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16/06/2016 | FRANCE | N°16NC00156

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 16 juin 2016, 16NC00156


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... F...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 6 mars 2015 par laquelle le préfet de la Moselle lui a refusé la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour et d'enjoindre au préfet de la Moselle de l'admettre au séjour en vue de démarche auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir.

Par une ordonnance n° 1503414 du 20 juillet 2015, le

vice-président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande et l'a cond...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... F...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 6 mars 2015 par laquelle le préfet de la Moselle lui a refusé la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour et d'enjoindre au préfet de la Moselle de l'admettre au séjour en vue de démarche auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir.

Par une ordonnance n° 1503414 du 20 juillet 2015, le vice-président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande et l'a condamné à payer une amende de 1 000 euros en raison du caractère abusif de son recours.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 28 janvier 2016, M. G... F..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1503414 du tribunal administratif de Strasbourg du 20 juillet 2015 ;

2°) d'annuler la décision du 6 mars 2015 par laquelle le préfet de la Moselle lui a refusé la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer une carte de séjour dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir.

Il soutient que :

- le signataire de la décision ne disposait pas d'une délégation régulière ;

- la décision n'est pas motivée ;

- sa demande d'asile ne constituait pas une fraude délibérée ou un recours abusif au sens du 4° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il s'agissait de sa première demande de réexamen ; il ne pouvait faire l'objet d'un éloignement immédiat ;

- l'amende pour recours abusif n'est pas justifiée dès lors qu'il a simplement utilisé la voie de droit mentionnée sur la décision préfectorale ; le montant est totalement disproportionné par rapport à ses moyens.

Par un mémoire en défense enregistré le 3 mai 2016, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

Vu le courrier en date du 18 mai 2016 informant les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la cour est susceptible de soulever d'office le moyen d'ordre public tiré de l'incompétence du vice-président du tribunal administratif de Strasbourg pour rejeter par ordonnance, en application du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, la demande de M. F...comportant des moyens de légalité interne assortis de précisions suffisantes.

M. F...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 janvier 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Rousselle a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.F..., ressortissant kosovar, né le 5 octobre 1980, est entré irrégulièrement en France le 7 juillet 2009 ; que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) lui a refusé sa demande d'asile le 31 décembre 2009 ; qu'il a quitté le territoire français pour retourner vivre au Kosovo, en sollicitant le bénéfice de l'aide au retour volontaire, le 30 septembre 2010 ; qu'il est, selon ses déclarations, entré à nouveau en France irrégulièrement le 22 avril 2012 ; qu'il a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile ; que le préfet de la Moselle lui a refusé la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour ; que 1 'OFPRA et la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) ont refusé de lui reconnaître la qualité de réfugié par des décisions du 21 août 2012 et du 22 mai 2013 ; que M. F...a alors demandé son admission au séjour en raison de son état de santé le 17 juin 2013 ; que par un arrêté du 16 octobre 2013, le préfet lui a refusé le séjour et l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; que par un jugement du 26 mars 2014, confirmé par la cour administrative d'appel de Nancy, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa requête formée contre la décision du 16 octobre 2013 ; que le 17 janvier 2014, M. F...a sollicité, à nouveau, son admission au séjour en France en raison de son état de santé ; que le 31 janvier 2014, le préfet de la Moselle a rejeté sa demande et confirmé les termes de la décision du 16 octobre 2013 ; que par une ordonnance du 8 septembre 2014, également confirmée par la cour, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa requête formée à l'encontre de la décision du 31 janvier 2014 ; que le requérant a sollicité le réexamen de sa demande d'asile auprès de l'OFPRA ; que M. F...relève appel de l'ordonnance du vice-président du tribunal administratif de Strasbourg qui a, d'une part, rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision du 6 mars 2015 par laquelle le préfet de la Moselle lui a refusé la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour portant la mention " en vue de démarches auprès de l'OFPRA " et, d'autre part, l'a condamné à une amende de 1 000 euros ;

