Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 23 octobre 2003, complétée par un mémoire enregistré le 24 juin 2005, présentés pour la SCI NATOUE, ayant pour siège ..., par Me Y..., avocat au barreau de Strasbourg ; la SCI NATOUE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0101404 en date du 7 août 2003 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg n'a fait que partiellement droit à sa demande de condamnation de la commune de La Wantzenau à lui verser une somme de 10 000 euros avec intérêts en réparation du préjudice subi du fait que le maire a omis de mentionner des servitudes importantes sur la notice de renseignement qui lui a été délivrée le 11 octobre 1999 pour un terrain sis au lieu dit Ried ;
2°) d'admettre sa demande devant le Tribunal administratif de Strasbourg ;
3°) de mettre à la charge de la commune de La Wantzenau la somme de 3 048,98 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que le préjudice ne trouvait pas son origine dans la servitude, mais dans la faute commise par la commune qui a fourni des renseignements erronés dans la note de renseignement d'urbanisme délivrée ;
- elle a subi des préjudices ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 mai 2005, présenté pour la commune de La Wantzenau (Bas-Rhin), représentée par son maire en exercice, par Me X..., avocat au barreau de Strasbourg ;
La commune de La Wantzenau conclut, à titre principal, au rejet de la requête et, par appel incident, demande à être déchargée de toute condamnation, et demande la condamnation de la SCI NATOUE à lui verser une somme de 3 048,98 auros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé ;
Vu l'ordonnance portant clôture de l'instruction au 27 juin 2005 à 16 heures ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 2000-916 du 19 septembre 2000 portant adaptation de la valeur en euros de certains montants exprimés en francs dans les textes législatifs, ensemble le décret n° 2001 ;373 du 27 avril 2001 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 décembre 2005 :
- le rapport de Mme Steinmetz-Schies, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Adrien, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par jugement du 7 août 2003, le Tribunal administratif de Strasbourg a, d'une part, retenu la responsabilité de la commune de La Wantzenau dans le préjudice dont se prévaut la SCI NATOUE et, d'autre part, rejeté une partie des conclusions indemnitaires qu'elle a présentées ; que, par appel principal, la SCI NATOUE demande qu'il soit fait droit à sa demande de condamnation de la commune à lui verser la somme de 83 846,96 euros ; que, par appel incident, la commune de La Wantzenau demande à être déchargée de toute responsabilité et indemnisation ;
Sur la responsabilité :
Considérant que la commune de La Wantzenau a délivré une note de renseignements d'urbanisme le 11 octobre 1999 au notaire chargé de la vente d'un terrain sis au lieudit Ried dans la commune de La Wantzenau, qui indiquait que le terrain était soumis au droit de préemption urbain simple et était situé en zone 24 I NAX 2 du plan d'occupation des sols approuvé le 12 mai 1995, sur la base de laquelle la vente est intervenue, le 10 janvier 2000, au profit de la SCI NATOUE ; qu'après avoir déposé un dossier de demande de permis de construire de locaux industriels ainsi qu'un logement et une clôture, la SCI NATOUE a été informée de prescriptions particulières applicables au terrain, situé en zone bleue inondable et soumis au plan d'exposition au risque d'inondation approuvé par arrêté préfectoral du 21 septembre 1993 , et de ce qu'en conséquence, elle se trouvait dans l'obligation de rehausser le bâtiment au niveau NGF 131,5 ; que la note de renseignement d'urbanisme ne mentionnant pas que le terrain en cause était situé en zone bleue inondable, la responsabilité de la commune est engagée à raison de la faute ainsi commise en fournissant une information ayant induit en erreur la SCI NATOUE ; que, par suite, la commune de La Wantzenau n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a retenu sa responsabilité dans le préjudice subi par la SCI NATOUE, sans qu'il puisse être reproché à ladite société de n'avoir pas consulté la réglementation annexe au plan d'occupation des sols, les notices de renseignements d'urbanisme étant délivrés pour dispenser le public de la consultation directe des divers documents composant le plan d'occupation des sols ;
Sur le préjudice :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 160-5 du code de l'urbanisme : «N'ouvrent droit à aucune indemnité les servitudes instituées par application du présent code en matière de voirie, d'hygiène et d'esthétique ou pour d'autres objets et concernant notamment, l'utilisation du sol, la hauteur des constructions, la proportion des surfaces bâties et non bâties dans chaque propriété, l'interdiction de construire dans certaines zones et en bordure de certaines voies, la répartition des immeubles entre diverses zones. Toutefois, une indemnité est due s'il résulte de ces servitudes une atteinte à des droits acquis ou à une modification à l'état antérieur des lieux déterminant un dommage direct, matériel et certain ; cette indemnité, à défaut d'accord amiable est fixée par le tribunal administratif, qui doit tenir compte de la plus value donnée aux immeubles …» ;
Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier que la SCI NATOUE a obtenu un permis de construire pour l'édification d'un ensemble de bureaux, locaux industriels, logement et clôture par un arrêté du 12 octobre 2000, et qu'elle s'est vu opposer, à raison de l'application de l'arrêté préfectoral du 21 septembre 1993 portant plan d'exposition au risque d'inondation, des prescriptions particulières afin de rehausser le bâtiment à la côte altimétrique NGF 131,50 ; que si la SCI NATOUE ne peut soutenir que la notice de renseignement lui avait conféré des droits acquis conformément à l'article précité, dès lors d'un permis de construire ne saurait être délivré en méconnaissance des dispositions législatives réglementaires régissant l'utilisation des sols, elle est, toutefois, fondée, contrairement à ce qu'à jugé le tribunal administratif, à obtenir réparation du préjudice résultant des surcoûts auxquels elle a fait face, à raison du refus opposé à une première demande de permis de construire, et de l'obligation qui lui a été faite de réaliser des plans et études supplémentaires ; que, toutefois, elle n'établit pas qu'elle aurait renoncé à l'acquisition du terrain et à la construction projetée si elle avait eu connaissance de l'existence de la servitude ; qu'il sera fait une juste appréciation de son préjudice lié aux surcoûts, résultant de la faute commise par la commune, en lui allouant à ce titre la somme de 10 000 euros ;
Considérant, d'autre part, que la SCI NATOUE n'établit pas que la somme de 10 000 euros allouée par le Tribunal administratif de Strasbourg en réparation du préjudice d'exploitation consistant en la perte de six mois de loyers en raison du retard pris dans les travaux, du fait de la délivrance d'un permis de construire le 12 octobre 2000 seulement, après un premier refus, serait insuffisante ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SCI NATOUE est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg n'a pas fait droit à sa demande pour un montant total de 20 000 € ;
Sur les intérêts :
Considérant que la SCI NATOUE a droit aux intérêts de la somme supplémentaire de 10 000 euros qui lui est allouée par la cour de céans, à compter du 7 août 2003 ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de la commune de La Wantzenau la somme demandée par la SCI NATOUE au titre des frais exposés par celle-ci en appel et non compris dans les dépens ;
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par la Commune de La Wantzenau doivent dès lors être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La commune de La Wantzenau versera à la SCI NATOUE une somme supplémentaire de 10 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 7 août 2003.
Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 7 août 2003 est réformé en tant qu'il est contraire à l'article 1er.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la SCI NATOUE est rejeté.
Article 4 : L'appel incident de la commune de La Wantzenau est rejeté.
Article 5 : Les conclusions des parties tendant à 'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI NATOUE et à la commune de La Wantzenau.
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N° 03NC01053