Vu, I°) la requête enregistrée au greffe de la Cour le 8 novembre 1999 sous le n° 99NC02322, et les mémoires complémentaires, enregistrés les 2 juin 2000 et 22 décembre 2003, présentés pour la S.A. GUIRAUDIE et AUFFEVE (ci-après dénommée G.A.), actuellement dénommée SOCIETE FONCIERE ARIANE, dont le siège est ... (31505), par Me de Forges, avocat ; la S.A. G.A. demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement n° 910216 en date du 9 septembre 1999 du Tribunal administratif de Besançon en ce qu'il a déclaré l'Etat responsable de la moitié des préjudices qu'elle a subis du fait des dommages que les crues de 1983 et 1990 ont causé à la société Equipements et Fournitures pour l'Imprimerie ( ci-après dénommée E.F.I.) ;
2°) de déclarer l'Etat entièrement responsable des préjudices qu'elle a subis de ce fait ;
3°) de condamner l'Etat à lui payer toutes les condamnations qu'elle a versées à la société E.F.I. et à son assureur A.G.F., avec intérêts à compter des dates de paiement ;
4°) de réformer le jugement en ce qu'il a déduit du préjudice indemnisable par l'Etat la somme de 25 554 443,70 francs que la société E.F.I. ne lui a pas remboursée ;
5°) de condamner l'Etat à lui payer ladite somme de 25 554 443,70 francs ; dire et juger que l'Etat sera subrogé à due concurrence dans les droits qu'elle peut détenir sur la société E.F.I. ;
6°) de réformer le jugement en ce qu'il a refusé de mettre à la charge de l'Etat les frais, dépens, émoluments et honoraires qu'elle a exposés dans les appels en garantie qu'elle a dû engager contre Batical, le cabinet d'architectes Acrua, la M.A.F., la Socotec, la compagnie Le Nord (Allianz-Via), la compagnie Zurich et la compagnie U.A.P. devant les juridictions judiciaires ;
7°) de condamner l'Etat à lui rembourser lesdits frais, dépens, émoluments et honoraires ;
8°) de réformer le jugement en ce qu'il a refusé de mettre à la charge de l'Etat les frais qu'elle a exposés pour les besoins de sa défense et laissés à sa charge dans les diverses instances judiciaires ainsi que les frais irrépétibles qu'elle a exposés devant la Cour administrative d'appel de Nancy ;
9°) de condamner l'Etat à lui rembourser lesdits frais ;
10°) de réformer le jugement en ce qu'il a refusé de mettre à la charge de l'Etat les intérêts sur les frais d'expertises administratives qu'elle a avancés ;
11°) de condamner l'Etat à payer lesdits intérêts à compter des dates de paiement des frais d'expertise ;
12°) de condamner l'Etat à lui payer les intérêts de toutes les sommes rappelées ci-dessus avec capitalisation des intérêts pour les périodes annuelles postérieures à celles retenues par le tribunal administratif ;
13°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 100 000 francs au titre des frais irrépétibles ;
Elle soutient que :
- elle ne saurait encourir aucune responsabilité ;
- elle n'avait aucune raison de solliciter des renseignements complémentaires après sa première consultation des services de l'équipement ;
- l'Etat est seul responsable du fait de ses multiples fautes et carences ;
- l'intégralité des préjudices qu'elle a subis doit être indemnisée ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 20 mars 2000, présenté par le ministre de l'équipement, des transports et du logement ;
Le ministre demande à la Cour :
- de rejeter la requête de la S.A. G.A. ;
- de condamner la S.A. G.A. à payer à l'Etat la somme de 50 000 francs au titre des frais irrépétibles ;
Il soutient que :
- la S.A. G.A. connaissait le risque d'inondations et a commis une faute, totalement exonératoire de la responsabilité de l'Etat, en ne sollicitant aucun renseignement auprès des services compétents et en n'engageant aucune étude technique sérieuse pour déterminer la cote altimétrique d'implantation de la future usine de la société E.F.I. ;
- la S.A. G.A. avait connaissance de l'existence de la cote 267,40 NGF-IGN ;
- il y a absence de lien direct de causalité entre la faute de l'administration de l'Etat et les dommages subis par l'usine de la société E.F.I. ;
- le tribunal administratif a rejeté, à bon droit, le surplus des conclusions indemnitaires de la S.A. G.A. ;
