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02/06/2005 | FRANCE | N°05NC00024

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ere chambre - formation a 3, 02 juin 2005, 05NC00024


Vu, enregistrée au greffe le 27 juillet 2004, la lettre par laquelle M. Patrice Z, élisant domicile ..., saisit la Cour d'une demande tendant à obtenir l'exécution du jugement n° 01-03613 - 01-04822 du 15 novembre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé la délibération du conseil municipal de Freybouse du 14 juin 2001 attribuant des terres de la commune à M. Daniel YX et à Mme Jeanine-France YX ;

Vu l'ordonnance du président de la Cour du 10 janvier 2005, ouvrant une procédure juridictionnelle d'exécution ;

Vu les mémoires, enregistrés les

15 février et 19 avril 2005, présentés par M. Fabrice Z ;

M. Z demande ...

Vu, enregistrée au greffe le 27 juillet 2004, la lettre par laquelle M. Patrice Z, élisant domicile ..., saisit la Cour d'une demande tendant à obtenir l'exécution du jugement n° 01-03613 - 01-04822 du 15 novembre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé la délibération du conseil municipal de Freybouse du 14 juin 2001 attribuant des terres de la commune à M. Daniel YX et à Mme Jeanine-France YX ;

Vu l'ordonnance du président de la Cour du 10 janvier 2005, ouvrant une procédure juridictionnelle d'exécution ;

Vu les mémoires, enregistrés les 15 février et 19 avril 2005, présentés par M. Fabrice Z ;

M. Z demande à la Cour :

- d'enjoindre à la commune de Freybouse, d'une part, d'accomplir toutes démarches nécessaires, y compris par voie judiciaire, en vue de l'annulation des contrats conclus en application de la délibération annulée et, d'autre part, de lui attribuer les terrains dont s'agit ;

- d'assortir cette injonction d'une astreinte de 750 euros par jour de retard ;

Vu le mémoire, enregistré le 11 mars 2005, présenté par M. Fabrice Z ;

M. Z demande à la Cour de liquider l'astreinte prononcée, à l'encontre de la commune de Freybouse, par le jugement du Tribunal administratif de Strasbourg n° 003532 du 19 janvier 2001, en vue de l'exécution du jugement du 20 mars 2000 ayant annulé la délibération du 22 octobre 1998 par laquelle le conseil municipal avait attribué des terrains à M. YX et à l'EARL de l'Entente ;

Vu le mémoire, enregistré le 11 mars 2005, présenté par M. Daniel YX ;

M. YX conclut au rejet de la demande ;

Il soutient que :

- il n'appartient qu'aux juridictions judiciaires de se prononcer sur la validité du bail à ferme qu'il a conclu avec la commune de Freybouse et sur l'indemnité qui lui serait due si la nullité du bail était constatée ;

- si le bail était déclaré nul, il appartiendrait à la commune de déterminer l'utilisation qu'elle entend faire de ses terres ;

Vu le mémoire, enregistré le 15 mars 2005, présenté pour la commune de Freybouse, représentée par son maire en exercice, par la société M et R, avocats ;

La commune de Freybouse conclut au rejet de la demande de M. Z et à la condamnation de celui-ci à lui verser 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- cette demande, qui n'est pas présentée par le ministère d'un avocat, n'est pas recevable ;

- la délibération du conseil municipal du 14 juin 2001 n'a été annulée qu'en tant qu'elle portait attribution de terres à M. et Mme YX, et non en tant qu'elle autorisait la signature de baux à ferme avec les intéressés ; elle est définitive sur ce dernier point, ce qui fait obstacle à la remise en cause des baux conclus avec les intéressés ;

- la réattribution des terres à M. Z supposerait que celui-ci bénéficie encore du droit de priorité reconnu aux jeunes agriculteur, ce qui n'est plus le cas ;

- les conclusions de M. Z relatives à la liquidation de l'astreinte prononcée par le jugement du Tribunal administratif de Strasbourg n° 003532 du 19 janvier 2001 soulèvent un litige distinct et le jugement du 20 mars 2000 a été exécuté ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code rural ;

Vu le code de justice administrative et notamment ses articles L. 911-4 et R. 921-2 et suivants ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mai 2005 :

- le rapport de M. Clot, président,

- les observations de M. Z, et de Me Viguier de la Selafa M. et R, avocat de la commune de Freybouse,

- et les conclusions de M. Adrien, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé ; que l'article L. 911-4 ajoute : En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d'appel qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution. Toutefois, en cas d'inexécution d'un jugement frappé d'appel, la demande d'exécution est adressée à la juridiction d'appel. Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte (...) ;

Sur la compétence de la juridiction administrative :

Considérant que par délibération du 14 juin 2001, le conseil municipal de Freybouse a décidé de donner en location notamment à M. Daniel YX un terrain cadastré ... et à Mme Jeanine-France YX un terrain cadastré ... ; que la même délibération autorisait le maire à conclure un bail à ferme avec chacun des intéressés ; que de tels contrats ont été signés le 14 juin 2001 ; que par jugement du 15 novembre 2002, le Tribunal administratif de Strasbourg a, sur la demande de M. Z, annulé dans cette mesure, cette délibération ; que par arrêt du 18 novembre 2004, la Cour a rejeté les appels de la commune de Freybouse et de M. et Mme YX contre ce jugement ; que la demande susvisée de M. Z, tend à ce que la Cour prescrive les mesures d'exécution qu'implique le jugement précité ;

Considérant que s'il n'appartient pas à la juridiction administrative de se prononcer sur la validité des baux conclus par la commune de Freybouse en exécution de la délibération du conseil municipal du 14 juin 2001 et sur l'indemnité qui serait due à ses cocontractants, il lui appartient, en revanche, de connaître du litige relatif aux conséquences que comporte l'annulation de ladite délibération ; que, dès lors, M. YX n'est pas fondé à soutenir que la demande de M. Z a été portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître ;

