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08/06/2006 | FRANCE | N°02NC00731

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2eme chambre - formation a 3, 08 juin 2006, 02NC00731


Vu la requête, enregistrée le 5 juillet 2002, complétée par un mémoire enregistré le 29 octobre 2002, présentée pour la société JLM EDITIONS, dont le siège est situé 38 rue Saint Michel à Ungersheim (68190), par Me Avitabile, avocat ;

La société JLM EDITIONS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°9900322 du 11 avril 2002 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1992 et

1993 et des pénalités y afférentes et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquel...

Vu la requête, enregistrée le 5 juillet 2002, complétée par un mémoire enregistré le 29 octobre 2002, présentée pour la société JLM EDITIONS, dont le siège est situé 38 rue Saint Michel à Ungersheim (68190), par Me Avitabile, avocat ;

La société JLM EDITIONS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°9900322 du 11 avril 2002 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1992 et 1993 et des pénalités y afférentes et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquelles elle a été assujettie pour la période du 1er janvier 1992 au 31 décembre 1993 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 10 000 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le jugement n'est pas suffisamment motivé ; qu'elle n'a pas été informée de la possibilité de bénéficier de la cascade complète ; que l'administration a remis en cause le contrat de licence de marque sans que le comité consultatif des abus de droit soit saisi ; qu'elle n'a pas eu communication des documents obtenus par l'administration dans le cadre de l'exercice de son droit de communication malgré sa demande ; que les immobilisations corporelles correspondant aux contrats de concession de licence n'étant pas fictives, la taxe sur la valeur ajoutée était déductible ; que lors de leur acquisition les appartements d'Antibes devaient permettre d'exploiter le contrat de concession de licence dans le département des Alpes Maritimes ; que la taxe sur la valeur ajoutée était déductible sur cet investissement ; que les contrats n'étant pas fictifs, elle était en droit de procéder à des dotations aux amortissements ; qu'elle a produit des justifications pour les charges qu'elle a déduites ; que l'activité de location n'ayant été que la conséquence de l'escroquerie dont elle a été victime, cette activité n'est pas de nature à remettre en cause l'exonération pour entreprise nouvelle ; que l'administration n'apportant pas la preuve que les sommes inscrites en compte courant ont été mises à la disposition de l'associé titulaire du compte, elle ne pouvait procéder à l'imposition des revenus distribués correspondants ; que le profit sur le Trésor correspondant au rappel de taxe sur la valeur ajoutée sur les appartements d'Antibes ne doit pas être constaté pour que la taxe sur la valeur ajoutée correspondante puisse être déduite du résultat ; que les pénalités n'ont pas été motivées ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 27 novembre 2002, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie qui conclut au rejet de la requête en faisant valoir que les moyens ne sont pas fondés ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 mai 2006 :

- le rapport de Mme Richer, président,

- et les conclusions de Mme Rousselle, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que si la SARL JLM EDITIONS soutient que le jugement attaqué ne serait pas suffisamment motivé, il ressort de l'examen de celui-ci que le Tribunal administratif de Strasbourg, qui n'était pas tenu de répondre à chaque argument de la requête, s'est prononcé sur l'ensemble des moyens qui avaient trait à la régularité de la procédure d'imposition ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement manque en fait ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales : Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses : (...) b) ou qui déguisent soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus ; c) ou qui permettent d'éviter, en totalité ou en partie, le paiement des taxes sur le chiffre d'affaires correspondant aux opérations effectuées en exécution d'un contrat ou d'une convention. L'administration est en droit de restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse. En cas de désaccord sur les redressements notifiés sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit (...) ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, pour justifier les rappels de taxe sur la valeur ajoutée et les suppléments d'impôt sur les sociétés notifiés à la société JLM EDITIONS, à la suite d'une vérification de sa comptabilité, l'administration a fait valoir, non que les contrats de concession de licence d'exploitation passés avec une entreprise « Willcine Editions » auraient été conclus de manière fictive ou dans le seul but d'éluder l'impôt, mais que l'existence même de ces contrats de concession n'était pas établie ; que, ce faisant, elle ne s'est pas placée sur le terrain de l'abus de droit ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'administration aurait mis en oeuvre implicitement la procédure de répression des abus de droit prévue à l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, sans saisir le comité consultatif de répression des abus de droit ne peut être accueilli ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du 2e alinéa de l' article L. 77 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au cours des années vérifiées : « Les entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés peuvent, dans la mesure où le bénéfice correspondant aux redressements effectués est considéré comme distribué, par application des articles 109 et suivants du code général des impôts, à des associés ou actionnaires dont le domicile ou le siège est situé en France, demander que l'impôt sur le revenu supplémentaire dû par les bénéficiaires en raison de cette distribution soit établi sur le montant du rehaussement soumis à l'impôt sur les sociétés diminué du montant de ce dernier impôt » ; que le 4e alinéa du

