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05/07/2016 | FRANCE | N°15NC01298

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 05 juillet 2016, 15NC01298


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...C...a demandé au tribunal administratif de Nancy, d'une part, d'annuler l'arrêté du 2 juillet 2013 par lequel le président du conseil général des Vosges a prononcé sa radiation des cadres pour abandon de poste à compter du 19 juillet 2013 et, d'autre part, de condamner le département des Vosges à lui verser l'intégralité des traitements dont elle a été privée depuis son placement en service non fait ainsi qu'une somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral et des troubles dans

les conditions d'existence.

Par un jugement n° 1301998 du 7 avril 2015, le tr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...C...a demandé au tribunal administratif de Nancy, d'une part, d'annuler l'arrêté du 2 juillet 2013 par lequel le président du conseil général des Vosges a prononcé sa radiation des cadres pour abandon de poste à compter du 19 juillet 2013 et, d'autre part, de condamner le département des Vosges à lui verser l'intégralité des traitements dont elle a été privée depuis son placement en service non fait ainsi qu'une somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence.

Par un jugement n° 1301998 du 7 avril 2015, le tribunal administratif de Nancy a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 12 juin 2015 et le 9 mai 2016, Mme D... C..., représentée Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 7 avril 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 2 juillet 2013 la radiant des cadres ;

3°) d'enjoindre au département des Vosges de procéder à sa réintégration et de reconstituer sa carrière dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de condamner le département des Vosges à lui verser une somme correspondant aux rémunérations nettes non perçues depuis le 10 juin 2013 ;

5°) de mettre à la charge du département des Vosges une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.

Elle soutient que :

- l'arrêté en litige a été pris à la suite d'une procédure irrégulière en ce qu'il se fonde sur l'avis du comité médical en date du 17 avril 2013, lequel est entaché d'irrégularité car il méconnaît les articles 3 et 4 du décret du 30 juillet 1987 ; elle n'a pu faire valoir ses droits ; le principe du contradictoire a été méconnu ; ce comité était irrégulièrement composé ;

- elle bénéficiait d'un arrêt de travail jusqu'au 7 juillet 2013 et ne peut par conséquent être regardée comme ayant abandonné son poste le 1er juillet 2013 ; son affection présente un lien avec le service ;

- le poste de travail qu'elle a occupé du 10 janvier 2011, date de sa réintégration, au 18 mars 2011, date à laquelle elle a été placée en congé de maladie, n'était pas compatible avec son état de santé ; le département des Vosges ne démontre pas que des missions variées lui ont été confiées, lui permettant d'alterner les tâches ;

Par un mémoire en défense enregistré le 14 janvier 2016, le département des Vosges, représenté par MeA..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de Mme C...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la circonstance que la requérante n'a pas été informée à temps de la tenue du comité médical statuant sur son dossier n'a eu aucune conséquence sur le sens de l'avis de ce comité en date du 17 avril 2013 et ne l'a privée d'aucune garantie ;

- les autres moyens invoqués ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le décret n°87-602 du 30 juillet 1987 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Fuchs,

- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,

- et les observations de Me B...pour MmeC....

