La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/02/2013 | FRANCE | N°12NC00529

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 07 février 2013, 12NC00529


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 26 mars 2012, complétée par des mémoires en production en date des 10 avril et 5 décembre 2102, présentée pour la commune de Lusigny-sur-Barse, représentée par son maire en exercice, élisant domicile..., par Me Mailhé, avocat ;

La commune de Lusigny-sur-Barse demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000283 en date du 31 janvier 2012 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a, à la demande de la société Pierralain et de M. et MmeB..., annulé la délibération en date du 18 décembr

e 2009 par laquelle son conseil municipal a approuvé le projet de révision simplif...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 26 mars 2012, complétée par des mémoires en production en date des 10 avril et 5 décembre 2102, présentée pour la commune de Lusigny-sur-Barse, représentée par son maire en exercice, élisant domicile..., par Me Mailhé, avocat ;

La commune de Lusigny-sur-Barse demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000283 en date du 31 janvier 2012 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a, à la demande de la société Pierralain et de M. et MmeB..., annulé la délibération en date du 18 décembre 2009 par laquelle son conseil municipal a approuvé le projet de révision simplifiée n°1 de son plan d'occupation des sols ;

2°) de rejeter la demande de la société Pierralain et de M. et MmeB... ;

3°) de mettre solidairement à la charge de la société Pierralain et de M. et Mme B... la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune de Lusigny-sur-Barse soutient que :

- les motifs d'annulation de la décision litigieuse sont entachés d'une appréciation erronée des faits dès lors que le projet Leclerc Express est justifié par une expansion démographique significative et la composition de la population de la commune ; les parcelles n'étaient plus à usage agricole à la date de la délibération litigieuse ;

- des considérations d'intérêt général ont justifié le recours à la procédure simplifiée, à savoir renforcer et diversifier l'offre commerciale dans une zone de chalandise jusqu'alors dépendante de l'agglomération troyenne ; le projet s'est accompagné de la création nette de neuf emplois et a permis le recours aux prestataires locaux ; le projet aura des incidences positives pour l'emploi local et les finances publiques locales ;

- elle n'a pas méconnu l'article L. 123-19 du code de l'urbanisme et n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en recourant à la procédure de révision simplifiée ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 15 octobre 2012, présenté pour la SARL Pierralain et M. et Mme A...B..., gérants et associés, ayant son siège social 3 rue Georges Clemenceau à Lusigny-sur-Barse (10270), par Me Waymel, avocat ;

Ils concluent au rejet de la requête et à mettre à la charge de la commune de Lusigny-sur-Barse la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que :

- la délibération litigieuse est entachée de détournement de pouvoir ;

- l'opération projetée, dont le seul objectif est de permettre l'implantation d'une surface commerciale, ne présente pas un caractère d'intérêt général, et les arguments développés en appel tirés de l'augmentation de la population communale entre 1999 et 2009, des aménagements routiers et de la suppression de terres agricoles ne peuvent être retenus ;

- la révision ne prend pas en compte les considérations liées à l'urbanisme et à la proximité du parc naturel régional de la forêt d'Orient, et n'est pas compatible avec les objectifs définis par la charte du parc naturel régional de la forêt d'orient et de l'opération de restructuration de l'artisanat et du commerce ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 janvier 2013 :

- le rapport de Mme Steinmetz-Schies, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Ghisu-Deparis, rapporteur public ;

1. Considérant que, pour annuler la délibération en date du 18 décembre 2009 par laquelle le conseil municipal de la commune de Lusigny-sur-Barse a décidé d'approuver le projet de révision simplifié n° 1 de son plan d'occupation des sols, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne s'est fondé sur le motif tiré de ce que l'opération projetée, qui tend à titre principal à l'implantation d'une moyenne surface commerciale, ne peut être regardée comme présentant un intérêt général de nature à justifier une révision simplifiée, dès lors que le terrain choisi présente des contraintes en matière de sécurité publique, qu'il n'est pas établi que le projet répondrait à un besoin réel du canton et de la commune en moyenne surface commerciale ni qu'il aurait une incidence positive pour l'emploi local et qu'il comporte un impact négatif sur les terres agricoles ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme issu de l'article 37 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 : "Lorsqu'elle annule pour excès de pouvoir un acte intervenu en matière d'urbanisme ou en ordonne la suspension, la juridiction administrative se prononce sur l'ensemble des moyens de la requête qu'elle estime susceptibles de fonder l'annulation ou la suspension, en l'état du dossier" ; qu'en vertu de ces dispositions il appartient au juge d'appel, saisi d'un jugement par lequel un tribunal administratif a prononcé l'annulation d'un acte intervenu en matière d'urbanisme en retenant plusieurs moyens, de se prononcer sur le bien-fondé de tous les moyens d'annulation retenus au soutien de leur décision par les premiers juges et d'apprécier si l'un au moins de ces moyens justifie la solution d'annulation ; que, dans ce cas, le juge d'appel n'a pas à examiner les autres moyens de première instance ; que dans le cas où il estime en revanche qu'aucun des moyens retenus par le Tribunal administratif n'est fondé, le juge d'appel, saisi par l'effet dévolutif des autres moyens de première instance, examine ces moyens ; qu'il lui appartient de les écarter si aucun d'entre eux n'est fondé et, à l'inverse, en application des dispositions précitées de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, de se prononcer, si un ou plusieurs d'entre eux lui paraissent fondés, sur l'ensemble de ceux qu'il estime, en l'état du dossier, de nature à confirmer, par d'autres motifs, l'annulation prononcée par les premiers juges ;

