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30/01/2012 | FRANCE | N°11NC00760

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 30 janvier 2012, 11NC00760


Vu la requête, enregistrée le 10 mai 2011 sous le n° 11NC00760, présentée pour M. Roger A, demeurant ..., par Me Honnet, avocat ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°0801821 du 10 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté en date du 2 mai 2008 du préfet de l'Aube autorisant M. B à exploiter 32 h 03 a de surfaces agricoles situées dans les départements de l'Aube et de l'Yonne ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somm

e de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de just...

Vu la requête, enregistrée le 10 mai 2011 sous le n° 11NC00760, présentée pour M. Roger A, demeurant ..., par Me Honnet, avocat ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°0801821 du 10 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté en date du 2 mai 2008 du préfet de l'Aube autorisant M. B à exploiter 32 h 03 a de surfaces agricoles situées dans les départements de l'Aube et de l'Yonne ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- l'arrêté contesté est signé par une autorité incompétente ;

- il comporte des erreurs dans les visas ;

- le préfet de l'Aube n'a pas pris de décision expresse dans le délai de quatre mois prévu par les dispositions de l'article R. 331-6 du code rural ;

- l'arrêté est insuffisamment motivé dès lors qu'il ne consacre aucun développement à la capacité ou à l'expérience professionnelle du demandeur ;

- le siège de l'exploitation du demandeur se situant dans le département de l'Aube, le préfet devait appliquer le schéma directeur départemental des structures agricoles de ce département, et non celui de l'Yonne ;

- le préfet n'avait pas à apprécier les ressources et charges du demandeur et du preneur en place ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 septembre 2011, présenté pour M. Robert B, par la SCP d'avocats George-Chassagnon, qui conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens présentés n'est fondé, et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. A au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 décembre 2011, présenté par le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire ; il conclut au rejet de la requête qui est infondée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code rural ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 janvier 2012:

- le rapport de Mme Rousselle, président ;

- et les conclusions de M. Wiernasz, rapporteur public ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 2 mai 2008 du préfet de l'Aube :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 331-2 du code rural : I Sont soumises à autorisation préalable : (...) 3° Quelle que soit la superficie en cause, les installations, les agrandissements ou les réunions d'exploitations agricoles au bénéfice d'une exploitation agricole : a) Dont l'un des membres ayant la qualité d'exploitant ne remplit pas les conditions de capacité ou d'expérience professionnelle ou a atteint l'âge requis pour bénéficier d'un avantage de vieillesse agricole ; (...) ; qu'aux termes de l'article L. 331-3 du code rural : L'autorité administrative se prononce sur la demande d'autorisation en se conformant aux orientations définies par le schéma directeur départemental des structures agricoles applicable dans le département dans lequel se situe le fonds faisant l'objet de la demande. Elle doit notamment : 1° Observer l'ordre des priorités établi par le schéma départemental entre l'installation des jeunes agriculteurs et l'agrandissement des exploitations agricoles, en tenant compte de l'intérêt économique et social du maintien de l'autonomie de l'exploitation faisant l'objet de la demande ; 2° S'assurer, en cas d'agrandissement ou de réunion d'exploitations, que toutes les possibilités d'installation sur une exploitation viable ont été considérées ; 3° Prendre en compte les biens corporels ou incorporels attachés au fonds dont disposent déjà le ou les demandeurs ainsi que ceux attachés aux biens objets de la demande en appréciant les conséquences économiques de la reprise envisagée ; 4° Prendre en compte la situation personnelle du ou des demandeurs, notamment en ce qui concerne l'âge et la situation familiale ou professionnelle et, le cas échéant, celle du preneur en place ; 5° Prendre en compte la participation du demandeur ou, lorsque le demandeur est une personne morale, de ses associés à l'exploitation directe des biens objets de la demande dans les conditions prévues à l'article L. 411-59 ; 6° Tenir compte du nombre d'emplois non salariés et salariés permanents ou saisonniers sur les exploitations concernées ; 7° Prendre en compte la structure parcellaire des exploitations concernées, soit par rapport au siège de l'exploitation, soit pour éviter que des mutations en jouissance ne remettent en cause des aménagements réalisés à l'aide de fonds publics ; 8° Prendre en compte la poursuite d'une activité agricole bénéficiant de la certification du mode de production biologique ; 9° Tenir compte de l'intérêt environnemental de l'opération. (...) ; qu'aux termes de l'article R. 331-4 du même code : (...) Lorsque les biens dont l'exploitation doit être autorisée sont situés sur le territoire de plusieurs départements, la demande est adressée au préfet du département du siège de l'exploitation du demandeur, qui procède à la consultation des autres départements intéressés et qu'aux termes de l'article R. 331-6 du même code : I. - Le préfet dispose d'un délai de quatre mois à compter de la date d'enregistrement du dossier complet mentionnée dans l'accusé de réception pour statuer sur la demande. / II. - II. - La décision d'autorisation ou de refus d'exploiter prise par le préfet doit être motivée au regard des critères énumérés à l'article L. 331-3. (...) / III. - (...) A défaut de notification d'une décision dans le délai de quatre mois à compter de la date d'enregistrement du dossier (...) ;

