Vu, enregistré sous le n° 13NC00738 le 18 avril 2013, le recours présenté par le préfet du Bas-Rhin ;
Le préfet demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1301166 en date du 18 mars 2013 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a, à la demande de M. A...C..., annulé sa décision en date du 14 mars 2013 ordonnant le placement de l'intéressé dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire pour cinq jours ;
2°) de rejeter les conclusions de M. C...;
Il soutient que :
- la décision est suffisamment motivée ;
- le secrétaire général de la préfecture disposait d'une délégation de signature régulièrement publiée ;
- M. C...a bénéficié des garanties procédurales prévues par la loi du 12 avril 2000 ;
- le caractère non suspensif du placement en rétention administrative n'est pas contraire à l'article 5-4 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, au code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni à la directive 2008/115/CE ;
- à la date de la décision attaquée, M. C...avait déclaré avoir perdu son passeport, le risque de fuite était établi du seul fait du comportement du requérant qui, depuis 2004, a fait l'objet de multiples condamnations et son comportement est constitutif d'une menace à l'ordre public ;
- M. C...n'apporte aucun élément permettant d'établir que son état de santé serait incompatible avec un placement en rétention ;
- s'agissant de la décision fixant le pays de destination, les moyens développés sont inopérants, la décision attaquée ne fixant pas un tel pays ;
Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;
Vu les pièces du dossier dont il ressort que le recours a été communiqué le 5 juin 2013 à M.C..., domicilié..., pour lequel il n'a pas été produit d'observations ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 février 2014 :
- le rapport de Mme Rousselle, président,
- et les conclusions de M. Wiernasz, rapporteur public ;
1. Considérant que M.C..., ressortissant algérien né le 19 mars 1978, a été condamné le 11 janvier 2012 par le tribunal correctionnel de Strasbourg à une peine de quatre mois d'emprisonnement, assortie d'une interdiction du territoire français pour une durée de trois ans ; que le préfet du Bas-Rhin a, par suite, retiré son certificat de résident par décision du 14 décembre 2012 et décidé, par arrêté du 14 mars 2013, de placer l'intéressé en rétention administrative pour une durée de cinq jours dans l'attente de son éloignement ; que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Strasbourg a annulé cette dernière décision ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) L'interdiction du territoire prononcée à titre de peine complémentaire peut également donner lieu au placement de l'étranger dans des lieux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, le cas échéant à l'expiration de sa peine d'emprisonnement, dans les conditions définies au présent titre (...) " et aux termes de l'article L. 561-2 du même code : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation. " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment des rapports d'audition de l'intéressé qu'à la date du 14 mars 2013, M. C... avait expressément indiqué ne plus disposer d'un passeport ; qu'il ne présentait ainsi pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque qu'il se soustraie à l'obligation de quitter le territoire français et le premier juge ne pouvait tenir compte de la production à la barre du passeport de l'intéressé pour annuler la décision prise à son encontre pour considérer que la décision ordonnant le placement de M. C...dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
4. Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les autres moyens de la requête de M.C... ;
5. Considérant que, par arrêté du 19 novembre 2012, régulièrement publié, le préfet du Bas-Rhin a donné à M.B..., signataire de la décision attaquée, secrétaire général de la préfecture, délégation " à l'effet de signer tous arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances administratives diverses relevant des attributions de l'Etat dans le département à l'exception des mesures concernant la défense nationale, des ordres de réquisition du comptable public et des arrêtés de conflit " ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte manque en fait et doit être écarté ;
6. Considérant qu'il ressort de l'ensemble des dispositions du livre V du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger son placement en rétention administrative ; que, par suite, M. C...ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, qui fixent les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979, pour contester ce placement ;
7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 554-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration doit exercer toute diligence à cet effet " ; qu'aux termes du premier paragraphe de l'article 5 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas suivants et selon les voies légales : / (...) f. s'il s'agit de l'arrestation ou de la détention régulières d'une personne pour l'empêcher de pénétrer irrégulièrement dans le territoire, ou contre laquelle une procédure d'expulsion ou d'extradition est en cours " ; qu'aux termes du quatrième paragraphe de l'article 5 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d'introduire un recours devant un tribunal, afin qu'il statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si la détention est illégale " ;
8. Considérant que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui prévoient, d'une part, que l'étranger placé en rétention administrative peut contester cette décision, dans un délai de quarante-huit heures, devant le président du tribunal administratif, qui statue dans un délai de soixante-douze heures, et, d'autre part, que cette mesure privative de liberté ne peut être prolongée au-delà de cinq jours que sur décision du juge des libertés et de la détention, qui statue dans un délai de vingt-quatre heures à compter de sa saisine, sont conformes aux exigences issues de ces stipulations ;
9. Considérant enfin qu'il ressort des pièces du dossier que M. C...a été examiné à deux reprises par deux médecins les 13 et 14 mars 2013 ; que ces médecins ont, au vu de son état de santé, prescrit un traitement qui lui a été administré lors de sa rétention ; qu'il n'est, par suite, pas fondé à soutenir que, compte tenu des pathologies psychiatriques dont il est affecté, le placement en rétention était constitutif d'un traitement contraire aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Bas-Rhin est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Strasbourg a annulé sa décision du 14 mars 2013 plaçant M. C...dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 18 mars 2013 est annulé.
Article 2 : Les conclusions de la requête de M. C...devant le tribunal administratif sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin et au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Strasbourg.
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N° 13NC00738