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23/03/2006 | FRANCE | N°04NC00597

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ere chambre - formation a 3, 23 mars 2006, 04NC00597


Vu la requête, enregistrée le 29 juin 2004, présentée pour M. Bertrand X, élisant domicile ..., par Me Brand ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 02-02083 du 4 mai 2004, par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la délibération du conseil municipal de Bouxwiller du 21 janvier 2002 approuvant la révision du plan d'occupation des sols de la commune en ce qu'elle classe sa parcelle en zone NCB, ensemble la décision du maire du 30 avril 2002 rejetant son recours gracieux contre cette délibération ;>
2°) d'annuler ladite délibération, ainsi que la décision susvisée du ma...

Vu la requête, enregistrée le 29 juin 2004, présentée pour M. Bertrand X, élisant domicile ..., par Me Brand ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 02-02083 du 4 mai 2004, par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la délibération du conseil municipal de Bouxwiller du 21 janvier 2002 approuvant la révision du plan d'occupation des sols de la commune en ce qu'elle classe sa parcelle en zone NCB, ensemble la décision du maire du 30 avril 2002 rejetant son recours gracieux contre cette délibération ;

2°) d'annuler ladite délibération, ainsi que la décision susvisée du maire de Bouxwiller ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Bouxwiller une somme de 2 000 € au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient :

- que c'est à tort que le tribunal a estimé que la délibération du 6 septembre 2001, modifiant le projet de révision du plan d'occupation des sols, n'a pas eu d'incidence sur le régime juridique applicable au document d'urbanisme, dès lors que cette délibération a eu également pour but d'adapter le projet aux besoins de la commune ;

- que le zonage retenu concernant sa parcelle est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- qu'une marge de recul par rapport à un élevage de bétail imposée sans indemnisation pour les propriétés voisines méconnaît le protocole additionnel n° 1 à la convention européenne des droits de l'homme ;

- que le nouveau classement retenu est discriminatoire et favorise un exploitant agricole ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 31 janvier 2005, présenté pour la commune de Bouxwiller par MMe Soler-Couteaux et Gillig ; la commune de Bouxwiller conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 € soit mise à la charge de M. X au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient qu'aucun des moyens énoncés par M. X n'est fondé ;

Vu le mémoire complémentaire, enregistré le 30 septembre 2005, présenté pour M. X ; M. X conclut aux mêmes fins que sa requête ;

Il soutient, en outre, qu'il a seul conservé la propriété de l'immeuble en cause après son divorce et qu'il a retrouvé l'intégralité de ses droits sur son patrimoine depuis la clôture pour extinction du passif de la procédure de liquidation judiciaire intentée à son encontre ;

Vu le mémoire complémentaire, enregistré le 10 novembre 2005, présenté pour la commune de Bouxwiller qui conclut aux mêmes fins que son mémoire en défense ;

Elle soutient, en outre, que la requête de M. X est irrecevable faute d'intérêt à agir à la date à laquelle le recours a été exercé ;

Vu l'ordonnance du président de la première chambre de la Cour fixant la clôture de l'instruction au 15 novembre 2005 à 16 heures ;

Vu le mémoire complémentaire, enregistré le 7 février 2006, présenté pour M. X ;

Vu, enregistrée le 16 mars 2006, la note en délibéré présentée pour M. X ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 mars 2006 :

- le rapport de M. Vincent, président,

; les observations de Me Brand, avocat de M. X, et de Me Coueffé, de la SELARL Soler-Couteaux, Llorens, avocat de la commune de Bouxwiller ;

- et les conclusions de M. Adrien, commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de capacité à agir de M. X :

