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05/07/2012 | FRANCE | N°11NC01351

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 05 juillet 2012, 11NC01351


Vu la requête, enregistrée le 19 août 2011, présentée pour M. Serop A, demeurant CADA 2 avenue de la Gare Mont Saint Martin (54350), par Me Grosset ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100748 du 19 juillet 2011 par lequel Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Meurthe-et-Moselle en date du 31 mars 2011 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et fixant le pays à destination duquel il est susceptible d'être re

conduit ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de Meurthe-et-Moselle en date du 31...

Vu la requête, enregistrée le 19 août 2011, présentée pour M. Serop A, demeurant CADA 2 avenue de la Gare Mont Saint Martin (54350), par Me Grosset ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100748 du 19 juillet 2011 par lequel Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Meurthe-et-Moselle en date du 31 mars 2011 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et fixant le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de Meurthe-et-Moselle en date du 31 mars 2011 ;

3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle de lui délivrer un titre de séjour ou une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil, sous réserve de la renonciation au bénéfice de l'aide juridictionnelle en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'irrégularité dès lors qu'il n'a pas fait droit à ses conclusions tendant au sursis à statuer ;

- l'auteur de l'arrêté attaqué était incompétent ;

- les dispositions de l'article L. 511-1 I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont incompatibles avec les articles 7 et 12 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;

- la décision contestée n'est pas suffisamment motivée ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'erreur dans l'appréciation de sa situation personnelle ;

- en fixant un délai de départ volontaire de trente jours le préfet n'a pas tenu compte de sa situation personnelle et familiale ;

- le préfet a commis une erreur d'appréciation sur sa situation personnelle dès lors qu'il s'est senti lié par les décisions de l'office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile et qu'il n'a pas pris en compte les risques encourus en cas de retour en Arménie ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, les mémoires en défense, enregistrés les 14 et 29 novembre 2011, présentés par le préfet de Meurthe-et-Moselle, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- la décision contestée est suffisamment motivée au regard de l'article 12 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;

- il n'est pas justifié d'une atteinte à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- pour les autres moyens, il s'en remet à ses observations présentées devant le tribunal administratif ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, en date 19 janvier 2012, accordant à M. A le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 juin 2012 :

- le rapport de M. Trottier, président ;

Sur les conclusions tendant au sursis à statuer :

Considérant que, si le requérant sollicite, par l'intermédiaire de son conseil, le bénéfice de l'aide juridictionnelle et, dans l'attente, le sursis à statuer sur son appel, par décision du 19 janvier 2012, le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Nancy a accordé à M. A le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, dès lors, ses conclusions tendant au sursis à statuer sont devenues sans objet ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 susvisée : " Dans les cas d'urgence, sous réserve de l'application des règles relatives aux commissions ou désignations d'office, l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d'aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président... " ;

Considérant qu'il ressort des visas du jugement attaqué que M. A s'est vu accorder, en application des dispositions précitées de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991, l'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle ; qu'ainsi, le requérantA, qui a bénéficié des services d'un conseil, n'a pas été privé du droit constitutionnellement garanti de toute personne à un recours juridictionnel effectif ; que, dès lors, il n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué, qui n'a pas fait droit à ses conclusions tendant au sursis à statuer, serait entaché d'irrégularité ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant, en premier lieu, qu'à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'arrêté du préfet de la Meurthe-et-Moselle en date du 31 mars 2011, M. A A reprend en appel les moyens soulevés devant le Tribunal administratif de Nancy et tirés de l'incompétence du signataire de l'acte, de l'insuffisante motivation de ce dernier et de l'erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les premiers juges auraient, par les motifs qu'ils ont retenus et qu'il y a lieu pour la Cour d'adopter, commis une erreur en écartant ces moyens ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 7 de la directive 200/115/CE susvisée : " 1. La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 et 4. Les États membres peuvent prévoir dans leur législation nationale que ce délai n'est accordé qu'à la suite d'une demande du ressortissant concerné d'un pays tiers. Dans ce cas, les États membres informent les ressortissants concernés de pays tiers de la possibilité de présenter une telle demande. Le délai prévu au premier alinéa n'exclut pas la possibilité, pour les ressortissants concernés de pays tiers, de partir plus tôt. 2. Si nécessaire, les États membres prolongent le délai de départ volontaire d'une durée appropriée, en tenant compte des circonstances propres à chaque cas, telles que la durée du séjour, l'existence d'enfants scolarisés et d'autres liens familiaux et sociaux (...) " ; qu'aux termes de l'article 12 de cette directive : " 1. Les décisions de retour et, le cas échéant, les décisions d'interdiction d'entrée ainsi que les décisions d'éloignement sont rendues par écrit, indiquent leurs motifs de fait et de droit et comportent des informations relatives aux voies de recours disponibles " ;

