Vu le recours du MINISTRE DE L'AGRICULTURE, DE L'ALIMENTATION, DE LA PECHE ET DES AFFAIRES RURALES, enregistré au greffe de la Cour le 8 août 2003. Il demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 20 mai 2003 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a condamné l'Etat à verser à M. X une somme de 66 120 euros en complément de l'indemnité qui lui avait été allouée pour l'abattage de son cheptel bovin au titre de la police sanitaire pour cause d'encéphalopathie spongiforme bovine ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Nancy ;
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier en la forme dès lors que la défense du préfet n'est ni visée ni analysée ;
- les moyens tirés d'une absence de motivation, de l'incompétence de l'auteur de l'acte et d'un vice de procédure ne sont pas fondés ;
- les experts n'ont pas justifié leurs évaluations supérieures aux montants de base définis par l'article 5 de l'arrêté du 30 mars 2001 et se sont fondés sur des prix du marché erronés ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense enregistré le 18 novembre 2003, présenté pour M. Pascal X, élisant domicile ..., par la SCP Kopf et Barbaut avocats au barreau de Nancy ; il conclut au rejet du recours et à la condamnation de l'Etat à lui verser 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il soutient que l'appel est irrecevable en tant que formé par le ministre et tardif ; qu'aucun moyen n'est fondé ;
Vu l'ordonnance du 16 décembre 2004 portant clôture de l'instruction au 14 janvier 2005 ;
Vu le code rural ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 mai 2005 :
- le rapport de M. Sage, président,
- les observations de Me Barbaut de la SCP Kopf et Barbaut, avocat de M. X,
- et les conclusions de M. Wallerich, commissaire du gouvernement ;
Sur les fins de non-recevoir opposées au recours :
En ce qui concerne la représentation de l'Etat devant la Cour :
Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles R. 811-10 et R. 811-10-1 du code de justice administrative qu'il appartient au ministre intéressé de représenter l'Etat devant les cours administratives d'appel sauf dans les matières énumérés par l'article R. 811-10-1, au nombre desquelles ne figurent pas l'objet du présent litige ; qu'ainsi, il appartenait au ministre chargé de l'agriculture et non au préfet des Vosges comme le soutient M. X d'interjeter appel du jugement attaqué ;
En ce qui concerne le délai d'appel :
Considérant que le jugement attaqué a été notifié au ministre chargé de l'agriculture le 10 juin 2003 ; que le recours par télécopie a été enregistré le 8 août 2003 et régularisé par production de l'original enregistré le 12 août 2003 ; que le délai d'appel de deux mois fixé par l'article R. 811-2 du code de justice administrative a ainsi été respecté ;
Au fond :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 221-2 du code rural : Des arrêtés conjoints du ministre chargé de l'agriculture et du ministre chargé de l'économie et des finances fixent les conditions d'indemnisation des propriétaires dont les animaux ont été abattus sur l'ordre de l'administration, ainsi que les conditions de la participation financière éventuelle de l'Etat aux autres frais obligatoirement entraînés par l'élimination des animaux ; qu'aux termes de l'arrêté du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et du MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE en date du 30 mars 2001 fixant les modalités de l'estimation des animaux abattus sur ordre de l'administration : Article 1er - Lorsqu'un troupeau fait l'objet d'un abattage total sur ordre de l'administration dans le cadre des dispositions prises pour application des articles L. 221-1 ou L. 223-8 du code rural, les animaux abattus et faisant l'objet d'une indemnisation en application de l'article L. 221-2 du code rural sont estimés aux frais de l'administration par deux experts sur la base de leur valeur de remplacement … / Article 3 - Le propriétaire des animaux qui doivent être abattus conformément aux dispositions de l'article 1er choisit un expert de chaque catégorie, l'un sur la liste du département d'implantation de l'élevage, l'autre sur la liste d'un département limitrophe / … En cas de refus par l'éleveur de choisir des experts, le directeur