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05/04/2012 | FRANCE | N°11NC00663

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 05 avril 2012, 11NC00663


Vu la requête, enregistrée le 21 avril 2011, présentée pour M. Albert A, demeurant ..., par Me Guiraud ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900562 du 3 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à la condamnation du Centre hospitalier universitaire de Nancy à lui payer la somme de 56 500 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis lors de son hospitalisation en février et mars 2002 ;

2°) de condamner le Centre hospitalier universitaire de Nancy à lui verser cette somme ;

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) de mettre à la charge du Centre hospitalier universitaire de Nancy les dépens et la ...

Vu la requête, enregistrée le 21 avril 2011, présentée pour M. Albert A, demeurant ..., par Me Guiraud ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900562 du 3 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à la condamnation du Centre hospitalier universitaire de Nancy à lui payer la somme de 56 500 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis lors de son hospitalisation en février et mars 2002 ;

2°) de condamner le Centre hospitalier universitaire de Nancy à lui verser cette somme ;

3°) de mettre à la charge du Centre hospitalier universitaire de Nancy les dépens et la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- le Centre hospitalier universitaire de Nancy a commis une faute pour manquement à son devoir d'information sur la nécessité de procéder à l'ablation totale de la thyroïde, sur le risque de rupture du drain et sur le fait que la fermeture du sternum à l'aide de fils d'acier pouvait entraîner des névralgies douloureuses ;

- l'établissement hospitalier sera donc condamné à lui verser 8 000 euros au titre de la perte de chance de guérison ;

- toutes les conditions pour que la responsabilité sans faute du Centre hospitalier universitaire de Nancy soit engagée du fait de la rupture du drain et de l'utilisation de fils d'acier sont réunies ;

- son préjudice moral, résultant de la seconde hospitalisation survenue le 4 mars 2002, et les souffrances endurées justifient l'allocation d'une somme de 1 500 euros ;

- il subit également un préjudice d'agrément évalué à 5 000 euros ;

- la perte de son emploi, imputable aux conséquences dommageables de l'intervention chirurgicale du 6 février 2002, doit être indemnisée pour un montant de 50 000 euros ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 mai 2011, présenté pour M. A tendant aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre que la responsabilité pour faute du Centre hospitalier universitaire de Nancy est engagée du fait de l'erreur de diagnostic préalable à l'intervention du 4 mars 2002 qui lui a fait perdre une chance d'ôter le morceau de drain cassé ;

Vu le mémoire, enregistré le 30 mai 2011, présenté par la caisse primaire d'assurance maladie des Vosges qui informe la Cour qu'elle n'entend pas intervenir dans l'instance ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 15 septembre 2011, présenté pour le Centre hospitalier universitaire de Nancy par Me Vilmin, qui conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge du requérant des dépens et de la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- le requérant n'a jamais fait état au cours des opérations d'expertise de ce qu'il n'aurait pas été informé sur les conditions et les conséquences de l'intervention chirurgicale ;

- le requérant a reçu toutes les informations utiles lors des deux interventions des 6 février et 4 mars 2002 ;

- en tout état de cause, l'état de santé du requérant imposait en urgence une intervention chirurgicale en vue de l'ablation de la thyroïde ;

- la fermeture du sternum a été réalisée dans les règles de l'art, un traitement médical approprié étant de nature à atténuer les douleurs résultant de l'utilisation de fils d'acier ;

- les préjudices dont le requérant demande réparation n'ont pas de lien direct et exclusif avec les actes de soins litigieux mais sont imputables à l'état de santé général de l'intéressé ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 mars 2012 :

- le rapport de M. Trottier, président,

- les conclusions de Mme Dulmet, rapporteur public,

- et les observations de Me Vilmin, avocat du Centre hospitalier universitaire de Nancy ;

Sur les conclusions à fin d'indemnisation :

En ce qui concerne la responsabilité pour faute :

Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 1111-2 du même code : " Toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus. (...) / Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables. Seules l'urgence ou l'impossibilité d'informer peuvent l'en dispenser. / Cette information est délivrée au cours d'un entretien individuel. (...) / En cas de litige, il appartient au professionnel ou à l'établissement de santé d'apporter la preuve que l'information a été délivrée à l'intéressé dans les conditions prévues au présent article. Cette preuve peut être apportée par tout moyen " ;

Considérant qu'il résulte de l'expertise ordonnée en première instance que M. A présentait un goitre endothoracique qui, en cas d'augmentation progressive ou brutale, s'accompagne de complications respiratoires aiguës compromettant le pronostic vital ; que, seule l'ablation de la glande thyroïde par voie chirurgicale et, par conséquent, la pose d'un drain aspiratif et la fermeture du sternum, pouvaient être envisagées, aucun autre traitement médical ne permettant de traiter la pathologie du patient sans prendre le risque d'une issue fatale ; qu'ainsi, à supposer même que le requérant n'aurait pas été informé des risques de procéder à l'ablation totale de la thyroïde, de la possible rupture du drain et de la persistance de névralgies douloureuses du fait de l'utilisation de fils d'acier, il ne peut être regardé comme établi que, dûment informé, M. A aurait renoncé à l'intervention ;

Considérant que, si l'expert indique que la rupture d'un drain constitue un risque fréquent en matière chirurgicale, il précise que les douleurs résiduelles dont se plaint le requérant ne sont pas dues au fragment de drain de Redon qui est resté dans la plaie opératoire lorsque ce drain a été retiré le 11 février 2002 ; qu'ainsi, M. A n'est pas fondé à demander la réparation de la perte de chance de se faire enlever ce fragment de drain ;

En ce qui concerne la responsabilité sans faute :

Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, dans sa version applicable : " Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'incapacité permanente ou de la durée de l'incapacité temporaire de travail. / Ouvre droit à réparation des préjudices au titre de la solidarité nationale un taux d'incapacité permanente supérieur à un pourcentage d'un barème spécifique fixé par décret ; ce pourcentage, au plus égal à 25 %, est déterminé par ledit décret. " ; qu'aux termes de l'article D. 1142-1 du même code, dans sa version applicable : " Le pourcentage mentionné au dernier alinéa de l'article L. 1142-1 est fixé à 24 %. / Un accident médical (...) présente également le caractère de gravité mentionné à l'article L. 1142-1 lorsque la durée de l'incapacité temporaire de travail résultant de l'accident médical (...) est au moins égale à six mois consécutifs ou à six mois non consécutifs sur une période de douze mois. / A titre exceptionnel, le caractère de gravité peut être reconnu : 1° Lorsque la victime est déclarée définitivement inapte à exercer l'activité professionnelle qu'elle exerçait avant la survenue de l'accident médical ( ...) ; 2° Ou lorsque l'accident médical (...) occasionne des troubles particulièrement graves, y compris d'ordre économique, dans ses conditions d'existence " ; qu'en vertu de l'article L. 1142-22 du même code, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) est chargé de l'indemnisation au titre de la solidarité nationale dans les conditions définies au II de l'article L. 1142-1 ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment de l'expertise que le seul accident médical qui est survenu en l'espèce, à savoir la rupture du drain de Redon dans la plaie opératoire, n'est pas à l'origine des préjudices dont se plaint M. A, y compris son inaptitude professionnelle définitive ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à la condamnation du Centre hospitalier universitaire de Nancy à réparer les préjudices qu'il estime avoir subis du fait de son hospitalisation en février et mars 2002 ;

Sur les dépens :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 811 euros doivent être laissés à la charge définitive du requérant ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du Centre hospitalier universitaire de Nancy, qui n'est pas la partie tenue aux dépens dans la présente instance, une somme quelconque au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, en l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de M. A la somme demandée par le Centre hospitalier universitaire de Nancy au même titre ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du Centre hospitalier universitaire de Nancy tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Albert A, au Centre hospitalier universitaire de Nancy et à la caisse primaire d'assurance maladie des Vosges.

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