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14/03/2013 | FRANCE | N°11NC01802

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 14 mars 2013, 11NC01802


Vu l'ordonnance du 9 novembre 2011, enregistrée le 16 novembre 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Nancy sous le n° 11NC01802, par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à cette Cour la requête présentée pour la Corporation obligatoire des patrons et entrepreneurs électriciens du Bas-Rhin, dont le siège est situé 2 rue de Copenhague à Schiltigheim (67300), par la SCP d'avocats Rocheteau

et Uzan-Sarano ;

Vu la requête, enregistrée le 16 novembre 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Nancy, complé

tée par les mémoires enregistrés les 16 novembre 2011 et 28 mars 2012, pr...

Vu l'ordonnance du 9 novembre 2011, enregistrée le 16 novembre 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Nancy sous le n° 11NC01802, par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à cette Cour la requête présentée pour la Corporation obligatoire des patrons et entrepreneurs électriciens du Bas-Rhin, dont le siège est situé 2 rue de Copenhague à Schiltigheim (67300), par la SCP d'avocats Rocheteau

et Uzan-Sarano ;

Vu la requête, enregistrée le 16 novembre 2011 au greffe de la Cour administrative d'appel de Nancy, complétée par les mémoires enregistrés les 16 novembre 2011 et 28 mars 2012, présentée pour la Corporation obligatoire des patrons et entrepreneurs électriciens du Bas-Rhin ;

La Corporation obligatoire des patrons et entrepreneurs électriciens du Bas-Rhin demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0801047 du 1er juin 2011 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg l'a condamnée à verser à M. A...la somme de 4 654 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 3 septembre 2007, correspondant au remboursement de cotisations indûment perçues ;

2°) de rejeter la requête de première instance de M. A...;

3°) de mettre à la charge de M. A...la somme de 3 000 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le tribunal était incompétent pour connaître d'un litige portant sur une demande de restitution de cotisations déjà versées à une corporation professionnelle obligatoire ; le préfet statue en premier et dernier ressort, et sa décision aurait donc dû être portée devant le Conseil d'Etat, par la voie du pourvoi en cassation ;

- le jugement est irrégulier : sa minute ne fait pas apparaître les signatures du président de la formation de jugement, du rapporteur et du greffier ; il ne vise pas la totalité des mémoires adressés par la Corporation ; il est insuffisamment motivé, car il ne précise pas suffisamment pourquoi il y a lieu de condamner la Corporation à reverser 80 % des cotisations prétendument perçues à tort durant la période 1993-2006, alors que M. A...n'avait indiqué dans aucun mémoire quelle part de son activité globale représentait son activité d'électricien ;

- c'est à tort que le tribunal a estimé que l'activité d'électricien de M. A...ne représentait que 20 % de ses revenus, car il s'agit de l'activité principale de l'intéressé ; le tribunal n'a pas recherché si, pendant la période 1993-2006, la part de revenus que l'intéressé a tiré de son activité d'électricien correspondait bien à seulement 20 % de son activité globale ; cette part a vraisemblablement varié au cours de la période en cause, et le tribunal ne pouvait pas appliquer un pourcentage forfaitaire et uniforme sur cette période ;

- si la prescription quadriennale n'était pas applicable en l'espèce, la prescription quinquennale de l'article 2277 du code civil était applicable, dès lors qu'il s'agissait de créances périodiques détenues sur un établissement public dépourvu d'un comptable public, et que la demande, présentée le 3 septembre 2007, concerne la restitution de cotisations versées entre 1993 et 2006 ; la demande est donc atteinte de prescription au titre des cotisations versées avant le 3 septembre 2002 ;

- M. A...a commis une négligence en n'informant pas, durant plus de dix ans, la Corporation qu'il était également affilié à une autre corporation, et cette négligence justifie un abattement de 50 % sur la restitution de cotisations indues ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 mai 2012, présenté pour M. B...A..., demeurant..., par Me Fady, qui conclut au rejet de la requête de la Corporation obligatoire des patrons et entrepreneurs électriciens du Bas-Rhin et à ce que soit mise à la charge de celle-ci une somme de 1 500 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il fait valoir que :

- le tribunal administratif de Strasbourg était compétent pour connaître de sa demande ;

- il a été inscrit autoritairement à deux corporations, alors que son activité d'électricien était secondaire par rapport à son activité principale de ferblantier ; de 1993 à 2006, il a donc cotisé indûment à la corporation obligatoire des patrons et entrepreneurs électriciens du Bas-Rhin, alors qu'il ne relevait, compte tenu de son activité, que de celle des ferblantiers ;

