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18/01/2007 | FRANCE | N°02NC00305

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 18 janvier 2007, 02NC00305


Vu la requête, enregistrée le 14 mars 2002, complétée par des mémoires enregistrés les 15 avril 2005, 20 avril 2006 et 4 décembre 2006, présentée par M. Jean-Pierre X, élisant domicile ...; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 96-1224, en date du 16 janvier 2002, par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la demande présentée par Me Jean-François DARGENT, agissant en qualité d'administrateur de sa liquidation judiciaire, tendant à la décharge, en droits et pénalités y afférentes, des rappels de taxe sur la valeur ajout

e mis à sa charge pour la période du 1er janvier 1989 au 31 décembre 1991 ;

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Vu la requête, enregistrée le 14 mars 2002, complétée par des mémoires enregistrés les 15 avril 2005, 20 avril 2006 et 4 décembre 2006, présentée par M. Jean-Pierre X, élisant domicile ...; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 96-1224, en date du 16 janvier 2002, par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la demande présentée par Me Jean-François DARGENT, agissant en qualité d'administrateur de sa liquidation judiciaire, tendant à la décharge, en droits et pénalités y afférentes, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er janvier 1989 au 31 décembre 1991 ;

2°) de prononcer la décharge de ces rappels de taxe sur la valeur ajoutée, ou leur réduction à hauteur d'un montant en droits de 842 141 F (128 383,57 euros), et pénalités y afférentes ;

3°) d'ordonner au besoin une expertise ;

4°) de prononcer la décharge de la taxe d'apprentissage qui lui est réclamée au titre de l'année 1989, pour un montant de 732 F (111,59 euros) ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat les frais exposés par lui ;

Il soutient que :

- le tribunal administratif n'a pas répondu à sa critique de la méthode utilisée par l'administration fiscale, ni à la nouvelle méthode qu'il propose lui-même, et son jugement est, sur ce point, insuffisamment motivé ;

- il apporte la preuve des inexactitudes résultant de la méthode d'évaluation du chiffre d'affaires taxable utilisée par l'administration en proposant une nouvelle méthode fondée sur la réédition des comptabilités des exercices en cause ;

- l'administration ne pouvait pas utiliser la comptabilité originelle de l'exercice 1989 pour déterminer une insuffisance d'imposition de la comptabilité définitive ;

- la comptabilité de l'exercice 1989, éditée le 20 mai 1992, a force probante ;

- les chiffres énoncés par le vérificateur sont excessifs et ne sont pas de nature à remettre en cause la légitimité de la comptabilité «définitive» ;

- si la comptabilité des exercices 1990 et 1991 a été reconstituée a posteriori, les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée avaient bien été souscrites pour ces années ;

- le vérificateur aurait dû tenir compte, au titre de l'exercice 1989, d'une taxe sur la valeur ajoutée déductible de 117 881 F (17 970,84 euros) non comptabilisée et d'un montant de taxe sur la valeur ajoutée de 20 244,56 F (3 086,26 euros) réglé à la direction des douanes le 20 juin 1990, relatif à la taxe sur la valeur ajoutée sur marge due sur une opération de courtage effectuée en 1988 ;

- la reconstitution du chiffre d'affaires taxable au titre de l'exercice 1990 comporte des erreurs de calcul ;

- la remise en cause par le vérificateur, au titre de l'exercice 1989, de l'exonération d'une vente à l'exportation, pour un montant de 14 000 F (2 139,29 euros), n'est pas justifiée ;

- il n'a pas été tenu compte d'une somme de 133 139 F (20 296,91 euros) versée le 19 février 1990 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 mai 2003, présenté pour le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, informant la Cour de l'intervention d'un dégrèvement, pour un montant de 57 521 F (8 769 euros) en droits et pénalités, et tendant pour le reste au rejet de la requête, par les motifs qu'elle n'est recevable que dans la limite de la demande présentée par M. X dans sa réclamation initiale, à hauteur d'un montant de 696 225 F (106 138,82 euros) en droits, qu'elle n'est pas recevable en tant qu'elle concerne la taxe d'apprentissage pour l'année 1989, à défaut de réclamation sur ce point, et que, pour le surplus, aucun des moyens invoqués par M. X n'est fondé ;

Vu les mémoires, enregistrés le 12 mai 2005 et le 23 mai 2006, présentés pour le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 décembre 2006 :

- le rapport de M. Montsec, président,

- et les conclusions de M. Lion, commissaire du gouvernement ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que, par une décision en date du 26 mai 2003, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux de la Marne a prononcé le dégrèvement, en droits et pénalités, à concurrence d'une somme de 57 521 F (8 769 euros), des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de M. X au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 1989 ; que les conclusions de la requête relatives à ces impositions sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;

Sur la fin de non-recevoir partielle opposée par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie à la requête de M. X :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 190-1 du livre des procédures fiscales : «Le contribuable qui désire contester tout ou partie d'un impôt qui le concerne doit d'abord adresser une réclamation au service territorial (…) de l'administration des impôts (…) dont dépend le lieu de l'imposition (…)» ;

