La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/11/2007 | FRANCE | N°07NC00106

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 19 novembre 2007, 07NC00106


Vu I°), sous le n° 07NC00106, la requête, enregistrée le 23 janvier 2007, présentée pour la SOCIETE D'EXPLOITATION DES SOURCES ROXANE, dont le siège est Les Clos des Sources à La Ferriere Bochard (61420), par Me Le Mercier ; la SOCIETE D'EXPLOITATION DES SOURCES ROXANE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0502320 du 26 octobre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a, à la demande de l'Association «Bien vivre chez nous» , de M. A et Mmes C, X, D et Z, annulé l'arrêté du préfet de la Moselle du 6 août 2004 autorisant la SOCIETE D'EXPLOITATI

ON DES SOURCES ROXANE à exploiter une usine d'embouteillage et de forage...

Vu I°), sous le n° 07NC00106, la requête, enregistrée le 23 janvier 2007, présentée pour la SOCIETE D'EXPLOITATION DES SOURCES ROXANE, dont le siège est Les Clos des Sources à La Ferriere Bochard (61420), par Me Le Mercier ; la SOCIETE D'EXPLOITATION DES SOURCES ROXANE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0502320 du 26 octobre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a, à la demande de l'Association «Bien vivre chez nous» , de M. A et Mmes C, X, D et Z, annulé l'arrêté du préfet de la Moselle du 6 août 2004 autorisant la SOCIETE D'EXPLOITATION DES SOURCES ROXANE à exploiter une usine d'embouteillage et de forage pour l'alimentation en eau destinée à la consommation humaine sur le territoire de la commune de Nitting ;

2°) de rejeter la demande présentée par l'Association «Bien vivre chez nous», de M. A et Mmes C, X, D et Z, devant le Tribunal Administratif de Strasbourg ;

3°) d'annuler le SDAGE Rhin Meuse dans toutes ses dispositions ;

4°) subsidiairement, de saisir la Cour de Justice des Communautés Européennes dans le cadre d'une question préjudicielle afin que cette dernière annule le SDAGE Rhin Meuse comme non conforme aux principes généraux du droit communautaire, et notamment de la directive 2000/60/CE du 23 octobre 2000 établissant une politique communautaire de l'eau ;

La société soutient :

- qu'aucune production de documents d'incidence au titre de la police de l'eau prévue par le décret du 29 mars 2003 n'est imposée ;

- qu'il ne saurait être invoqué une prétendue insuffisance de l'étude d'impact ;

- que le projet n'est pas incompatible avec le SDAGE ;

- qu'il n'y a pas d'incompatibilité avec la loi du 21 avril 2005 ni avec le plan d'occupation des sols ;

Vu le mémoire enregistré le 17 juillet 2007, présenté par la secrétaire d'état chargée de l'écologie ; elle conclut aux mêmes fins que la requête et fait valoir que :

- le moyen retenu par les premiers juges, tiré de l'incompatibilité du projet avec le SDAGE doit être censuré ;

- ni le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact, ni le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation quant au risque pour la minéralisation de l'eau, la stabilité des sols ou la sécurité des riverains n'étaient fondés ;

- qu'il n'y a pas eu méconnaissance du principe de précaution ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 11 octobre 2007, présenté pour l'Association «Bien vivre chez nous», M. A et Mmes C, X, D et Z, par Me Meyer ; les défendeurs concluent au rejet de la requête et à ce que la SOCIETE D'EXPLOITATION DES SOURCES ROXANE soit condamnée à leur verser 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; ils font valoir que :

- sont irrecevables les conclusions nouvelles en appel tenant à l'annulation du SDAGE ;

- sont également irrecevables les conclusions autres que celles tendant à l'annulation d'une décision ;

- compte tenu de la durée d'application du SDAGE, le projet n'est pas compatible avec les objectifs de ce schéma ;

- l'étude d'impact est insuffisante ;

- les analyses de l'étude relatives à l'air, le paysage et l'eau sont insuffisantes ;

- l'enquête publique s'est déroulée de façon irrégulière ;

- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaît le principe de précaution du fait du risque de minéralisation, de déstabilisation des sols et, d'une manière générale, dans l'appréciation de la situation des riverains ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 17 octobre 2007, présenté pour la Région Lorraine, par Me Soler-Couteaux ; elle conclut au rejet de la requête et à ce que la SOCIETE D'EXPLOITATION DES SOURCES ROXANE soit condamnée à lui verser une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; la Région Lorraine fait valoir que :

