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19/10/2006 | FRANCE | N°05NC00797

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ere chambre - formation a 3, 19 octobre 2006, 05NC00797


Vu la requête, enregistrée le 27 juin 2005 et complétée par mémoire enregistré le 20 janvier 2006, présentés pour la COMMUNE DE SCHEIBENHARD, représentée par son maire en exercice, à ce dûment habilité par délibération du 31 mai 2005 et élisant domicile en cette qualité à l'Hôtel de ville, 32 rue des Tirailleurs Tunisiens à Scheibenhard (67630), par Me Nunge, avocat ; la COMMUNE DE SCHEIBENHARD demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0300484 du 19 avril 2005 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a, à la demande de Mme X, annulé l'arrêté d

u 20 décembre 2002 par lequel son maire a refusé de lui délivrer un permis de co...

Vu la requête, enregistrée le 27 juin 2005 et complétée par mémoire enregistré le 20 janvier 2006, présentés pour la COMMUNE DE SCHEIBENHARD, représentée par son maire en exercice, à ce dûment habilité par délibération du 31 mai 2005 et élisant domicile en cette qualité à l'Hôtel de ville, 32 rue des Tirailleurs Tunisiens à Scheibenhard (67630), par Me Nunge, avocat ; la COMMUNE DE SCHEIBENHARD demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0300484 du 19 avril 2005 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a, à la demande de Mme X, annulé l'arrêté du 20 décembre 2002 par lequel son maire a refusé de lui délivrer un permis de construire ;

2°) de rejeter la demande de Mme X devant le Tribunal administratif de Strasbourg ;

3°) de mettre à la charge de Mme X une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- qu'elle était fondée, nonobstant l'annulation d'un premier refus par le tribunal administratif, à opposer à nouveau un refus à la demande de permis de construire litigieux, compte tenu de l'évolution des circonstances ;

- que c'est à tort que le tribunal a écarté son moyen relatif à l'incompatibilité du projet avec le schéma directeur, dès lors que les décisions d'urbanisme doivent être compatibles avec celui-ci ;

- que le projet porte atteinte à l'esprit de l'article L. 111-3 du code rural dans la mesure où il empêchera le développement de la commune ;

- qu'au surplus, le projet ne respecte les dispositions dudit article L. 111-3 qu'à la condition de considérer la maison d'habitation de Mme X comme un bâtiment agricole annexe, ce qui n'est pas le cas ;

- que c'est à tort que le tribunal a écarté le moyen tiré de l'article R. 111-4 du code de l'urbanisme ;

- que le maire pouvait légalement fonder son refus sur l'atteinte à l'ordre public engendrée par le projet ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 27 juillet 2005 et complété par mémoire enregistré le 14 février 2006, présentés pour Mme X, par Me Karm ;

Mme X conclut :

- en premier lieu, au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 7 500 euros soit mise à la charge de la COMMUNE DE SCHEIBENHARD en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

A ce titre, elle soutient qu'aucun des moyens énoncés par la commune n'est fondé ;

- en second lieu, par voie d'appel incident, à la réformation du jugement attaqué en tant qu'il n'a pas fait droit à sa demande d'astreinte assortissant l'injonction qu'il a prononcée ;

A ce titre, elle soutient que c'est à tort que le tribunal n'a pas fait droit à sa demande et qu'il y a lieu pour la Cour de prescrire une astreinte dont le montant est laissé à sa libre appréciation ;

Vu l'ordonnance du président de la première chambre de la Cour fixant la clôture de l'instruction au 27 mars 2006 à 16 heures ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code rural ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 septembre 2006 :

- le rapport de M. Vincent, président,

- et les conclusions de M. Adrien, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par jugement du 5 novembre 2002 devenu définitif, le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé l'arrêté en date du 3 janvier 2001 par lequel le maire de Scheibenhard a refusé de faire droit à la demande de permis de construire déposée par Mme X en vue d'édifier une construction à usage de poulailler industriel et enjoint ledit maire de procéder au réexamen de cette demande ; que, par arrêté du 20 décembre 2002, le maire de Scheibenhard a de nouveau refusé la délivrance du permis de construire sollicité par l'intéressée, pour l'unique motif tiré de ce que le projet litigieux se situait en zone NCb du plan d'occupation des sols, déclarée inconstructible dans le cadre de la révision dudit plan adoptée le 27 mars 2002 ; que, sur requête de Mme X, le Tribunal administratif de Strasbourg a, en premier lieu, annulé cette nouvelle décision par jugement du 19 avril 2005 en estimant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme faisaient obstacle à ce que le maire de Scheibenhard pût légalement fonder son refus sur des dispositions postérieures à la date du premier refus de permis de construire, d'autre part, que les autres moyens invoqués en défense par la commune n'étaient pas fondés, et, en second lieu, enjoint la COMMUNE DE SCHEIBENHARD de statuer sur la demande de Mme X dans un délai d'un mois ; que ladite commune, qui ne conteste pas la motivation du tribunal relative à l'application de l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme, conclut à l'annulation dudit jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à ses autres moyens articulés en défense, cependant que, par voie d'appel incident, Mme X demande la réformation du jugement attaqué en tant qu'il n'a pas assorti d'une astreinte l'injonction prononcée à l'encontre de ladite commune ;

