La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/05/2017 | FRANCE | N°16NC00893

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 04 mai 2017, 16NC00893


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler la décision du 28 octobre 2014 par laquelle l'inspectrice du travail de l'unité territoriale de l'Aube a autorisé MeD..., liquidateur judiciaire de la société Elba Troyes, à le licencier pour motif économique.

Par un jugement n° 1402428 du 15 mars 2016, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 mai 2016, M. C

...B..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal adm...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler la décision du 28 octobre 2014 par laquelle l'inspectrice du travail de l'unité territoriale de l'Aube a autorisé MeD..., liquidateur judiciaire de la société Elba Troyes, à le licencier pour motif économique.

Par un jugement n° 1402428 du 15 mars 2016, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 mai 2016, M. C...B..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 15 mars 2016 ;

2°) d'annuler la décision de l'inspectrice du travail de l'unité territoriale de l'Aube du 28 octobre 2014 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il n'a pas été satisfait à l'obligation de reclassement personnalisé en méconnaissance des dispositions de l'article L. 1233-4 du code du travail ; l'employeur ne pouvait procéder par lettre circulaire ; il ne pouvait être procédé à un recrutement en lieu et place d'un reclassement ;

- l'obligation conventionnelle de reclassement a été méconnue.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 juin 2016, Me D..., liquidateur judiciaire de la société Elba Troyes, représentée par Me Ygouf, demande à la cour de constater l'interruption de l'instance en raison du décès du requérant.

La ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social n'a pas produit en la présente instance.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- la convention collective pour le personnel des industries de cartonnage du 9 janvier 1969 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Fuchs,

- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,

- et les observations de MeE..., substituant Me Ygouf, avocat de Me D....

1. Considérant que la société Elba Troyes, qui était spécialisée dans la fabrication d'intercalaires, faisait partie du groupe Hamelin qui intervient sur le marché de la papeterie et des fournitures de bureau ; qu'un plan de sauvegarde de l'emploi relatif à cette société a été conclu le 5 septembre 2013 et validé le 19 septembre suivant ; qu'à la suite du licenciement des salariés non protégés au cours des mois de novembre et décembre 2013, l'entreprise a totalement cessé son activité le 31 décembre 2013 ; que, par un jugement du 17 septembre 2014, le tribunal de commerce de Caen a prononcé la liquidation judiciaire de la société Elba Troyes et a nommé Me D...en qualité de liquidateur ; que, par la décision contestée du 28 octobre 2014, l'inspectrice du travail de l'unité territoriale de l'Aube a autorisé le licenciement de M.B..., qui exerçait les fonctions d'ouvrier qualifié opérateur et était en outre délégué syndical et membre de la délégation unique du personnel ;

Sur la demande de non-lieu :

2. Considérant qu'en application de l'article R. 634-1 du code de justice administrative, dans les affaires qui ne sont pas en état d'être jugées, la procédure est suspendue par la notification du décès de l'une des parties jusqu'à la mise en demeure pour reprendre l'instance ; que la présente affaire étant en état d'être jugée, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de non-lieu présentée par Me D...en raison du décès de M. B...;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis de fonctions représentatives, qui bénéficient d'une protection exceptionnelle dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions d'effectifs envisagées et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 1233-4 du code du travail : " Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie. / Le reclassement du salarié s'effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d'une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, le reclassement s'effectue sur un emploi d'une catégorie inférieure. / Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises " ;

5. Considérant que, pour apprécier si l'employeur a satisfait à son obligation en matière de reclassement, l'autorité administrative doit s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, qu'il a procédé à une recherche sérieuse des possibilités de reclassement du salarié, tant au sein de l'entreprise que dans les entreprises du groupe auquel elle appartient, ce dernier étant entendu, à ce titre, comme les entreprises dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation permettent, en raison des relations qui existent avec elles, d'y effectuer la permutation de tout ou partie de son personnel ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la liquidation judiciaire de la société Elba Troyes a eu pour conséquence la suppression de la totalité des effectifs présents sur son site unique de Troyes ; que M. B...a répondu, le 3 octobre 2014, à la demande du mandataire judiciaire, qu'il était prêt à accepter un reclassement à l'étranger ; que, par des courriers du 29 septembre 2014, le mandataire judiciaire a interrogé vingt-et-une entreprises du groupe Hamelin situées à l'étranger et huit entreprises de ce groupe situées en France ; qu'à cette correspondance était joint un tableau précisant, pour chaque salarié concerné, son nom et son adresse, la date de son entrée en fonction, la qualification précise de l'emploi occupé, la nature du contrat de travail dont il bénéficiait ainsi que son salaire de référence ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la société n'aurait pas procédé à une recherche de reclassement personnalisée du fait de l'envoi de lettres circulaires ; que les entreprises sollicitées ont toutes apportées une réponse négative ; qu'ainsi, les sociétés du groupe Hamelin ne disposaient pas d'un poste de travail comparable aux fonctions exercées par le requérant ; que, dans ces conditions, et alors que la société Elba Troyes ne peut être regardée comme ayant instauré un mécanisme de recrutement exclusif d'une procédure de reclassement contrairement à ce que soutient l'intéressé, l'inspectrice du travail a pu légalement considérer qu'une recherche réelle, sérieuse, loyale et personnalisée des possibilités de reclassement avait été effectuée et que la société avait ainsi satisfait à l'obligation de recherche de reclassement qui lui incombait au titre des dispositions précitées ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'en vertu des dispositions du code du travail, l'autorité administrative saisie d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé doit apprécier si les règles de procédure de licenciement économique d'origine conventionnelle préalables à sa saisine ont été observées ; qu'il résulte des stipulations de l'article 5 du titre premier de l'accord national interprofessionnel du 10 février 1969 relatif à la sécurité de l'emploi annexé à la convention collective pour le personnel des industries de cartonnage du 9 janvier 1969 que les commissions paritaires de l'emploi ont pour tâche " d'examiner en cas de licenciements collectifs les conditions de mise en oeuvre des moyens de reclassement et de réadaptation " ; qu'il ressort des pièces du dossier que la commission paritaire nationale de l'emploi a été informée, le 26 juillet 2013, de la mise en oeuvre d'une procédure de licenciement collectif ; que la commission paritaire nationale a de nouveau été saisie de la situation des six salariés protégés par un courrier reçu le 1er octobre 2014, dans lequel étaient détaillés les emplois concernés, le type de contrat, la date d'entrée dans les fonctions ainsi que le salaire de référence ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des obligations conventionnelles incombant à la société Elba Troyes doit en tout état de cause être écarté ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante en la présente instance, la somme demandée par M. B...au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête présentée par M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B..., à Me D... et à la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

2

N° 16NC00893


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC00893
Date de la décision : 04/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-03 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Licenciement pour motif économique.


Composition du Tribunal
Président : Mme DHIVER
Rapporteur ?: M. Olivier FUCHS
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : SCP CHAPRON YGOUF LANIECE

Origine de la décision
Date de l'import : 16/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2017-05-04;16nc00893 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award