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25/02/2016 | FRANCE | N°14NC01703

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 25 février 2016, 14NC01703


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société FH Invest a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignées au titre des années 2004, 2005 et 2006 et des cotisations supplémentaires de contribution sur l'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignées au titre des années 2004 et 2006, ainsi que des majorations correspondantes.

Par un jugement n°1101179 du 8 juillet 2014, le tribunal administratif de Strasbourg a rej

eté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société FH Invest a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignées au titre des années 2004, 2005 et 2006 et des cotisations supplémentaires de contribution sur l'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignées au titre des années 2004 et 2006, ainsi que des majorations correspondantes.

Par un jugement n°1101179 du 8 juillet 2014, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 1er septembre 2014 et 22 septembre 2015, la société FH Invest, société par actions simplifiée, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 8 juillet 2014 ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignées au titre des années 2004, 2005 et 2006 et des cotisations supplémentaires de contribution sur l'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignées au titre des années 2004, 2005 et 2006, ainsi que des majorations correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a produit les documents justifiant dans leur principe et leur montant la réalité des prestations dont la déduction est remise en cause par l'administration ; la réalité juridique et matérielle des prestations réalisée par la société LTI France au profit de la société de la Moselle Rive Gauche en ce qui concerne l'immeuble situé à Saint-Etienne-lès-Remiremont n'a jamais été discutée ; l'intégralité de ces prestations ne pouvait être déduite, ainsi que l'avait reconnu l'administration au cours de la procédure amiable ; la déductibilité des honoraires d'un montant de 230 000 euros facturés à la société de la Moselle Rive Gauche au titre de l'exercice clos en 2005, liés à la recherche de sites d'implantation de locaux, ne pouvait être intégralement remise en cause ; il en va de même s'agissant des sommes déduites par la société de la Moselle Rive Gauche au cours des années 2004, 2005 et 2006 et versées à la société FH Invest en vertu d'un contrat de service ;

- dans le cadre des articles 223 et suivants du code général des impôts, elle aurait dû bénéficier d'une compensation des opérations intra-groupe par le biais de la neutralisation des actifs ; en particulier, le 6ème alinéa de l'article 223 B du code général des impôts a été méconnu ; du fait de cette neutralisation des actifs, le préjudice subi par l'administration est nul ; l'administration aurait dû tirer toutes les conséquences de la position qu'elle adoptait et neutraliser au niveau de la société FH Invest prise en sa qualité de société mère intégrante la totalité des sommes dont la déduction était remise en cause au niveau de la société de la Moselle Rive Gauche, société membre du groupe.

Par un mémoire en défense enregistré le 5 mars 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête, au motif qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Fuchs,

- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,

- et les observations de Me A...pour la société FH invest.

1. Considérant que la société FH Invest constitue la société mère d'un groupe fiscalement intégré comprenant notamment la société LTI France et la société civile immobilière de la Moselle Rive Gauche ; que cette dernière société a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les années 2004, 2005 et 2006, à l'issue de laquelle l'administration a remis en cause la déduction d'honoraires facturés et à facturer par la société LTI France et la société FH Invest ; que la société FH Invest relève appel du jugement du 8 juillet 2014 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des majorations y afférentes, qui lui ont été assignées, en tant que société mère du groupe, au titre des années 2004, 2005 et 2006, ainsi que la décharge des cotisations additionnelles à cet impôt, et des majorations correspondantes, qui lui ont été assignées au titre des années 2004, 2005 et 2006 ;

Sur les conclusions à fin de décharge :

2. Considérant qu'en application des dispositions combinées des articles 38 et 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion commerciale normale ; qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'oeuvre, le loyer des immeubles dont l'entreprise est locataire. Toutefois les rémunérations ne sont admises en déduction des résultats que dans la mesure où elles correspondent à un travail effectif et ne sont pas excessives eu égard à l'importance du service rendu. Cette disposition s'applique à toutes les rémunérations directes ou indirectes, y compris les indemnités, allocations, avantages en nature et remboursements de frais. (...) Les dépenses ci-dessus énumérées peuvent également être réintégrées dans les bénéfices imposables dans la mesure (...) où la preuve n'a pas été apportée qu'elles ont été engagées dans l'intérêt direct de l'entreprise. (...) " ;

3. Considérant qu'en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des créances de tiers, amortissements, provisions et charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; qu'en ce qui concerne les charges, le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;

4. Considérant qu'il résulte de ces principes, que lorsqu'une entreprise a déduit en charges une dépense réellement supportée, conformément à une facture régulière relative à un achat de prestations ou de biens dont la déductibilité par nature n'est pas contestée par l'administration, celle-ci peut demander à l'entreprise qu'elle lui fournisse tous éléments d'information en sa possession susceptibles de justifier la réalité et la valeur des prestations ou biens ainsi acquis ; que la seule circonstance que l'entreprise n'aurait pas suffisamment répondu à ces demandes d'explications ne saurait suffire à fonder en droit la réintégration de la dépense litigieuse, l'administration devant alors fournir devant le juge tous éléments de nature à étayer sa contestation du caractère déductible de la dépense ; que le juge de l'impôt doit apprécier la valeur des explications qui lui sont respectivement fournies par le contribuable et par l'administration ;