Vu, II°) le recours, enregistré au greffe de la Cour le 15 novembre 1999 sous le n° 99NC02341, et les mémoires complémentaires, enregistrés les 20 mars 2000 et 13 mars 2001, présentés par le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT ; le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 910216 en date du 9 septembre 1999 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a déclaré l'Etat responsable de la moitié des conséquences dommageables, pour la S.A. G.A., des inondations subies en 1983 et 1990 par l'usine de la société E.F.I. à Baume-les-Dames ;
2°) de rejeter la demande de la S.A. G.A. devant le Tribunal administratif de Besançon ;
3°) de condamner la S.A. G.A. à payer à l'Etat la somme de 90 000 francs au titre des frais irrépétibles ;
Il soutient que :
- son recours est recevable puisque présenté dans les délais et dirigé contre un jugement avant dire droit ;
- la S.A. G.A., qui connaissait le risque d'inondations, ne s'est pas préoccupée d'assurer la mise hors d'eau de la future construction et a ainsi commis une faute totalement exonératoire de la responsabilité de l'Etat ;
- la S.A. G.A. avait connaissance de la cote 267,40 NGF ;
- la survenance du litige est imputable à l'inaction de la S.A. G.A. et ne présente pas de lien de causalité avec la faute de l'Etat ;
- l'action de la S.A. G.A. devant le tribunal administratif est une action subrogatoire ;
- la demande indemnitaire de la S.A. G.A. était atteinte par la prescription quadriennale ;
- l'évaluation du préjudice établie par le tribunal administratif est erronée ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les mémoires en défense, enregistrés les 2 juin 2000, 26 juin 2001, 20 décembre 2001, 31 octobre 2002 et le 22 décembre 2003, présentés pour la S.A. G.A., par Me de Forges, avocat ;
La S.A. G.A. demande à la Cour :
- de joindre les instances n° 99NC02322 et 99NC2341 ;
- de dire et juger que l'appel du ministre est tardif ;
- de lui donner acte qu'elle reprend les demandes formulées dans sa requête d'appel ;
Elle soutient que :
- le recours ministériel a été présenté hors délai ;
- son action devant le tribunal administratif est une action récursoire ;
- le préjudice qu'elle a subi présente un caractère direct ;
- l'Etat a commis des fautes de nature à engager sa responsabilité ;
- elle n'a commis aucune faute ;
- l'intégralité du préjudice qu'elle a subi doit être indemnisée ;
Vu le mémoire, enregistré le 6 décembre 2001, présenté pour la commune de Baume-les-Dames, par Me Y..., avocat ;
La commune de Baume-les-Dames demande à la Cour de confirmer la décision rendue par le Tribunal administratif de Besançon en ce qu'il a débouté la S.A. G.A. de son action à son encontre et l'Etat de son appel en garantie ;
Vu, III°) la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 25 novembre 2002 sous le n° 02NC01257, et les mémoires complémentaires, enregistrés les 26 juin et 22 décembre 2003 et le 27 septembre 2004, présentés pour la S.A. G.A., actuellement dénommée SOCIETE FONCIERE ARIANE, dont le siège est ... (31505), par Me de Forges, avocat ; la S.A. G.A. demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement n° 910216 en date du 3 octobre 2002 du Tribunal administratif de Besançon en ce qu'il a déclaré l'Etat responsable de la moitié des préjudices qu'elle a subis et déterminés par le supplément d'instruction ;
2°) de déclarer l'Etat entièrement responsable des préjudices qu'elle a subis de ce fait ;
3°) de réformer le jugement en ce qu'il condamne l'Etat au paiement de la moitié seulement des sommes complémentaires qu'elle a versées aux A.G.F. ; par suite, condamner l'Etat au paiement de la somme de 9 386 162 francs (1 430 911,17 euros) ; assortir cette condamnation des intérêts de retard depuis la date de paiement de ladite somme et ordonner la capitalisation des intérêts pour les périodes annuelles suivant ledit paiement ;
4°) de réformer le jugement en ce qu'il condamne l'Etat au paiement de la moitié seulement de la somme qu'elle a versée à la compagnie A.G.F., sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, en application de l'arrêt de la Cour d'appel de Besançon du 31 mai 1995, et ainsi condamner l'Etat à supporter l'intégralité dudit paiement soit la somme de 15 000 francs ( 2 286,74 euros) ;
