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19/11/2015 | FRANCE | N°14NC00698

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 19 novembre 2015, 14NC00698


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C...ont demandé au tribunal administratif de Besançon de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales supplémentaires auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2006 à 2008.

Par un jugement n° 1300345 du 20 février 2014, le tribunal administratif de Besançon a fait droit à la demande de M. et Mme C...en jugeant que les bases d'imposition de ces derniers devaient être réduites à hauteu

r du montant des revenus occultes et des revenus distribués mis à leur charge.

Procédu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C...ont demandé au tribunal administratif de Besançon de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales supplémentaires auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2006 à 2008.

Par un jugement n° 1300345 du 20 février 2014, le tribunal administratif de Besançon a fait droit à la demande de M. et Mme C...en jugeant que les bases d'imposition de ces derniers devaient être réduites à hauteur du montant des revenus occultes et des revenus distribués mis à leur charge.

Procédure devant la cour :

Par un recours enregistré le 23 avril 2014 et un mémoire complémentaire enregistré le 15 juillet 2014, le ministre des finances et des comptes publics demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 1300345 du 20 février 2014 par lequel le tribunal administratif de Besançon a réduit les bases d'imposition de M. et Mme C...au titre des années 2006, 2007 et 2008 à hauteur du montant des revenus occultes et des revenus distribués mis à leur charge ;

2°) de remettre à la charge de M. et Mme C...l'imposition dont la décharge a été prononcée, ou, subsidiairement, de remettre à leur charge l'imposition à concurrence d'un fonds de commerce évalué à 240 000 euros.

Le ministre soutient que :

- si la proposition de rectification est insuffisamment motivée en ce qui concerne la méthode par comparaison, elle est suffisamment motivée en ce qui concerne la deuxième méthode de calcul ;

- c'est à tort que le tribunal a estimé que la deuxième méthode d'évaluation du fonds de commerce d'électricité générale cédée par M. C...était erronée, l'administration n'ayant pas commis de confusion entre des données hors taxes et des données toutes taxes comprises ;

- subsidiairement, le prix du fonds de commerce pourra être fixé à 240 000 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 juin 2014, et un mémoire complémentaire, enregistré le 4 août 2014, M. et MmeC..., représentés par MeA..., concluent au rejet du recours, à la confirmation du jugement n° 1300345 du tribunal administratif de Besançon du 20 février 2014 et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'État sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que :

- la demande du ministre est irrecevable en tant qu'elle tend à la remise à leur charge des pénalités dont la décharge a été prononcée par le tribunal ;

- la méthode d'évaluation retenue par le vérificateur est erronée en ce qu'elle confond des données hors taxe et des données toutes taxes comprises ;

- le défaut de motivation de la proposition de rectification entraîne la décharge de la totalité des impositions supplémentaires dès lors que l'administration a valorisé le fonds de commerce en ne se fondant que sur la première méthode utilisant des termes de comparaison avec d'autres sociétés ;

- le ministre se fonde dans ses écritures sur une nouvelle méthode incohérente.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Di Candia,

- les conclusions de M. Goujon-Fischer, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., pour M. et MmeC....

1. Considérant qu'en 2001, M. B...C...a créé avec son épouse la Sarl Electricité C...poursuivant le même objet que l'activité de travaux d'électricité générale et de géothermie qu'il exerçait jusqu'alors à titre individuel ; que le 15 décembre 2006, la Sarl Electricité C...a fait l'acquisition auprès de M. C...du fonds de commerce qu'elle exploitait jusqu'alors en location-gérance pour un montant de 450 000 euros ; que le 26 février 2007, la Sarl Electricité C...a cédé les éléments incorporels de sa branche géothermie à une société tierce pour un montant de 58 000 euros ; qu'à la suite d'une vérification de la comptabilité de la société, l'administration fiscale a rectifié à la baisse la valeur du fonds ainsi cédé et refusé la déduction de charges du bénéfice imposable de la société correspondant aux intérêts d'emprunt et aux frais d'assurance du prêt bancaire souscrit par elle pour financer cette acquisition ; que l'administration fiscale, qui a en conséquence regardé comme des revenus distribués, d'une part la différence de 234 000 euros existant entre la valeur du fonds figurant dans l'acte de cession de ce dernier et celle retenue par le vérificateur, d'autre part la part des intérêts d'emprunt et des frais d'assurance non admis en charge, a assujetti M. et Mme C...à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales supplémentaires au titre des années 2006 à 2008 ; que par jugement n° 1300345 du 20 février 2014, le tribunal administratif de Besançon a déchargé M. et Mme C...de ces impositions supplémentaires ; que le ministre des finances et des comptes publics interjette appel de ce jugement et demande à la cour, à titre principal, de rétablir les impositions litigieuses au titre des années 2006 à 2008 et, à titre subsidiaire, de réformer le jugement attaqué en arrêtant à la somme de 240 000 euros le prix du fonds de commerce cédé le 15 décembre 2006 ;