5. Considérant, en premier lieu, que l'administration a réintégré au résultat imposable de la société de la Moselle Rive Gauche, au titre des exercices clos en 2004 et 2005, les sommes de 50 000 euros et 180 000 euros, déduites au titre, respectivement, d'un " acompte sur frais de négociation - vente actifs SCI Moselle " et d'" honoraires suite à la cession de l'immeuble de Saint-Etienne de Remiremont ", qui lui avaient été facturées par la société LTI France le 5 janvier 2005 et le 19 juillet 2005 ; que, contrairement à ce que soutient la société FH Invest, il résulte de l'instruction que l'administration conteste la réalité de ces prestations, pour lesquelles elle indique qu'aucun justificatif probant n'a été fourni en dépit de demandes en ce sens ; que le service fait valoir, en outre, que l'objet social de la société LTI France, qui exerce une activité de location de camions avec conducteurs, est étranger aux prestations facturées et qu'aux termes des stipulations du contrat de service conclu le 25 février 2003 entre la société de la Moselle Rive Gauche et la société FH Invest, ces prestations auraient dû être réalisées par la société requérante ; que les courriers produits par la société FH Invest, qui sont adressés à la société de la Moselle Rive Gauche, ne permettent pas de justifier de la réalité des prestations qui auraient été effectuées par la société LTI France, qui n'est au demeurant pas mentionnée dans ceux-ci ; que la société requérante ne conteste pas que, comme l'a jugé le tribunal administratif de Strasbourg, le procès-verbal d'assemblée générale de la société de la Moselle Rive Gauche du 7 mai 2004 n'est pas davantage de nature à démontrer la réalisation de prestations par la société LTI France ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration a considéré que les dépenses en litige, qui étaient dépourvues de contrepartie, n'avaient pas été engagées dans l'intérêt direct de l'exploitation de la société de la Moselle Rive Gauche et qu'elle les a réintégrées au résultat imposable de la société FH Invest au titre des exercices clos en 2004 et 2005 ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que l'administration a réintégré dans le résultat imposable de la société de la Moselle Rive Gauche au titre de l'exercice clos en 2005 la somme de 230 000 euros qui avait été déduite au compte 622600, " honoraires ", au motif qu'aucune facture n'avait été présentée et que la réalité de la prestation que ce versement devait rémunérer n'était pas établie ; qu'en se bornant à soutenir que les pièces produites prouvent la réalité des prestations réalisées, la société requérante ne conteste pas sérieusement que, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif de Strasbourg, les courriers et notes manuscrites relatifs à l'acquisition d'un terrain dans la ZAC de Dombasle qu'elle a versés au dossier ne permettent pas de justifier de la réalité des prestations qui auraient été effectuées au profit de la société de la Moselle Rive Gauche par la société LTI France ; qu'au demeurant, ces pièces ne permettent pas plus de justifier de la réalité des prestations qui auraient été réalisées par la société LTI France pour la société de la Moselle Rive Gauche en vue de l'acquisition dudit terrain, ni d'établir avec précision leur montant ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a considéré que ces sommes n'avaient pas été versées dans l'intérêt de la société et les a réintégrées au résultat imposable de l'exercice clos en 2005 ;

7. Considérant, en troisième lieu, que la société requérante qui se borne à soutenir de manière générale que les pièces produites prouvent la réalité des prestations réalisées, ne conteste pas sérieusement que, ainsi que l'a jugé le tribunal administratif de Strasbourg, la réalité des prestations effectuées en contrepartie des honoraires qui lui ont été versés par la société de la Moselle Rive Gauche en vertu d'un contrat, intitulé " contrat de service ", daté du 25 février 2003, n'était pas établie ;

8. Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte de ce qui précède que n'ont été établis ni la réalité ni le montant des prestations en contrepartie desquelles les honoraires déduits du résultat imposable ont été versés ; que, par voie de conséquence, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que l'administration n'aurait dû procéder qu'à des remises en cause partielles de ces déductions ;

9. Considérant, en cinquième lieu, que l'option pour le régime d'intégration fiscale prévu à l'article 223 A du code général des impôts, ne dispense pas chacune des sociétés du groupe fiscal intégré de déterminer son résultat dans les conditions de droit commun, ainsi que le prévoit le premier alinéa de l'article 223 B du code général des impôts, sous la seule réserve des dérogations expressément autorisées par les dispositions propres à ce régime d'exception ; qu'aucune de ces dispositions n'autorise une société membre du groupe à déclarer, selon des règles différentes des règles de droit commun, un abandon de créance ou une subvention qu'elle a consenti ou dont elle a bénéficié ; que la neutralisation d'un tel abandon de créance ou d'une subvention consenti entre sociétés du même groupe est effectuée, conformément aux dispositions du sixième alinéa de ce même article 223 B, pour la détermination du résultat d'ensemble, après l'établissement des résultats individuels des sociétés membres du groupe ; que la société fait valoir que elle aurait dû bénéficier d'une compensation des opérations intra-groupe par le biais de la neutralisation des actifs ; qu'en se bornant à affirmer qu'une compensation aurait dû être effectuée entre les résultats des différentes sociétés fiscalement intégrées sans préciser, en particulier, qu'elle remplirait les conditions requises par les dispositions précitées, en particulier le sixième alinéa de l'article 223 B du code général des impôts, la société requérante ne met pas la cour à même d'apprécier le bien-fondé de ce moyen ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité des conclusions de la requête relatives à la contribution sociale au titre de l'année 2006, que la société FH Invest n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, la somme demandée par la société FH Invest au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société FH Invest est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société FH Invest et au ministre des finances et des comptes publics.

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N° 14NC01703


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14NC01703
Date de la décision : 25/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-04-02-01-04 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Détermination du bénéfice net.


Composition du Tribunal
Président : Mme ROUSSELLE
Rapporteur ?: M. Olivier FUCHS
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : GUENOT

Origine de la décision
Date de l'import : 05/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2016-02-25;14nc01703 ?
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