1. Considérant que MmeC..., agent administratif territorial employé par le département des Vosges, a été victime, le 16 septembre 1996, d'un accident de service lui ayant occasionné un traumatisme du poignet gauche ; qu'elle a bénéficié d'arrêts pour maladie successifs qui lui ont été délivrés par son médecin traitant ; que l'intéressée n'ayant pas repris ses fonctions à l'issue de ses congés de maladie, elle a été mise en demeure par son employeur de le faire puis radiée des cadres pour abandon de poste par un arrêté du président du conseil général des Vosges du 15 juillet 2003 ; qu'à la suite de l'annulation de cet arrêté par une décision du Conseil d'Etat en date du 9 avril 2010, Mme C...a effectivement repris ses fonctions le 10 janvier 2011 ; qu'elle a cessé de travailler à compter du 18 mars 2011 pour des motifs médicaux et a bénéficié de congés de maladie ordinaires à plein traitement, puis à demi-traitement, avant d'être placée en disponibilité pour raison médicale à compter du 17 mars 2012 ; que par arrêté du 4 juin 2013, il a été demandé à Mme C...de reprendre ses fonctions à compter du 10 juin 2013, date à laquelle l'intéressée s'est présentée au service pour y déposer un nouvel arrêt de travail pour la période du 8 juin au 7 juillet 2013 ; que, par un courrier du 18 juin réceptionné le 27 juin 2013, son employeur l'a mise en demeure, en l'absence de tout élément nouveau relatif à son état de santé, de reprendre son poste à compter du 1er juillet 2013 ; que, Mme C... ne s'étant pas présentée pour prendre ses fonctions à cette date, le président du conseil général des Vosges a prononcé, par un arrêté du 2 juillet 2013, sa radiation des cadres pour abandon de poste à compter du 19 juillet 2013 ; que la requérante relève appel du jugement du 7 avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ainsi que ses conclusions indemnitaires ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant, en premier lieu, que Mme C...soutient, pour la première fois en appel, que l'arrêté en litige aurait été pris au terme d'une procédure irrégulière, dès lors que le président du conseil général s'est fondé, pour prendre cet arrêté, sur l'avis du 17 avril 2013 du comité médical départemental, lequel aurait été adopté en méconnaissance des articles 3 et 4 du décret du 30 juillet 1987 visé ci-dessus et aurait violé les droits de la défense et le principe du contradictoire ; qu'elle fait également valoir que ce comité aurait été irrégulièrement composé ;

3. Considérant que la procédure de radiation des cadres pour abandon de poste débute lorsque l'agent est mis en demeure par son employeur de reprendre son service ; que les éventuelles irrégularités antérieures à cette mise en demeure ou afférentes à une procédure distincte ne peuvent, dès lors, pas avoir d'incidence sur la légalité de cette décision ;

4. Considérant qu'en l'espèce, l'avis du comité médical départemental du 17 avril 2013 est seulement afférent à la possibilité pour l'intéressée de bénéficier d'un congé de longue maladie et est antérieur à la mise en demeure adressée par son employeur à Mme C... afin que celle-ci reprenne son service ; qu'au demeurant, cet avis n'est visé ou mentionné ni dans la mise en demeure du 18 juin 2013, ni dans l'arrêté en litige ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'adoption de cet avis du comité médical départemental ainsi que celui tiré de la composition irrégulière de ce comité sont sans incidence sur la légalité de l'arrêté en litige et ne peuvent par conséquent être utilement invoqués ;

5. Considérant, en second lieu, qu'une mesure de radiation des cadres pour abandon de poste ne peut être régulièrement prononcée que si l'agent concerné a, préalablement à cette décision, été mis en demeure de rejoindre son poste ou de reprendre son service dans un délai qu'il appartient à l'administration de fixer ; que lorsque l'agent ne s'est ni présenté ni n'a fait connaître à l'administration aucune intention avant l'expiration du délai fixé par la mise en demeure, et en l'absence de toute justification d'ordre matériel ou médical, présentée par l'agent, de nature à expliquer le retard qu'il aurait eu à manifester un lien avec le service, cette administration est en droit d'estimer que le lien avec le service a été rompu du fait de l'intéressé ;

6. Considérant, d'une part, que Mme C...fait valoir qu'elle ne pouvait être considérée comme en situation d'abandon de poste le 1er juillet 2013 dès lors qu'elle avait présenté un certificat médical, établi par son médecin traitant le 8 juin 2013, qui prolongeait son arrêt de travail jusqu'au 7 juillet 2013 ; que ce certificat médical n'apporte toutefois aucun élément nouveau quant à son état de santé tel qu'apprécié par la commission de réforme et le comité médical départemental à de nombreuses reprises, et en dernier lieu le 17 avril 2013 ; qu'aucune autre pièce du dossier ne permet d'établir que le placement de l'intéressée en congé de maladie se justifiait par des considérations nouvelles inconnues de son employeur, qui a eu connaissance de ce certificat médical avant d'édicter la mise en demeure du 18 juin 2013, ou du comité médical départemental ; que la circonstance que son affection a été reconnue en lien avec le service, pas plus que celle que son médecin traitant n'a pu être entendu par le comité médical départemental ne peuvent utilement remettre en cause cette appréciation ;

