Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 21 novembre 2006, présentée pour la SOCIETE SNIDARO, société anonyme, dont le siège est ZAC de la Rente du Bassin à Sennecey-les-Dijon (21800), par Me Merienne, avocat ; la SOCIETE SNIDARO demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0400309 en date du 21 septembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la société Pertuy construction à lui payer la somme de 55 857,50 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 10 mars 1998, en règlement de factures émises dans le cadre du marché de construction d'un bâtiment à l'hôpital Boulloche de Montbéliard, ainsi qu'une somme de 3 500 euros au titre de dommages et intérêts ;
2°) de condamner la société Pertuy construction à lui verser ces sommes ;
3°) de condamner ladite société à lui verser une somme de 3 500 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;
4°) de condamner la société Pertuy construction à lui verser une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- les factures qu'elle a adressées à la société Grands Travaux de Franche-Comté (GTFC) correspondaient à des travaux de reprise indispensables, qu'elle a effectués à la place de la société GTFC avec l'accord du maître d'oeuvre et sur ordre du maître de l'ouvrage, ainsi que le prouvent les comptes rendus de chantier et attachements joints à la demande ;
- la société GTFC ne peut soutenir que la procédure de l'article 49 du cahier des clauses administratives générales n'a pas été utilisée, dès lors que cette procédure concerne les pouvoirs du maître d'ouvrage ;
- la société GTFC ne s'est pas opposée aux comptes rendus de chantier auxquels elle était partie et doit être regardée comme ayant accepté les travaux, ce qui crée un lien direct entre les deux sociétés et vaut accord établissant une relation contractuelle et instaurant une délégation de paiement ;
- elle pouvait, en raison de l'urgence et en application de l'article 1144 du code civil, exécuter elle-même l'obligation aux dépens du débiteur ;
- les factures n'étant pas contestées, la circonstance qu'elles n'aient pas été produites devant le tribunal administratif est sans incidence ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les mémoires en défense, enregistrés les 13 septembre 2007 et 30 janvier 2008, présentés pour la société Pertuy construction, venant aux droits de la société GTFC, par Me Pilati, avocat ;
La société Pertuy construction conclut :
- au rejet de la requête ;
- à la condamnation de la SOCIETE SNIDARO à lui verser une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- il n'y a aucun lien contractuel entre elle et la SOCIETE SNIDARO ;
- les factures sont établies au nom de la société Seba ingénierie ;
- l'article 1144 du code civil n'est pas applicable, dès lors que son seul créancier est le maître de l'ouvrage et non la société requérante et que cette dernière n'a pas sollicité d'autorisation d'un tribunal ;
- un compte rendu de chantier ne pouvait créer de lien contractuel entre les deux entreprises ;
- subsidiairement, à supposer qu'un lien contractuel existe, la juridiction administrative serait incompétente ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 septembre 2008 :
- le rapport de Mme Stefanski, président,
- les observations de Me Alves, pour la SCP Cadrot-Masson-Pilati-Braillard, avocat de la SA Pertuy construction,
- et les conclusions de M. Collier, commissaire du gouvernement ;
Considérant que le centre hospitalier général André Boulloche de Montbéliard a, par acte d'engagement notifié le 26 juin 1995, confié à la SOCIETE SNIDARO le lot n° 13 « sols souples » du marché de construction d'un bâtiment de gynécologie ; que la société Grands Travaux de Franche-Comté (GTFC), aux droits de laquelle vient la société Pertuy construction, était chargée du lot n° 2 « gros oeuvre » ; que du 30 août 1997 au 30 janvier 1998, la SOCIETE SNIDARO a émis six factures correspondant à des travaux de reprise du gros oeuvre, qu'elle soutient avoir dû réaliser en raison des carences de la société GTFC ; que la SOCIETE SNIDARO interjette appel du jugement du 21 septembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à ce que la société Pertuy construction soit condamnée à lui verser une somme de 55 587,50 euros en règlement de ces factures ;
Sur les conclusions indemnitaires :
Considérant, en premier lieu, qu'il est constant que la société GTFC n'a conclu aucun contrat avec la société requérante ; qu'aucun lien contractuel ne saurait être né entre elles du seul fait que la société GTFC n'ait émis aucune opposition aux comptes rendus de chantier faisant état de travaux exécutés par la SOCIETE SNIDARO ; que si le compte rendu de chantier du 29 septembre 1997 précise que ce document deviendra contractuel en l'absence de remarque des participants à la réunion, une telle précision ne concerne que les rapports entre le maître de l'ouvrage et les entrepreneurs et non les rapports des entrepreneurs entre eux ; que la seule urgence à effectuer les travaux litigieux invoquée par la SOCIETE SNIDARO ne saurait davantage créer une quelconque obligation contractuelle de la société GTFC à son égard ; que la société requérante ne peut, dès lors, en tout état de cause, ni se prévaloir de l'article 1144 du code civil selon lequel le créancier peut, en cas d'inexécution, être autorisé à faire exécuter lui-même l'obligation aux dépens du débiteur, ni soutenir, du fait des mentions précitées du compte rendu du chantier du 29 septembre 1997, être bénéficiaire d'une délégation de paiement consentie à son profit par le centre hospitalier et l'autorisant à rechercher auprès de la société GTFC le règlement de travaux qu'elle aurait effectués en ses lieu et place ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'à supposer même que la SOCIETE SNIDARO doive être regardée comme entendant également invoquer la responsabilité quasi délictuelle de la société GTFC, la seule acceptation implicite par celle-ci de la voir effectuer des travaux dont la réalisation aurait dû incomber au titulaire du lot « gros-oeuvre » ne saurait être constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de ladite société à son égard ; que les éventuels manquements qu'aurait commis la société GTFC dans l'exécution de ce même lot ne sauraient par ailleurs engager la responsabilité de celle-ci que vis-à-vis du maître d'ouvrage ;
Considérant, en dernier lieu, que si la SOCIETE SNIDARO soutient qu'elle aurait exécuté les travaux litigieux à la demande verbale du maître d'ouvrage et que ceux-ci étaient au surplus indispensables à la correcte réalisation de l'ouvrage selon les règles de l'art, il lui appartenait d'en réclamer directement le paiement à ce dernier, après les avoir inclus dans le projet de décompte final remis au maître d'oeuvre, lequel doit comporter l'intégralité des créances résultant de l'exécution du marché, y compris le coût des travaux supplémentaires qu'un entrepreneur aurait effectués alors même qu'ils relèveraient d'un autre lot que celui dont la réalisation lui a été confiée ;
Sur les conclusions aux fins de dommages et intérêts pour résistance abusive :
Considérant que si la SOCIETE SNIDARO demande l'allocation d'une somme de 3 500 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive, elle ne justifie d'aucun préjudice à ce titre ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE SNIDARO n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge la société Pertuy construction, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la SOCIETE SNIDARO au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge de la SOCIETE SNIDARO une somme de 1 500 euros au titre des mêmes frais exposés par la société Pertuy construction ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la SOCIETE SNIDARO est rejetée.
Article 2 : La SOCIETE SNIDARO versera à la société Pertuy construction une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE SNIDARO et à la société Pertuy construction.
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N° 06NC01484