La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/10/2017 | FRANCE | N°16NC01915-16NC01916

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 03 octobre 2017, 16NC01915-16NC01916


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C...et M. E...B...ont demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler les arrêtés du 30 juillet 2015 par lesquels le préfet du Doubs a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourront être éloignés à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1502010 et 1502011 du 22 mars 2016, le tribunal administratif de Besançon a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 26 août 2016 sous le n° 16NC01915,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C...et M. E...B...ont demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler les arrêtés du 30 juillet 2015 par lesquels le préfet du Doubs a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourront être éloignés à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1502010 et 1502011 du 22 mars 2016, le tribunal administratif de Besançon a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 26 août 2016 sous le n° 16NC01915, M. E...B...représenté par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Besançon du 22 mars 2016 en tant qu'il rejette sa demande ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Doubs du 30 juillet 2015 pris à son encontre ;

3°) d'enjoindre au préfet du Doubs de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai et sous la même astreinte et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour pendant la durée de ce réexamen ;

4°) de mettre les dépens à la charge de l'Etat.

Il soutient que :

- la décision méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et contrevient au respect du secret médical ; le préfet ne pouvait pas refuser de lui délivrer un titre de séjour, compte tenu des termes de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ;

- la décision de refus de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense enregistré le 22 novembre 2016, le préfet du Doubs conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens invoqués par le requérant n'est fondé.

II. Par une requête enregistrée le 26 août 2016 sous le n° 16NC01916, Mme A...C...représentée par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Besançon du 22 mars 2016 en tant qu'il rejette sa demande ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Doubs du 30 juillet 2015 pris à son encontre ;

3°) d'enjoindre au préfet du Doubs de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai et sous la même astreinte et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour pendant la durée de ce réexamen ;

4°) de mettre les dépens à la charge de l'Etat.

Elle soutient que :

- la décision méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et contrevient au respect du secret médical ; le préfet ne pouvait pas refuser de délivrer un titre de séjour à son compagnon, compte tenu des termes de l'avis le médecin de l'agence régionale de santé ;

- la décision de refus de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense enregistré le 22 novembre 2016, le préfet du Doubs conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens invoqués par la requérante n'est fondé.

Mme C...et M. B...ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par deux décisions du 22 juillet 2016.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Haudier,

- et les conclusions de M. Collier, rapporteur public,

1. Considérant que Mme A...C...et M. E...B..., tous deux de nationalité angolaise, sont entrés irrégulièrement en France le 26 mai 2013 ; que leurs demandes d'asile ont été rejetées par des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 17 décembre 2013 et du 20 mars 2014, confirmées par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 26 mai 2015 ; que, par un courrier du 25 avril 2015, les intéressés ont présenté une demande de titre de séjour en se prévalant de l'état de santé de M.B... ; que, par deux arrêtés du 30 juillet 2015, le préfet du Doubs a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourront être éloignés à l'expiration de ce délai ; que Mme C...et M. B...relèvent appel du jugement du 22 mars 2016, par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces deux arrêtés ;

2. Considérant que les requêtes n° 16NC01915 et 16NC01916 de Mme C...et M. B... sont dirigées contre un même jugement, présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt ;

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ;

4. Considérant que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle ;

5. Considérant que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ; qu'en cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;

6. Considérant, en l'espèce, que, par un avis du 25 juillet 2015, le médecin de l'agence régionale de santé a indiqué que l'état de santé de M. B...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il n'existe pas de traitement approprié dans son pays d'origine ; que le préfet du Doubs, qui n'était pas lié par cet avis, a refusé de délivrer à l'intéressé la carte de séjour temporaire sollicitée sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, le préfet, se fondant sur des éléments communiqués le 10 juin 2015 par le médecin référent auprès du directeur général des étrangers en France, a considéré que le requérant pouvait bénéficier d'un traitement approprié en Angola ;

7. Considérant, d'une part, que, contrairement à ce que semblent soutenir les requérants, la circonstance que M. B...n'ait pas levé le secret médical ne faisait pas, à elle-seule, obstacle à ce que le préfet puisse légalement décider de ne pas se conformer à l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ; que, d'autre part, il ressort des éléments communiqués le 10 juin 2015 par le médecin référent auprès du directeur général des étrangers en France et dont se prévaut le préfet que la majorité des pathologies peuvent être traitées en Angola et en particulier à Luanda ; que M. B..., seul en mesure d'apporter des éléments couverts par le secret médical susceptibles de montrer que le traitement qui lui est nécessaire n'est pas au nombre de ceux disponibles en Angola, n'a pas souhaité lever ledit secret et n'a pas davantage communiqué d'éléments de nature à permettre d'apprécier, même sans que soit levé le secret médical, sa situation au regard de la pathologie dont il souffre ; que, compte tenu de cette abstention de l'intéressé et des éléments produits sur les soins disponibles en Angola, le préfet doit être regardé comme apportant la preuve qu'un traitement approprié à l'état de santé de M. B...existe dans le pays d'origine de ce dernier ; que le moyen tiré de ce que le préfet a méconnu les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313 11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit ainsi être écarté ;

8. Considérant, en second lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version alors applicable : " " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 (...) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à

l'article L. 311-7 " ;

9. Considérant que pour justifier de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels au sens de ces dispositions, les requérants font état de leur bonne intégration au sein de la société française, de la scolarisation de leur fils et des menaces dont ils ont fait l'objet en Angola ; que, toutefois et en tout état de cause, ils n'apportent aucun élément probant permettant d'établir de telles menaces ; que, par ailleurs, eu égard notamment au caractère récent de leur date d'arrivée en France et à la possibilité pour les intéressés de reconstituer la cellule familiale en Angola, ils ne peuvent pas être regardés comme justifiant de l'existence de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance desdites dispositions doit être écarté ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C...et M. B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté leurs demandes ; que leurs conclusions à fin d'annulation ainsi que, par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction et d'astreinte doivent être rejetées ;

11. Considérant, enfin, que la présente instance n'ayant donné lieu à aucun dépens, les conclusions présentées à ce titre par Mme C...et M. B...ne peuvent également qu'être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes de Mme C...et M. B...sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C..., à M. E...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Doubs.

2

N° 16NC01915 et 16NC01916


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC01915-16NC01916
Date de la décision : 03/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: Mme Guénaëlle HAUDIER
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : ABDELLI - ALVES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-10-03;16nc01915.16nc01916 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award