Sur l'appel principal de la commune :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article L. 122-1 du code de l'urbanisme dans leur rédaction antérieure à la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 que le permis de construire n'est pas au nombre des décisions administratives dont la légalité doit s'apprécier par référence aux dispositions des schémas directeurs d'aménagement et d'urbanisme ; que c'est par suite à bon droit que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de l'incompatibilité du permis litigieux avec le schéma directeur de la Bande Rhénane Nord arrêté le 28 mars 2000 en tant que ce dernier prévoirait la réalisation d'une voie de contournement du village dont l'assiette correspondrait en partie à celle du projet de Mme X ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 111-3 du code rural : «Lorsque des dispositions législatives ou réglementaires soumettent à des conditions de distance l'implantation ou l'extension de bâtiments agricoles vis-à-vis des habitations et immeubles habituellement occupés par des tiers, la même exigence d'éloignement doit être imposée à ces derniers à toute nouvelle construction précitée à usage non agricole nécessitant un permis de construire, à l'exception des extensions de constructions existantes» ;

Considérant que la COMMUNE DE SCHEIBENHARD ne saurait utilement invoquer ces dispositions, qui édictent une exigence d'éloignement minimal des constructions à usage non agricole par rapport aux bâtiments agricoles préexistants, à l'encontre du projet de Mme X, qui concerne un bâtiment agricole ; que la circonstance que l'application de ces dispositions serait susceptible de faire obstacle à l'urbanisation future de la commune est sans incidence sur le bien-fondé de la décision attaquée au regard des dispositions précitées du code rural ;

Considérant, en troisième lieu, que si la COMMUNE DE SCHEIBENHARD fait en outre valoir que le projet méconnaîtrait des dispositions, qu'elle ne précise pas, en vertu desquelles les bâtiments agricoles devraient être éloignés d'au moins 100 mètres par rapport aux constructions à usage non agricole autres que celles considérées comme annexées à l'exploitation, telles que l'habitation de l'exploitant, en tant que l'habitation de Mme X, située sur le terrain d'assiette de l'exploitation, comporterait deux logements occupés par des propriétaires différents dont l'un n'a pas le statut d'agriculteur, la seule circonstance que l'unique maison propriété des époux X et dans laquelle réside Mme X, exploitante, serait également en partie la propriété d'un tiers non agriculteur, n'est pas de nature à faire regarder ladite construction comme ne constituant pas un bâtiment annexe à une exploitation agricole ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article R. 111-4 du code de l'urbanisme : «Le permis de construire peut être refusé sur des terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à l'importance ou à la destination de l'immeuble ou de l'ensemble d'immeubles envisagé… Il peut également être refusé si les accès présentent un risque pour la sécurité des usagers des voies publiques ou pour celle des personnes utilisant ces accès. Cette sécurité doit être appréciée compte tenu, notamment, de la position des accès, de leur configuration ainsi que de la nature et de l'intensité du trafic…» ;

Considérant que l'accès et la sortie de l'exploitation correspondant à la construction litigieuse doit s'effectuer par un chemin d'exploitation préexistant desservant d'autres agriculteurs de la commune et débouchant sur la route départementale n° 3 ; que si la COMMUNE DE SCHEIBENHARD soutient que ce chemin d'exploitation serait insuffisant pour absorber la circulation supplémentaire générée par le projet litigieux et que celle-ci créerait un risque au niveau de l'accès du chemin d'exploitation sur la route départementale, c'est à juste titre, en l'absence de tout élément en sens contraire, que les premiers juges ont affirmé qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier que l'accès en cause ne permettrait pas de satisfaire aux conditions fixées par les dispositions précitées de l'article R. 111-4 du code de l'urbanisme ;

Considérant, en dernier lieu, qu'à supposer que, comme le soutient la commune requérante, l'opposition au projet de la majorité des habitants de la commune pourrait constituer un facteur de troubles à l'ordre public, cette seule circonstance ne saurait légalement fonder son refus de faire droit à la demande de Mme X ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE DE SCHEIBENHARD n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision susrappelée de son maire en date du 20 décembre 2002 ;

Sur l'appel incident de Mme X :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : «Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public… prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé» ; qu'aux termes de l'article L. 911-3 du même code : «Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les circonstances prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet» ;

Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que la juridiction, saisie de conclusions en se sens, n'est pas tenue d'assortir d'une astreinte l'injonction de prendre une nouvelle décision qu'elle a prononcée sur le fondement des dispositions précitées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de réformer le jugement attaqué en tant qu'il n'a pas fait droit aux conclusions de Mme X en ce sens ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme X, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la COMMUNE DE SCHEIBENHARD au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la COMMUNE DE SCHEIBENHARD une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par Mme X et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la COMMUNE DE SCHEIBENHARD et l'appel incident de Mme X sont rejetés.

Article 2 : La COMMUNE DE SCHEIBENHARD versera une somme de 1 000 euros à Mme X au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE SCHEIBENHARD et à Mme Blandine X.

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N° 05NC00797


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ere chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 05NC00797
Date de la décision : 19/10/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MAZZEGA
Rapporteur ?: M. Pierre VINCENT
Rapporteur public ?: M. ADRIEN
Avocat(s) : SELARL JURIS DIALOG

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2006-10-19;05nc00797 ?
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