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05/05/2008 | FRANCE | N°06NC01385

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 05 mai 2008, 06NC01385


Vu la requête, enregistrée le 16 octobre 2006, présentée par le PREFET DES VOSGES ; le PREFET DES VOSGES demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0401855 du 4 juillet 2006 par lequel Tribunal administratif de Nancy a condamné l'Etat à verser à la SARL SOCOVEG la somme de 97 650 euros avec intérêts au taux légal à compter du 16 septembre 2004 et la somme de 4 990,40 euros au titre des frais d'expertise, et à verser à la SCI FRAAL la somme de 60 896 euros avec intérêts au taux légal à compter du 16 septembre 2004 et la somme de 4 476,65 euros au titre d

es frais d'expertise, en réparation des préjudices subis lors d'une manif...

Vu la requête, enregistrée le 16 octobre 2006, présentée par le PREFET DES VOSGES ; le PREFET DES VOSGES demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0401855 du 4 juillet 2006 par lequel Tribunal administratif de Nancy a condamné l'Etat à verser à la SARL SOCOVEG la somme de 97 650 euros avec intérêts au taux légal à compter du 16 septembre 2004 et la somme de 4 990,40 euros au titre des frais d'expertise, et à verser à la SCI FRAAL la somme de 60 896 euros avec intérêts au taux légal à compter du 16 septembre 2004 et la somme de 4 476,65 euros au titre des frais d'expertise, en réparation des préjudices subis lors d'une manifestation qui s'est déroulée à Epinal le 24 octobre 2002 ;

2°de rejeter les conclusions de la SARL SOCOVEG et de la SCI FRAAL ;


Il soutient que :

- les premiers juges ont commis une erreur de droit en considérant que le caractère prémédité de l'action était sans incidence sur la reconnaissance de la responsabilité de l'Etat sur le fondement de l'article L. 2216-3 du code général des collectivités territoriales ;

- les exactions dont ont été victimes les deux sociétés étaient le fait d'un groupe menant une action planifiée et préméditée en vue de la destruction des marchandises et installations des requérantes, faisant obstacle à la mise en oeuvre des dispositions de l'article L. 2216-3 du code général des collectivités territoriales ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;


Vu le courrier de Me Watbot, avocat, enregistré le 5 novembre 2007 indiquant se constituer pour la SCI FRAAL et pour la SARL SOCOVEG ;



Vu les autres pièces du dossier;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;



Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 avril 2008 :

- le rapport de Mme Rousselle, premier conseiller,

- les observations de M. Petit représentant le PREFET DES VOSGES et de Me Luisin, avocat de la SCI FRAAL et de la SARL SOCOVEG,

- et les conclusions de M. Wallerich, commissaire du gouvernement ;



Considérant qu'aux termes de l'article 92 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 codifié à l'article L. 2216-3 du code général des collectivités territoriales : «L'Etat est civilement responsable des dégâts et dommages résultant des crimes et délits commis, à force ouverte ou par violence, par des attroupements ou rassemblements armés ou non armés, soit contre des personnes, soit contre des biens» ;

Considérant que, lors d'une manifestation organisée le 24 octobre 2002 à Epinal afin de protester contre la mise en liquidation judiciaire d'une entreprise textile, les manifestants ont mis le feu à deux cercueils remplis de coton devant le bâtiment appartenant à la SCI FRAAL, dans lequel la SARL SOCOVEG exploitait la librairie «Concorde», causant ainsi des dommages au bâtiment et au stock de marchandises ; que ces agissements étaient constitutifs du délit de destruction volontaire de biens d'autrui, réprimé par les dispositions du code pénal alors en vigueur ; que, nonobstant les liens existant entre les deux sociétés précitées et le groupe propriétaire de l'entreprise textile concernée par la procédure de liquidation, la seule circonstance que les deux cercueils ont été réalisés plusieurs jours avant la manifestation afin de symboliser la mort du textile vosgien ne permet pas de considérer qu'il a été dans l'intention des organisateurs de la manifestation d'incendier la librairie ou tout autre bâtiment, public ou privé ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient le préfet, cet incendie ne relevait pas d'actes planifiés ou prémédités ; que par suite, les dommages causés doivent être regardés comme la conséquence d'un attroupement ou d'un rassemblement, de nature à engager la responsabilité de l'Etat en application des dispositions précitées du code général des collectivités territoriales ;
Considérant cependant qu'il résulte de l'instruction que la SARL SOCOVEG, bien qu'elle y ait été invitée par les autorités administratives, n'a pas procédé à la fermeture de son établissement en temps utile à l'approche de la manifestation ; qu'ayant, ainsi concouru à ce que la marchandise exposée dans son magasin soit rendue impropre à son usage, elle soit supporter le 1/3 du préjudice qui en est résulté pour elle ;

Considérant, par ailleurs, que, s'agissant des frais d'expertise privée, non contradictoire et réalisée par les soins et à la demande de l'assureur de la SCI FRAAL et de la SARL SOCOVEG, elle n'a pas été utile à la solution du litige ; que, par suite, il n'y a pas lieu de condamner l'Etat à supporter la charge financière de cette expertise ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DES VOSGES est seulement fondé à obtenir la réformation du jugement attaqué en tant qu'il a intégralement fait droit aux conclusions de la SCI FRAAL et de la SARL SOCOVEG, à ce qu'un tiers des conséquences des dommages subis par cette dernière restent à sa charge ainsi que, pour les deux sociétés, l'intégralité des frais d'expertise ;


DÉCIDE :


Article 1er : La somme de 97 650 euros que l'Etat a été condamné à verser à la SARL SOCOVEG par le jugement du Tribunal administratif de Nancy du 4 juillet 2006 est ramenée à 64 449 euros.

Article 2 : Les frais d'expertise, pour un montant de 4 990,40 euros s'agissant de la SARL SOCOVEG et 4 476,65 euros s'agissant de la SCI FRAAL sont laissés intégralement à la charge des deux sociétés.

Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Nancy du 4 juillet 2006 est réformé en ce qu'il a de contraire aux articles 1 et 2 du présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête du PREFET DES VOSGES est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié AU PREFET DES VOSGES, A LA SARL SOCOVEG et à la SCI FRAAL.




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N° 06NC01385


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06NC01385
Date de la décision : 05/05/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. JOB
Rapporteur ?: Mme Pascale ROUSSELLE
Rapporteur public ?: M. WALLERICH
Avocat(s) : LANGUILLE FOURAY GUIRANNA CAHEN MORTIN KNITTEL WATBOT LUISIN GERRIET

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2008-05-05;06nc01385 ?
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