S'agissant des moyens de légalité externe :

Considérant, en premier lieu, que M. Locqueville, chef du service d'économie agricole à la direction départementale de l'équipement et de l'agriculture de l'Aube bénéficiait, par arrêté du préfet de ce département du 26 février 2008 régulièrement publié, d'une délégation lui permettant de signer l'acte contesté ; que, par suite, le moyen présenté par M. A tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte manque en fait ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'écarter le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué comporte des erreurs dans ses visas, qui ne comporte aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée par M. A devant le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;

Considérant, en troisième lieu, que le délai de quatre mois imparti au préfet pour statuer sur une demande d'autorisation d'exploitation agricole en application des dispositions précitées de l'article R. 331-6 du code rural n'est pas prescrit à peine de nullité et ne constitue pas une garantie pour les administrés ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré du dépassement de ce délai est inopérant ;

Considérant, en dernier lieu, que si M. A soutient que l'arrêté contesté est insuffisamment motivé dès lors qu'aucun développement n'est consacré à la capacité ou à l'expérience professionnelle de M. B, il ressort, toutefois, des dispositions des articles L. 331-2 et L. 331-3 du code rural susvisés, que la condition de capacité ou d'expérience professionnelle n'est pas au nombre des critères sur lesquels l'autorité préfectorale peut se fonder pour statuer sur la délivrance d'une autorisation d'exploitation ; qu'en se fondant notamment sur les orientations du schéma directeur départemental des structures agricoles du département de l'Yonne ainsi que sur la situation tant familiale que personnelle du demandeur et du preneur sur place, le préfet a suffisamment motivé son arrêté ;

S'agissant des moyens de légalité interne :

Considérant que pour l'application des articles L. 331-2, L. 331-3 et R. 331-4 du code rural précités, le préfet du département du siège de l'exploitation du demandeur, compétent pour statuer sur la demande dans l'hypothèse où les biens dont l'exploitation doit être autorisée sont situés sur le territoire de plusieurs départements, se prononce sur celle-ci en se conformant aux orientations définies par le schéma directeur départemental des structures agricoles applicable dans le département dans lequel se trouve la majorité de la surface totale de terres objet de la demande, sous réserve toutefois que la superficie des terres se situant dans un autre département n'excède pas le seuil de contrôle fixé par le schéma directeur des structures agricoles de ce dernier département ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, d'une part, que sur les 32 ha 03 a de terres pour lesquels M. B, dont l'exploitation a son siège dans le département l'Aube, a sollicité une autorisation d'exploiter, 29 ha sont situés dans le département de l'Yonne ; que, d'autre part, il est constant que la surface des terres situées dans le département de l'Aube et concernées par le projet de M. B n'excède pas le seuil de contrôle fixé par le schéma directeur départemental des structures agricoles de ce département ; que, dès lors, le préfet de l'Aube n'a pas commis d'illégalité en faisant application du schéma directeur départemental des structures agricoles du département de l'Yonne pour se prononcer sur la demande présentée par M. B ;

Considérant, par ailleurs, que si M. A fait valoir que le préfet de l'Aube n'avait pas à prendre en considération les ressources et charges du demandeur et du preneur en place, il ressort du contenu même de l'arrêté contesté que le préfet, conformément aux dispositions précitées du 4° de l'article L. 331-3 du code rural, a étudié les situations familiale et professionnelle des demandeurs en prenant uniquement en compte le nombre de personnes composant le foyer familial de chaque partie intéressée, la profession du conjoint et les caractéristiques générales des exploitations du demandeur et du preneur sur place ; que, dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ;

Sur l'amende pour recours abusif :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 3 000 euros. ;

Considérant qu'en l'espèce, la requête de M. A présente un caractère abusif ; qu'il y a lieu de le condamner à payer une amende de 1 000 euros ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. B et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête présentée par M. A est rejetée.

Article 2 : M. A est condamné à verser une somme de 1 000 (mille) euros en application des dispositions de l'article R. 741-12 du code de justice administrative.

Article 3 : M. A versera à M. B une somme de 1 500 euros (mille-cinq-cents) en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Roger A, à M. Robert B et au ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche de la ruralité et de l'aménagement du territoire.

Copie en sera adressée au préfet de l'Aube et au directeur départemental des finances publiques de la Marne.

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N° 11NC00760


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11NC00760
Date de la décision : 30/01/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

03-03-03-01 Agriculture, chasse et pêche. Exploitations agricoles. Cumuls. Cumuls d'exploitations.


Composition du Tribunal
Président : M. JOB
Rapporteur ?: Mme Pascale ROUSSELLE
Rapporteur public ?: M. WIERNASZ
Avocat(s) : HONNET - FLOTTES DE POUZOLS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2012-01-30;11nc00760 ?
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