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01/04/2010 | FRANCE | N°09NC01783

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 01 avril 2010, 09NC01783


Vu la requête, enregistrée le 4 décembre 2009, présentée par le PREFET DE L'AUBE ; le PREFET DE L'AUBE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0905082 du 2 novembre 2009 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a annulé son arrêté du 29 octobre 2009 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Fabrice A et fixant le pays de destination de ladite reconduite, lui enjoignant de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement et de lui délivrer, durant le temps de ce réexa

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Vu la requête, enregistrée le 4 décembre 2009, présentée par le PREFET DE L'AUBE ; le PREFET DE L'AUBE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0905082 du 2 novembre 2009 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a annulé son arrêté du 29 octobre 2009 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Fabrice A et fixant le pays de destination de ladite reconduite, lui enjoignant de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement et de lui délivrer, durant le temps de ce réexamen, une autorisation provisoire de séjour et mettant à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

2°) de rejeter la demande de M. A devant le Tribunal administratif de Strasbourg ;

Il soutient que son arrêté en date du 29 octobre 2009 ne viole pas les dispositions des articles L. 313-11 6° et L. 511-4 6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que M. A n'établit pas contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de sa fille Diamant depuis sa naissance ou depuis au moins deux ans, qu'il ne viole pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que la date d'entrée en France de M. A n'est pas connue et qu'il a été reconduit au Congo le 20 septembre 2007, qu'il y a eu rupture de la vie commune entre celui-ci et sa première concubine, Mlle B, qu'il ne connaît même pas le nom de famille de sa deuxième concubine enceinte de ses oeuvres, que la communauté de vie entre eux n'est absolument pas avérée et que leur relation est très récente, qu'il n'est pas très proche de son père et de ses demi-frères et demi-soeurs puisqu'il ne connaît pas l'adresse du premier ni précisément les âges des autres ;

Vu, le mémoire en défense, enregistré le 5 mars 2010, présenté pour M. A demeurant chez Mme C, ..., par Me Andreini qui conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint au PREFET DE L'AUBE de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir et à la condamnation de l'Etat au versement d'une somme de 1 500 euros à Me Andreini au titre de l'article L. 761-1 du Code de justice administrative, qui correspond aux honoraires qui auraient été facturés à M. A s'il n'avait pas été bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale. Conformément à l'article 37 alinéa 2 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991, l'avocat soussigné renonce, en cas de condamnation de l'Etat à payer une somme supérieure de 14% à l'aide juridictionnelle à réclamer à l'Etat l'indemnisation prévue par ladite loi ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mars 2010 :

- M. Giltard, président de la Cour,

- et les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, rapporteur public ;

En ce qui concerne la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Sur le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, de nationalité congolaise, qui a déclaré être entré une première fois en France le 11 août 2001, à l'âge de 16 ans, a fait l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière le 7 novembre 2005, puis d'une obligation de quitter le territoire français le 21 février 2007, qui a été exécutée le 20 septembre suivant ; qu'il est toutefois revenu irrégulièrement en France à une date indéterminée ; que s'il a eu un enfant, né le 13 juin 2006, qu'il a reconnu, avec une ressortissante française, il ne justifiait pas, à la date de l'arrêté attaqué, d'une vie commune avec cette concubine, dont il est séparé ; qu'il a déclaré en février 2007, lors d'une audition par les services de police pour faits de violence à l'égard de Melle D, vivre maritalement avec cette personne, puis, lors d'une audition en octobre 2009, vivre avec une autre concubine, dont il ne connaît que le prénom, qui attend un enfant de lui ; que si ses parents et ses quatre jeunes demi-frères et demi-soeurs, résident en France, son père étant titulaire d'un titre de séjour, il ne justifie pas d'une vie familiale effective avec eux ; que, compte tenu de l'ensemble de ces circonstances, des conditions de séjour en France de M. A, qui a été condamné plusieurs fois, notamment pour des vols, et a été entendu à de nombreuses reprises par les services de police pour des délits, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté du préfet de l'Aube en date du 29 octobre 2009 n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels a été pris ledit arrêté ; que le PREFET de L'AUBE n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A devant le Tribunal administratif de Strasbourg et la Cour ;

Sur les moyens tirés de la violation des articles L. 313-11 6° et L. 511-4 6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code de civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée ; (...) et qu'aux termes de l'article L. 511-4 du même code : Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (...) 6° L'étranger ne vivant pas en état de polygamie qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans ( ...) ;

Considérant que si M. A, père d'un enfant français, fait état de l'intérêt qu'il porte à son enfant, il ne produit toutefois aucun élément de nature à établir qu'il contribue effectivement à son éducation et à son entretien ; que par suite, le PREFET DE L'AUBE n'a pas méconnu les dispositions des articles L. 313-11 6° et L. 511-4 6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ;

Considérant que si M. A, dont la demande d'admission au statut de réfugié a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, soutient qu'il encourt des risques pour sa vie en cas de retour au Congo, il n'apporte toutefois aucune justification susceptible d'établir la réalité des risques auxquels il serait personnellement exposés en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, la décision attaquée ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE L'AUBE est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué et le rejet de la demande de M. A devant le Tribunal administratif de Strasbourg ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0905082 du 2 novembre 2009 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg est annulé.

Article 2 : La demande de M. A devant le Tribunal administratif de Strasbourg est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire et à M. Fabrice A.

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N° 09NC01783


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 09NC01783
Date de la décision : 01/04/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. le Prés Daniel GILTARD Rapporteur
Rapporteur public ?: Mme STEINMETZ-SCHIES
Avocat(s) : ANDREINI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2010-04-01;09nc01783 ?
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