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19/01/2012 | FRANCE | N°11NC01329

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, Président de la cour, 19 janvier 2012, 11NC01329


Vu la requête, enregistrée le 16 août 2011, présentée pour Mme Hadda A demeurant chez M. Amar B, ..., par Me Weiss ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103568 en date du 18 juillet 2011 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Haut-Rhin du 13 juillet 2011 décidant sa reconduite à la frontière ;

2°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 100 euros par jour

de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, à défaut d'enjoind...

Vu la requête, enregistrée le 16 août 2011, présentée pour Mme Hadda A demeurant chez M. Amar B, ..., par Me Weiss ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103568 en date du 18 juillet 2011 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Haut-Rhin du 13 juillet 2011 décidant sa reconduite à la frontière ;

2°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, à défaut d'enjoindre au préfet, sous les mêmes délais et astreinte, de réexaminer sa situation ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

* En ce qui concerne la décision de reconduite à la frontière :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que son recours formé devant la Cour nationale du droit d'asile a un caractère non-suspensif ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la mesure où elle a démontré sa volonté de s'intégrer à la société française ;

-elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'elle est exposée à des traitements inhumains et dégradants dans son pays d'origine en raison de son appartenance à la communauté harki ;

* En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- elle méconnaît les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 septembre 2011, présenté pour le préfet du Haut-Rhin; le préfet conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé ;

Vu, en date du 29 septembre 2011, la décision du président du bureau d'aide juridictionnelle admettant Mme A au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 décembre 2011 :

- le rapport de Mme Piérart, président de la Cour,

- et les conclusions de Mme Ghisu-Deparis, rapporteur public ;

En ce qui concerne la décision portant reconduite à la frontière :

Sur le moyen tiré de l'insuffisance de motivation :

Considérant que l'arrêté du préfet du Haut-Rhin en date du 13 juillet 2011 comporte, dans ses visas et ses motifs, les éléments de droit et de fait sur lesquels il se fonde et qui permettent de vérifier que l'administration préfectorale a procédé à un examen de la situation particulière de Mme A au regard des stipulations et des dispositions législatives et réglementaires applicables ; qu'il est ainsi suffisamment motivé ;

Sur le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

Considérant qu'aux termes de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente convention ont été violés, a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles ; qu'aux termes de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : (...) 4° la demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente. (...) ; qu'aux termes de l'article L. 742-5 du même code : Dans le cas où l'admission au séjour a été refusée pour l'un des motifs mentionnés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4, l'étranger qui souhaite bénéficier de l'asile peut saisir l'office de sa demande. Celle-ci est examinée dans les conditions prévues au second alinéa de l'article L. 723-1 ; qu'aux termes de l'article L. 723-1 du même code : (...) L'office statue par priorité sur les demandes émanant de personnes auxquelles le document provisoire de séjour prévu à l'article L. 742-1 a été refusé ou retiré pour l'un des motifs mentionnés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4 (.....) ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 742-6 du même code : L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée au livre V du présent code ne peut être mise à exécution avant la décision de l'office (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par une décision du 16 mars 2011, l'admission au séjour de Mme A, ressortissante algérienne, qui a présenté une demande de protection subsidiaire au titre de l'asile, a été refusée par le préfet du Haut-Rhin sur le fondement du 4° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande d'asile le 19 mai 2011 suite à sa saisine dans le cadre de la procédure prioritaire ; que Mme A a formé un recours contre la décision de l'Office le 27 juin 2011 ; que le droit à un recours effectif tel que garanti par les stipulations précitées de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'implique pas que l'étranger, qui fait l'objet de la procédure prioritaire prévue à l'article L. 723-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et dispose du droit de contester la décision de rejet qui lui est opposée devant l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, puis, en cas de rejet de sa demande par l'Office, devant la Cour nationale du droit d'asile, puisse se maintenir sur le territoire français jusqu'à l'issue de son recours devant cette juridiction ; qu'ainsi le préfet du Haut-Rhin pouvait, sans méconnaître les stipulations de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, prononcer à l'encontre de l'intéressée une décision de reconduite à la frontière ;

Sur le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

Considérant que Mme A, entrée en France le 28 septembre 2010 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour, valable du 12 avril au 8 octobre 2010, fait valoir qu'elle a démontré sa volonté de s'intégrer à la société française en envisageant de prendre des cours de français et en répondant à toutes les convocations des autorités ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que Mme A, qui a vécu jusqu'à l'âge de 49 ans en Algérie, n'est pas dépourvue d'attaches privées et familiales dans son pays d'origine, où résident notamment son époux et ses trois enfants ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, en particulier des conditions et de la durée du séjour de Mme A en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté pris à son encontre ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

Considérant que si Mme A affirme qu'un retour dans son pays d'origine l'exposerait à des traitements inhumains et dégradants, dès lors qu'elle a subi de réelles persécutions du fait de son appartenance à la communauté harki , ce moyen est inopérant à l'égard de la décision de reconduite à la frontière qui n'indique pas le pays vers lequel l'intéressée sera éloignée ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

Considérant que le préfet du Haut-Rhin n'a pris aucune décision fixant le pays de destination et ne saurait être regardé comme ayant pris implicitement une telle décision ; qu'ainsi, Mme A ne peut utilement invoquer la violation des stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales à l'appui de son recours contre la décision prononçant sa reconduite à la frontière ;

Considérant qu'il résulte de ce tout qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 13 juillet 2011 par lequel le préfet du Haut-Rhin a décidé sa reconduite à la frontière ; que, par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction et les conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Hadda A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

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N° 11NC01329


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : Président de la cour
Numéro d'arrêt : 11NC01329
Date de la décision : 19/01/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Odile PIERART
Rapporteur public ?: Mme GHISU-DEPARIS
Avocat(s) : WEISS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2012-01-19;11nc01329 ?
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