Sur l'appel principal du ministre des finances et des comptes publics :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) " ; que lorsque l'administration entend fonder au moins en partie une rectification, non sur des pratiques habituelles à la profession ou au secteur d'activité, mais sur des éléments de comparaison issus de données chiffrées provenant d'autres entreprises, elle doit, pour assurer le caractère contradictoire de la procédure sans méconnaître le secret professionnel protégé par l'article L. 103 du livre des procédures fiscales, désigner nommément ces entreprises mais ne fournir au contribuable que des moyennes ne lui permettant pas de connaître, fût-ce indirectement, les données propres à chacune d'elles ; que cette obligation, dont le respect constitue une garantie pour le contribuable, s'impose à l'administration même si ce dernier disposait d'éléments relatifs à sa propre situation pour contester les évaluations du vérificateur ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment des termes mêmes de la proposition de rectification du 17 décembre 2009, que pour déterminer le prix de cession du fonds de commerce en cause, l'administration a déterminé le pourcentage que représentait le prix de cession des éléments incorporels de ce fonds par rapport au chiffre d'affaires moyen, résultant d'éléments de comparaison issus de données chiffrées provenant d'autres entreprises et relatifs à la cession de trois autres fonds de commerce de travaux d'électricité ; qu'elle a ensuite appliqué ce coefficient au chiffre d'affaires TTC moyen des trois derniers exercices de la Sarl ElectricitéC..., obtenant un montant de 216 000 euros ; que le ministre ne conteste pas en appel que cette méthode est entachée d'irrégularité en tant qu'elle n'indique pas le nom des entreprises retenues comme éléments de comparaison ; que toutefois, pour vérifier la cohérence de cette évaluation, l'administration a calculé que la branche d'activité de géothermie, cédée par ailleurs à un tiers à des conditions qu'elle ne conteste pas, représentait 26,56 % du chiffre d'affaires moyen HT des trois derniers exercices de la société ; qu'appliquant ce coefficient à la valeur de 216 000 euros qui ressort de la première estimation, le service a obtenu le montant de 57 369 euros, dont la quasi coïncidence avec le prix de vente effectif de la branche de géothermie, soit 58 000 euros, lui fait estimer pertinent le montant de 216 000 euros auquel il évalue la valeur de la cession de l'activité de travaux d'électricité en cause ; qu'eu égard au lien existant entre les deux méthodes dont la seconde, qui utilise le résultat de la première ne peut, dès lors, être qualifiée " d'interne " et alors qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'administration aurait retenu le même montant si elle ne s'était fondée que sur la deuxième méthode d'évaluation, l'insuffisance de motivation de la proposition de rectification en ce qui concerne les termes de comparaison employés affecte la régularité de la proposition de rectification dans son ensemble ; que, par suite, M. et Mme C... sont fondés à soutenir, par le moyen de défense qu'ils invoquent en appel, que c'est à tort que le tribunal n'a pas tiré les conséquences de l'irrégularité de la procédure d'imposition en cause en ne prononçant pas, pour ce motif, la décharge de l'imposition litigieuse ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens du ministre non plus que sur la fin de non-recevoir relative à la pénalité pour manquement délibéré, opposée en défense, que le ministre des finances et des comptes publics n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a déchargé M. et Mme C...des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales supplémentaires qui leur ont été assignées au titre des années 2006 à 2008 à raison de la réévaluation du prix du fonds de commerce cédé le 15 décembre 2006 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. et Mme C...et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le recours du ministre des finances et des comptes publics est rejeté.

Article 2 : L'État versera à M. et Mme C...une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de M. et Mme C...est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des finances et des comptes publics et à M. et MmeC....

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14NC00698


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14NC00698
Date de la décision : 19/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-04-01-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu.


Composition du Tribunal
Président : Mme la Pdte. SICHLER
Rapporteur ?: M. Olivier DI CANDIA
Rapporteur public ?: M. GOUJON-FISCHER
Avocat(s) : SCP SCHAUFELBERGER MONNIN

Origine de la décision
Date de l'import : 08/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2015-11-19;14nc00698 ?
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