La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/02/2008 | FRANCE | N°06NC01525

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 25 février 2008, 06NC01525


Vu la requête, enregistrée le 1er décembre 2006, présentée pour la SARL METALME FRANCE, dont le siège est 3 rue Saint Christophe à Ecole Valentin (25480), représentée par Me Pascal Guyon, mandataire judiciaire, par Me Guichard, avocat ; la SARL METALME FRANCE demande à la Cour :

1°) d'annuler les jugements n° 0300894 et 0300895 du 5 octobre 2006, par lesquels le Tribunal administratif de Besançon a rejeté ses demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 1997 et 1998 e

t des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été notifiés au ti...

Vu la requête, enregistrée le 1er décembre 2006, présentée pour la SARL METALME FRANCE, dont le siège est 3 rue Saint Christophe à Ecole Valentin (25480), représentée par Me Pascal Guyon, mandataire judiciaire, par Me Guichard, avocat ; la SARL METALME FRANCE demande à la Cour :

1°) d'annuler les jugements n° 0300894 et 0300895 du 5 octobre 2006, par lesquels le Tribunal administratif de Besançon a rejeté ses demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 1997 et 1998 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été notifiés au titre de la période du 20 mai 1996 au 30 septembre 2000 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- en matière d'impôt sur les sociétés, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, les factures établies ne reflétaient pas le chiffre d'affaires réel de la société, car il s'agissait de pré-facturation, permettant aux organismes bancaires de procéder aux paiements dans le cadre d'une opération de fraude à la taxe sur la valeur ajoutée en Italie, et ces factures étaient annulées dès l'émission des factures définitives, aucun profit taxable n'en découlant ;

- la seule activité de la société était l'intermédiation en matière de facturation permettant de frauder la taxe sur la valeur ajoutée italienne et la seule marge imposable est celle d'une activité de prestation de services de facturation, dont le coefficient multiplicateur pourrait être fixé à 1,0025 au tire des années vérifiées ;

- les frais financiers liés à une opération de cautionnement de 32 920 000 F déposés auprès d'une banque italienne, en vue de permettre une spéculation sur le différentiel de cours entre diverses monnaies ont été justifiés et sont le corollaire des produits financiers ainsi réalisés, qui ont été déclarés dans les résultats déclarés de l'entreprise ;

- en matière de taxe sur la valeur ajoutée, le tribunal s'est livré à une mauvaise appréciation des faits car, dès lors que les marchandises n'ont jamais transité par le territoire français, tous les bons de livraison établis par elle étant des faux destinés à frauder la taxe sur la valeur ajoutée italienne, aucune opération assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée n'a été réalisée en France et ne devait y être assujettie ;

- de même, l'insuffisance de chiffre d'affaires déclaré n'est pas établie, dès lors qu'elle ne repose que sur les factures proforma établies pour frauder le fisc italien ;


Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 8 juin 2007, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; il conclut au rejet de la requête et fait valoir que :

- en matière d'impôt sur les sociétés, la SARL METALME FRANCE supporte la charge de la preuve du caractère exagéré des impositions et ne l'établit pas, l'examen de la comptabilité de l'entreprise révélant des soldes créditeurs de comptes clients confortés par l'établissement des factures, payées par le client, traduisant l'accord sur la chose et le prix, la circonstance que celles-ci n'auraient jamais été suivies d'effet étant inopérante ;

- les frais financiers imputés ne sont étayés d'aucun justificatif et ne résultent pas d'un prêt contracté dans l'intérêt de l'entreprise qui a déposé en caution une somme équivalente ;

- les opérations réalisées par l'entreprise sont, au terme des dispositions des articles 256 I et 258-1 du code général des impôts imposables à la taxe sur la valeur ajoutée en France puisqu'il s'agit de livraison de biens effectuées à titre onéreux, réalisées par un assujetti en tant que tel et que la livraison des biens est présumée se dérouler en France, la société requérante n'ayant produit, pour justifier de la livraison de biens intracommunautaires, que de faux documents de transport;

- la circonstance que ces lettres de voiture étaient fausses n'excluait pas la réalité d'opérations d'acquisitions intracommunautaires, devant donner lieu à liquidation de la taxe sur la valeur ajoutée en France ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;


Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 janvier 2008 :

- le rapport de Mme Rousselle, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Wallerich, commissaire du gouvernement ;




Considérant que la SARL METALME FRANCE, créée le 17 mai 1996, dont l'objet social était le négoce de métaux ferreux et non ferreux ainsi que les opérations connexes, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période allant du 20 mai 1996 au 30 septembre 2000 à l'issue de laquelle le vérificateur lui a notifié des redressements, au titre de l'impôt sur les sociétés pour les exercices clos en 1997 et 1998 d'un montant de 9 854 946 € en droits et pénalités, et 23 702 379 € en droits et pénalités de rappels de taxe sur la valeur ajoutée sur l'ensemble de la période vérifiée, l'ensemble de ces redressements incluant des majorations pour mauvaise foi ; que la société fait appel du jugement du Tribunal administratif de Besançon du 5 octobre 2006 rejetant sa demande de décharge des compléments d'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie à la suite de ce contrôle ;