- les dispositions des articles 100 f et 100 s du code local des professions méconnaissent le droit à la liberté d'association négative consacré par l'article 11 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 1er février 2013, présenté pour la Corporation obligatoire des patrons et entrepreneurs électriciens du Bas-Rhin, qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre que la déclaration d'inconstitutionnalité ne règle pas tous les aspects du litige et ne saurait à elle seule fonder la demande de restitution des cotisations versées par M.A..., compte tenu de la jurisprudence sur l'enrichissement sans cause ;

Vu le mémoire en duplique, enregistré le 6 février 2013, présenté pour M.A..., qui conclut dans le sens de ses précédentes écritures, et demande en outre la condamnation de la Corporation obligatoire des patrons et entrepreneurs électriciens du Bas-Rhin à lui verser la somme de 6 269,41 euros en remboursement des cotisations perçues, assortie des intérêts légaux à compter de l'arrêt à intervenir, et de mettre à la charge de la requérante une somme de 3 000 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code local des professions ;

Vu le code civil ;

Vu la décision n° 2012-285 QPC du 30 novembre 2012 du Conseil constitutionnel ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 février 2013 :

- le rapport de M. Favret, premier conseiller,

- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,

- et les observations de Me Fady, avocat de M.A... ;

1. Considérant que la Corporation obligatoire des patrons et entrepreneurs électriciens du Bas-Rhin demande à la Cour d'annuler le jugement du 1er juin 2011 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg l'a condamnée à verser à M. A...la somme de

4 654 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 3 septembre 2007, correspondant au remboursement de cotisations indûment perçues ;

Sur la compétence du tribunal administratif :

2. Considérant, d'une part, que si le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort, en vertu des dispositions du 2ème alinéa de l'article R. 811-1 du code de justice administrative, dans les litiges définis au 7° de l'article R. 222-13 du même code, notamment les actions indemnitaires, lorsque le montant des indemnités demandées n'excède pas un montant fixé à 10 000 euros, les conclusions de M. A...devant le tribunal administratif de Strasbourg tendent au versement de cotisations indûment versées à un établissement public et ne revêtent pas un caractère indemnitaire au sens du 7° de l'article R. 222-13 ;

3. Considérant, d'autre part, qu'en application de l'article R. 312-10 du code de justice administrative, les litiges relatifs aux législations régissant les activités professionnelles relèvent, lorsque la décision attaquée n'a pas un caractère réglementaire, de la compétence du tribunal administratif dans le ressort duquel se trouve, soit l'établissement ou l'exploitation dont l'activité est à l'origine du litige, soit le lieu d'exercice de la profession ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la Corporation obligatoire des patrons et entrepreneurs électriciens du Bas-Rhin n'est pas fondée à soutenir que le tribunal administratif de Strasbourg était incompétent pour connaître du recours introduit par

M. A...;

Sur la régularité du jugement attaqué :

5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience " ; que, contrairement à ce que soutient la Corporation obligatoire des patrons et entrepreneurs électriciens du Bas-Rhin, l'original de la minute du jugement attaqué fait apparaître les signatures du président de la formation de jugement, du rapporteur et du greffier, alors même que la copie adressée aux parties ne les fait effectivement pas apparaître ; que le moyen sera donc écarté ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision... contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application... " ; que la Corporation obligatoire des patrons et entrepreneurs électriciens du Bas-Rhin ne fait pas mention du ou des mémoires communiqués au tribunal administratif et qui, selon elle, n'auraient pas été visés par le jugement ; que, par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que le tribunal a entaché son jugement d'une irrégularité de nature à entraîner son annulation ;

7. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés " ; qu'il résulte de la lecture du jugement entrepris que les premiers juges ont précisé, après avoir mentionné les dispositions applicables du code local des professions, que " M. A...expose sans être utilement contredit sur ce point que son activité d'électricien représente 20% des revenus qu'il tire de son activité globale ", " que sa cotisation auprès de la corporation défenderesse ne pouvait dès lors, en application des dispositions précitées de l'article 100 s du code local des professions, dépasser cette proportion ", et qu'il y avait lieu en conséquence " de condamner celle-ci à reverser 80 % des cotisations perçues par elle à tort durant la période susmentionnée " ; que cette motivation est suffisante au sens des dispositions de l'article

