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07/06/2012 | FRANCE | N°11NC00510

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 07 juin 2012, 11NC00510


Vu la requête, enregistrée le 25 mars 2011, présentée pour le CENTRE HOSPITALIER GENEVIEVE DE GAULLE ANTHONIOZ, représenté par son président en exercice, ayant son siège rue Albert Schweitzer à Saint Dizier (52115), par Me Fouré, avocat ;

Le CENTRE HOSPITALIER GENEVIEVE DE GAULLE ANTHONIOZ demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802829 du 20 janvier 2011 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne l'a condamné à verser à la société Eurovia Champagne Ardenne une somme de 239 064,91 euros assortie des intérêts au taux légal à compt

er du 20 novembre 2007 ainsi qu'une somme de 656,11 euros au titre des intérêts mo...

Vu la requête, enregistrée le 25 mars 2011, présentée pour le CENTRE HOSPITALIER GENEVIEVE DE GAULLE ANTHONIOZ, représenté par son président en exercice, ayant son siège rue Albert Schweitzer à Saint Dizier (52115), par Me Fouré, avocat ;

Le CENTRE HOSPITALIER GENEVIEVE DE GAULLE ANTHONIOZ demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802829 du 20 janvier 2011 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne l'a condamné à verser à la société Eurovia Champagne Ardenne une somme de 239 064,91 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 novembre 2007 ainsi qu'une somme de 656,11 euros au titre des intérêts moratoires liés à la situation n° 14 ;

2°) de rejeter la demande de la société Eurovia Champagne Ardenne ;

3°) de mettre à la charge des sociétés Eurovia Champagne Ardenne et Screg-Est une somme de 4 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier, car les premiers juges ont inversé la charge de la preuve et ont insuffisamment motivé leur décision ;

- c'est à juste titre qu'il a fait application des dispositions des articles 15 et 16 du CCAG et de l'article 3.3.3.2 du CCAP travaux dès lors que le litige porte sur une diminution de la masse de travaux initiale ;

- la contestation du groupement selon laquelle l'article 118 du code des marchés publics ne permettait d'édicter une décision de poursuivre que lorsque le montant des travaux exécutés va atteindre le montant initialement prévu du marché est inopérante ;

- lorsqu'il y a diminution de la masse de travaux, le cocontractant ne peut être indemnisé que si cette diminution excède la limite de 10% stipulée par le CCAP, et cela même si le prix est global et forfaitaire ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 juillet 2011, présenté pour la société Eurovia Champagne Ardenne, dont le siège social est rue Louis Freycinet à Saint-André-les-Vergers (10120), et la société Screg-Est, ayant son siège social 44 boulevard de la Mothe à Nancy (54000), par Me Guimet, avocat ;

Elles concluent au rejet de la requête et demandent que soit mise à la charge du CENTRE HOSPITALIER GENEVIEVE DE GAULLE ANTHONIOZ la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elles soutiennent que les premiers juges ont régulièrement fait droit à leur demande sans renversement de la charge de la preuve ni défaut de motivation; la circonstance que le Tribunal n'ait pas expressément répondu au moyen selon lequel l'article 3.3.3.2 du CCAP aurait pu permettre une réfaction est sans incidence dès lors qu'un tel moyen était inopérant ; le centre hospitalier commet une erreur d'appréciation et de qualification des faits dès lors qu'il y a eu un accroissement des prestations à réaliser et non une diminution de la masse de travaux, et n'est pas fondé à demander l'application de l'article 16.1 du CCAG travaux ; seul l'article 11.22 du CCAG travaux s'applique dès lors que l'ouvrage, en ce qui concerne l'assainissement, a été réalisé conformément aux exigences contractuelles et que la règle du forfait s'applique ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 mai 2012 :

- le rapport de Mme Steinmetz-Schies, rapporteur,

- les conclusions de Mme Ghisu-Deparis, rapporteur public,

- les observations de Me Fouré, avocat du CENTRE HOSPITALIER GENEVIEVE DE GAULLE ANTHONIOZ, de Me Joignant, avocat de la société Eurovia Champagne et de la société Screg-Est ;