- la requête est irrecevable à défaut d'avoir été présentée par un avocat ;

- sont irrecevables les conclusions nouvelles en appel tenant à l'annulation du SDAGE ;

- sont également irrecevables les conclusions autres que celles tendant à l'annulation d'une décision ;

- les dispositions de l'article L. 212-5-1 du code de l'environnement ne peuvent utilement être invoquées ;

- contrairement à ce que soutient la requérante, le SDAGE définit précisément les objectifs applicables ainsi que les mesures à mettre en oeuvre ;

- que la SOCIETE D'EXPLOITATION DES SOURCES ROXANE n'a nullement établi l'absence d'impact de son projet sur la nappe des grès du trias inférieur ;

- les avis rendus par les hydro-géologues montrent que le forage aurait un effet négatif sur le niveau de la nappe dans son ensemble ;

- l'arrêté querellé est soumis à la législation sur l'eau et, en particulier, le dossier devait comporter un volet sur les incidences de l'opération sur la ressource en eau qui fait défaut, entachant ainsi le dossier d'illégalité ;

- l'étude d'impact sur le paysage est insuffisante car elle ne prévoit aucun traitement paysager du projet ;

- l'étude est également insuffisante en ce qui concerne l'air ;

- l'étude est insuffisante sur les conséquences sur la santé, par voie de conséquence de l'insuffisance des indications sur la qualité de l'air ;

- l'étude d'impact est insuffisante au regard des impacts du projet sur l'eau, tant au niveau piézométrique de la nappe qu'à celui des forages voisins ;

Vu les courriers du président de la quatrième chambre de la Cour en date des 11 septembre 2007 et 3 octobre 2007 informant les parties en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ;

Vu le courrier du maire de Nitting en date du 29 septembre 2007 ;

Vu II°), sous le n° 07NC00115, le recours, enregistré le 24 janvier 2007, de la SECRETAIRE D'ETAT CHARGEE DE L'ECOLOGIE et du MINISTRE d'ETAT, MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT ET DE L'AMENAGEMENT DURABLES ; le ministre demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0502320 du 26 octobre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a, à la demande de l'Association «Bien vivre chez nous», de M. A et Mmes C, X, D et Z, annulé l'arrêté du préfet de la Moselle du 6 août 2004 autorisant la société d'exploitation des sources Roxane à exploiter une usine d'embouteillage et de forage pour l'alimentation en eau destinée à la consommation humaine sur le territoire de la commune de Nitting ;

2°) de rejeter la demande présentée par l'Association «Bien vivre chez nous», de M. A et Mmes C, X, D et Z, devant le Tribunal Administratif de Strasbourg ;

Il soutient que :

- le moyen retenu par les premiers juges, tiré de l'incompatibilité du projet avec le SDAGE doit être censuré ;

- ni le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact, ni le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation quant au risque pour la minéralisation de l'eau, la stabilité des sols ou la sécurité des riverains n'étaient fondés ;

- il n'y a pas eu méconnaissance du principe de précaution ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 20 avril 2007, présenté pour la Région Lorraine, place Hocquart, à Metz (57036), par Me Soler Couteaux ; elle conclut au rejet de la requête et à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que :

- le jugement n'est entaché d'aucune erreur de droit dès lors que l'arrêté préfectoral n'est pas compatible avec les dispositions du SDAGE, dont l'objectif principal est de lutter contre l'abaissement du niveau piézométrique de la nappe des grès du trias inférieur et qu'en l'espèce, la société d'exploitation des sources Roxane n'a nullement établi l'absence d'impact de son projet de forage sur cette nappe ;

- que les études produites sont insuffisantes et ne répondent pas aux exigences du décret du 29 mars 2003 ;

- que l'étude d'impact est insuffisante en tant qu'elle concerne les paysages, l'air, la santé et l'eau ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 11 octobre 2007, présenté pour l'Association «Bien vivre chez nous», M. A et Mmes C, X, D et Z, par Me Meyer ; les défendeurs concluent au rejet de la requête et à ce que la société d'exploitation des sources Roxane soit condamnée à leur verser 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; ils font valoir que :

- comme l'a jugé la Cour lors de l'examen de la demande de sursis à exécution du jugement, le projet n'est pas compatible avec les objectifs de ce schéma ;

- l'étude d'impact est insuffisante ;

- les analyses de l'étude quant à l'air, le paysage et l'eau sont insuffisantes ;

