Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler son compte rendu d'entretien professionnel établi au titre de l'année 2015.
Par un jugement n° 1600408 du 10 novembre 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 9 janvier 2017, M.B..., représenté par la SELAFA Cabinet Cassel, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 10 novembre 2016 ;
2°) d'annuler le compte rendu de l'entretien professionnel établi au titre de l'année 2015 ;
3°) d'enjoindre au maire de la commune de Joinville d'organiser un nouvel entretien professionnel à compter de la lecture de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Joinville une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est entaché de contradiction interne ;
- le compte rendu de son entretien professionnel méconnaît les dispositions de l'article 3 du décret du 16 décembre 2014 ;
- les griefs qui lui sont reprochés ne sont pas matériellement établis ;
- la décision contestée est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- le compte-rendu viole les dispositions de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983.
Par un mémoire en défense enregistré le 5 avril 2017, la commune de Joinville, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce que la cour mette à la charge de M. B...une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par M. B...ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée ;
- le décret n° 2014-1526 du 16 décembre 2014 modifié ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Tréand,
- et les conclusions de M. Collier, rapporteur public.
1. Considérant que M. B...a été recruté par la commune de Joinville à compter du 1er novembre 1991 en qualité de technicien territorial contractuel affecté aux services techniques ; qu'il a intégré le cadre d'emploi des ingénieurs territoriaux le 1er novembre 2003 et a été nommé directeur des services techniques ; que, par un jugement du 10 novembre 2016, dont M. B...relève appel, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation du compte rendu d'entretien professionnel établi au titre de l'année 2015 ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 17 de la loi du 13 juillet 1983 : " Les notes et appréciations générales attribuées aux fonctionnaires et exprimant leur valeur professionnelle leur sont communiquées (...) " ; qu'aux termes de l'article 76 de la loi du 26 janvier 1986 dans sa version applicable à l'espèce : " L'appréciation, par l'autorité territoriale, de la valeur professionnelle des fonctionnaires se fonde sur un entretien professionnel annuel conduit par le supérieur hiérarchique direct qui donne lieu à l'établissement d'un compte rendu. (...) " ; que l'article 3 du décret du 16 décembre 2014, dans sa rédaction alors en vigueur, dispose : " L'entretien professionnel porte principalement sur : / 1° Les résultats professionnels obtenus par le fonctionnaire eu égard aux objectifs qui lui ont été assignés et aux conditions d'organisation et de fonctionnement du service dont il relève / 2° Les objectifs assignés au fonctionnaire pour l'année à venir et les perspectives d'amélioration de ses résultats professionnels, compte tenu, le cas échéant, des évolutions prévisibles en matière d'organisation et de fonctionnement du service / 3° La manière de servir du fonctionnaire / 4° Les acquis de son expérience professionnelle / 5° Le cas échéant, ses capacités d'encadrement / 6° Les besoins de formation du fonctionnaire eu égard, notamment, aux missions qui lui sont imparties, aux compétences qu'il doit acquérir et à son projet professionnel ainsi que l'accomplissement de ses formations obligatoires / 7° Les perspectives d'évolution professionnelle du fonctionnaire en termes de carrière et de mobilité / L'agent est invité à formuler, au cours de cet entretien, ses observations et propositions sur l'évolution du poste et le fonctionnement du service " ; que l'article 4 prévoit que : " Les critères à partir desquels la valeur professionnelle du fonctionnaire est appréciée, au terme de cet entretien, sont fonction de la nature des tâches qui lui sont confiées et du niveau de responsabilité assumé. Ces critères, fixés après avis du comité technique, portent notamment sur : / 1° Les résultats professionnels obtenus par l'agent et la réalisation des objectifs / 2° Les compétences professionnelles et techniques / 3° Les qualités relationnelles / 4° La capacité d'encadrement ou d'expertise ou, le cas échéant, à exercer des fonctions d'un niveau supérieur " et, qu'enfin, l'article 5 dispose : " Le compte rendu de l'entretien, établi et signé par le supérieur hiérarchique direct, comporte une appréciation générale littérale exprimant la valeur professionnelle du fonctionnaire au regard des critères fixés à l'article 4 " ;