S'agissant des redressements en matière d'impôt sur les sociétés :

Considérant, en premier lieu, que si la société METALME France, qui supporte la charge de la preuve du caractère exagéré des impositions notifiées en raison de la procédure suivie, allègue que les factures proforma, comptabilisées pour des montants de 83 890 951 F au titre de l'exercice 1996/1997 et 63 641 977 F pour l'exercice clos en 1998, étaient fictives et uniquement éditées afin de permettre de frauder le fisc italien et auraient, selon ses dires, été annulées au moment de l'émission des factures définitives, elle ne l'établit pas, la circonstance qu'aucune livraison de matériel ne serait, selon elle, intervenue, à la supposer établie, étant sans incidence sur le bien-fondé des redressements notifiés, au vu des soldes créditeurs constatés par le vérificateur, que présentaient les comptes clients des sociétés COREMET et TALMET, ouverts dans la comptabilité de la Société METALME FRANCE ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'étude de marge réalisée lors des opérations de contrôle a mis en évidence des marges négatives ; que le vérificateur a reconstitué le chiffre d'affaires de la société en appliquant la marge positive moyenne relevée pour les autres factures établies par la société au titre de chaque exercice ; que la société METALME FRANCE conteste les taux ainsi retenus et fait valoir que sa seule activité réelle étant l'intermédiation en matière de facturation, le taux de marge susceptible d'être appliqué devrait être celui d'une activité de prestation de services de facturation, dont le coefficient multiplicateur pourrait être fixé à 1,0025 au tire des années vérifiées ; que, toutefois, outre le fait qu'elle n'apporte aucun élément propre à l'entreprise ou tiré de comparaison avec des sociétés exerçant une activité comparable, permettant de corroborer ce taux, elle n'établit pas que son activité se limiterait à une activité d'intermédiation et ne portait pas, également, sur la vente de marchandises ;

Considérant, en troisième lieu, que la société METALME FRANCE allègue, sans d'ailleurs l'établir, avoir retiré des opérations en devises réalisées sur des comptes courants ouverts en lires et en dollars un produit financier du fait des variations de taux de change justifiant, selon elle, cette pratique ; que, pour contester le refus d'admettre le caractère déductible d'intérêts d'emprunts payés à la Banca Nazionale del Lavoro afin de financer ces opérations, elle se borne à produire devant la Cour des extraits de compte, non assortis d'explications ou de détails, ainsi que des documents rédigés en italien non traduits ; qu'ainsi, elle ne peut être regardée comme apportant la preuve, qui lui incombe, du montant réel, ni de l'effectivité de cette charge, ni de son intérêt dans le cadre d'une gestion normale de sa trésorerie ;

S'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée :

Considérant qu'aux termes de l'article 256-1 du code général des impôts « sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel » ; que l'article 258-1 du même code prévoit que « le lieu de livraison des biens meubles corporels est réputé se situer en France lorsque le bien se trouve en France : a. au moment de l'expédition ou du transport » ; qu'enfin, aux termes de l'article 262 ter I « sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée : 1° les livraisons de biens expédiés ou transportés sur le territoire d'un autre Etat membre de la Communauté Européenne à destination d'un autre assujetti ou d'une personne morale non assujettie » ;

Considérant que les transports de produits métallurgiques que la société allègue avoir confiés à plusieurs sociétés de transport reposaient, en réalité, sur de fausses lettres de voiture et des factures proforma afin de permettre une fraude à la taxe sur la valeur ajoutée en Italie ; que, toutefois, il ne résulte pas de l'instruction et en particulier des quelques procès-verbaux d'instruction issus de la procédure en cours devant les juridictions italiennes produits au dossier, que lesdits matériaux n'ont jamais transité par le territoire français ni qu'aucun produit métallurgique n'a été acquis par la société requérante ; que l'administration, qui n'était, au demeurant, pas en mesure de déterminer avec précision la nature et le volume exact des produits métallurgiques concernés, était fondée à établir l'imposition sur la base de la situation apparente ainsi créée par la redevable ; que dès lors, eu égard aux mentions figurant sur les différents documents produits, ces opérations ne sauraient, au sens des dispositions précitées du code général des impôts être assimilées au regard du vendeur à des exportations exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée perçue par l'Etat français ; que c'est par suite à bon droit que l'administration a assujetti les ventes litigieuses à la taxe sur la valeur ajoutée sur la base du prix facturé ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société METALME FRANCE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE
Article 1er : La requête de la SARL METALME FRANCE est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL METALME FRANCE et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

2
N° 06NC01525


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06NC01525
Date de la décision : 25/02/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. JOB
Rapporteur ?: Mme Pascale ROUSSELLE
Rapporteur public ?: M. WALLERICH
Avocat(s) : LAMY LEXEL

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2008-02-25;06nc01525 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award