En ce qui concerne le moyen tiré de l'intérêt général de nature à justifier une révision simplifiée :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'urbanisme: " Les schémas de cohérence territoriale, les plans locaux d'urbanisme et les cartes communales déterminent les conditions permettant d'assurer : 1° L'équilibre entre le renouvellement urbain, un développement urbain maîtrisé, le développement de l'espace rural, d'une part, et la préservation des espaces affectés aux activités agricoles et forestières et la protection des espaces naturels et des paysages, d'autre part, en respectant les objectifs du développement durable (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 123-13 du même code, tel qu'en vigueur à la date de la délibération litigieuse : " Lorsque la révision a pour seul objet la réalisation d'une construction ou d'une opération, à caractère public ou privé, présentant un intérêt général notamment pour la commune ou toute autre collectivité, elle peut, à l'initiative du maire, être effectuée selon une procédure simplifiée. La révision simplifiée donne lieu à un examen conjoint des personnes publiques associées mentionnées à l'article L. 123-9. Le dossier de l'enquête publique est complété par une notice présentant la construction ou l'opération d'intérêt général. Les dispositions du présent alinéa sont également applicables à un projet d'extension des zones constructibles qui ne porte pas atteinte à l'économie générale du projet d'aménagement et de développement durable et ne comporte pas de graves risques de nuisance.(...) " ; que l'existence d'un intérêt général de nature à justifier le recours à la procédure de révision simplifiée du plan local d'urbanisme doit être appréciée au regard de l'ensemble des objectifs économiques, sociaux et urbanistiques poursuivis par les collectivités publiques ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la révision simplifiée du plan d'occupation des sols de la commune de Lusigny-sur-Barse a pour objet d'ouvrir à l'urbanisation le site " Champ Rond ", appartenant à la commune, classé en zone N (zone exclusivement réservée aux constructions nécessaires à l'activité agricole), afin de permettre l'implantation d'une enseigne commerciale de moyenne surface à l'entrée de la commune ; que la commune soutient que le projet d'intérêt général, est motivé d'une part, par l'expansion démographique significative de la commune entre 1999 et 2006 (qui est passée de 1450 à 1657 habitants) et du canton ( qui est passée de 8318 à 9147 habitants) avec la construction de deux lotissements, d'autre part, par la circonstance que les parcelles en cause sont propriétés de la commune car acquises en vue de leur réaffectation à des activités commerciales, et enfin que ledit projet ne portera pas atteinte aux commerces individuels de Lusigny-sur-Barse, créera neuf emplois, sera en partie approvisionné par des producteurs et transporteurs locaux, et, en renforçant le commerce de proximité, aura une incidence positive pour l'emploi local et les finances publiques locales ;

5. Considérant qu'il ressort toutefois tant du rapport de présentation de l'enquête publique que des conclusions motivées du commissaire enquêteur, que la commune de Lusigny-sur-Barse compte déjà sept commerces (dont un commerce d'alimentation générale sous l'enseigne " Carrefour express ", une boulangerie-pâtisserie, deux boucherie-charcuterie, un commerce d'antiquité brocante, une fleuriste, un magasin de prêt-à-porter), soit le tiers des commerces du canton et que des craintes légitimes ont été exprimées par la population pour la sauvegarde des espaces naturels, la sécurité aux abords du collège situé à proximité et la pérennité des commerces du centre ville ; que, par suite, eu égard à son incidence négative sur l'entrée du bourg, la modification des accès du village, la modification des flux et passages dans la commune à proximité du collège, la densité commerciale de la zone de chalandise, son influence paysagère dans une zone naturelle d'intérêt écologique floristique et faunistique de type 1 (à savoir les prairies des vallées de la Barse et de la Boderonne entre Courteranges et Marolles-les-Bailly) située au sein du parc naturel régional de la forêt d'Orient, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'implantation ainsi envisagée présente un caractère d'intérêt général justifiant le recours à la révision simplifiée du plan d'occupation des sols ; que, par suite, c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé que la décision litigieuse méconnaissait l'article L. 123-13 du code de l'urbanisme ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que la commune de Lusigny-sur-Barse n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement n° 1000283 en date du 31 janvier 2012, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a, à la demande de la société Pierralain et de M. et MmeB..., annulé la délibération en date du 18 décembre 2009 par laquelle la commune de Lusigny-sur-Barse a approuvé le projet de révision simplifié n° 1 de son plan d'occupation des sols ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Lusigny-sur-Barse une somme de 1 500 euros à verser solidairement à la SARL Pierralain et à M. et Mme B...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la commune de Lusigny-sur-Barse est rejetée.

Article 2 : La commune de Lusigny-sur-Barse versera solidairement à la SARL Pierralain et à M. et Mme A...B...une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Lusigny-sur-Barse, à la SARL Pierralain, et à M. et Mme A...B....

''

''

''

''

2

12NC00529


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12NC00529
Date de la décision : 07/02/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01-01-02-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Plans d'aménagement et d'urbanisme. Plans d'occupation des sols et plans locaux d'urbanisme. Légalité des plans. Modification et révision des plans. Procédures de révision.


Composition du Tribunal
Président : M. VINCENT
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre STEINMETZ-SCHIES
Rapporteur public ?: Mme GHISU-DEPARIS
Avocat(s) : WAYMEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2013-02-07;12nc00529 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award