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23/06/2014 | FRANCE | N°13NC01718

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 23 juin 2014, 13NC01718


Vu, enregistrée sous le n° 13NC01718 le 19 septembre 2013, la requête présentée pour M. D...A..., domicilié..., par Me Levi-Cyferman, avocat ;

M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201833 en date du 28 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa requête tendant à annuler la décision en date du 2 mai 2012 par laquelle le préfet de Meurthe-et-Moselle a prononcé son expulsion ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;

3°) de condamner l'Etat à verser à Me Levi-Cyferman la somme de 1 500 eu

ros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à ...

Vu, enregistrée sous le n° 13NC01718 le 19 septembre 2013, la requête présentée pour M. D...A..., domicilié..., par Me Levi-Cyferman, avocat ;

M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201833 en date du 28 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa requête tendant à annuler la décision en date du 2 mai 2012 par laquelle le préfet de Meurthe-et-Moselle a prononcé son expulsion ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision ;

3°) de condamner l'Etat à verser à Me Levi-Cyferman la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;

Il soutient que :

- l'arrêté préfectoral n'est pas suffisamment motivé tant en droit qu'en fait et ne comporte aucune analyse personnalisée et circonstanciée de sa situation ;

- la seule condamnation dont il a fait l'objet ne permet pas d'établir la gravité de la menace pour l'ordre public ; le préfet n'a pas apprécié sa situation au jour de l'arrêté d'expulsion et n'a pas pris en compte son parcours carcéral ; il n'existe pas de risque de récidive ; l'administration pénitentiaire a donné un avis favorable à une mesure de libération ;

- la décision porte atteinte à son droit à une vie privée garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il est arrivé très jeune en France où il réside depuis 1991 ; qu'il espère renouer contact avec ses enfants ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu, enregistré le 12 février 2014 le mémoire en défense présenté par le préfet de Meurthe-et-Moselle ; il conclut au rejet de la requête et indique s'en remettre à ses écritures de première instance, le requérant n'apportant pas d'arguments ou d'éléments nouveaux ; il indique, en outre, que M. A...a fait l'objet d'une mesure de libération conditionnelle et a été expulsé vers la Turquie le 28 janvier 2014 ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle (section administrative) en date du 27 septembre 2013 accordant à M. A...le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu le mémoire enregistré le 27 mai 2014 par lequel Me B...déclare succéder à Me C...et conclut à l'entier bénéfice des précédentes écritures et à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'aide juridique ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 juin 2014 :

- le rapport de Mme Rousselle, président,

- les conclusions de M. Wiernasz, rapporteur public,

- et les observations de Me Ticot, avocat, suppléant MeB..., pour M. A... ;

1. Considérant qu'en application de l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile aux termes duquel : " : " Sous réserve des dispositions des articles L. 521-2, L. 521-3 et L. 521-4, l'expulsion peut être prononcée si la présence en France d'un étranger constitue une menace grave pour l'ordre public. ", le préfet de Meurthe-et-Moselle a, par arrêté du 2 mai 2012, ordonné l'expulsion du territoire français de M. D... A..., ressortissant turc né le 20 février 1972 ; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté la demande de M. A...tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant, en premier lieu, qu'au soutien de sa critique du jugement attaqué, M. A... reprend, avec la même argumentation, son moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté préfectoral du 2 mai 2012 ; qu'il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que les premiers juges auraient, par les motifs qu'ils ont retenus et qu'il y a lieu d'adopter, commis une erreur en écartant ce moyen ;

3. Considérant, en second lieu, que les infractions pénales commises par un étranger ne sauraient, à elles seules, justifier légalement une mesure d'expulsion et qu'elles ne dispensent en aucun cas l'autorité compétente d'examiner, d'après l'ensemble des circonstances de l'affaire et du comportement de l'intéressé, si la présence de ce dernier sur le territoire français est de nature à constituer une menace grave et actuelle pour l'ordre public ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...a été condamné le 8 décembre 2006 par la Cour d'Assises du Haut-Rhin, à une peine de 22 ans d'emprisonnement assortie d'une peine de sureté pour l'assassinat de son épouse ; que ni le rapport d'expertise psychiatrique établi le 9 juillet 2010 ni l'attestation de l'infirmière psychiatrique en date du 16 novembre 2011 ne permettent de regarder pour établi qu'il ne présentait plus, à la date de la décision attaquée, de risque grave et actuel pour l'ordre public ; qu'ainsi, nonobstant l'avis défavorable de la commission d'expulsion en date du 14 décembre 2011, M.A..., qui ne peut utilement se prévaloir de certificats ou éléments postérieurs à la décision attaquée, n'établit pas que le préfet de Meurthe-et-Moselle aurait commis une erreur d'appréciation en estimant que son comportement constituait une menace grave pour l'ordre public et en décidant, pour ce motif, de prononcer son expulsion ;

5. Considérant en troisième lieu qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

6. Considérant qu'ainsi qu'il vient d'être dit, le comportement de M. A...constituait une menace grave pour l'ordre public de nature à justifier l'ingérence de l'autorité publique dans sa vie privée ; qu'en tout état de cause, l'intéressé n'établit, ni même n'allègue avoir aucune relation avec ses enfants, ni avoir d'autres liens familiaux en France ; qu'il suit de là qu'il n'est pas fondé à soutenir que le tribunal a, à tort, considéré que le préfet de Meurthe-et-Moselle, en prononçant son expulsion, n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par cette décision et n'a ainsi pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa requête ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.

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13NC01718


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13NC01718
Date de la décision : 23/06/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-02 Étrangers. Expulsion.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Pascale ROUSSELLE
Rapporteur public ?: M. WIERNASZ
Avocat(s) : LAGRANGE PHILIPPOT CLEMENT ZILLIG VAUTRIN SCP

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2014-06-23;13nc01718 ?
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