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26/09/2017 | FRANCE | N°15NC02491

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 26 septembre 2017, 15NC02491


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C...a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 19 février 2015 par lequel la préfète de l'Aube lui a ordonné de se dessaisir de l'ensemble de ses armes et lui a fait interdiction d'acquérir ou de détenir des armes et munitions de catégories B, C et D, ainsi que la décision du 22 avril 2015 par laquelle la préfète de l'Aube a rejeté son recours gracieux formé contre l'arrêté du 19 février 2015.

Par un jugement n° 1501226 du 20 octobre 2015, le

tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé l'arrêté du 19 février 2015 en ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C...a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 19 février 2015 par lequel la préfète de l'Aube lui a ordonné de se dessaisir de l'ensemble de ses armes et lui a fait interdiction d'acquérir ou de détenir des armes et munitions de catégories B, C et D, ainsi que la décision du 22 avril 2015 par laquelle la préfète de l'Aube a rejeté son recours gracieux formé contre l'arrêté du 19 février 2015.

Par un jugement n° 1501226 du 20 octobre 2015, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé l'arrêté du 19 février 2015 en tant qu'il a interdit l'acquisition et la détention des armes et munitions de catégorie D et rejeté le surplus des conclusions de la demande de M. C....

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 décembre 2015 et un mémoire complémentaire, enregistré le 1er août 2016, M.C..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 20 octobre 2015 en tant qu'il rejette le surplus de sa demande ;

2°) d'enjoindre à la préfète de l'Aube de lui restituer les armes et munitions dont il s'est dessaisi ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- en prenant les décisions contestées, la préfète de l'Aube a commis une erreur dans l'appréciation de la dangerosité de son comportement ;

- la préfète de l'Aube méconnaît à son égard le principe de l'égalité de traitement des administrés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 février 2016, la préfète de l'Aube conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la sécurité intérieure ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique du 5 septembre 2017 :

- le rapport de M. Di Candia, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Kohler, rapporteur public.

1. Considérant que M. C...l'ayant saisie, le 1er août 2014, d'une demande d'autorisation d'acquérir une arme dans le but de pratiquer le tir sportif, la préfète de l'Aube a, par un arrêté du 19 février 2015, d'une part fait obligation à l'intéressé de se dessaisir, dans un délai de trois mois, de l'ensemble de ses armes et d'autre part, lui a interdit d'acquérir ou de détenir des armes et des munitions de catégories B, C et D ; que par décision du 22 avril 2015, elle a rejeté le recours gracieux formé par M. C...contre l'arrêté du 19 février 2015 ; que par un jugement du 20 octobre 2015, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé l'arrêté du 19 février 2015 en tant seulement qu'il portait interdiction d'acquisition et de détention d'armes et de munitions de catégorie D ; que M. C...relève appel de ce jugement en tant que le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté le surplus de ses demandes ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 312-11 du code de la sécurité intérieure : " Sans préjudice des dispositions de la sous-section 1, le représentant de l'Etat dans le département peut, pour des raisons d'ordre public ou de sécurité des personnes, ordonner à tout détenteur d'une arme des catégories B, C et D de s'en dessaisir (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 312-3 du code de la sécurité intérieure dans sa version applicable aux décisions en litige : " Nul ne peut acquérir et détenir légalement des matériels ou des armes des catégories B et C s'il ne remplit pas les conditions suivantes : (...) Ne pas se signaler par un comportement laissant objectivement craindre une utilisation de l'arme ou du matériel dangereuse pour soi-même ou pour autrui. " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des comptes-rendus d'enquêtes et des procès-verbaux qu'elle produit, que pour prendre les décisions en litige, la préfète de l'Aube s'est fondée sur des faits de violences volontaires, de dégradations volontaires de véhicule, de détention illégale d'une arme de sixième catégorie et d'outrage envers un huissier de justice qui auraient été commis par M. C...entre octobre 2004 et octobre 2008 ; que toutefois, il résulte des mentions portées dans les comptes rendus des 8 octobre 2004 et 19 octobre 2008 que les violences dont M. C... avait reconnu être l'auteur ont été commises sans faire usage d'arme, au cours de rixes durant lesquelles des coups lui avaient également été portés ; que de même, M. C... a, au cours de son audition du 6 janvier 2005, contesté avoir commis, le 24 avril 2004, les dégradations volontaires de véhicule et violences volontaires qui lui étaient reprochées et que ces faits, qui n'ont donné lieu à aucune condamnation pénale, ne peuvent être regardés comme établis ; qu'enfin, la découverte lors d'une palpation effectuée sur l'intéressé au cours d'une interpellation du 6 janvier 2005, d'un couteau à cran d'arrêt n'est pas suffisamment révélatrice d'un comportement dangereux de M.C..., au sens des dispositions précitées, dès lors qu'il n'est pas contesté qu'il ne s'en servait que pour manger sur son lieu de travail ; que si M. C...reconnaît avoir été condamné en 2004 pour avoir menacé un huissier de justice, ces faits, qui sont les seuls à avoir donné lieu à une condamnation pénale, ne sauraient, en raison de leur ancienneté et en l'absence de suite judiciaire donnée aux autres faits survenus durant la même période, suffire à établir que son comportement laisserait objectivement craindre une utilisation de l'arme ou du matériel dangereuse pour lui-même ou pour autrui ; que dans ces conditions, la préfète de l'Aube a, en fondant son arrêté du 19 février 2015 et sa décision du 22 avril 2015 sur l'existence d'un tel comportement, fait une inexacte application des dispositions précitées du code de la sécurité intérieure ;

4. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête, que M. C...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation totale de l'arrêté du 19 février 2015 et de la décision du 22 avril 2015 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Considérant que l'exécution du présent arrêt n'implique pas nécessairement la restitution des armes dont M. C...se serait dessaisi mais seulement un réexamen de sa demande en fonction de sa situation de droit et de fait actuelle ; qu'il en résulte que les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à la préfète de procéder à cette restitution doivent être rejetées ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. C...et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : L'arrêté de la préfète de l'Aube du 19 février 2015 obligeant M. C...à se dessaisir de l'ensemble de ses armes et lui interdisant d'acquérir ou de détenir des armes et des munitions de catégories B et C est annulé, ainsi que la décision du 22 avril 2015 rejetant le recours gracieux dirigé contre cet arrêté.

Article 2 : Le jugement n° 1501226 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 20 octobre 2015 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. C...une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C...est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète de l'Aube.

2

N° 15NC02491


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC02491
Date de la décision : 26/09/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-05-05 Police. Polices spéciales. Police du port et de la détention d'armes.


Composition du Tribunal
Président : M. KOLBERT
Rapporteur ?: M. Olivier DI CANDIA
Rapporteur public ?: Mme KOHLER
Avocat(s) : HONNET - FLOTTES DE POUZOLS

Origine de la décision
Date de l'import : 10/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-09-26;15nc02491 ?
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