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30/05/2013 | FRANCE | N°11NC01331

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 30 mai 2013, 11NC01331


Vu la requête, enregistrée le 16 août 2011, complétée par un mémoire enregistré le 16 janvier 2012, présentée pour la société civile immobilière (SCI) Eurise domiciliée s/c Afis consulting, 33 quai Arloing - CS 10036- 69337Lyon cedex 09 par Me Fossier, avocat ;

La SCI Eurise demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0802231 du 16 juin 2011 du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en tant qu'il a rejeté son opposition formée contre le commandement de payer ou de délaisser valant saisie en date du 25 juin 2008 émis à son encontre par le tré

sorier-payeur général de l'Aube lui faisant obligation de payer la somme de 4 190 2...

Vu la requête, enregistrée le 16 août 2011, complétée par un mémoire enregistré le 16 janvier 2012, présentée pour la société civile immobilière (SCI) Eurise domiciliée s/c Afis consulting, 33 quai Arloing - CS 10036- 69337Lyon cedex 09 par Me Fossier, avocat ;

La SCI Eurise demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0802231 du 16 juin 2011 du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en tant qu'il a rejeté son opposition formée contre le commandement de payer ou de délaisser valant saisie en date du 25 juin 2008 émis à son encontre par le trésorier-payeur général de l'Aube lui faisant obligation de payer la somme de 4 190 263,41 euros à raison de compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales dus par M. B...au titre des années 1990, 1991 et 1992 ;

2°) de la décharger de l'obligation de payer résultant de cet acte de poursuite ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 55 000 euros en réparation du préjudice qui lui a été occasionné par les procédures de saisie irrégulières et les frais exposés ;

Elle soutient que :

- le défaut de signification préalable de la poursuite au débiteur principal faisait obstacle à ce que l'administration puisse la poursuivre en qualité de tiers saisi en vue d'obtenir le paiement de la dette de M.B... ; que ce moyen, qui se rattache à l'obligation de payer a été écarté à tort par le juge de l'impôt ; qu'en l'espèce, aucun commandement n'a été régulièrement délivré au débiteur principal préalablement à l'engagement des poursuites à son encontre en qualité de tiers saisi, dès lors que les actes de poursuite destinés au débiteur principal n'ont pas été notifiés à ce dernier aux différentes adresses qui avaient été signifiées à l'administration ;

- elle est fondée à se prévaloir de ce que la prescription de l'action en recouvrement lui est acquise du fait qu'aucun acte régulier interruptif de prescription n'est intervenu à l'égard du débiteur principal depuis le 23 août 2004 ;

- le titre exécutoire dont a fait état la trésorerie en 2008 est faux, puisqu'il ne tenait pas compte des dégrèvements intervenus en 2006 suite à l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Nancy ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 17 novembre 2011, le mémoire en défense présenté par l'administrateur général des finances publiques de l'Aube ; il conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- la saisie immobilière litigieuse a été engagée contre la SCI Eurise, en tant que tiers détenteur, en exécution du droit de suite du Trésor sur un immeuble sis à Toulon qu'elle a acquis, sans qu'il ait été procédé à la purge des hypothèques, sur M.B..., débiteur principal, alors même que le bien était grevé d'une hypothèque légale du Trésor inscrite en 1996 et renouvelée en 2006 ;

- la poursuite a été régulièrement notifiée au débiteur principal à son dernier domicile connu, alors que ses différentes adresses en Belgique étaient toutes obsolètes ;

- la créance du Trésor n'est pas prescrite à l'égard du débiteur principal, compte tenu des nombreux actes interruptifs effectués à son encontre depuis le 16 octobre 1997 ;

- le montant de la créance dont le recouvrement forcé est poursuivi (579 343,86 euros) est justifié compte tenu des dégrèvements intervenus et dès lors, en outre, que le pourvoi en cassation formé devant le Conseil d'Etat n'est pas suspensif ;

Vu, enregistré le 16 janvier 2012, le mémoire en réplique présenté pour la SCI Eurise qui conclut aux mêmes fins que sa requête et, en outre, au retrait de propos de l'administration injurieux ou diffamatoires, selon lesquels M. B...était " en fuite ", subsidiairement à ce que soit constaté que la créance n'était pas certaine ;

Elle soutient :

- que le juge de l'impôt est compétent pour se prononcer, au regard de l'obligation de payer, sur les moyens tirés de l'absence d'information, tant du débiteur principal que du tiers saisi, du renouvellement de l'inscription de l'hypothèque judiciaire qui est intervenu en 2006 ; qu'elle est ainsi fondée à se prévaloir sur le fondement de l'article 1er du décret du 28 novembre 1983 de l'instruction codificatrice de la comptabilité publique du 25 mars 1999 qui exige que le contribuable soit informé par lettre recommandée du renouvellement de l'inscription d'une hypothèque légale du Trésor ; que la poursuite dont elle fait l'objet n'a pas été précédée d'un commandement régulièrement notifié au débiteur principal, dès lors que le dernier domicile connu de l'intéressé n'est pas celui auquel lui a été notifiée la poursuite ;

