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12/04/2018 | FRANCE | N°17NC01809-17NC01825

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 12 avril 2018, 17NC01809-17NC01825


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 25 octobre 2016 par lequel le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1602115 du 16 mai 2017, le tribunal administratif de Besançon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

I.) Par une requête, enregistrée le 21 juillet 2017 sous le n° 17NC018

09, et un mémoire, enregistré le 15 septembre 2017, MmeA..., représentée par Me Dravigny, demande à ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 25 octobre 2016 par lequel le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1602115 du 16 mai 2017, le tribunal administratif de Besançon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

I.) Par une requête, enregistrée le 21 juillet 2017 sous le n° 17NC01809, et un mémoire, enregistré le 15 septembre 2017, MmeA..., représentée par Me Dravigny, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre, à titre principal, au préfet du Doubs de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) d'enjoindre, à titre subsidiaire, au préfet du Doubs de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au bénéfice de son conseil en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

S'agissant de la régularité du jugement :

- le tribunal administratif a procédé à une substitution de motif qui n'était pas demandée par le préfet du Doubs et qui n'a pas été soumise à un débat ;

- le tribunal n'a pas statué sur le moyen tiré de ce que le préfet du Doubs s'est cru à tort en situation de compétence liée pour refuser de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qu'il avait la possibilité de régulariser sa situation dans le cadre de son pouvoir discrétionnaire ;

S'agissant de la décision de refus de séjour :

- le préfet du Doubs a méconnu les dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet du Doubs s'est estimé être en situation de compétence liée ;

- la décision contestée est contraire aux dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est contraire aux dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- elle est contraire aux stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 24 novembre1990 ;

S'agissant de la décision l'obligeant à quitter le territoire français :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'illégalité en raison de l'illégalité dont la décision de refus de séjour est elle-même entachée, et elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

S'agissant de la décision fixant le pays de destination :

- la décision contestée est contraire aux dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 août 2007, le préfet du Doubs conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

II.) Par une requête, enregistrée le 24 juillet 2017 sous le n° 17NC01825, Mme A..., représentée par Me Dravigny, demande à la cour :

1°) de prononcer le sursis à exécution du jugement précité ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au bénéfice de son conseil en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- l'exécution du jugement risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables ;

- les moyens exposés dans le cadre de l'instance n° 17NC01809 sont sérieux.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 août 2007, le préfet du Doubs conclut au rejet de la requête.

Il soutient que la requête n'est pas recevable et que les conditions du sursis à exécution d'un jugement ne sont pas remplies.

Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par deux décisions du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal de grande instance de Nancy du 28 août 2017.

Vu :

- les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 24 novembre1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Dhers a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que les requêtes n°s 17NC01809 et 17NC01825 concernent la situation de Mme A...au regard de son droit au séjour en France et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul jugement ;

2. Considérant que MmeA..., ressortissante congolaise (République démocratique du Congo) née le 25 mai 1996, a déclaré être entrée en France le 24 janvier 2013 ; qu'elle a été confiée au service de l'aide sociale à l'enfance du département du Doubs ; qu'elle a demandé le 17 octobre 2014 au préfet du Doubs de lui délivrer un titre de séjour ; que, par un arrêté du 25 octobre 2016, le préfet du Doubs a refusé de faire droit à sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé son pays de destination ; que la requérante relève appel du jugement du 16 mai 2017 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté et demande à la cour de prononcer le sursis à exécution de ce jugement ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sur la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue au 1° de l'article L. 313-10 portant la mention " salarié " ou la mention " travailleur temporaire " peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le respect de la condition prévue à l'article L. 311-7 n'est pas exigé " ;

4. Considérant que Mme A...a été confiée à l'aide sociale à l'enfance à l'âge de dix-sept ans ; qu'elle était inscrite en première année de baccalauréat professionnel " accompagnement soins et services " au cours de l'année 2014-2015 et en baccalauréat l'année suivante ; que si ses bulletins des premier et deuxième trimestres 2015-2016 font état d'absences, il ressort des pièces du dossier, et en particulier des attestations de ses professeurs principaux et d'une note d'information établie par le pôle " solidarité et cohésion sociale " du département du Doubs du 2 novembre 2016, que ces absences sont liées à l'état de santé de la fille de la requérante, qui est née le 12 juin 2014, à sa situation de mère isolée et aux problèmes psychologiques qu'elle a rencontrés consécutivement aux violences subies de la part du père de son enfant dont elle est séparée ; que, malgré ces difficultés, Mme A...avait une moyenne générale de 11 sur 20 au premier trimestre, de 9,5 sur 20 au deuxième trimestre et a obtenu le diplôme du baccalauréat en juin 2016 ; que, dans ces conditions, la requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que le préfet du Doubs a considéré que ses études n'avaient pas présenté un caractère réel et sérieux ; que, dès lors, la décision de refus de séjour contestée, ainsi que, par voie de conséquence, l'obligation de quitter le territoire français, la décision relative au délai de départ volontaire et la décision fixant le pays de destination qui l'assortissent, sont entachées d'illégalité ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme A...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande ; que, par conséquent, elle est fondée à demander l'annulation tant du jugement que de l'arrêté préfectoral attaqués.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Considérant qu'eu égard au motif d'annulation retenu, l'exécution du présent jugement implique que la demande de MmeA... soit réexaminée ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet du Doubs de procéder à ce réexamen dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions à fin de sursis à exécution du jugement :

7. Considérant que la cour se prononçant par le présent arrêt sur le bien-fondé du jugement du 16 mai 2017, les conclusions de Mme A...tendant à ce qu'il soit sursis à son exécution sont devenues sans objet ; qu'il n'y a donc plus lieu d'y statuer ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

8. Considérant que Mme A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Dravigny, avocate de MmeA..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Dravigny de la somme de 1 500 euros ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1602115 du tribunal administratif de Besançon du 16 mai 2017 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du préfet du Doubs du 25 octobre 2016 est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet du Doubs de procéder à un réexamen de la situation de Mme A...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de Mme A...tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du jugement n° 1602115 du 16 mai 2017 du tribunal administratif de Besançon.

Article 5 : L'Etat versera à Me Dravigny, avocate de MmeA..., une somme de 1 500 euros au titre des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 6 : Le surplus des conclusions des requêtes est rejeté.

Article 7 : Le présent jugement sera notifié à Mme A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Doubs.

2

N°17NC01809,17NC01825


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17NC01809-17NC01825
Date de la décision : 12/04/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. DHERS
Rapporteur ?: M. Stéphane DHERS
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : DRAVIGNY AMANDINE

Origine de la décision
Date de l'import : 24/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2018-04-12;17nc01809.17nc01825 ?
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