même article précise : « Les demandes que les contribuables peuvent présenter au titre des deuxième et troisième alinéas doivent être faites au plus tard dans le délai de trente jours consécutifs à la réception de la réponse aux observations prévue à l'article L 57 ou, à défaut, d'un

document spécifique les invitant à formuler lesdites demandes » ; qu'il ne résulte pas de ces dispositions que l'administration serait tenue, à l'occasion de sa réponse aux observations de la société vérifiée, de l'informer de la faculté qui lui est offerte par le 2e alinéa de l'article L. 77 précité ; que la société requérante ne peut en tout état de cause, opposer au service, une instruction 13 L-1-90 du 21 février 1990 ni sur le fondement de l'article L. 80A du livre des procédures fiscales dès lors que cette doctrine traitant d'une question relative à la procédure d'imposition ne peut être regardée comme comportant une interprétation de la loi fiscale au sens desdites dispositions, ni sur le fondement de l'article 1er du décret du 28 novembre 1983, dès lors qu'imposant des règles de procédure non prévues par les dispositions du livre des procédures fiscales que son auteur n'avait pas compétence pour instituer, elle est contraire aux lois et règlements ; qu'il résulte de ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Strasbourg a écarté le moyen tiré d'un vice de la procédure d'imposition fondé sur un défaut d'information relatif à la mise en oeuvre des dispositions de l'article L. 77 sus-rappelées ;

Considérant, en troisième lieu, que si la société JLM EDITIONS soutient qu'elle n'a pas eu connaissance des documents obtenus par l'administration auprès du Crédit mutuel, dans le cadre de l'exercice du droit de communication, malgré une demande formulée le 23 janvier 1995, il résulte de l'instruction que ces documents figuraient en annexe à la réponse aux observations du contribuable qui lui a été adressée le 23 février 1995 ; qu'ainsi, le moyen manque en fait ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée :

Considérant que pour contester les rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été mis à sa charge pour la période du 1er janvier 1992 au 31 décembre 1993, la société JLM EDITIONS se borne à reprendre l'argumentation qu'elle a présentée en première instance sans critiquer les motifs du jugement ; qu'elle ne met pas ainsi le juge d'appel en mesure de se prononcer sur les erreurs que le tribunal administratif aurait pu commettre en rejetant les moyens relatifs à la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée sur l'acquisition de contrats de concession de licence et sur le prix d'acquisition de deux appartements situés à Antibes ;

En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés :

S'agissant des charges déduites par la société JLM EDITIONS :

Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature. 2° les amortissements réellement effectués par l'entreprise (...) ; qu'en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure

de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des créances de tiers, amortissements, provisions et charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; qu'en ce qui concerne les charges, le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;

Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que la société JLM EDITIONS a, pour l'évaluation du résultat de ses exercices clos au 31 décembre 1992 et au 31 décembre 1993, déduit pour un montant respectivement de 49 348 F et 80 800 F, les amortissements pratiqués sur les immobilisations incorporelles inscrites à l'actif de son bilan et correspondant au montant hors taxes de contrats relatifs aux concessions de licence d'exploitation de la marque « Agenda décideur » et « Repert Utile » qu'elle a déclaré avoir acquises en 1992 auprès de M. William X ; que pour justifier la réalité des écritures portées en charges, M. Y, gérant de fait de la société JLM EDITIONS, n'a pu produire lors de la vérification de comptabilité que des contrats qui ne comportaient pas la signature de M. X ; que les déclarations de ce dernier ont révélé qu'un seul contrat avait été passé pour les départements d'Alsace avec Mme Y ; que l'examen des comptes privés de M. et Mme Y dans le cadre de la procédure de contrôle diligentée à leur encontre n'a permis d'établir que l'existence d'un règlement correspondant à cet unique contrat ; que les allégations de la société JLM EDITIONS selon lesquelles la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires aurait admis implicitement « le caractère non fictif des opérations » sont dépourvues de pertinence, la commission ayant expressément subordonné l'abandon des redressements à la production par la société des justificatifs permettant de s'assurer de la réalité du paiement des contrats litigieux ; que si la société JLM EDITIONS a produit en appel des écritures de régularisation passées dans la comptabilité en 1996, ces documents ne permettent pas de justifier la réalité des immobilisations incorporelles ; qu'ainsi, la société appelante, qui n'apporte pas de justifications suffisantes, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration a réintégré dans les résultats des exercices clos en 1992 et 1993 le montant des dotations aux amortissements à hauteur respectivement de 49 348 F et 80 800 F ;

Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction que la société JLM EDITIONS n'a pas justifié la totalité des charges inscrites dans un compte 6238 « divers » ; que s'agissant du compte de charges 6251 « voyages », l'administration a admis les justifications produites le 13 août 1996 correspondant à des frais de restaurant pour un montant de 4 770 F ; qu'elle n'a toutefois pas admis les frais engagés les jours fériés ; que, contrairement à ce que soutient la société JLM EDITIONS, l'administration n'avait pas l'obligation de répondre à des productions de pièces postérieures à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes

sur le chiffre d'affaires ; que s'agissant du compte 6451 « cotisations URSSAF », la société JLM EDITIONS n'a produit aucune pièce pour justifier l'inscription d'une provision de 30 000 F ; que, dès lors, la société appelante n'est pas fondée à soutenir que ces différentes charges étaient déductibles du résultat ;

S'agissant de l'exonération pour entreprise nouvelle :

Considérant que la société JLM EDITIONS reprend l'argumentation qu'elle a présentée en première instance ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les premiers juges auraient, par les moyens qu'ils ont retenus et qu'il y a lieu d'adopter commis une erreur en écartant le moyen tiré de ce que la société pouvait bénéficier lors de sa création d'une exonération pour entreprise nouvelle ;

S'agissant des revenus distribués :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment de l'examen des avis de mises en recouvrement, qu'aucune imposition supplémentaire n'a été réclamée à la société JLM EDITIONS au titre des revenus distribués ; que, par suite, les conclusions relatives à ce chef de redressement sont irrecevables ;

S'agissant du profit sur le Trésor :

Considérant que si la société JLM EDITIONS reprend son argumentation de première instance, elle fait en outre valoir que la taxe sur la valeur ajoutée déduite à tort n'a pas été inscrite au compte 6352 « TVA non récupérable » ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les premiers juges auraient, par les moyens qu'ils ont retenus et qu'il y a lieu d'adopter commis une erreur en écartant le moyen tiré de ce que le profit sur le Trésor devait être annulé ;

Sur les pénalités :

Considérant que pour contester les pénalités dont ont été assorties les impositions litigieuses, la société JLM EDITIONS se borne à reprendre l'argumentation qu'elle a présentée en première instance sans critiquer les motifs du jugement ; qu'elle ne met pas ainsi le juge d'appel en mesure de se prononcer sur les erreurs que le tribunal administratif aurait pu commettre en rejetant le moyen relatif à la motivation insuffisante des pénalités ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL JLM EDITIONS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;

Sur les frais exposés :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que demande la SARL JLM EDITIONS au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société JLM EDITIONS est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société JLM EDITIONS et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

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N° 02NC00731


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 02NC00731
Date de la décision : 08/06/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : Mme FELMY
Rapporteur ?: Mme Michèle RICHER
Rapporteur public ?: Mme ROUSSELLE
Avocat(s) : SELASA J.L.A

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2006-06-08;02nc00731 ?
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