L. 9 ; que, par suite, la Corporation obligatoire des patrons et entrepreneurs électriciens du Bas-Rhin n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'une insuffisance de motivation de nature à entraîner son annulation ;

Sur le fond :

8. Considérant qu'aux termes des dispositions applicables au litige de l'article 100 f du code local des professions : " Sont affiliés d'office à la corporation obligatoire, les personnes qui exploitent à titre sédentaire l'une des activités pour lesquelles la corporation a été créée (...) Les exploitants ayant plusieurs activités artisanales relèvent de la corporation obligatoire correspondant à leurs activités principales (...) " ; qu'aux termes de l'article

100 s du même code : " Les exploitants qui, outre l'activité artisanale à raison de laquelle ils sont affiliés à la corporation, exercent encore une autre activité artisanale, ou une activité commerciale, ne seront soumis à la cotisation corporative, qu'eu égard à la part de revenus qu'ils tirent de l'exploitation artisanale pour laquelle ils sont affiliés " ; que, par décision

2012-285 QPC du 30 novembre 2012, le Conseil constitutionnel a jugé que ces dispositions étaient contraires à la Constitution ; qu'il s'ensuit que la Corporation obligatoire des patrons et entrepreneurs électriciens du Bas-Rhin n'était fondée, ni à affilier d'office

M. A...en application de l'article 100 f du code local des professions, ni à lui imposer le versement de la cotisation corporative prévue par l'article 100 s alinéa 3 du même code ; que c'est donc à tort que le Tribunal administratif de Strasbourg s'est fondé sur ces dispositions pour condamner la Corporation obligatoire des patrons et entrepreneurs électriciens du Bas-Rhin à reverser à M. A...80 % des cotisations perçues par elle à tort durant la période en cause, soit la somme de 4654 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la demande du 3 septembre 2007 ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article 2277 du code civil, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Se prescrivent par cinq ans les actions en paiement : / Des salaires ; / Des arrérages des rentes perpétuelles et viagères et de ceux des pensions alimentaires /Des loyers et des fermages / Des intérêts des sommes prêtées, et généralement de tout ce qui est payable par année ou à des termes périodiques plus courts " ; que la Corporation obligatoire des patrons et entrepreneurs électriciens du Bas-Rhin ne saurait utilement se prévaloir de ces dispositions, les sommes en cause étant, ainsi qu'il a été dit plus haut, privées de tout fondement légal, en application de la décision du Conseil constitutionnel du 30 novembre 2012 ;

10. Considérant qu'il y a donc lieu de condamner la Corporation obligatoire des patrons et entrepreneurs électriciens du Bas-Rhin à reverser à M. A...l'ensemble des cotisations perçues par elle à tort durant la période 1993-2006, soit la somme de 5 818 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la demande en date du 3 septembre 2007 ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la Corporation obligatoire des patrons et entrepreneurs électriciens du Bas-Rhin n'est pas fondée à se plaindre de que le Tribunal administratif de Strasbourg, par le jugement attaqué, l'a condamnée à verser à

M. A...les cotisations perçues par elle à tort durant la période 1993-2006 ;

Sur les conclusions au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M.A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la Corporation obligatoire des patrons et entrepreneurs électriciens du Bas-Rhin demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la Corporation obligatoire des patrons et entrepreneurs électriciens du Bas-Rhin une somme de 1 500 euros à verser à M. A...au titre des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 0801047 du 1er juin 2011 du Tribunal administratif de Strasbourg est annulé.

Article 2 : La Corporation obligatoire des patrons et entrepreneurs électriciens du Bas-Rhin est condamnée à verser à M. A...les cotisations perçues par elle à tort durant la période 1993-2006, soit la somme de 5 818 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la demande en date du 3 septembre 2007.

Article 3 : La Corporation obligatoire des patrons et entrepreneurs électriciens du Bas-Rhin versera à M. A...une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Article 4 : Les conclusions de la Corporation obligatoire des patrons et entrepreneurs électriciens du Bas-Rhin tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la Corporation obligatoire des patrons et entrepreneurs électriciens du Bas-Rhin et à M. B...A....

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N° 11NC01802


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11NC01802
Date de la décision : 14/03/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

06-07 Alsace-Moselle. Professions - Commerce - Industrie.


Composition du Tribunal
Président : Mme HERBELIN
Rapporteur ?: M. Jean-Marc FAVRET
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : SCP F. ROCHETEAU ET C. UZAN-SARANO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2013-03-14;11nc01802 ?
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