- que la créance du Trésor se trouve prescrite depuis 2001 et depuis 2008 " de nouveau ", faute pour l'administration d'avoir interrompu la prescription auprès du débiteur par des actes réguliers ;

- que la Trésorerie ne pouvait ignorer les dégrèvements prononcés par la Cour administrative d'appel de Nancy par son arrêt du 8 juin 2006 ; que le titre exécutoire émis deux ans plus tard ne tient pas compte de ces dégrèvements ; qu'il s'agit d'un faux qui doit être annulé purement et simplement ;

Vu, enregistré le 12 mars 2012, le mémoire en réplique présenté par l'administrateur général des finances publiques de l'Aube ; il conclut, comme précédemment au rejet de la requête, par les mêmes moyens ; il soutient en outre que le moyen tiré de l'absence d'information du renouvellement des inscriptions hypothécaires est inopérant ; que les actes interruptifs de prescription n'ont pas fait l'objet de contestations par M. B...dans les délais réglementaires, en conséquence de quoi le moyen est inopérant ; qu'aucun titre exécutoire n'a été émis en 2008 ;

Vu, enregistrés les 2 juillet 2012, 31 janvier 2013 et 29 mars 2013, les mémoires en réplique présentés pour la SCI Eurise ; elle conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens et demande, en outre, que l'indemnité qu'elle sollicite soit portée à 300 000 euros compte tenu des fautes commises par l'administration afin de poursuivre une saisie en violation des droits du tiers saisi ;

Vu, enregistrés les 29 août 2012 et 22 février 2013, les mémoires en défense présentés par l'administrateur général des finances publiques de l'Aube qui conclut, comme précédemment et par les mêmes moyens, au rejet de la requête ;

Vu l'ordonnance du 13 février 2013 fixant la clôture de l'instruction au 6 mars 2013 en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu l'ordonnance du 13 mars 2013 portant réouverture de l'instruction, en application de l'article R. 613-4 du code de justice administrative ;

Vu la lettre du 14 mars 2013 par laquelle les parties ont été informées qu'en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience du 11 avril 2013 et que l'instruction pourrait être close à partir du 2 avril 2013 sans information préalable ;

Vu l'avis d'audience portant clôture de l'instruction immédiate pris le 02 avril 2013 en application de l'article R. 613-2 du code de justice administrative ;

Vu l'ordonnance du 17 avril 2013 portant clôture de l'instruction immédiate, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu, enregistré le 29 avril 2013, le mémoire présenté après la clôture de l'instruction par l'administration générale des finances publiques de l'Aube ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le livre des procédures fiscales, notamment en son article L. 281 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 mai 2013 :

- le rapport de M. Commenville, président de chambre,

- les conclusions de M. Féral, rapporteur public,

1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SCI Eurise, dont Mme B...est gérante, a acquis le 18 octobre 1999, sans procéder à la purge des hypothèques, des biens immobiliers sis à Toulon grevés de l'hypothèque légale du Trésor que lui a vendus M. A... B... ; que les 20 et 25 juin 2008, le Trésorier de Troyes lui a fait notifier par huissier de justice, en sa qualité de tiers détenteur des biens saisis, un commandement de payer ou délaisser valant saisie lui faisant sommation de payer la somme de 4 190 263,41 euros correspondant au montant des impôts sur le revenu, contributions sociales, intérêts moratoires, majorations et frais de poursuite dus par M. B...au titre des années 1990, 1991 et 1992 ; qu'après avoir formé opposition à cet acte de poursuite, la SCI Eurise a porté l'affaire devant le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, qui a limité le montant de son obligation de payer à 2 052 258,41euros ; que la requérante demande la réformation du jugement du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 16 juin 2011 en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ;

Sur les moyens tirés du défaut de signification du commandement attaqué au débiteur principal et du défaut d'information préalable des débiteurs lors du renouvellement de l'inscription de l'hypothèque légale du Trésor :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 281-1 du livre des procédures fiscales : " Les contestations relatives au recouvrement des impôts, taxes, redevances et sommes quelconques dont la perception incombe aux comptables publics compétents mentionnés à l'article L. 252 doivent être adressées à l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites. Les contestations ne peuvent porter que : 1° Soit sur la régularité en la forme de l'acte ; 2° Soit sur l'existence de l'obligation de payer, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués, sur l'exigibilité de la somme réclamée, ou sur tout autre motif ne remettant pas en cause l'assiette et le calcul de l'impôt. Les recours contre les décisions prises par l'administration sur ces contestations sont portés, dans le premier cas, devant le juge de l'exécution (1), dans le second cas, devant le juge de l'impôt tel qu'il est prévu à l'article L. 199. " ;

