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05/07/2016 | FRANCE | N°15NC01738

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 05 juillet 2016, 15NC01738


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 26 novembre 2014 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant deux ans.

Par un jugement n° 1407154 du 1er juillet 2015, le tribunal administratif de Strasbourg

a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 3 a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 26 novembre 2014 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant deux ans.

Par un jugement n° 1407154 du 1er juillet 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 3 août 2015, M. D..., représenté par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1407154 du 1er juillet 2015 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet du Haut-Rhin du 26 novembre 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer une carte de séjour temporaire sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

S'agissant de la décision de refus de séjour :

- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnait les dispositions de l'article L. 313-14 du code précité ;

- elle a été prise en violation des stipulations de l'article 3 de la convention précitée ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

S'agissant de la décision fixant le pays de destination :

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

S'agissant de l'interdiction de retour sur le territoire français pendant deux ans :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est disproportionnée ;

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 octobre 2015, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la requête est tardive ;

- les autres moyens soulevés par M. D...ne sont pas fondés.

M. D...a été refusé au bénéfice de l'aide juridictionnelle par une décision du 28 avril 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C...a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. D..., né le 15 avril 1983, de nationalité kosovienne, est entré irrégulièrement en France le 22 avril 2009 ; que le 6 octobre 2014 il a sollicité son admission exceptionnelle au séjour ; qu'il relève appel du jugement du 1er juillet 2015 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Haut-Rhin du 26 novembre 2014 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination d'une éventuelle mesure d'éloignement forcé et prononçant à son encontre une interdiction de retour en France pendant deux ans ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le préfet du Haut-Rhin tirée de la tardiveté de la requête :

Sur la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, que lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé ; qu'il en résulte que M. D... ne peut pas utilement invoquer le moyen tiré de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'encontre du refus opposé à sa demande de titre de séjour qui n'a pas été présentée sur le fondement de cet article ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ; qu'il appartient à l'autorité administrative, en application de ces dispositions, de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention "vie privée et familiale" répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié" ou "travailleur temporaire" ;

4. Considérant que si M.D..., qui est célibataire et sans enfant à charge, fait valoir qu'il est présent sur le territoire français depuis 2009, qu'il ne trouble pas l'ordre public, qu'il parle le français, qu'il manifeste une réelle volonté de s'intégrer et qu'il justifie d'une promesse d'emploi en contrat à durée indéterminée en qualité de technicien en isolation, emploi qui correspond à sa formation de technicien machinerie et de maçon ravaleur, ces éléments ne constituent pas des circonstances humanitaires ou un motif exceptionnel d'admission au séjour au sens des dispositions précitées de l'article L. 313-14 ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

6. Considérant que M. D... fait valoir, sans plus de précisions, qu'il est parfaitement intégré en France où il réside depuis plusieurs années, qu'il n'a plus de lien avec sa famille restée au Kosovo et qu'il maîtrise la langue française et dispose d'une promesse d'embauche ; que, toutefois, ainsi qu'il a été dit, M. D... est célibataire et sans charge de famille ; qu'il ne conteste pas que ses parents et sa fratrie résident au Kosovo, où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de 26 ans ;

7. Considérant, en dernier lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut utilement être invoqué pour contester la légalité d'une décision de refus de délivrance d'un titre de séjour qui n'implique pas par elle-même le retour de l'intéressé dans son pays d'origine ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. Considérant, en premier lieu, que les moyens dirigés contre la décision de refus de titre de séjour ayant été écartés, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée par M. D... à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écartée par voie de conséquence ;

9. Considérant, en deuxième lieu, dès lors que le refus de titre de séjour est lui-même suffisamment motivé et que les dispositions législatives qui permettent de l'assortir d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, la motivation de l'obligation de quitter le territoire se confond avec celle de la décision de refus de séjour ; que l'arrêté attaqué vise les dispositions applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et notamment l'article L. 511-1 I 1° et 3° et précise les raisons pour lesquelles le préfet a refusé de délivrer un titre de séjour à M. D... ; qu'il suit de là que le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire serait entachée d'un défaut de motivation manque en fait et doit être écarté ;

10. Considérant, en troisième lieu, que les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des articles L. 313-11-7° et L. 313-14 doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux mentionnés aux points précédents ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

11. Considérant que les moyens dirigés contre les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ayant été écartés, l'exception d'illégalité de ces décisions invoquée par M. D... à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination ne peut qu'être écartée par voie de conséquence ;

12. Considérant que M. D...n'établit pas davantage qu'en première instance la réalité des risques personnels auxquels il serait exposé en cas de retour au Kosovo ;

Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

13. Considérant que les moyens dirigés contre les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ayant été écartés, l'exception d'illégalité de ces décisions invoquée par M. D... à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant interdiction de retour sur le territoire français ne peut qu'être écartée par voie de conséquence ;

14. Considérant qu'aux termes des dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans leur version en vigueur à la date de la décision litigieuse : " L'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. / (...). / Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger obligé de quitter le territoire français, l'autorité administrative peut prononcer l'interdiction de retour pour une durée maximale de trois ans à compter de sa notification. / Lorsqu'un délai de départ volontaire a été accordé à l'étranger obligé de quitter le territoire français, l'autorité administrative peut prononcer l'interdiction de retour, prenant effet à l'expiration du délai, pour une durée maximale de deux ans à compter de sa notification. / Lorsque l'étranger faisant l'objet d'une interdiction de retour s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai de départ volontaire ou alors qu'il était obligé de quitter sans délai le territoire français ou, ayant déféré à l'obligation de quitter le territoire français, y est revenu alors que l'interdiction de retour poursuit ses effets, l'autorité administrative peut prolonger cette mesure pour une durée maximale de deux ans. / L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) " ;

15. Considérant qu'il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux ; que la décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs ; que si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère ;

16. Considérant qu'il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger ; qu'elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet ; qu'elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace ; qu'en revanche, si, après la prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément ;

17. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que pour prononcer l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans à l'encontre de M.D..., le préfet du Haut-Rhin a indiqué que l'intéressé est entré irrégulièrement en France le 22 avril 2009 et s'y est maintenu irrégulièrement malgré le prononcé de deux précédentes mesures d'éloignement prononcées à son encontre les 21 mars 2011 et 17 mars 2013 auxquelles il ne s'est pas conformé, qu'il est célibataire, sans enfant et sans charge de famille en France et ne démontre pas être isolé dans son pays d'origine où résident ses parents et deux de ses frères et qu'il est sans ressources propres en France ; que cette motivation atteste de la prise en compte par le préfet de l'ensemble des critères prévus par les dispositions précitées ; que la circonstance que la décision ne précise pas l'éventuelle menace que le requérant pourrait représenter sur le territoire français ne révèle pas, par elle-même, l'absence d'examen de ce critère et signifie seulement que le préfet n'a pas entendu retenir ce critère pour édicter l'interdiction de retour ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté ;

18. Considérant que, eu égard aux motifs évoqués ci-dessus, le préfet du Haut-Rhin a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation, interdire à M. D...le retour sur le territoire français pendant deux ans ;

19. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...D...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.

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N° 15NC01738


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC01738
Date de la décision : 05/07/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: M. Yves MARINO
Rapporteur public ?: M. LAUBRIAT
Avocat(s) : SCP SAMARDZIC ET WEISS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-07-05;15nc01738 ?
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