5°) de réformer le jugement en ce qu'il condamne l'Etat au paiement de la moitié seulement des frais d'expertise judiciaire visés au jugement et qu'elle a supportés ; par suite, condamner l'Etat au paiement de la somme de 1 735 899 francs (264 636,10 euros), assortie des intérêts de retard depuis la date du paiement de ladite somme, et ordonner la capitalisation des intérêts pour les périodes annuelles suivant ledit paiement ;
6°) de réformer le jugement en ce qu'il condamne l'Etat au paiement de la moitié seulement des dépens auxquels elle a été condamnée dans les litiges l'opposant à la société E.F.I. et à son assureur ; par suite, condamner l'Etat au paiement de la somme de 1 659 501 francs (252 989,30 euros) au titre des dépens qu'elle a supportés au cours des procédures précédentes, assortie des intérêts de retard depuis la date du paiement de ladite somme, et ordonner la capitalisation des intérêts pour les périodes annuelles postérieures suivant ledit paiement ;
7°) d'ordonner la jonction de la présente requête avec les requêtes enregistrées sous les n° 99NC2322, 99NC02341 et 02NC01287 ;
8°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 30 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- elle n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité ;
- l'administration est entièrement responsable du préjudice qu'elle a subi ;
- ce préjudice présente un caractère direct avec les fautes commises par l'administration ;
- la prescription quadriennale ne saurait être opposée à sa demande indemnitaire ;
- le tribunal administratif n'a pas pris en compte l'ensemble des préjudices qu'elle a subis ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les mémoires en défense, enregistrés les 7 février 2003 et 15 juin 2004, présentés pour l'Etat, représenté par le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, par la SCP Peignot Garreau, avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation ;
L'Etat demande à la Cour :
- de rejeter la requête de la S.A. G.A. ;
- de condamner la S.A. G.A. à lui payer la somme de 6 000 euros au titre des frais irrépétibles ;
Il soutient que :
- le préjudice subi par la S.A. G.A. présente un caractère indirect ;
- l'Etat n'a pas commis de faute dans la délivrance du permis de construire ;
- la S.A. G.A.. a accumulé les fautes dans la construction de l'usine de la société E.F.I. ;
- la demande indemnitaire de la S.A. G.A. était atteinte par la prescription quadriennale ;
Vu, IV°) le recours, enregistré au greffe de la Cour le 2 décembre 2002 sous le n° 02NC01284, et les mémoires complémentaires, enregistrés les 6 février 2003 et 14 juin 2004, présentés pour le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS, DU LOGEMENT, DU TOURISME ET DE LA MER, par la SCP Peignot, Garreau, avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation ; le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS, DU LOGEMENT, DU TOURISME ET DE LA MER demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 910216 en date du 3 octobre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Besançon l'a condamné à verser à la S.A. G.A. la somme de 975 411,50 euros ;
2°) de rejeter la demande indemnitaire de la S.A. G.A. ;
3°) de condamner la S.A. G.A. à lui verser une somme de 10 000 euros au titre des frais irrépétibles ;
Il soutient que :
- le préjudice subi par la S.A. G.A. présente un caractère indirect ;
- la S.A. G.A. a commis des fautes totalement exonératoires de sa propre responsabilité ;
- la demande indemnitaire de la S.A. G.A. est une demande subrogatoire ;
- les condamnations prononcées à l'encontre de la S.A. G.A. au bénéfice de la société E.F.I. ne peuvent lui être imputées ;
- la demande indemnitaire de la S.A. G.A.. était atteinte par la prescription quadriennale ;
- le tribunal l'a condamné à tort à verser à la S.A. G.A. la somme de 975 411,50 euros ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les mémoires en défense, enregistrés les 28 mai et 22 décembre 2003 et le 27 septembre 2004, présentés pour la S.A. G.A. par Me de Forges, avocat ;