Considérant qu'il résulte de l'examen des réclamations adressées le 23 décembre 1994 et le 28 décembre 1995 par M. X puis son conseil, au directeur régional des impôts de Châlons-en-Champagne, que la contestation ne concernait qu'une partie des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge du requérant, pour la période du 1er janvier 1989 au 31 décembre 1991, à concurrence de la somme de 696 225 F (106 138,82 euros) ; qu'il suit de là que, conformément aux dispositions précitées de l'article R. 190-1, les conclusions de la requête de M. X doivent être rejetées comme irrecevables, d'une part, en tant qu'elles tendent à obtenir la décharge de la taxe d'apprentissage réclamée à M. X au titre de l'année 1989 et, d'autre part, en tant qu'elles excèdent le quantum susmentionné, tel que contesté dans les réclamations, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ;

Sur le surplus des conclusions de la requête :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

Considérant que, contrairement à ce que soutient M. X, le tribunal administratif a, dans son jugement, répondu à la critique de la méthode d'évaluation mise en oeuvre par l'administration et à la nouvelle méthode d'évaluation proposée par lui, en relevant qu'il n'y avait pas lieu de tenir compte de la reconstitution de la comptabilité des années en cause, effectuée plusieurs années après, à partir d'éléments comptables non produits lors de la vérification ;

En ce qui concerne la charge de la preuve :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : «Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition» ; qu'aux termes de l'article R. 194-1 du même livre, dans sa rédaction alors applicable : «Lorsque, ayant donné son accord au redressement ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la notification de redressement, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de redressement, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré (…)» ;

Considérant que, pour ce qui concerne l'année 1989, M. X, qui ne conteste pas la procédure de taxation d'office dont il a fait l'objet, faute d'avoir déposé dans les délais requis les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée, supporte, en application des dispositions précitées de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales, la charge de prouver l'exagération des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge ; que, pour ce qui concerne les années 1990 et 1991, M. X, qui n'a pas répondu, dans le délai légal, à la notification de redressement qui lui avait été régulièrement adressée, doit être regardé comme ayant tacitement accepté les redressements et supporte donc également la charge de la preuve, en application des dispositions susmentionnées de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales ;

En ce qui concerne le bien-fondé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige :

Considérant que M. X, qui exploitait depuis le 5 janvier 1988 une entreprise individuelle de courtage en véhicules automobiles, sous l'enseigne «European Commerce Wagen», à Tinqueux, dans la Marne, ne conteste pas avoir exercé en réalité, dès 1989, une activité de négociant en véhicules automobiles, consistant dans l'achat et la revente de véhicules, sans contrat de courtage ni à l'achat ni à la vente, pour laquelle il se rémunérait par le différentiel entre prix d'achat et prix de vente ; que, suite à une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 1989 au 31 décembre 1991, M. X s'est vu réclamer, notamment, le paiement de rappels de taxe sur la valeur ajoutée portant sur toute cette période ; que, pour ce qui concerne l'exercice 1989, le vérificateur a regardé la comptabilité présentée comme probante et a procédé à la rectification du chiffre d'affaires soumis à taxe sur la valeur ajoutée par comparaison entre les produits figurant au compte de résultats et les opérations ayant effectivement fait l'objet de déclarations de taxe sur la valeur ajoutée, la différence mettant en évidence une minoration de la taxe sur la valeur ajoutée déclarée ; que, pour ce qui concerne les exercices 1990 et 1991, pour lesquels il est constant qu'il n'existait aucune comptabilité, le vérificateur a procédé à une reconstitution du chiffre d'affaires soumis à la taxe sur la valeur ajoutée à partir des bordereaux de vente qui lui avaient été présentés, révélant également une minoration du chiffre d'affaires déclaré à la taxe sur la valeur ajoutée ; que, pour les trois exercices, le vérificateur a, en outre, remis en cause une partie de la taxe sur la valeur ajoutée déductible déclarée ;

Considérant que la comptabilité présentée par M. X, reconstituée par un cabinet comptable en 1994, puis par lui-même en 1999, plusieurs années après les exercices en cause et après les opérations de vérification, est, par nature, dépourvue de valeur probante ; que M. X ne peut dès lors utilement invoquer le contenu de cette comptabilité pour critiquer la méthode d'évaluation du chiffre d'affaires soumis à la taxe sur la valeur ajoutée mise en oeuvre par le vérificateur et fonder les bases des méthodes successives d'évaluation qu'il propose lui-même ; que M. X ne peut davantage utilement invoquer, en tout état de cause, l'attitude de son comptable qui aurait procédé en 1989 à un transfert des ventes de véhicules neufs en ventes de véhicules d'occasion, «rayant» du chiffre d'affaires les ventes et achats correspondants pour ne plus faire apparaître que la marge, et n'aurait pas établi de comptabilité pour les exercices 1990 et 1991 ;