- l'enquête publique s'est déroulée de manière irrégulière dès lors que le rapport de l'expert G n'a été rendu qu'après clôture de l'enquête ;

- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaît le principe de précaution du fait du risque de minéralisation, de déstabilisation des sols et, d'une manière générale, dans l'appréciation de la situation des riverains ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu la loi n° 76-663 du 16 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement ;

Vu la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l'eau ;

Vu le décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 ;

Vu le décret n° 93-742 du 29 mars 1993 relatif aux procédures d'autorisation et de déclaration prévues par l'article 10 de la loi du 3 janvier 1992 sur l'eau ;

Vu le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux Rhin Meuse approuvé par le préfet de la Région Lorraine le 15 novembre 1996 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 octobre 2007 :

- le rapport de Mme Rousselle, premier conseiller,

- les observations de Me Le Mercier, avocat de la SOCIETE D'EXPLOITATION DES SOURCES ROXANE, de Me Reich, avocat de l'Association «Bien vivre chez nous» et autres et de MM. E et F pour le MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT ET DE L'AMENAGEMENT DURABLES,

- et les conclusions de M. Wallerich, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le recours n° 07NC00115 présenté par le MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT ET DE L'AMENAGEMENT DURABLES, et la requête n° 07NC00106 présentée pour la SOCIETE D'EXPLOITATION DES SOURCES ROXANE présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur les conclusions de la Région Lorraine :

Considérant que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté comme irrecevables les conclusions de la Région Lorraine ; que cette collectivité ne conteste pas l'irrecevabilité qui lui a été ainsi opposée par les premiers juges ; que, par suite, ses conclusions d'appel ne peuvent qu'être également rejetées ;

Sur les conclusions de la SOCIETE D'EXPLOITATION DES SOURCES ROXANE tendant à l'annulation du SDAGE Rhin-Meuse :

Considérant que les conclusions susmentionnées de la SOCIETE D'EXPLOITATION DES SOURCES ROXANE constituent une demande nouvelle en appel et sont par suite irrecevables ;

Sur le surplus des conclusions de la SOCIETE D'EXPLOITATION DES SOURCES ROXANE et les conclusions du MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT ET DE L'AMENAGEMENT DURABLES :

Considérant que, pour annuler l'arrêté du préfet de la Moselle en date du 6 août 2004 autorisant la SOCIETE D'EXPLOITATION DES SOURCES ROXANE à exploiter deux forages d'eau pratiqués dans la nappe phréatique des grès vosgiens sur le territoire de la commune de Nitting, le Tribunal administratif de Strasbourg a considéré que ladite autorisation aurait manifestement un impact négatif sur le niveau de la nappe phréatique, dans des conditions la rendant incompatible avec l'objectif fixé par le SDAGE Rhin Meuse, et donc illégale au regard des dispositions de l'article L. 212-1 XI du code de l'environnement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 212-1 du code de l'environnement «III - Chaque bassin ou groupement de bassins hydrographiques est doté d'un ou de plusieurs schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux fixant les orientations fondamentales d'une gestion équilibrée des eaux [...] XI : «- Les programmes et les décisions administratives dans le domaine de l'eau doivent être compatibles ou rendus compatibles avec les dispositions des schémas directeurs d'aménagement et de gestion des eaux.» ; que le SDAGE du bassin Rhin-Meuse, tel qu'approuvé par le préfet de la Région Lorraine le 15 novembre 1996, se fixe comme objectif d'enrayer la baisse du niveau de la nappe captive des grès du trias inférieur par la maîtrise des prélèvements et, comme principe de gestion pour atteindre cet objectif, d'équilibrer le bilan alimentation et prélèvements dans la nappe, en spécifiant que de nouveaux forages ne pourront être réalisés qu'en «respectant globalement et de manière partagée les objectifs concernant l'évolution du niveau de la nappe» ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'aucune des trois études hydro-géologiques réalisées lors de l'instruction de la demande n'a émis un avis défavorable au projet de la SOCIETE D'EXPLOITATION DES SOURCES ROXANE, même si la première, réalisée par un hydro-géologue agréé à la demande du préfet, recommande la limitation rigoureuse du volume des prélèvements et un strict suivi piezométrique de la nappe au droit des forages ; que la seconde étude , réalisée en 2003 à l'initiative de la direction départementale de l'agriculture et de la forêt par le bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) en vue de réaliser une simulation du fonctionnement intégrant les prélèvements futurs envisagés dans la nappe, prévoit la remontée du niveau de la nappe phréatique à partir de 2015, et un retour à un niveau satisfaisant à l'échéance 2100, compte tenu de l'arrêt programmé des exhaures minières et dans un contexte climatique constant ; que le rapport de l'hydro-géologue nommé par le président du Tribunal administratif de Strasbourg pour assister le commissaire enquêteur conclut sans ambiguïté que le projet ne présente pas de risque pour la ressource constituée par la nappe des grès vosgiens, tant au niveau local des captages d'alimentation en eau potable existants qu'au niveau de l'économie générale de la nappe au plan régional ; qu'il résulte en outre de l'instruction qu'à la date de la présente décision, l'arrêt anticipé du pompage des eaux d'exhaure, tant en France qu'en Allemagne, permet d'escompter que le bilan entre l'alimentation de la nappe et les prélèvements, y compris ceux résultant du projet litigieux, sera positif avant 2013 ; qu'il s'ensuit, contrairement à l'appréciation des premiers juges, qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'arrêté du préfet autorisant le prélèvement annuel d'un million de mètres cubes d'eau par an aurait à terme un impact négatif sur le niveau de la nappe phréatique des grès du trias inférieur et serait de ce fait incompatible avec le SDAGE Rhin Meuse ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par l'Association «Bien vivre chez nous», et autres devant le Tribunal administratif de Strasbourg ;

