Vu la requête, enregistrée le 9 février 2011, présentée pour M. Jean-Louis A, demeurant ..., par Me Weber ;
M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0900280 du 7 décembre 2010 du Tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à annuler la décision en date du 21 novembre 2008 par laquelle le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité a annulé la décision de l'inspecteur du travail en date du 30 mai 2008 autorisant son licenciement, et confirmé l'autorisation de licenciement ;
2°) d'annuler la décision ministérielle en date du 21 novembre 2008 ;
3°) d'enjoindre à la société Médiapost de le réintégrer dans ses fonctions ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- la procédure de licenciement interne à l'entreprise n'a pas été respectée ;
- l'inspecteur du travail qui a autorisé son licenciement n'était pas celui dont dépend l'établissement où il travaille ;
- le ministre ne peut que confirmer l'autorisation, l'annuler ou la réformer, et non pas prendre une seule décision annulant l'autorisation accordée par l'inspecteur du travail et autorisant le licenciement ;
- les manquements de la société justifiaient son refus de prendre son poste ;
- le tribunal avait, par jugement du 7 décembre 2010, confirmé la décision de l'inspecteur du travail du 17 janvier 2008 refusant le licenciement pour refus de signer les feuilles de route, et il ne pouvait pas se contredire en rendant un jugement contraire qui portait sur les mêmes faits ;
- le licenciement est en lien avec l'exercice de ses mandats ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 26 avril 2011, présenté par la société Médiapost, représentée par son président directeur général en exercice, par la SCP August et Debouzy, qui conclut au rejet de la requête de la société Médiapost et à ce que soit mise à la charge de M. A une somme de 3 000 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés :
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 octobre 2011 :
- le rapport de M. Favret, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Dulmet, rapporteur public ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des salariés qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ;
Considérant, en premier lieu, que la décision en date du 21 novembre 2008 par laquelle le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité a annulé la décision de l'inspecteur du travail en date du 30 mai 2008 autorisant le licenciement de M. A, et confirmé l'autorisation de licenciement, comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que s'il appartient au ministre, qui doit apprécier si les faits reprochés sont établis et s'ils sont d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement de l'intéressé compte tenu des règles applicables à son contrat de travail et des exigences propres à l'exécution normale de ses mandats, de motiver sur ce point sa décision, il n'est pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments développés par le salarié en cause dans le cadre de son recours hiérarchique ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il y a lieu d'adopter le motif retenu par les premiers juges, qui ont estimé que le moyen de M. A tiré de ce que le ministre ne pouvait pas, dans une même décision, annuler la décision de l'inspecteur du travail et reprendre une décision d'autorisation de licenciement, devait être écarté ;
Considérant, en troisième lieu, qu'à la supposer avérée, l'incompétence territoriale de l'inspecteur du travail est sans incidence sur la légalité de la décision par laquelle le ministre statue sur la demande d'autorisation de licenciement ;
Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article R. 2421-1 du code du travail : La demande d'autorisation de licenciement d'un délégué syndical, d'un salarié mandaté ou d'un conseiller du salarié est adressée à l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement dans lequel est employé l'intéressé. Lorsque le délégué syndical bénéficie également de la protection prévue aux sections 3 et 4 du chapitre Ier du titre Ier de la partie législative, la demande est accompagnée du procès-verbal de la réunion du comité d'entreprise... ; qu'aux termes de l'article R. 2325-3 du même code : Les délibérations des comités d'entreprise sont consignées dans des procès-verbaux établis par le secrétaire et communiqués à l'employeur et aux membres du comité ; qu'aux termes de l'article L. 2325-20 du même code : L'employeur fait connaître lors de la réunion du comité d'entreprise suivant la communication du procès-verbal sa décision motivée sur les propositions qui lui ont été