Sur la légalité de la décision attaquée :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 123-19 du code de l'urbanisme : « … Lorsqu'un plan d'occupation des sols est en cours de révision et que le projet de plan d'occupation des sols a été arrêté par le conseil municipal avant l'entrée en vigueur de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000…, la révision dudit document reste soumise au régime antérieur à ladite loi à condition que son approbation intervienne dans un délai d'un an à compter de l'entrée en vigueur de la loi… » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le conseil municipal de Bouxwiller a arrêté le projet de révision du plan d'occupation des sols de la commune par une délibération en date du 25 mai 2000, soit avant l'entrée en vigueur de la loi susvisée, fixée au 1er avril 2001, et que ladite révision a été approuvée par une nouvelle délibération en date du 21 janvier 2002, soit dans le délai d'un an à compter du 1er avril 2001 ; que si le requérant soutient toutefois que les dispositions transitoires susrappelées ne pouvaient recevoir application en l'espèce, dès lors que la révision du plan d'occupation des sols n'aurait en réalité été arrêtée que par une délibération en date du 6 septembre 2001, il ressort des termes de cette dernière délibération que la modification du projet à laquelle elle procède est intervenue pour tenir compte des avis des personnes publiques associées, conformément aux dispositions des anciens articles R. 123-9 et R. 123-10 du code de l'urbanisme ; que si, il est vrai, ladite délibération mentionne également que les modifications en cause viseraient également à « tenir compte de l'évolution du projet de révision » et à « adapter le document aux besoins de la commune », le requérant, qui est en mesure d'accéder sur sa demande au dossier détenu par la commune, n'apporte aucun commencement de preuve de ce que les modifications qui procéderaient des mentions précitées du procès-verbal de séance du conseil municipal conduiraient à un bouleversement de l'économie générale du plan d'occupation des sols en cours de révision et seraient ainsi d'une ampleur telle que la délibération en cause devrait être regardée comme ayant seule arrêté le projet de révision du plan d'occupation des sols, au sens des dispositions précitées ; qu'il s'ensuit que, sans qu'il soit besoin d'ordonner le supplément d'instruction sollicité, le moyen doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il convient, par les motifs énoncés par les premiers juges et qu'il y a lieu pour la Cour d'adopter, d'écarter le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entaché le classement de la parcelle du requérant en secteur agricole non constructible ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il est de la nature de tout plan d'occupation des sols de définir des règles concernant le droit d'implanter des constructions ; qu'ainsi, l'impossibilité de construire résultant pour le requérant de la révision du plan d'occupation des sols de la commune de Bouxwiller ne porte pas d'atteinte illégale au principe d'égalité des citoyens devant la loi ;

Considérant, en quatrième lieu, que le requérant doit être regardé, en soutenant que le classement de sa parcelle méconnaîtrait le droit de propriété garanti par le premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en tant qu'il n'est assorti d'aucune indemnisation, comme entendant faire valoir que les dispositions de l'article L. 160-5 du code de l'urbanisme, en vertu desquelles : « N'ouvrent droit à aucune indemnité les servitudes instituées par application du présent code… et concernant notamment… l'interdiction de construire dans certaines zones… Toutefois, une indemnité est due s'il résulte de ces servitudes une atteinte aux droits acquis ou une modification à l'état antérieur des lieux déterminant un dommage matériel, direct et certain… », seraient incompatibles avec l'article 1er dudit protocole additionnel, qui stipule que : « Toute personne… a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. - Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre ne vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général… » ;

Considérant que, d'une part, l'article L. 160-5 du code de l'urbanisme subordonne le principe qu'il édicte de non-indemnisation des servitudes d'urbanisme à la condition que celles-ci aient été instituées légalement, aux fins de mener une politique d'urbanisme conforme à l'intérêt général et dans le respect des règles de compétence, de procédure et de forme prévues par la loi ; que, d'autre part, cet article ne pose pas un principe général et absolu, mais l'assortit expressément de deux exceptions touchant aux droits acquis par les propriétaires et à la modification de l'état antérieur des lieux ; qu'enfin, cet article ne fait pas obstacle à ce que le propriétaire dont le bien est frappé d'une servitude prétende à une indemnisation dans le cas exceptionnel où il résulte de l'ensemble des conditions et circonstances dans lesquelles la servitude a été instituée et mise en oeuvre, ainsi que de son contenu, que ce propriétaire supporte une charge spéciale et exorbitante hors de proportion avec l'objectif d'intérêt général poursuivi ; que, dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'article L. 160-5 du code de l'urbanisme serait incompatible avec les stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, soit en lui-même, soit par les conditions dans lesquelles il est intervenu, le classement du terrain de M. X en zone inconstructible par le plan d'occupation des sols révisé de la commune de Bouxwiller ait fait peser sur l'intéressé une charge spéciale et exorbitante hors de proportion avec les justifications d'intérêt général sur lesquelles repose ce document d'urbanisme ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré par le requérant de l'atteinte à son droit de propriété doit être écarté ;

Considérant, en dernier lieu, qu'il ne résulte pas des pièces du dossier que le classement du terrain du requérant en zone naturelle ait été effectué dans le but de favoriser indûment les intérêts financiers de l'exploitant agricole dont la propriété est contiguë à celle du requérant ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré du détournement de pouvoir doit être écarté ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Bouxwiller, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. X au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. X une somme de 1 000 € au titre des frais exposés par la commune de Bouxwiller et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : M. X versera à la commune de Bouxwiller une somme de 1 000 € au titre des dispositions de l'article L. 761-1du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. X, à la commune de Bouxwiller et au ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer.

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N°04NC00597


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ere chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 04NC00597
Date de la décision : 23/03/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MAZZEGA
Rapporteur ?: M. Pierre VINCENT
Rapporteur public ?: M. ADRIEN
Avocat(s) : BRAND ; BRAND ; HSKA AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2006-03-23;04nc00597 ?
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