des services vétérinaires y procède d'office … / Article 4 - L'expertise a lieu, dans la mesure du possible, conjointement. Elle donne lieu à un rapport écrit commun signé par les deux experts, identifiant chaque animal ou groupe d'animaux et motivant leur estimation. En cas de désaccord, mention en est faite sur le rapport. Le cas échéant, deux rapports distincts sont établis. … / Article 5 - Lorsque le montant de l'expertise visée à l'article 4 est supérieur au montant de base tel que défini en annexe en moyenne par catégorie d'animaux, le rapport doit détailler les raisons de cette majoration, notamment au regard des caractéristiques et des performances du troupeau. / Lorsque, à titre exceptionnel, ce montant dépasse le montant majoré tel que défini en annexe en moyenne par catégorie d'animaux, et dans l'hypothèse où des examens complémentaires justifiant le dépassement du montant majoré, ou s'il l'estime nécessaire, le directeur des services vétérinaires fait procéder à une nouvelle expertise dans les conditions prévues aux articles 3 et 4, par deux experts choisis par ses soins sur les listes prévues à l'article 2 ou, en dehors de ces listes, après avis de la directrice générale de l'alimentation … / Article 6 - Le préfet arrête le montant définitif de l'estimation et le notifie au propriétaire des animaux. Si, à titre très exceptionnel, ce montant dépasse le montant majoré visé à l'article 5, le préfet arrête le montant définitif de l'estimation après avis de la directrice générale de l'alimentation et au vu du rapport de l'expert et des pièces justificatives des examens visés à l'article 5 ; qu'il résulte de ces dispositions que le droit à indemnisation supérieure à celle résultant de l'application du tarif de base défini par l'annexe à l'arrêté précité n'est ouvert aux propriétaires d'animaux abattus qu'à la condition que les raisons de cette majoration soit établies notamment au regard des caractéristiques et des performances du troupeau par rapport à la moyenne par catégorie d'animaux ;
Considérant qu'il résulte de l'examen du rapport d'expertise effectuée les 3 et 6 novembre 2001 au vu de l'estimation du cheptel bovin de M. X dont l'abattage avait été ordonné par le préfet des Vosges le 25 octobre 2001 au titre de la police sanitaire pour cause d'encéphalopathie spongiforme, qu'aucun motif de dépassement du tarif de base n'est indiqué ; qu'il ne résulte pas non plus de l'instruction et qu'il n'est même pas allégué que le troupeau de M. X aurait présenté des caractéristiques et des performances supérieures à la moyenne ; que M. X n'avait ainsi droit qu'à indemnisation calculée à partir du tarif de base de l'annexe à l'arrêté précité du 30 mars 2001 et que ce n'est qu'à titre purement gracieux que le préfet des Vosges l'a fait bénéficier du montant majoré ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le Tribunal administratif de Nancy s'est fondé sur la seule évaluation des experts pour accorder à M. X une indemnité supplémentaire de 66 120 euros ;
Considérant, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le Tribunal administratif de Nancy ;
Considérant toutefois qu'il appartient au juge de plein contentieux non d'apprécier la légalité de la décision liant le contentieux mais de se prononcer lui-même sur le droit du requérant à obtenir l'indemnité qu'il demande ; que, dès lors, les moyens tirés du défaut de motivation de la décision du préfet des Vosges fixant le montant de l'indemnité, de l'incompétence de l'auteur de l'acte, et d'un vice de procédure soit inopérants;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du recours que le MINISTRE DE L'AGRICULTURE, DE L'ALIMENTATION, DE LA PECHE ET DE LA RURALITE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a fait droit à la demande de M. X ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nancy en date du 20 mai 2003 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X devant le Tribunal administratif de Nancy est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de M. X tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4: Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'AGRICULTURE, DE L'ALIMENTATION, DE LA PECHE ET DE LA RURALITE et à M. Pascal X.
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N° 03NC00840