Sur la fin de non recevoir opposée à la demande de M. Z par la commune de Freybouse :

Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article R. 811-7 du code de justice administrative : Les demandes d'exécution d'un arrêt de la cour administrative d'appel ou d'un jugement rendu par un tribunal administratif situé dans le ressort de la cour et frappé d'appel devant celle-ci sont également dispensées de ministère d'avocat. ; que, dès lors, la fin de non recevoir opposée par la commune de Freybouse à la demande d'exécution de jugements du Tribunal administratif de Strasbourg présentée par M. Z, tirée de ce qu'elle n'est pas présentée par l'un des mandataires mentionnés à l'article R. 431-2 du code de justice administrative, ne peut être accueillie ;

Sur l'exécution du jugement n° 01-03613 - 01-04822 du 15 novembre 2002 :

Considérant que, contrairement à ce que soutient la commune de Freybouse, la délibération du conseil municipal du 14 juin 2001 a été annulée non seulement en tant qu'elle décidait de donner en location à M. Daniel YX un terrain cadastré ... et à Mme Jeanine-France YX un terrain cadastré ..., mais également en tant qu'elle autorisait le maire à conclure un bail à ferme avec chacun des intéressés ; que cette annulation a été motivée par la méconnaissance par la commune de la priorité instituée, au profit des exploitants qui réalisent une installation en bénéficiant de la dotation d'installation aux jeunes agriculteurs, par les dispositions, dont se prévalait M. Z, du quatrième alinéa de l'article L. 411-15 du code rural, applicable aux baux ruraux lorsque le bailleur est une personne morale de droit public ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce et eu égard à la nature des contrats conclus le 14 juin 2001 par la commune de Freybouse avec, respectivement, M. et Mme YX et du vice dont est entachée la délibération qui en autorisait la passation, l'annulation de cette délibération implique nécessairement la résolution desdits contrats ; qu'il y a lieu, dès lors, d'enjoindre à la commune de Freybouse, si elle ne peut obtenir de ses cocontractants qu'ils acceptent la résolution de ces contrats d'un commun accord des parties, de solliciter du juge de ces contrats cette résolution dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'affaire, de prononcer à l'encontre de la commune de Freybouse, à défaut pour elle de justifier de cette exécution dans ce délai, une astreinte de 200 euros par jour jusqu'à la date à laquelle le jugement susmentionné aura reçu exécution ;

Considérant que l'annulation de la délibération du conseil municipal du 14 juin 2001 n'implique pas nécessairement que les terrains susénumérés appartenant à la commune de Freybouse soient loués par celle-ci à M. Z ; que, dès lors, l'intéressé n'est pas fondé à demander qu'il soit enjoint à ladite commune de lui attribuer ces terrains ;

Sur la liquidation de l'astreinte prononcée par le jugement n° 003532 du 19 janvier 2001 :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-7 du code de justice administrative : En cas d'inexécution totale ou partielle ou d'exécution tardive, la juridiction procède à la liquidation de l'astreinte qu'elle avait prononcée. (...) ; qu'ainsi, il appartient au juge administratif qui a prononcé l'astreinte de procéder à la liquidation de celle-ci, le cas échéant ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que par jugement du 20 mars 2000, le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé la délibération du conseil municipal de Freybouse du 22 octobre 1998 décidant d'attribuer des terrains à M. YX et à l'EARL de l'Entente ; que par jugement n° 003532 du 19 janvier 2001, le tribunal a enjoint à ladite commune de reprendre la procédure d'attribution de ces terrains et de conclure de nouveaux baux, et a assorti cette injonction d'une astreinte ; que les conclusions contenues dans le mémoire susvisé de M. Z enregistré le 11 mars 2005, tendant à la liquidation de cette astreinte, relèvent de la compétence du Tribunal administratif de Strasbourg, auquel il y a lieu, par suite, de les transmettre ;

Sur les conclusions de la commune de Freybouse tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. Z qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la commune de Freybouse quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par cette collectivité et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Il est enjoint à la commune de Freybouse, si elle ne peut obtenir de M. Daniel YX et de Mme Jeanine-France YX qu'ils acceptent la résolution des contrats conclus le 14 juin 2001, de saisir le juge de ces contrats dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt aux fins de voir prononcer la résolution desdits contrats.

La commune de Freybouse adressera au greffe de la Cour les pièces justifiant de l'exécution de cette injonction.

Article 2 : Une astreinte est prononcée à l'encontre de la commune de Freybouse si elle ne justifie pas avoir, dans les deux mois suivant la notification du présent arrêt, exécuté l'injonction décidée à l'article 1er ci-dessus.

Le taux de cette astreinte est fixé à 200 euros par jour à compter de l'expiration du délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.

Article 3 : Les conclusions contenues dans le mémoire de M. Patrice Z enregistré le 11 mars 2005, tendant à la liquidation de l'astreinte prononcée par jugement du Tribunal administratif de Strasbourg n° 003532 du 19 janvier 2001, sont transmises audit tribunal.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la demande de M. Patrice Z est rejeté.

Article 5 : Les conclusions de la commune de Freybouse tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. Patrice Z, à la commune de Freybouse, à M. Daniel YX et à Mme Jeanine-France YX.

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N° 05NC00024


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ere chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 05NC00024
Date de la décision : 02/06/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MAZZEGA
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre CLOT
Rapporteur public ?: M. ADRIEN
Avocat(s) : SELAFA M et R AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2005-06-02;05nc00024 ?
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