Considérant que, si M. X conteste la remise en cause par le vérificateur, au titre de l'exercice 1989, de l'exonération d'une vente à l'exportation, pour un montant de 14 000 F (2 134,29 euros), il n'établit pas la réalité de cette exportation, en se bornant à produire un talon de chèque et des relevés de banque relatifs au reversement de la taxe à l'acheteur et un procès-verbal des services des douanes où ledit acheteur indique que, si le véhicule était destiné à être exporté au Maroc, il y a renoncé en raison des taxes réclamées ;

Considérant que, si M. X demande l'imputation sur la taxe sur la valeur ajoutée due au titre de l'année 1989 d'un montant de taxe déductible de 117 881 F (17 970,84 euros), omis par son comptable, ainsi que d'un montant de taxe sur la valeur ajoutée de 20 244,56 F (3 086,26 euros) réglée à la direction des douanes le 20 juin 1990, relatif à la taxe sur la valeur ajoutée sur marge due sur une opération de courtage effectuée en 1988, il n'apporte à l'appui de cette demande aucune précision de nature à permettre au juge d'en apprécier le bien-fondé ;

Considérant que M. X fait valoir que le vérificateur n'aurait pas tenu compte d'une régularisation intervenue en novembre 1990, liée au transfert d'une partie du chiffre d'affaires relatif à des véhicules neufs sur celui relatif à des véhicules d'occasion, et qu'il y aurait en conséquence double taxation sur les ventes de véhicules d'occasion ; que, cependant, ladite régularisation a bien été prise en considération par le vérificateur, au titre de l'exercice 1989, dès lors qu'il a utilisé la comptabilité de cet exercice telle que «rééditée» en 1992, au moment des opérations de vérification, qui incluait cette régularisation ; que, par ailleurs, alors que le requérant n'établit pas, ni même n'allègue, que la régularisation dont s'agit correspondait à la réalité de la répartition des transactions effectuées entre véhicules neufs et véhicules d'occasion, c'est à bon droit que l'administration fiscale a remis en cause cette régularisation, au titre de l'exercice 1990, comme n'étant pas justifiée, et l'a intégrée dans le rappel de taxe sur la valeur ajoutée pour un montant en droit de 286 329 F (43 650,57 euros) ;

Considérant que si, s'agissant de la reconstitution du chiffre d'affaires, notamment pour ce qui concerne l'exercice 1990, M. X invoque des erreurs de calcul, il n'établit pas que de telles erreurs aient pu avoir une incidence qui lui soit défavorable sur la fixation des rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige ;

Considérant que, dans ces conditions, M. X n'établit pas que la méthode utilisée par le vérificateur aboutirait à un chiffre d'affaires soumis à la taxe sur la valeur ajoutée excessif, pour les trois exercices en cause, ni que le vérificateur aurait à tort remis en cause une partie de la taxe sur la valeur ajoutée déductible au titre des mêmes exercices ;

Considérant, enfin, que M. X ne peut utilement demander la prise en compte d'une somme de 133 139 F (20 296,91 euros) qui aurait été versée le 19 février 1990, alors qu'il ne conteste pas que ce versement a servi au paiement de la taxe sur la valeur ajoutée due en fonction des déclarations effectuées et ne saurait dès lors être déduit des rappels en litige ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise qu'il demande, M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ; que doivent être également rejetées, par voie de conséquence et en tout état de cause, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Sur les passages injurieux et diffamatoires des mémoires de l'appelant :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 741-2 du code de justice administrative : «Sont également applicables les dispositions des alinéas 3 à 5 de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 ci-après reproduite : (…) Pourront (…) les juges, saisis de la cause et statuant sur le fond, prononcer la suppression des discours injurieux, outrageants ou diffamatoires (…)» ;

Considérant que l'examen des mémoires du requérant révèle l'existence de passages injurieux ou diffamatoires à l'encontre de l'administration ; qu'il y a lieu, en application des dispositions précitées, d'ordonner la suppression des passages suivants : dans son mémoire daté du 14 mars 2002, page 16, de «En fait il utilisera» à «délictueuse», page 18, de «Mais cette nouvelle pratique» à «pouvoir déplacé», page 27, de «mais pour révéler» à «période contrôlée», page 29, de «L'analyse exhaustive» à «malhonnête», dans son mémoire daté du 2 avril 2005, pages 1 et 2 en totalité, page 3, de «Le vérificateur» à «dénaturé», page 6, de «Cette évidence» à «sans conteste», page 9, de «C'est à partir» à «le masquer», page 17, de «l'administration fiscale souhaite» à «son vérificateur», page 18, de «Mais attendu» à «en écriture», page 19, de «C'est que le vol» à «plus de quelques jours» et de «1° de décider» à «contribuable requérant», et, enfin, dans son mémoire daté du 15 avril 2006, page 2, de «A n'en pas douter» à «bien au contraire» ;

DECIDE :

Article 1er : Il est ordonné la suppression, dans les mémoires du requérant, des passages susmentionnés.

Article 2 : A concurrence de la somme de 8 769 euros, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. X.

Article 3 : Le surplus de la requête de M. X est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jean-Pierre X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

7

N° 02NC00305


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 02NC00305
Date de la décision : 18/01/2007
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: M. Pierre MONTSEC
Rapporteur public ?: M. LION

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2007-01-18;02nc00305 ?
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