Considérant que par acte d'engagement du 12 novembre 2005, le CENTRE HOSPITALIER DE SAINT DIZIER a retenu les sociétés Eurovia Champagne Ardenne et Screg-Est, la première étant mandataire du groupement d'entreprises solidaire, pour l'exécution du lot n° 1 : " Terrassements, voirie et réseaux divers " de la construction du nouvel hôpital de Saint-Dizier " ; qu'il ressort des stipulations de cet acte d'engagement que ces travaux devaient être effectués pour un prix global et forfaitaire ; qu'en conséquence notamment de la nécessité de procéder à des fouilles archéologiques, qui ont interdit le réemploi de déblais, il a été convenu d'abaisser le niveau du sol d'une vingtaine de centimètres, ce qui a fait l'objet d'un avenant n° 1 conclu le 8 juin 2007 ; que, compte tenu de ce qui précède, le tracé des réseaux d'assainissement s'en trouvant modifié, la société Eurovia Champagne Ardenne a proposé, le 18 juin 2007, une modification du système d'assainissement initialement convenu, ce qui a conduit à une diminution des coûts d'un montant de 239 064,91 euros toutes taxes comprises ; que la société requérante a émis des réserves quant à un avenant n° 3 du 27 juillet 2007 proposé par le centre hospitalier et qui entendait imputer cette somme sur les montants dus, et a refusé de signer un avenant n° 3A dont le seul objet était de minorer le montant du marché de ce montant ; que le centre hospitalier a alors notifié à la société Eurovia Champagne Ardenne une " décision de poursuivre " en date du 12 mars 2008, incluant l'abaissement corrélatif du montant du marché ; que cette décision a fait l'objet d'une réclamation le 17 juin 2008, à laquelle le maître d'ouvrage n'a pas répondu ; que par jugement du 20 janvier 2011, le Tribunal administratif de Châlons en Champagne a condamné le CENTRE HOSPITALIER DE SAINT DIZIER à verser à la société Eurovia Champagne Ardenne, d'une part, la somme de 239 064,91 euros majorée des intérêts et, d'autre part, une somme de 656,11 euros correspondant aux intérêts contractuels résultant du retard de paiement d'une facture ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 11.22 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux alors en vigueur auquel renvoie le présent contrat : " Dans le cas d'application d'un prix forfaitaire, le prix est dû dès lors que l'ouvrage, la partie d'ouvrage ou l'ensemble des prestations auxquelles il se rapporte a été exécuté. Les différences éventuellement constatées pour chaque nature d'ouvrage ou chaque élément d'ouvrage, entre les quantités réellement exécutées et les quantités indiquées dans la décomposition de ce prix, (....) même si celle-ci a une valeur contractuelle, ne peuvent conduire à une modification dudit prix ; il en est de même pour les erreurs que pourrait comporter cette décomposition. " ; qu'il résulte de l'instruction que, contrairement à ce que soutient le centre hospitalier requérant, les prestations objet du marché ont été exécutées dans leur intégralité ; que la circonstance que cette exécution se soit, du fait de la modification susrappelée du système d'assainissement, induisant une diminution des quantités de matériaux mises en oeuvre, révélée moins onéreuse que prévu, n'est pas de nature à justifier la remise en cause du mode de détermination forfaitaire du prix du marché ; que, par suite, c'est à juste titre que le Tribunal administratif a estimé que le caractère forfaitaire du prix du marché conclu entre le CENTRE HOSPITALIER DE SAINT DIZIER et le groupement dont la société Eurovia Champagne Ardenne était mandataire, faisait obstacle à ce que le maître d'ouvrage pratique, au détriment du groupement, une réfaction portant sur la somme de 239 064,91 euros ;