3. Considérant que les moyens susmentionnés, respectivement tirés du défaut de signification du commandement attaqué au débiteur principal et du défaut d'information préalable du débiteur principal et du tiers saisi lors du renouvellement de l'inscription de l'hypothèque légale du Trésor mettent en cause la régularité des acte de poursuites et, dès lors, ne peuvent être utilement invoqués devant le juge de l'impôt ;

Sur les moyens tirés de la prescription de l'action en recouvrement :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales : " Les comptables publics des administrations fiscales qui n'ont fait aucune poursuite contre un redevable pendant quatre années consécutives à compter du jour de la mise en recouvrement du rôle ou de l'envoi de l'avis de mise en recouvrement sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable. " ; qu'aux termes de l'article R. 281-2 du même livre, alors en vigueur : " La demande prévue par l'article R. 281-1 doit, sous peine de nullité, être présentée au trésorier-payeur général dans un délai de deux mois à partir de la notification de l'acte si le motif invoqué est un vice de forme ou, s'il s'agit de tout autre motif, dans un délai de deux mois après le premier acte qui permet d'invoquer ce motif " ;

5. Considérant, en premier lieu, que si la société requérante soutient que la prescription de l'action en recouvrement lui serait acquise du fait qu'aucun acte régulier interruptif de prescription n'est intervenu à l'égard du débiteur principal depuis le 23 août 2004, il est constant qu'il ne s'est pas écoulé un délai de quatre années consécutives entre le commandement du 23 août 2004 , dont M B...a personnellement accusé réception le 6 septembre 2004, et le commandement présentement frappé d'opposition en date du 25 juin 2008 ; qu'ainsi la créance du trésor n'était pas prescrite à la date de signification du commandement du 25 juin 2008 ;

6. Considérant, en second lieu, qu'il résulte des dispositions précitées de l'article R. 281-2, alors en vigueur du livre des procédures fiscales que, dans la mesure où le motif tiré de la prescription de l'action en recouvrement n'a pas été victorieusement invoqué contre le commandement susmentionné du 23 août 2004 contre lequel M. B...avait formé opposition, l'opposante ne peut utilement contester l'acte du 25 juin 2008 par le motif tiré de ce que la prescription de l'action en recouvrement n'aurait pas été valablement interrompue par les poursuites antérieures à l'acte interruptif de prescription du 23 août 2004 ;

Sur le montant de la créance du Trésor :

7. Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction et que la société requérante n'établit nullement que l'obligation de payer résultant du commandement litigieux, dont le montant a été limité à 2 052 258,41 euros par les premiers juges, porterait encore sur des sommes qui auraient été allouées en dégrèvement à M. B...par arrêt de la Cour de céans en date du 8 juin 2006 et par décision du Conseil d'Etat en date du 18 mai 2009 ; qu'en outre, en tout état de cause, d'une part, la présentation d'un pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat n'a pas pour effet de suspendre l'exigibilité de l'impôt concerné et, d'autre part, la société requérante ne fait état d'aucune décision du Conseil d'Etat, intervenue à la date du présent arrêt, qui aurait eu pour effet de limiter le montant de la créance de M. B...en paiement de laquelle elle est poursuivie ;

Sur la demande d'indemnité :

8. Considérant qu'il ne résulte pas de ce qui est dit ci-dessus que l'administration aurait commis une faute dans la poursuite du recouvrement forcé de la dette d'impôts de M. B...à l'encontre de la SCI Eurise en tant que tiers détenteur ; que, dès lors, la demande d'indemnité formée par la société requérante au titre de la réparation de son préjudice et des frais exposés n'est pas fondée ;

Sur les conclusions de la requérante tendant à la suppression d'écrits injurieux outrageants ou diffamatoires :

9. Considérant que, en vertu des dispositions de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 reproduites à l'article L. 741-2 du code de justice administrative, les cours administratives d'appel peuvent, dans les causes dont elles sont saisies, prononcer, même d'office, la suppression des écrits injurieux, outrageants ou diffamatoires ;

10. Considérant que le passage dont la suppression est demandée par la SCI Eurise, qui n'est au demeurant que la reproduction d'un " attendu " du jugement du 19 mai 2004 du Tribunal de grande instance de Troyes, n'excède pas le droit à la libre discussion et ne présente pas un caractère injurieux, outrageant ou diffamatoire ; que les conclusions tendant à sa suppression doivent par suite être rejetées ;

11. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la SCI Eurise n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa le surplus des conclusions de sa demande ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SCI Eurise est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI EURISE et à la Direction Départementale des Finances Publiques de l'Aube.

2

11NC01331


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11NC01331
Date de la décision : 30/05/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-01-05 Contributions et taxes. Généralités. Recouvrement.


Composition du Tribunal
Président : M. COMMENVILLE
Rapporteur ?: M. Bernard COMMENVILLE
Rapporteur public ?: FERAL
Avocat(s) : SELARL FOSSIER NOURDIN

Origine de la décision
Date de l'import : 09/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2013-05-30;11nc01331 ?
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