La S.A. G.A. demande à la Cour :
- de rejeter le recours de l'Etat ;
- de reprendre les demandes formulées dans sa requête d'appel ;
Elle soutient que :
- son préjudice présente un caractère direct ;
- elle n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité ;
- l'administration est entièrement responsable du préjudice qu'elle a subi ;
- la prescription quadriennale ne saurait être opposée à sa demande d'indemnisation ;
- le tribunal administratif n'a pas pris en compte l'ensemble des préjudices qu'elle a subis ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code de l'urbanisme, applicable au 30 juin 1980 ;
Vu le code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure applicable au 25 juin 1974 ;
Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics ;
Vu le décret du 25 juin 1974 portant approbation du plan des surfaces submersibles de la vallée de la rivière le Doubs dans la section comprise, dans le département du Doubs, entre le pont de la route nationale 438 (commune de Voujeaucourt) à l'amont et la limite du département du Jura à l'aval ;
Vu le décret du 25 juin 1974 déterminant les dispositions techniques applicables dans les parties submersibles de la rivière le Doubs dans la section comprise, dans le département du Doubs, entre le pont de la route nationale 438 (commune de Voujeaucourt) à l'amont et la limite du département du Jura à l'aval ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 février 2006 :
- le rapport de M. Collier, premier conseiller,
- les observations de Me Badin, substituant Me de Forges, avocat de la SOCIETE FONCIERE ARIANE, et de Me X... pour la SCP Peignot, Garreau, avocat du MINISTRE DES TRANSPORTS, DE L'EQUIPEMENT, DU TOURISME ET DE LA MER,
- et les conclusions de M. Tréand, commissaire du gouvernement ;
Vu la note en délibéré enregistrée le 17 février 2006 présentée pour la SOCIETE FONCIERE ARIANE, anciennement S.A. G.A. ;
Sur la jonction :
Considérant que les requêtes enregistrées sous les n° 99NC02322, 99NC02341, 02NC01257 et 02NC01284 présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre, afin de statuer par un même arrêt ;
Sur la recevabilité du recours du MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS, DU TOURISME ET DE LA MER :
Considérant qu'aux termes des dispositions figurant à l'article R. 811-6 du code de justice administrative : Par dérogation aux dispositions du premier alinéa de l'article R. 811-2, le délai d'appel contre un jugement avant dire droit, qu'il tranche ou non une question au principal, court jusqu'à l'expiration du délai d'appel contre le jugement qui règle définitivement le fond du litige. ; qu'il résulte de ces dispositions que, contrairement à ce qui est soutenu par la S.A. GUIRAUDIE et AUFFEVE, le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS, DU TOURISME ET DE LA MER était recevable à faire appel, le 15 novembre 1999, du jugement avant dire droit en date du 9 septembre 1999 par lequel le Tribunal administratif de Besançon l'a déclaré responsable de la moitié des dommages causés à la société Equipement et Fournitures pour l'Imprimerie (E.F.I.), le montant définitif des réparations mises à la charge de l'Etat ayant été fixé par un second jugement du Tribunal administratif de Besançon en date du 3 octobre 2002 ;
Sur la responsabilité :
Considérant que la société Equipement et Fournitures pour l'Imprimerie (E.F.I.) a obtenu le 30 juin 1980 un permis de construire accordé, au nom de l'Etat, par le préfet du Jura pour la réalisation, sur le territoire de la commune de Baume-les-Dames, zone industrielle de la Prairie, d'un bâtiment à usage industriel dont la construction a été confiée à la société GUIRAUDIE et AUFFEVE (G.A.) ; qu'à la suite de deux crues du Doubs, intervenues en 1983 et en 1990, le bâtiment en cause a été rendu totalement inutilisable, la société E.F.I ayant, alors, recherché la responsabilité de son constructeur, la S.A. G.A. devant les juridictions judiciaires sur le fondement de la garantie décennale des constructeurs ; que