Considérant cependant que, pour justifier le bien-fondé de la réfaction ainsi pratiquée, le centre hospitalier se prévaut des stipulations de l'article 16.1 du cahier des clauses administratives générales alors en vigueur, aux termes desquelles : " - Diminution dans la masse des travaux... Si la diminution de la masse des travaux est supérieure à la diminution limite définie à l'alinéa suivant, L'entrepreneur a droit à être indemnisé en fin de compte du préjudice qu'il a éventuellement subi du fait de cette diminution au-delà de la diminution limite. La diminution limite est fixée : - pour un marché à prix forfaitaires, au vingtième de la masse initiale ; ", ainsi que des stipulations de l'article 3.3.3.2 du cahier des clauses administratives particulières afférentes au marché, aux termes desquelles : " règlement des prix des ouvrages ou des travaux non prévus : Les travaux en supplément et ceux en déduction au forfait qui seraient la conséquence de modifications que l'administration se réserve le droit d'apporter en cours d'exécution des travaux seront réglés dans les conditions prévues à l'article 14 du CCAG travaux (...) Tout ordre de service délivré en application de l'article 14 du CCAG ou consistant en une quelconque modification des prestations du marché n'est valable que s'il est revêtu du visa du maître d'ouvrage (...) ; " ; que, toutefois, le système d'assainissement prévu au marché ayant été intégralement réalisé, comme il a été dit plus haut, la seule réduction de son coût ne saurait être analysée ni comme une diminution de la masse des travaux au sens de l'article 16-1 précité du cahier des clauses administratives générales ni comme des travaux " en déduction au forfait " au sens du cahier des clauses administratives particulières ; que c'est ainsi à juste titre que les premiers juges ont écarté l'application en l'espèce des stipulations de l'article 16.1 du cahier des clauses administratives générales, qui concernent la diminution de la masse des travaux à exécuter décidée par le maître d'ouvrage pour un motif d'intérêt général, mais qui n'autorisent pas celui-ci à décider unilatéralement de diminuer le coût de travaux ayant conduit à la réalisation de l'ouvrage convenu ; qu'en écartant ainsi le moyen tiré de l'application des stipulations de ce dernier article, le Tribunal administratif a implicitement, mais nécessairement, également écarté l'application des stipulations précitées de l'article 3.3.3.2 du cahier des clauses administratives particulières et n'a pas ce faisant entaché sa décision d'insuffisance de motivation ;

Considérant, en second lieu, que si le CENTRE HOSPITALIER GENEVIEVE DE GAULLE ANTHONIOZ demande la décharge de la somme de 656,11 euros, somme que les premiers juges l'ont condamnée à verser au titre des intérêts moratoires liés à la situation n° 14, ladite demande n'est pas assortie de précisions suffisantes pour en apprécier le bien fondé ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le CENTRE HOSPITALIER GENEVIEVE DE GAULLE ANTHONIOZ n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 20 janvier 2011, qui est suffisamment motivé et n'a pas inversé la charge de la preuve, le Tribunal administratif de Chalons en Champagne l'a condamné à verser à la société Eurovia Champagne Ardenne une somme de 239 064,91 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 novembre 2007 ainsi qu'une somme de 656,11 euros au titre des intérêts moratoires liés à la situation n° 14 ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société, Eurovia Champagne Ardenne, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que le CENTRE HOSPITALIER GENEVIEVE DE GAULLE ANTHONIOZ demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CENTRE HOSPITALIER GENEVIEVE DE GAULLE ANTHONIOZ une somme globale de 1 500 euros au titre des frais exposés par la société Eurovia Champagne Ardenne et la société Screg-Est ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du CENTRE HOSPITALIER GENEVIEVE DE GAULLE ANTHONIOZ est rejetée.

Article 2 : Le CENTRE HOSPITALIER GENEVIEVE DE GAULLE ANTHONIOZ versera aux sociétés Eurovia Champagne Ardenne et Screg-Est une somme globale de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au CENTRE HOSPITALIER GENEVIEVE DE GAULLE ANTHONIOZ et aux sociétés Eurovia Champagne Ardenne et Screg-Est.

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11NC00510


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11NC00510
Date de la décision : 07/06/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05-01-01 Marchés et contrats administratifs. Exécution financière du contrat. Rémunération du co-contractant. Prix.


Composition du Tribunal
Président : M. VINCENT
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre STEINMETZ-SCHIES
Rapporteur public ?: Mme GHISU-DEPARIS
Avocat(s) : GUIMET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2012-06-07;11nc00510 ?
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