Sur la régularité de la procédure d'enquête publique :

En ce qui concerne le moyen tiré de l'insuffisance de l'étude d'impact :

Considérant qu'en vertu de l'article 3 du décret du 21 septembre 1977, à chaque exemplaire de la demande d'autorisation doivent être jointes les pièces suivantes : .«4° L'étude d'impact prévue à l'article 2 de la loi du 19 juillet 1976. Cette étude indiquera les éléments propres à caractériser la situation existante au regard des intérêts visés aux articles 1er des lois du 16 décembre 1964 et du 19 juillet 1976 et fera ressortir les effets prévisibles de l'installation sur son environnement, au regard de ces intérêts. L'étude détaillera en outre l'origine, la nature et l'importance des inconvénients susceptibles de résulter de l'exploitation de l'installation considérée. A cette fin, elle indiquera notamment en tant que de besoin, le niveau acoustique des appareils qui seront employés, le mode et les conditions d'approvisionnement en eau et d'utilisation de l'eau, les dispositions prévues pour la protection des eaux souterraines, l'épuration et l'évacuation des eaux résiduaires et des émanations gazeuses, l'élimination des déchets et résidus de l'exploitation, les conditions d'apport à l'installation des matières destinées à y être traitées et du transport des produits fabriqués. Les mesures envisagées par le demandeur pour supprimer, limiter ou compenser les inconvénients de l'installation feront l'objet de descriptifs précisant les dispositions d'aménagement et d'exploitation prévues, leurs caractéristiques détaillées ainsi que les performances attendues» ; que les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d'entraîner l'illégalité de la décision d'autorisation d'une installation classée que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'expression de ses observations par la population à l'occasion de l'enquête publique ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative en la conduisant à sous-estimer l'importance des conséquences du projet sur l'environnement et la commodité du voisinage ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'étude d'impact litigieuse comporte une analyse complète de la situation hydrologique actuelle et future du secteur concerné, ainsi que de l'ensemble de la nappe captive ; qu'en ce qui concerne les impacts sur le paysage, l'étude d'impact comporte au chapitre 1.2 une analyse du contexte paysager autour du site projeté ainsi qu'une indication précise sur l'intégration du projet dans le paysage ; que, s'agissant des impacts sonores, le chapitre IV sur le bruit, qui porte sur le bruit des installations et rappelle que les installations bruyantes qu'elle prend en compte sont les groupes électrogènes, les opérations de production et la circulation des poids lourds, retrace les mesures de niveau sonore réalisées qui envisagent une élévation moyenne du niveau sonore de 3 db de jour comme de nuit à la zone d'émergence réglementée la plus proche et précise que, compte tenu des mesures d'insonorisation des locaux techniques, les niveaux de bruit ne devraient pas excéder les normes admises ; que le bruit généré par le trafic des poids lourds est également pris en considération ; qu'enfin, s'agissant de l'impact sur l'air, l'étude envisage les conséquences du fonctionnement des diverses installations ainsi que de l'augmentation de la circulation routière aux abords du site ; qu'il suit de là que, contrairement à ce qu'ont soutenu les requérants devant le tribunal administratif, le dossier d'étude d'impact soumis à l'enquête publique n'est pas entaché d'insuffisances de nature à entacher d'illégalité la décision de l'administration prise au vu de cette enquête ;

