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01/08/2008 | FRANCE | N°07NC01105

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 01 août 2008, 07NC01105


Vu la requête, enregistrée le 8 août 2007, présentée par le PREFET DU BAS-RHIN ; le PREFET DU BAS-RHIN demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0703250 du 19 juillet 2007 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé les articles 2 et 3 de l'arrêté en date du 31 mai 2007 par lesquels le PREFET DU BAS-RHIN a fait obligation à M. X de quitter le territoire français et fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) de rejeter la demande de M. X ;

Le préfet soutient que :

- M. X ne l'a pas saisi d'une demande de titre se séjo

ur mentionnant que son état de santé nécessitait sa présence sur le territoire français...

Vu la requête, enregistrée le 8 août 2007, présentée par le PREFET DU BAS-RHIN ; le PREFET DU BAS-RHIN demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0703250 du 19 juillet 2007 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé les articles 2 et 3 de l'arrêté en date du 31 mai 2007 par lesquels le PREFET DU BAS-RHIN a fait obligation à M. X de quitter le territoire français et fixant le pays de destination de la reconduite ;

2°) de rejeter la demande de M. X ;

Le préfet soutient que :

- M. X ne l'a pas saisi d'une demande de titre se séjour mentionnant que son état de santé nécessitait sa présence sur le territoire français ;

- il ne justifie pas d'une résidence habituelle sur le territoire français où il ne vit que depuis le 13 février 2007 ;

- il ne justifie pas que son état de santé implique une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ni qu'il ne peut bénéficier de soins adaptés dans son pays ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré le 2 mai 2008, présenté pour M. X, demeurant chez ... par Me Airoldi ; M. X conclut au rejet du recours et demande à la cour de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 € en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- l'arrêté qui se contente d'une motivation globale et stéréotypée ne peut être regardé comme motivé tant en ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour qu'en ce qui concerne la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire est contraire à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- cette décision comporterait des conséquences d'une exceptionnelle gravité pour sa santé ;

- la décision fixant la Géorgie comme pays de renvoi est contraire à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision méconnait l'article 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 ;

Vu le décret n°2004-374 du 29 avril 2004 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 juin 2008 :

- le rapport de Mme Richer, président,

- et les conclusions de M. Lion, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi » ;

Considérant qu'à l'appui de sa demande d'annulation de la décision l'obligeant à quitter le territoire français, M. X a produit un certificat médical en date du 10 mai 2007, établi par un praticien hospitalier, certifiant qu'il souffre d'une hépatite chronique C qui peut évoluer, qu'un bilan est en cours pour préciser l'état de santé et la nécessité d'un traitement antiviral et que l'absence de prise en charge médicale est susceptible d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; qu'un tel certificat ne suffit pas à établir que M. X, qui, au demeurant, ne réside en France que depuis février 2007, ne peut pas recevoir un traitement approprié en Géorgie, pays dont il a la nationalité ; qu'ainsi le PREFET DU BAS-RHIN est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a annulé pour erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement sur la situation personnelle de M. X l'article 2 de son arrêté du 31 mai 2007 obligeant ce dernier à quitter le territoire français ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le Tribunal administratif de Strasbourg ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'obligation de quitter le territoire :

En ce qui concerne la légalité externe :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 45 du décret du 29 avril 2004 sus-visé : « (...) En cas de vacance momentanée du poste de préfet, l'intérim est assuré par le secrétaire général de la préfecture. (...) » ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté en date du 31 mai 2007 a été signé par M. Raphaël Le Méhauté, secrétaire général de la préfecture qui assurait, alors, l'intérim du préfet ; que M. Le Méhauté était, en vertu des dispositions précitées, habilité à exercer pendant la période d'intérim toutes les compétences normalement dévolues au préfet ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte au motif qu'il aurait pas reçu une nouvelle délégation postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du

24 juillet 2006 modifiant l'article L 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté ;

