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22/03/2018 | FRANCE | N°16NC01774

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 22 mars 2018, 16NC01774


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Soho Informatique, devenue SARL Soho Media Solutions, a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle et des intérêts de retard mis à sa charge au titre des années 2007, 2008 et 2009.

Par un jugement n° 1300300 du 16 juin 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a constaté un non-lieu à statuer partiel et rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant l

a cour :

Par une requête, enregistrée le 10 août 2016, et des mémoires, enregistrés les

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Soho Informatique, devenue SARL Soho Media Solutions, a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle et des intérêts de retard mis à sa charge au titre des années 2007, 2008 et 2009.

Par un jugement n° 1300300 du 16 juin 2016, le tribunal administratif de Strasbourg a constaté un non-lieu à statuer partiel et rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 10 août 2016, et des mémoires, enregistrés les

3 juillet 2017 et 10 janvier 2018, la SARL Soho Media Solutions, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300300 du tribunal administratif de Strasbourg du

16 juin 2016 en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande de décharge ;

2°) de prononcer la décharge complémentaire des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2007, 2008 et 2009 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal administratif ne s'est pas prononcé sur les critiques qu'elle a formulées sur l'incohérence des méthodes et omissions des analyses de l'expert ;

- le rapport de l'expert concernant l'année 2009 ne lui a pas été notifié par voie postale ;

- elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité pour l'année 2009 ; la procédure est irrégulière, puisqu'aucun avis de vérification de comptabilité ne lui a été notifié ;

- le directeur de la délégation régionale à la recherche et à la technologie de Lorraine et l'expert nommé par ce dernier n'étaient pas impartiaux ;

- l'administration s'est contentée de reprendre les conclusions de l'expert, ce qui l'a privée de la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur ;

- l'administration a méconnu les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ;

- l'évaluation forfaitaire des dépenses de personnel ne correspond pas à la réalité.

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 octobre 2016, le ministre de l'économie et des finances conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

Vu

- les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Dhers,

- et les conclusions de Mme Peton, rapporteur public.

1. Considérant que la SARL Soho Informatique, devenue SARL Soho Media Solutions, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité du 19 mai 2010 au 16 septembre 2011 à l'issue de laquelle l'administration a partiellement remis en cause le crédit d'impôt recherche dont elle avait bénéficié au titre des années 2007 et 2008 ; que la société requérante a fait l'objet d'un contrôle sur pièces en 2011 à l'issue duquel l'administration a partiellement remis en cause le crédit d'impôt recherche dont elle avait bénéficié au titre de l'année 2009 ; que la SARL Soho Media Solutions a sollicité auprès du tribunal administratif de Strasbourg la décharge des rappel d'impôt sur les sociétés découlant de ces contrôles ; que, par un jugement du 16 juin 2016, le tribunal a constaté un non-lieu à statuer partiel, en raison de deux dégrèvements prononcés le 10 juin 2015, et rejeté le surplus de sa demande de

décharge ; que la société requérante relève appel du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 16 juin 2016 en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions tendant à la décharge des rappels ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que si la SARL Soho Media Solutions a entendu soutenir que le tribunal administratif de Strasbourg a omis de répondre au moyen tiré de l'existence d'incohérences qui, selon elle, entacheraient le calcul fait par l'administration du montant des amortissements éligibles au crédit d'impôt recherche des années 2008 et 2009, ce moyen ne concernait pas les impositions restant en litige consécutivement aux dégrèvements prononcés ; que dès lors, il n'y avait pas lieu pour le tribunal d'y répondre ;

Sur les conclusions à fin de décharge :

En ce qui concerne la procédure d'imposition :

3. Considérant, en premier lieu, que la SARL Soho Media Solutions reprend les moyens qu'elle avait invoqués en première instance et tirés de ce qu'elle n'a pas eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur et de ce que le rapport d'expertise concernant l'année 2009 a été remis en main propre à son représentant légal ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable aux rappels litigieux : " L'administration des impôts contrôle les déclarations ainsi que les actes utilisés pour l'établissement des impôts, droits, taxes et redevances. Elle contrôle, également les documents déposés en vue d'obtenir des déductions, restitutions ou remboursements, ou d'acquitter tout ou partie d'une imposition au moyen d'une créance sur l'Etat. A cette fin, elle peut demander aux contribuables tous renseignements, justifications ou éclaircissements relatifs aux déclarations souscrites ou aux actes déposés (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 47 du même livre, dans sa version applicable au litige : " (...) une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification (...) " ; que lorsque l'administration fait usage du droit que lui confèrent les dispositions précitées de contrôler sur pièces les déclarations du contribuable en lui demandant, le cas échéant, des justifications complémentaires, sans toutefois procéder à un examen critique des documents comptables, cette procédure ne peut être assimilée à une vérification de comptabilité ; qu'en revanche, la vérification de comptabilité consiste à contrôler sur place la sincérité des déclarations fiscales souscrites par un contribuable en les comparant avec les écritures comptables ou les pièces justificatives dont le service prend alors connaissance et dont il peut remettre en cause l'exactitude ;