En ce qui concerne le déroulement de l'enquête publique :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 123-5 du code de l'environnement, «à la demande du commissaire enquêteur ou du président de la commission d'enquête et lorsque les spécificités de l'enquête l'exigent, le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il délègue peut désigner un expert chargé d'assister le commissaire enquêteur ou le président de la commission d'enquête» ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne prévoit d'assurer la publicité du rapport de l'expert ainsi désigné ; qu'il résulte de l'instruction qu'en application de ces dispositions, le président du tribunal administratif de Strasbourg a, le 4 décembre 2003, à la demande du commissaire enquêteur, désigné M. G, hydro-géologue, afin de l'assister ; que la circonstance que le rapport de cet expert, dont la mission, ainsi qu'il vient d'être dit, était d'apporter une assistance technique au commissaire enquêteur, n'a été remis à ce dernier que le 3 mai 2004 et n'a pas été soumis à l'enquête publique n'est pas par elle-même de nature à entacher d'irrégularité la procédure suivie ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'arrêté attaqué est intervenu au terme d'une procédure irrégulière ;

Sur la légalité interne de l'arrêté attaqué :

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort de l'ensemble des études hydro-géologiques jointes au dossier que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, dès lors que le front d'eau salée se trouve en aval de l'endroit prévu par le forage, aucun risque de minéralisation de la nappe n'est à envisager ;

Considérant, en second lieu, que le risque de désordres causés aux forages voisins n'est qu'allégué par les requérants, qui n'apportent aucun élément de nature à étayer leurs affirmations ; qu'il en est de même s'agissant du risque allégué de déstabilisation des sols, qui ne ressort d'aucune pièce du dossier ;

Considérant, en troisième lieu, que si le trafic de poids lourds au départ de la future usine d'embouteillage va doubler, afin de permettre l'approvisionnement des installations et la commercialisation des bouteilles d'eau, il résulte de l'instruction que le trafic global recensé n'augmentera que de 4 %, que des mesures de contournement des agglomérations, et en particulier de Hesse, sont prévues par l'exploitant, ainsi qu'une distribution du trafic sur plusieurs itinéraires ; qu'enfin est à l'étude le projet d'un contournement routier de la commune de Hesse ; que la circonstance que la SOCIETE D'EXPLOITATION DES SOURCES ROXANE serait bénéficiaire indirecte de la réalisation de cet ouvrage public est sans incidence sur le fait que ledit contournement permettra de réduire encore l'impact de l'accroissement de la circulation dans la traversée de cette commune ;

Considérant, en dernier lieu, qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'autorisation litigieuse méconnaîtrait le principe de précaution formulé dans la charte de l'environnement ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requérants sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué qui doit être annulé, le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé l'arrêté en date du 6 août 2004 par lequel le préfet de la Moselle a autorisé la SOCIETE D'EXPLOITATION DES SOURCES ROXANE à exploiter une usine d'embouteillage et de forage pour l'alimentation en eau destinée à la consommation humaine, sur le territoire de la commune de Nitting ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par l'Association «Bien vivre chez nous», M. A et Mmes C, X, D et Z au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 26 octobre 2006 est annulé.

Article 2 : Les conclusions de la Région Lorraine, de l'Association «Bien vivre chez nous », de M. A, de Mmes B, X, Y et Z présentées devant le Tribunal administratif et la Cour sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE D'EXPLOITATION DES SOURCES ROXANE, à la présidente de la région Lorraine, à l'association Bien vivre chez nous, à M. Michel A, à Mme Christine C, à Mme Simone X, à Mme Lucie Y, à Mme Marie-Odile Z, à la commune de Nitting, au MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT ET DE L'AMENAGEMENT DURABLES et à la SECRETAIRE D'ETAT CHARGEE DE L'ECOLOGIE.

2

N°s 07NC00106,07NC00115


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07NC00106
Date de la décision : 19/11/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. COMMENVILLE
Rapporteur ?: Mme Pascale ROUSSELLE
Rapporteur public ?: M. WALLERICH
Avocat(s) : GEISZ - LE MERCIER - PAPILLAUD CANDELA ; GEISZ - LE MERCIER - PAPILLAUD CANDELA ; GEISZ - LE MERCIER - PAPILLAUD CANDELA ; GEISZ - LE MERCIER - PAPILLAUD CANDELA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2007-11-19;07nc00106 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award