devant cet ordre de juridiction, la responsabilité de la S.A. G.A. a été retenue pour avoir réalisé une construction dans une zone inondable sans s'entourer des précautions indispensables pour éviter sa submersion en cas d'inondations ; qu'à la suite des condamnations à réparation qui ont été prononcées à son encontre, au profit de la société E.F.I., la S.A. G.A. a recherché la responsabilité solidaire de la commune de Baume-les-Dames et de l'Etat pour ne pas l'avoir informée que la construction devait être réalisée à une hauteur au-dessus de la cote 267,40, cote préconisée par le service de la navigation de Lyon dans le cadre des prescriptions nécessaires pour assurer le libre écoulement des eaux ;
Considérant que lorsque le responsable d'un dommage, condamné par l'autorité judiciaire à en indemniser la victime, saisit la juridiction administrative d'un recours en vue de faire supporter la charge de la réparation par la collectivité publique, co-auteur de ce dommage, sa demande n'a pas le caractère d'une action récursoire par laquelle il ferait valoir des droits propres à l'encontre de cette collectivité, mais d'une action subrogatoire fondée, conformément au principe posé par l'article 1251 du code civil, sur les droits de la victime a l'égard de ladite collectivité ; qu'ainsi subrogé, il ne saurait avoir plus de droits que la victime et peut se voir opposer les moyens de défense qui auraient pu l'être au subrogeant ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, d'une part, que la société E.F.I. a reconnu avoir eu connaissance de la lettre, datée du 3 juillet 1980, adressée par le service de la navigation de Lyon à la direction départementale de l'équipement du Doubs prescrivant que le pétitionnaire devrait disposer ses installations au-dessus de la cote 267,40, d'autre part, que cette même information, comme le relèvent les experts intervenus à la procédure, figurait dans un rapport d'examen du dossier de conception de l'ouvrage adressé le 24 septembre 1980 à la société E.F.I. par le bureau de contrôle Socotec ; que la société E.F.I., qui savait ainsi à quelle altitude devait être implanté son bâtiment quelques semaines après le début des travaux et à une date à laquelle, pour un surcoût maximum de 350 000 francs, elle pouvait modifier cette hauteur a, par imprudence, commis une faute de nature à exonérer totalement l'Etat de sa responsabilité ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui vient d'être dit que le MINISTRE DE L'EQUIPEMENT, DES TRANSPORTS, DU TOURISME ET DE LA MER est fondé à soutenir que c'est tort que, par les jugements attaqués du Tribunal administratif de Besançon, il a été déclaré responsable de la moitié des conséquences dommageables, pour la S.A. G.A., des inondations subies par la société E.F.I. dans ses bâtiments situés à Baume-les-Dames et condamné à verser à la S.A. G.A. 50 % des sommes que celle-ci avait été condamnée à verser à la société E.F.I. ; qu'il y a lieu par suite de rejeter les requêtes susvisées de la SA GUIRAUDIE et AUFFEVE ;
Considérant qu'aux termes des dispositions figurant à l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens …
Considérant que les dispositions précitées font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la société GUIRAUDIE et AUFFEVE la somme qu'elle réclame sur leur fondement ;
Considérant, en revanche, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la société GUIRAUDIE et AUFFEVE à payer à l'Etat la somme de 1 000 euros en application de ces dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1er : Les jugements du Tribunal administratif de Besançon en date des 9 septembre 1999 et 3 octobre 2002 sont annulés.
Article 2 : La demande présentée par la société GUIRAUDIE et AUFFEVE devant le Tribunal administratif de Besançon et ses requêtes susvisées sont rejetées.
Article 3 : La société GUIRAUDIE et AUFFEVE est condamnée à verser à l'Etat la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE FONCIERE ARIANE, au MINISTRE DES TRANSPORTS, DE L'EQUIPEMENT, DU TOURISME ET DE LA MER et à la commune de Baume-les-Dames.
4
N° 99NC02322,02NC01257,02NC01284,99NC02341