Considérant, d'autre part, que l'obligation de quitter le territoire français est une mesure de police qui doit, comme telle, être motivée en application des règles de forme édictées, pour l'ensemble des décisions administratives, par l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ; que, toutefois, la motivation de cette mesure se confond avec celle du refus ou du retrait de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus ou ce retrait est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, de mention spécifique pour respecter les exigences de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ; qu'il ressort des pièces du dossier que la décision du 31 mai 2007 par laquelle le PREFET DU BAS-RHIN a fait connaître à M. X qu'il n'était plus admis au séjour comporte les considérations de fait et de droit qui la justifient ; qu'il vise également l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision portant obligation pour M. X de quitter le territoire doit être écarté ;

En ce qui concerne la légalité interne :

S'agissant de l'exception d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour :

Considérant, d'une part, qu'ainsi qu'il est dit ci-dessus, l'arrêté en date du 31 mai 2007 a été signé par M. Raphaël Le Méhauté, secrétaire général de la préfecture qui assurait, alors, l'intérim du préfet et était, en vertu des dispositions précitées, habilité à exercer pendant la période d'intérim toutes les compétences normalement dévolues au préfet ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte au motif qu'il n'aurait pas été contresigné par le préfet doit, en tout état de cause, être écarté ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : (...) 8º A l'étranger qui a obtenu le statut de réfugié en application du livre VII du présent code (...) » ; qu'aux termes de l'article L. 741-1 du même code : « Tout étranger présent sur le territoire français qui, n'étant pas déjà admis à séjourner en France sous couvert d'un des titres de séjour prévus par le présent code ou les conventions internationales, demande à séjourner en France au titre de l'asile forme cette demande dans les conditions fixées au présent chapitre. » ; qu'aux termes de l'article L. 742-6 du même code : « En cas de reconnaissance de la qualité de réfugié (...), l'autorité administrative (...) délivre sans délai au réfugié la carte de résident prévue au 8º de l'article L. 314-11 (...) » ;

Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que tout ressortissant étranger qui demande à être admis au bénéfice de l'asile doit être regardé comme ayant également sollicité la délivrance de la carte de résident à laquelle la reconnaissance éventuelle de la qualité de réfugié lui ouvre droit en application de l'article L. 314-11, 8° précité ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. X a formé une demande d'asile le 22 mars 2007 auprès des services de la préfecture, transmise le 7 mai suivant à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ; qu'ainsi, contrairement à ce qu'il soutient, M. X est réputé avoir formé une demande de carte de résident sur le fondement de l'article L. 314-11, 8° ; qu'il s'ensuit qu'il n'est pas fondé à soutenir que le refus de séjour qui lui a été opposé n'aurait pas été précédé d'une telle demande, ni que le préfet aurait pris cette décision de refus à seule fin de pouvoir l'assortir d'une obligation de quitter le territoire français ;

Considérant, enfin, qu'en application de l'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le recours formé auprès de la Commission des recours des réfugiés par M. X contre la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 22 mai 2007, statuant selon la procédure prioritaire, ne saurait ouvrir droit pour l'intéressé au maintien sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de la Commission ; que cette circonstance n'est toutefois pas de nature à priver l'intéressé de l'examen de son recours et demeure, en tout état de cause, sans incidence sur la légalité de la décision par laquelle le PREFET DU BAS-RHIN a refusé de l'admettre au séjour ;

S'agissant de la violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

Considérant que si M. X affirme qu'un retour dans son pays d'origine l'exposerait à des traitements inhumains ou dégradants, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'encontre de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision fixant le pays de renvoi :

Considérant que si M. X affirme qu'il serait exposé en cas de retour en Géorgie à des traitements inhumains ou dégradants, il n'apporte aucun élément à l'appui de ses allégations ; que contrairement à ce qu'il soutient, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet, qui ne s'est pas estimé lié par la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, n'aurait pas examiné, au vu des éléments présentés par l'intéressé, sa situation au regard des risques que la décision fixant le pays de renvoi lui ferait courir ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU BAS-RHIN est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a annulé les articles 2 et 3 de son arrêté du 31 mai 2007 obligeant M. X à quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi ;

DECIDE

Article 1er : Le jugement du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 19 juillet 2007 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Strasbourg est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire et à M. Jumber X.

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N°07NC01105


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07NC01105
Date de la décision : 01/08/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. COMMENVILLE
Rapporteur ?: Mme Michèle RICHER
Rapporteur public ?: M. LION
Avocat(s) : AIROLDI

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2008-08-01;07nc01105 ?
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