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08/12/2015 | FRANCE | N°14NC01999

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 08 décembre 2015, 14NC01999


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...et Mme C...A...ont demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler les arrêtés du 5 février 2014 par lesquels le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourraient être renvoyés.

Par un jugement n° 1401108, 1401110 du 3 juin 2014, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nancy, statuant, à la sui

te de l'assignation à résidence du 15 mai 2014 de M. et MmeA..., selon la procédure prévu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...et Mme C...A...ont demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler les arrêtés du 5 février 2014 par lesquels le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourraient être renvoyés.

Par un jugement n° 1401108, 1401110 du 3 juin 2014, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nancy, statuant, à la suite de l'assignation à résidence du 15 mai 2014 de M. et MmeA..., selon la procédure prévue au III de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a rejeté les demandes de M. et Mme A...tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel ils pourraient être renvoyés.

Par un jugement n° 1401108, 1401110 du 23 septembre 2014, le tribunal administratif de Nancy a joint ces demandes et a, d'une part, annulé les décisions du 5 février 2014 refusant à M. et Mme A...la délivrance d'un titre de séjour et, d'autre part, enjoint au préfet de Meurthe-et-Moselle de leur délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 29 octobre 2014 sous le n° 14NC01998, le préfet de Meurthe-et-Moselle demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1401108, 1401110 du tribunal administratif de Nancy du 23 septembre 2014 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Nancy.

Il soutient que :

- la décision de refus de titre de séjour est suffisamment motivée ;

- le moyen tiré de ce que cette décision méconnaît les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ne peut qu'être écarté dès lors qu'elle a été prise sur demande ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est suffisamment motivée ;

- l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a transposé la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;

- le délai de départ volontaire accordé à M. A...était approprié à sa situation et il n'a fait valoir aucun élément spécifique tendant à l'octroi d'un délai plus long ;

- le moyen tiré de la méconnaissance de la recommandation du Parlement européen n'est pas fondé ;

- les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne sont pas fondés ;

- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas fondé ;

- le moyen tiré de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences des décisions en litige sur la situation personnelle de l'intéressé n'est pas fondé ;

- son refus de le régulariser au titre de son pouvoir discrétionnaire n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée à M.A..., qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

II. Par une requête enregistrée le 29 octobre 2014 sous le n° 14NC01999, le préfet de Meurthe-et-Moselle demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1401108, 1401110 du tribunal administratif de Nancy du 23 septembre 2014 ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme A...devant le tribunal administratif de Nancy.

Il soutient que :

- la décision de refus de titre de séjour est suffisamment motivée ;

- le moyen tiré de ce que cette décision méconnaît les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ne peut qu'être écarté dès lors qu'elle a été prise sur demande ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est suffisamment motivée ;

- l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a transposé la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;

- le délai de départ volontaire accordé à Mme A...était approprié à sa situation et elle n'a fait valoir aucun élément spécifique tendant à l'octroi d'un délai plus long ;

- le moyen tiré de la méconnaissance de la recommandation du Parlement européen n'est pas fondé ;

- les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne sont pas fondés ;

- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas fondé ;

- le moyen tiré de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences des décisions en litige sur la situation personnelle de l'intéressée n'est pas fondé ;

- son refus de la régulariser au titre de son pouvoir discrétionnaire n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée à MmeA..., qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Michel, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. et MmeA..., ressortissants serbes, nés les 17 février 1987 et 23 juillet 1987, sont entrés irrégulièrement sur le territoire français le 8 mars 2010, selon leurs déclarations ; que leurs demandes tendant à la reconnaissance de la qualité de refugié ont été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides par décisions du 8 novembre 2010, confirmées par la Cour nationale du droit d'asile le 28 juin 2011 ; que le réexamen de leurs demandes d'asile a été rejeté par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides par décisions du 19 avril 2012, confirmées par la Cour nationale du droit d'asile le 9 avril 2013 ; que M. et Mme A... ont en dernier lieu sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des dispositions de l'article L. 313-14 du même code en se prévalant de leur présence en France et de la scolarisation de leurs enfants ; que par arrêtés du 5 février 2014, le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourraient être renvoyés ; que par arrêtés du 15 mai 2014, le préfet de Meurthe-et-Moselle les a assignés à résidence ; que par jugement du 3 juin 2014, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nancy, statuant selon la procédure prévue au III de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a rejeté les demandes de M. et Mme A...tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel ils pourraient être renvoyés ; que par jugement du 23 septembre 2014 le tribunal administratif de Nancy a, d'une part, annulé les arrêtés du 5 février 2014 du préfet de Meurthe-et-Moselle refusant à M. et Mme A...la délivrance d'un titre de séjour, et, d'autre part, lui a enjoint de leur délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement ; que le préfet de Meurthe-et-Moselle relève appel de ce jugement ;

2. Considérant que les requêtes n° 14NC01998 et n° 14NC01999 sont dirigées contre le même jugement et on fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un même arrêt ;

Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. et MmeA..., ressortissants serbes, sont entrés irrégulièrement sur le territoire français avec leurs trois enfants mineurs le 8 mars 2010, selon leurs déclarations ; qu'ils se sont maintenus sur le territoire français durant près de quatre ans au bénéfice de demandes successives de séjour ; que si M. et Mme A...soutiennent souffrir d'anxiété en lien avec leur statut en France, le certificat médical produit par les requérants ne comporte aucune mention tenant notamment à l'absence d'un traitement approprié à leur état de santé dans leur pays d'origine ; qu'en outre, si le grand-père, le frère, la soeur et leurs conjoints, l'oncle et la tante de M. A...résident régulièrement sur le territoire français et attestent que les intéressés n'auraient plus d'attaches familiales dans leur pays d'origine, il ressort des pièces du dossier que Mme A...ne déclare aucune attache familiale en France et n'établit pas en être dépourvue dans son pays d'origine ; que, par ailleurs, M. et Mme A...ne justifient pas qu'ils ne pourraient pas poursuivre une vie privée et familiale normale dans leur pays d'origine où ils ont vécu jusqu'à l'âge de 22 ans ; qu'en outre, si trois de leurs quatre enfants, nés en 2005, 2006 et 2008, sont scolarisés à Nancy en cours élémentaire deuxième et première année et en grande section de maternelle, M. et Mme A...ne font état d'aucun élément particulier qui ferait obstacle à la poursuite de leur scolarisation dans leur pays d'origine, ces enfants ayant vocation à suivre leurs parents ; que, par suite, dans les circonstances de l'espèce, les décisions de refus de titre de séjour n'ont pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de M. et Mme A...une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises ; que, dès lors, le préfet de Meurthe-et-Moselle est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nancy a annulé ses décisions du 5 février 2014 refusant de délivrer à M. et Mme A...un titre de séjour en retenant le moyen tiré de l'inexacte application des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

5. Considérant toutefois qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. et Mme A...en première instance ;

Sur les autres moyens soulevés par M. et MmeA... :

6. Considérant, en premier lieu, que les décisions de refus de titre de séjour en litige, après avoir visé notamment le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionnent que M. et Mme A...sont entrés en France le 8 mars 2010 accompagnés de leurs enfants, que leurs demandes tendant à la reconnaissance du statut de réfugié ont été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides par décisions du 8 novembre 2010, confirmées par la Cour nationale du droit d'asile le 28 juin 2011 ; que le réexamen de leurs demandes d'asile a été rejeté par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides par décisions du 19 avril 2012, confirmées par la Cour nationale du droit d'asile ; que ces décisions précisent également que les intéressés ont sollicité le 11 juin 2013 un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en se prévalant de leur présence en France et de la scolarisation de leurs enfants et indiquent de manière circonstanciée les éléments pour lesquels un titre de séjour leur est refusé sur le fondement de ces dispositions ; que les décisions de refus de titre de séjour comportent les éléments de droit et de fait qui en constituent le fondement et sont ainsi suffisamment motivées ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que M. et Mme A...ne peuvent utilement soutenir que les décisions en litige auraient méconnu les dispositions du paragraphe 1 de l'article 12 de la directive 2008/115/CE, dès lors que lorsqu'il se prononce sur une demande de titre de séjour un Etat membre ne met pas en oeuvre le droit de l'Union européenne ;

8. Considérant, en troisième lieu, que l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 dispose que : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales (...) " ; qu'en vertu de leurs termes mêmes, ces dispositions ne peuvent être utilement invoquées à l'encontre d'une décision de refus de titre de séjour, qui est prise en réponse à une demande formulée par l'étranger ;

9. Considérant, en quatrième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment des termes des décisions en litige que le préfet de Meurthe-et-Moselle n'aurait pas procédé à un examen de la situation individuelle de M. et MmeA... ;

10. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale " ;

11. Considérant que M. et Mme A...ne justifient pas que leurs enfants ne pourraient pas poursuivre avec eux leur vie familiale en Serbie et y continuer leur scolarité ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté ;

12. Considérant, en dernier lieu, qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le préfet de Meurthe-et-Moselle aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ses décisions sur la situation personnelle et familiale de M. et MmeA... ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de Meurthe-et-Moselle est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a annulé ses décisions du 5 février 2014 refusant de délivrer à M. et Mme A...un titre de séjour ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1401108, 1401110 du 23 septembre 2014 du tribunal administratif de Nancy est annulé.

Article 2 : Les demandes présentées par M. et Mme A...devant le tribunal administratif de Nancy sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A..., à Mme C...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.

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Nos 14NC01998, 14NC01999


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14NC01999
Date de la décision : 08/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MARINO
Rapporteur ?: M. Alexis MICHEL
Rapporteur public ?: M. LAUBRIAT

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2015-12-08;14nc01999 ?
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