7. Considérant, d'autre part, que Mme C...soutient que les fonctions qu'il lui était demandé de rejoindre, qui sont semblables à celles qu'elle a occupées entre les mois de janvier et de mars 2011, n'étaient compatibles ni avec son état de santé, ni avec les préconisations du médecin du travail ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'intéressée a été réintégrée en janvier 2011 sur un poste d'assistante administrative de l'action sociale en faveur du personnel, dont elle ne conteste pas qu'il correspondait à son grade et à ses compétences ; que les réserves exprimées par le médecin du service de médecine professionnelle, qui l'a reçue le jour de sa reprise de poste, ont été respectées ; qu'en particulier, les équipements nécessaires à un travail ergonomique ont été rapidement mis à la disposition de la requérante lorsqu'ils étaient disponibles ou ont été commandés ; qu'une personne référente lui a été affectée afin d'éviter le port de toute charge lourde ; que si Mme C...soutient que les tâches qui lui ont été confiées n'étaient pas variées, il ressort des pièces du dossier, en particulier des échanges de courriels et du récapitulatif de son activité versés par le département, que l'intéressée était chargée de saisie informatique, de tâches d'impression et de classement, de croisement de données ainsi que de contacts, notamment téléphoniques, avec les agents pour la gestion des chèques vacances ; qu'ainsi, conformément aux préconisations médicales, elle était en mesure d'alterner les tâches à effectuer durant ses journées de travail ;

8. Considérant, enfin, qu'aucun élément ne vient au soutien des allégations de la requérante selon lesquelles les conditions d'exercice de ses fonctions entre le 10 janvier et le 17 mars 2011 seraient à l'origine d'une rechute de sa pathologie, reconnue imputable au service ; que, par ailleurs, si Mme C...s'était présentée à son poste de travail le 1er juillet 2013, elle aurait été conduite à consulter, préalablement à sa reprise de fonctions, le médecin du service de médecine professionnelle, qui aurait pu prescrire si nécessaire de nouveaux aménagements de son poste de travail ; qu'ainsi, Mme C... n'établit pas que le poste sur lequel l'administration lui proposait de reprendre son service aurait été incompatible avec son état de santé ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme C...ne justifie pas qu'elle se serait trouvée dans l'impossibilité de reprendre son travail le 1er juillet 2013 ou que le poste qui lui était proposé aurait été incompatible avec son état de santé ; qu'il s'ensuit que, du fait de son abstention à déférer à la mise en demeure qui lui avait été adressée, l'intéressée doit être regardée comme ayant rompu le lien qui l'unissait au département des Vosges et abandonné son poste ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le département en première instance, que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 juillet 2013 la radiant des cadres ;

Sur les conclusions à fin d'indemnisation :

11. Considérant que les conclusions de Mme C...tendant à l'indemnisation de son préjudice financier doivent être rejetées par voie de conséquence du rejet de ses conclusions à fin d'annulation de la décision en litige ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nancy a rejeté ses conclusions à fin d'indemnisation ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

12. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions de Mme C...tendant à l'annulation de la décision en litige, n'implique aucune mesure d'exécution ; que ses conclusions à fin d'injonction doivent, par suite, être rejetées ;

Sur les dépens :

13. Considérant qu'aucun dépens n'a été exposé au cours de la présente instance ; que les conclusions de Mme C...tendant à ce que ceux-ci soit mis à la charge du département des Vosges doivent donc être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge du département des Vosges, qui n'est pas la partie perdante, la somme demandée par Mme C... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de Mme C...une somme de 500 euros à verser au département des Vosges sur le fondement de ces dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.

Article 2 : Mme C...versera une somme de 500 (cinq cents) euros au département des Vosges sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...C...et au département des Vosges.

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N° 15NC01298


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15NC01298
Date de la décision : 05/07/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-10-04 Fonctionnaires et agents publics. Cessation de fonctions. Abandon de poste.


Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. SICHLER
Rapporteur ?: M. Olivier FUCHS
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : GARTNER

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-07-05;15nc01298 ?
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