5. Considérant que si l'administration a demandé à la SARL Soho Media Solutions de lui communiquer la liste de ses immobilisations, les factures d'achat de celles-ci et le suivi d'activité de son personnel affecté à la recherche et au développement et les a examinés sur place, il ne résulte pas de l'instruction, et en particulier des motifs de la proposition de rectification du 28 septembre 2011 ou de la chronologie des opérations de contrôle, qu'elle aurait procédé, par l'exploitation de ces documents, à un examen critique des documents comptables de la société requérante ; que par suite, la SARL Soho Media Solutions n'est pas fondée à soutenir que la procédure a été irrégulière au regard des dispositions de l'article

L. 47 du livre des procédures fiscales ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 244 quater B du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " I. Les entreprises industrielles et commerciales (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 45 B du livre des procédures fiscales : " La réalité de l'affectation à la recherche des dépenses prises en compte pour la détermination du crédit d'impôt défini à l'article 244 quater B du code général des impôts peut, sans préjudice des pouvoirs de contrôle de l'administration des impôts qui demeure seule compétente pour l'application des procédures de rectification, être vérifiée par les agents du ministère chargé de la recherche et de la technologie. Un décret fixe les conditions d'application du présent article " ; qu'aux termes de l'article R. 45 B-1 du même livre, dans sa rédaction applicable aux années en litige : " La réalité de l'affectation à la recherche des dépenses prises en compte pour la détermination du crédit d'impôt mentionné à l'article L. 45 B peut être vérifiée soit par des agents dûment mandatés par le directeur de la technologie, soit par les délégués régionaux à la recherche et à la technologie ou par des agents dûment mandatés par ces derniers (...) Les résultats de ce contrôle sont notifiés à l'entreprise et sont communiqués à l'administration des impôts. " ;

7. Considérant que la SARL Soho Media Solutions soutient que l'expert désigné par le directeur de la délégation régionale à la recherche et à la technologie de Lorraine n'était pas impartial ; qu'à l'appui de ce moyen, elle fait valoir que l'expert a dirigé une société concurrente, la société Lorasi, qu'il a travaillé avec le directeur de la délégation régionale à la recherche et à la technologie de Lorraine, notamment au sein du laboratoire lorrain de recherche en informatique et ses applications, et qu'ils ont tous deux participé à la rédaction d'un ouvrage portant sur les réseaux téléinformatiques ; que la circonstance que l'expert a des rapports professionnels avec l'autorité qui l'a désigné ne saurait faire naître un doute sur son impartialité ; qu'il ne résulte pas de l'instruction, et en particulier des écrits de la société requérante qui ne fait état d'aucun événement précis susceptible de mettre en cause l'impartialité de l'expert et qui n'a fait part pour la première fois de ses doutes sur ce point que lors de l'entretien de clôture des opérations de contrôle, que les fonctions exercées par l'expert au sein de la société Lorasi, qui a été placée en procédure collective en 2003, ont pu générer des relations conflictuelles avec la SARL Soho Media Solutions ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'expert ne présentait pas toutes les garanties d'impartialité requises doit être écarté ;

8. Considérant, en quatrième lieu, qu'aucune disposition ni aucun principe ne fait obstacle à ce que l'administration reprenne à son compte l'analyse de l'expert, dès lors qu'elle ne s'est pas estimée liée par son avis, ce qui est le cas en l'espèce ;

9. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. " ; qu'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en oeuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent ; que cette obligation ne s'impose à l'administration que pour les seuls renseignements effectivement utilisés pour fonder les rectifications ;

10. Considérant qu'en se bornant à soutenir, sans autre précision, que " le vérificateur était en possession en novembre 2010 d'un rapport de M. B...qui a été occulté dans le 3924 de décembre 2010, alors même que ce rapport a manifestement influencé ses redressements ", la SARL Soho Media Solutions n'établit pas que le vérificateur aurait omis de l'informer de l'origine et de la teneur de renseignements obtenus auprès de tiers et qui fonderaient les rappels litigieux ;

En ce qui concerne le bien-fondé des rappels :

11. Considérant que l'administration a estimé que le personnel de la SARL Soho Media Solutions avait consacré 90 % de son temps de travail à des activités de recherche et de développement en 2008 et 2009 ; que, contrairement à ce que soutient la société requérante, aucune disposition ou principe ne s'oppose à une évaluation forfaitaire du temps consacré aux activités éligibles au crédit d'impôt recherche ; que rien ne permet de remettre en cause le taux de 90 % retenu ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le prorata admis par l'administration serait sous-évalué doit être écarté ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL Soho Media Solutions n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté le surplus de ses demandes ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de SARL Soho Media Solutions est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à SARL Soho Media Solutions et au ministre de l'action et des comptes publics.

2

16NC01774


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC01774
Date de la décision : 22/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-03-04-05 Contributions et taxes. Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances. Taxe professionnelle. Questions relatives au plafonnement.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: M. Stéphane DHERS
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : SCP RICHARD et MERTZ

Origine de la décision
Date de l'import : 03/04/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2018-03-22;16nc01774 ?
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