3. Considérant que, contrairement à ce que soutient M.B..., l'ensemble des critères à prendre en compte par l'évaluateur, prévus par les dispositions des articles 3 et 4 du décret du 16 décembre 2014, ont été renseignés dans le compte rendu de son entretien professionnel ; que l'évaluation de ses compétences professionnelles s'est faite au moyen de grilles offrant cinq possibilités de choix pour chaque critère, qui ont été systématiquement complétées et le plus souvent assorties de commentaires explicatifs ; que le compte rendu contesté comporte également une appréciation générale relative à la valeur professionnelle de l'intéressé, qui a pu présenter ses observations à différentes étapes de l'entretien professionnel ; que si M. B...soutient que certaines cases ont été raturées, cette circonstance n'est pas de nature à entraîner l'illégalité du compte rendu d'entretien professionnel, les modifications apportées ayant conduit à tenir compte du dialogue instauré au cours de l'entretien professionnel ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 3 du décret du 16 décembre 2014 doit être écarté ;
4. Considérant, en deuxième lieu, que si M. B...soutient que les griefs qui lui ont été faits par son supérieur hiérarchique direct durant son entretien professionnel ne sont pas matériellement établis, il ressort de ses fiches de notation passées, en particulier celles relatives à 2008, 2010 et 2011, ainsi que des courriers qui lui ont été adressés en cours d'année par le maire et la directrice générale des services les 22 avril 2011, 28 octobre 2011 et 7 mai 2013 que l'intéressé connait des difficultés à communiquer et à déléguer ;
5. Considérant, en troisième lieu, que si M. B...se prévaut de notations antérieures, qui avaient toutefois chacune un caractère annuel, et d'échanges de mail avec des partenaires extérieurs censés attester de ses qualités professionnelles, et met en avant la mauvaise organisation de la collectivité, il ne conteste pas sérieusement la réalité des difficultés mentionnées dans le compte rendu d'entretien professionnel qui sont récurrentes et établies par les pièces au dossier comme il a été dit au point 3 ; qu'en outre, le compte rendu d'entretien professionnel de M. B...au titre de l'année 2015 souligne également les qualités professionnelles du requérant ; qu'il s'ensuit qu'il n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation de sa valeur professionnelle ;
6. Considérant, en dernier lieu, que M. B...soutient qu'il serait victime de harcèlement moral de la part de la collectivité qui l'emploie, caractérisé par des actes vexatoires, des remarques dégradantes, un isolement professionnel, une réduction de ses attributions et une dégradation de sa situation statutaire ; qu'il résulte des dispositions de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires que peuvent être qualifiés de harcèlement moral les agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail de l'agent susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que, pour être qualifiés de harcèlement moral, de tels faits répétés doivent excéder les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique ; qu'en l'espèce, le compte rendu d'entretien professionnel en litige fait apparaître que l'objectif assigné à M. B... pour l'année évaluée a été atteint ; que si l'évaluation de ses compétences professionnelles révèle que l'intéressé a des insuffisances professionnelles, elle comporte également des appréciations soulignant qu'il a acquis et maîtrise de nombreuses autres compétences ; que l'appréciation générale de son supérieur hiérarchique met en avant son investissement dans les nouvelles compétences qui lui ont été confiées en matière d'urbanisme et mentionne que ses difficultés récurrentes à communiquer avec les élus et sa hiérarchie devraient diminuer avec, à l'avenir, la tenue régulière d'un comité de direction de la collectivité auquel il participera ; que, par suite, quels que soient les griefs que l'intéressé fasse, par ailleurs, à sa hiérarchie, M. B...ne peut, en tout état de cause, soutenir que son compte rendu d'entretien professionnel, qui est fondé sur des griefs établis et n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation ainsi qu'il a été dit aux points 4 et 5, serait un acte constitutif d'un harcèlement moral et encourrait, pour ce motif, l'annulation ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui n'est entaché d'aucune contradiction de motifs, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande d'annulation du compte rendu de son entretien professionnel au titre de l'année 2015 ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Joinville, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que demande M. B...au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de ce dernier une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la commune de Joinville et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête présentée par M. B...est rejetée.
Article 2 : M. B...versera à la commune de Joinville une somme de 1 000 (mille) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et à la commune de Joinville.
2
N° 17NC00033