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Considérant que, pour rejeter la demande de M.F..., le vice-président du tribunal administratif de Strasbourg s'est fondé sur les dispositions de l'article R.222-1 du code de justice administrative au terme desquelles : " (...) les présidents des formations de jugement des tribunaux et des cours peuvent, par ordonnance : (...) 7° rejeter, après l'expiration du délai de recours (...) les requêtes ne comportant que (...) des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé " ;

3. Considérant toutefois qu'il ressort des pièces du dossier que la demande de M. F...comportait des moyens tirés de l'incompétence de l'auteur de l'acte, du défaut de motivation de la décision attaquée ou de l'erreur de droit du préfet, ainsi que des éléments, certes succincts, permettant d'en apprécier le bien-fondé ; qu'il suit de là que le vice-président du tribunal administratif de Strasbourg ne pouvait mettre en oeuvre les dispositions précitées du 7° de l'article R.222-1 du code de justice administrative sans méconnaître la compétence de la formation collégiale du tribunal ;

4. Considérant qu'il y a lieu pour la cour administrative d'appel de se prononcer immédiatement par voie d'évocation sur les conclusions de M. F...tendant à l'annulation de la décision du 6 mars 2015 ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation du refus d'autorisation provisoire de séjour :

5. Considérant, en premier lieu, que le préfet de la Moselle a, par arrêté en date du

15 octobre 2014, régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture, donné délégation à Mme C...E..., chef du bureau de l'éloignement et de l'asile, pour signer les décisions litigieuses en cas d'empêchement de Mme B...A..., directrice du service de l'immigration et de l'intégration, elle-même titulaire d'une délégation de signature du préfet de la Moselle ; que la décision litigieuse n'est pas exclue de la délégation confiée à cette dernière ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme B...A...n'aurait pas été absente ou empêchée ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté litigieux est manifestement infondé et doit être écarté ;

6. Considérant en deuxième lieu, que la décision attaquée, qui vise les textes applicables et rappelle avec précision les différentes demandes de M. F...au cours des années précédentes ainsi que les décisions prises par l'administration à son encontre pour en tirer la conclusion que sa nouvelle demande d'admission au séjour au titre de l'asile présente un caractère abusif ; qu'elle est, par suite, suffisamment motivée ;

7. Considérant enfin qu'aux termes de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile peut être refusée, notamment, si : " 4° La demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente. Constitue, en particulier, un recours abusif aux procédures d'asile la présentation frauduleuse de plusieurs demandes d'admission au séjour au titre de l'asile sous des identités différentes. Constitue également un recours abusif aux procédures d'asile la demande d'asile présentée dans une collectivité d'outre-mer s'il apparaît qu'une même demande est en cours d'instruction dans un autre Etat membre de l'Union européenne. Constitue une demande d'asile reposant sur une fraude délibérée la demande présentée par un étranger qui fournit de fausses indications, dissimule des informations concernant son identité, sa nationalité ou les modalités de son entrée en France afin d'induire en erreur les autorités " ;

8. Considérant qu'à supposer même que l'arrêté du 16 octobre 2013 ne puisse donner lieu à une exécution forcée, la seule circonstance, avérée en l'espèce, ainsi que cela a été rappelé au point 1, que M. F...a multiplié les demandes d'admission au séjour et de réexamen de ses demandes malgré l'absence d'éléments nouveaux, constitue un recours abusif aux procédures d'asile ; que, par suite, le préfet a pu, à bon droit, estimer que la demande de réexamen de M. F... entrait dans le champ d'application des dispositions précitées du 4° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. F...n'est pas fondé à demander l'annulation des décisions attaquées ; qu'il y a lieu, par suite, de rejeter ses conclusions à fin d'annulation ainsi que, par voie de conséquence, celles à fin d'injonction ;

D E C I D E :

Article 1er : L'ordonnance du 20 juillet 2015 est annulée.

Article 2 : Le surplus des conclusions et les conclusions de la demande de M. F...sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... F...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.

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N° 16NC00156


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16NC00156
Date de la décision : 16/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme ROUSSELLE
Rapporteur ?: Mme Pascale ROUSSELLE
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : PIERRE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-06-16;16nc00156 ?
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