Considérant que la motivation de l'obligation de quitter le territoire français se confond avec celle du refus ou du retrait de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus ou ce retrait est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, de mention spécifique pour respecter les exigences de l'article 12 de la directive du 16 décembre 2008 précité ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du premier alinéa du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée: " L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa " ; qu'aux termes du troisième alinéa du même I : " L'étranger dispose, pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, d'un délai d'un mois à compter de sa notification. Passé ce délai, cette obligation peut être exécutée d'office par l'administration " ;

Considérant, que ces dispositions laissent, de façon générale, un délai d'un mois pour le départ volontaire de l'étranger qui fait l'objet d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français ; qu'un tel délai d'un mois s'entend comme une période minimale de trente jours, telle que prévue par l'article 7 de la directive à titre de limite supérieure du délai devant être laissé pour un départ volontaire ; que les dispositions de l'article L. 511-1 ne font pas obstacle à ce que l'autorité administrative prolonge, le cas échéant, le délai de départ volontaire d'une durée appropriée pour faire bénéficier les étrangers dont la situation particulière le nécessiterait, de la prolongation prévue par le paragraphe 2 de l'article 7 de la directive ; que, dans ces conditions, les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont compatibles avec les objectifs des articles 7 et 8 de la directive du 16 décembre 2008 ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'il ressort des termes mêmes de l'arrêté attaqué que le préfet a considéré qu'aucune circonstance ne justifiait de prolonger le délai de départ volontaire au-delà de trente jours ; que M. A, qui ne s'était pas prévalu de son état de santé et dont les jeunes enfantsA étaient scolarisés en maternelle depuis peu de temps, n'établit pas que le délai de départ volontaire qui lui a été ainsi accordé n'aurait pas été approprié à sa situation à la date de la décision en litige ;

Considérant, en dernier lieu, que si M. A, dont la demande d'asile a été rejetée par l'office français de protection des réfugiés et apatrides par décision du 19 février 2009, et par la Cour nationale du droit d'asile par une décision du 21 juin 2010, soutient qu'un retour en Arménie, l'exposerait à des risques pour sa vie et sa liberté, il n'apporte aucun élément précis et circonstancié de nature à établir la réalité et la gravité des menaces auxquelles il serait personnellement exposé en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir qu'en prenant la décision contestée, le préfet de la Meurthe-et-Moselle n'aurait pas apprécié les risques auxquels il pourrait être exposé et se serait senti lié par les décisions prises par l'office français de protection des réfugiés et apatrides et par la Cour nationale du droit d'asile ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Meurthe-et-Moselle en date du 31 mars 2011 ;

Sur les conclusions aux fins d'injonctions :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions aux fins d'annulation présentées par M. A n'implique aucune mesure d'exécution ; que les conclusions du requérant tendant à ce que la Cour enjoigne le préfet de Meurthe-et-Moselle de lui délivrer un titre de séjour ou une autorisation provisoire de séjour ne peuvent, dès lors, être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du Code de justice administrative :

Considérant que les dispositions susvisées font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, à verser à Me Grosset une somme quelconque au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A et au ministre de l'intérieur.

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N° 11NC01351


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11NC01351
Date de la décision : 05/07/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. LAURENT
Rapporteur ?: M. Thierry TROTTIER
Rapporteur public ?: Mme DULMET
Avocat(s) : SELARL GUITTON et GROSSET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2012-07-05;11nc01351 ?
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