soumises. Les déclarations sont consignées dans le procès-verbal ; que si M. A soutient qu'en l'absence d'approbation, à la date de la décision de l'inspecteur du travail, du procès-verbal de la réunion du comité d'établissement du 18 avril 2008, la décision prise par l'administration est entachée de nullité, aucune disposition légale ou réglementaire n'impose que le procès-verbal du comité ait été approuvé par les membres dudit comité avant d'être communiqué à l'inspecteur du travail ; que le moyen du requérant, tiré de ce que l'extrait du projet de procès-verbal remis à l'inspecteur du travail n'a pas été signé par le secrétaire de réunion, manque en fait ; qu'aucun texte n'impose d'informer le comité d'entreprise sur l'âge du salarié concerné et les motifs pour lesquels un licenciement de ce salarié a pu être antérieurement refusé ; que, par suite, les moyens de M. A tirés de ce que la procédure interne à l'entreprise serait entachée d'irrégularité doivent être écartés ;
Considérant, en cinquième lieu, que M. A ne conteste pas avoir refusé, les 28 et 30 janvier 2008, et les 4, 5, 6, 11, 13 et 28 février 2008, de signer les feuilles de route qui lui étaient présentées et de ne pas avoir exécuté le travail prévu par ces documents ; que le refus réitéré d'un salarié d'exécuter ses obligations professionnelles constitue une faute d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement ; qu'à la supposer avérée, la circonstance que l'employeur aurait lui-même méconnu ses obligations légales et conventionnelles ne constitue pas, pour le salarié, un motif légitime pour refuser d'exécuter son contrat de travail ; qu'au demeurant, il ne ressort pas des pièces du dossier que la société Médiapost aurait manqué à ses obligations légales et conventionnelles ;
Considérant, en sixième lieu, que M. A soutient que le tribunal administratif avait, par jugement en date du 7 décembre 2010, confirmé la décision de l'inspecteur du travail en date du 17 janvier 2008 refusant son licenciement pour refus de signer les feuilles de route, et qu'il ne pouvait donc pas se contredire en rendant un jugement contraire qui portait sur les mêmes faits ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que les faits en cause dans la présente affaire ne sont pas les mêmes que ceux que les premiers juges ont eu à connaître dans le cadre de la procédure antérieure, dans le cadre de laquelle la société Médiapost reprochait à l'intéressé un refus de travailler, un exercice illégitime du droit de retrait et un refus de signer les feuilles de route ; qu'en outre, l'employeur est fondé à engager une nouvelle procédure de licenciement, lorsque les mêmes faits se répètent ultérieurement ;
Considérant, en septième lieu, que M. A ne produit aucun élément de nature à établir l'existence d'un lien entre la demande de la société Médiapost et l'exercice de ses mandats ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la société Médiapost souhaite se séparer des représentants syndicaux appartenant à SUD PTT ; qu'à la supposer avérée, la circonstance qu'un autre délégué syndical SUD PTT aurait également fait l'objet d'une procédure de licenciement pour faute n'est pas de nature à établir un lien entre la demande de la société et les mandats exercés par M. A ; que la circonstance que l'inspecteur du travail avait estimé, dans le cadre d'une autre procédure de licenciement, qu'il y avait un lien avec le mandat, n'est pas de nature à établir l'existence d'un tel lien dans le cadre de la présente procédure ; que, par suite, le moyen tiré du lien avec le mandat doit être écarté ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à annuler la décision en date du 21 novembre 2008 par laquelle le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité a annulé la décision de l'inspecteur du travail en date du 30 mai 2008 autorisant son licenciement, et confirmé l'autorisation de licenciement ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ; que les conclusions de M. A tendant à ce que la Cour ordonne à la société Médiapost de le réintégrer dans ses fonctions ne peuvent, dès lors et en tout état de cause qu'être rejetées ;
Sur les conclusions au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. A demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A la somme que la société Médiapost demande au titre des mêmes dispositions ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la société Médiapost tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jean-Louis A, à la société Médiapost et au ministre du travail, de l'emploi et de la santé.
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