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10/03/2005 | FRANCE | N°99NC02437

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2eme chambre - formation a 3, 10 mars 2005, 99NC02437


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 10 décembre 1999, complétée par des mémoires enregistrés les 18 juillet 2000, 15 janvier et 26 juin 2001, 7 juin et 27 décembre 2002, présentée par la Sarl TNC 3, dont le siège est Rue de Belfort à Sochaux (25600), représentée par sa gérante : Mme X ;

La Sarl TNC 3 demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 97-410 du 7 octobre 1999 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté ses demandes tendant à obtenir la décharge, d'une part, des suppléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle

a été assujettie au titre des exercices 1990, 1991 et 1992, d'autre part, de rappels ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 10 décembre 1999, complétée par des mémoires enregistrés les 18 juillet 2000, 15 janvier et 26 juin 2001, 7 juin et 27 décembre 2002, présentée par la Sarl TNC 3, dont le siège est Rue de Belfort à Sochaux (25600), représentée par sa gérante : Mme X ;

La Sarl TNC 3 demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 97-410 du 7 octobre 1999 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté ses demandes tendant à obtenir la décharge, d'une part, des suppléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices 1990, 1991 et 1992, d'autre part, de rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 1990 au 31 décembre1992 ;

2°) de lui accorder la décharge de ces impositions ;

3°) de prononcer le sursis à exécution du jugement attaqué ;

4°) de condamner l'Etat à lui payer une somme de 4 573 euros en application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

La Sarl TNC 3 soutient que :

- la méthode de reconstitution des recettes est excessivement sommaire ;

- les stocks déclarés en fin d'exercice étaient minorés en raison d'erreurs involontaires donc susceptibles de rectification ; celles-ci sont corroborées par les discordances entre le stock de sortie de l'exercice 1992, établi après un inventaire complet et exceptionnel, et ceux des exercices précédents ;

- le coefficient de marge de 2,01 est surévalué ;

- l'avis de la CDI est entaché d'une insuffisance de motivation ;

- l'option de la société pour le régime des sociétés de personnes exercée en 1989 constitue une décision de gestion opposable au service et ne pouvait plus être remise en cause à l'occasion des redressements ;

- c'est à tort que la comptabilité de la société a été écartée en raison de l'absence de présentation de certains documents, non obligatoires, et suppléés par d'autres pièces équivalentes ;

- l'administration n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, de la mauvaise foi de la contribuable alléguée pour appliquer les pénalités ;

- les conséquences du paiement des impositions, ayant d'ailleurs conduit à une mise en liquidation de l'entreprise, justifient le sursis à exécution sollicité ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré le 30 mars 2004 présenté pour la Sarl TNC 3 ;

Vu, enregistrés au greffe les 16 août et 24 octobre 2000, 27 mars, 30 avril et 18 octobre 2001 et le 18 septembre 2002, les mémoires en défense présentés par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Il conclut au rejet de la requête de la Sarl TNC 3 ;

Il soutient que :

- la société, dont la comptabilité était incomplète, n'apporte pas la preuve de l'erreur d'évaluation des nouvelles bases des impositions en litige ; en particulier, le coefficient de 2,01 tient compte des ventes en solde ;

- les pénalités pour mauvaise foi sont justifiées ;

- l'insuffisance de motivation de l'avis de la CDI, à la supposer établie, ne peut entraîner la décharge des impositions ;

- l'option de la Sarl pour le régime des sociétés de personnes, d'ailleurs renouvelée en 1994, ne remplissait pas les conditions de forme requises, et n'a pu constituer une décision de gestion ;

- la demande de sursis à exécution du jugement n'apparaît pas fondée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 janvier 2005 :

- le rapport de M. Bathie, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Rousselle, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la Sarl TNC 3, créée le 1er février 1989, et qui exploitait un commerce de lingerie à Sochaux, a opté dès le 31 mars 1989 pour le régime des sociétés de personnes comme le lui permettaient les dispositions de l'article 239 bis AA du code général des impôts ; qu'en conséquence, les deux associés à 50 %, M. et Mme X, ont été assujettis à l'impôt sur le revenu, dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, en fonction des résultats déclarés de la société ; qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 1990, 1991 et 1992, l'administration a, d'une part, remis en cause l'option susévoquée au motif qu'elle n'avait pas été exercée conformément aux règles de forme prévues par la loi fiscale, ce qui a entraîné l'assujettissement de la Sarl TNC 3 à l'impôt sur les sociétés au titre des 3 exercices susmentionnés, et d'autre part, après avoir écarté la comptabilité présentée, a reconstitué les résultats de l'entreprise, et mis en recouvrement les suppléments subséquents d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée ; que la Sarl TNC 3 fait régulièrement appel du jugement du 7 octobre 1999 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a refusé de lui accorder la décharge de ces suppléments d'imposition ;

Sur le régime d'imposition de la société :

Considérant qu'aux termes de l'article 239 bis AA du code général des impôts : Les sociétés à responsabilité limitée exerçant une activité industrielle, commerciale ou artisanale, et formées uniquement entre personnes parentes en ligne directe ou entre frères et soeurs, ainsi que les conjoints, peuvent opter pour le régime fiscal des sociétés de personnes mentionné à l'article 8. L'option ne peut être exercée qu'avec l'accord de tous les associés. ; que l'option prévue par ces dispositions doit s'exercer selon les conditions régies par les articles 46 terdecies A à D de l'annexe III au code général des impôts ;

Considérant que la requérante ne conteste pas que son option susévoquée pour le régime des sociétés de personnes, ne respectait pas toutes les conditions prévues par les dispositions précitées du code général des impôts, en particulier celle d'être signée de tous les associés ; qu'il suit de là que le document transmis au service, daté du 31 mars 1989, ne peut être regardé comme ayant valablement constitué l'option prévue par l'article 239 bis AA précité ; que l'administration, qui n'était pas tenu d'inviter la société à régulariser cette option, était, dès lors, fondée, dans les limites du délai de prescription, à assujettir la Sarl à l'impôt sur les sociétés, selon le régime de droit commun, au titre des exercices vérifiés ; que l'abstention du service, pendant plusieurs années, à remettre en cause le régime d'imposition appliqué par les associés, ne peut constituer une prise de position formelle sur la situation fiscale de la Sarl, susceptible de lui être opposée, conformément à l'article L. 80-B du livre des procédures fiscales ; qu'il résulte de ces éléments que le moyen tiré de ce que l'administration n'aurait pu, dans le cadre des redressements litigieux, remettre en cause l'option sus-analysée, doit être écarté ;

Sur l'avis de la CDI et la charge de la preuve :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'un redressement, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission... ;

Considérant qu'il résulte des termes de l'avis émis par la CDI le 25 octobre 1995, qu'il se borne à affirmer que l'hypothèse de la minoration de stock soulevée par la société ne peut pas être prise en considération... ; que cette formulation ne permet pas à la société contribuable de connaître les raisons pour lesquelles les minorations de stock alléguées n'auraient aucune incidence sur les redressements ; qu'il suit de là que cet avis est insuffisamment motivé ; que l'imposition en litige ne pouvant être regardée comme établie conformément à l'avis de la commission, l'administration supporte la charge de la preuve du bien-fondé de son redressement, en application de l'article L. 192 précité ;

Considérant en revanche que cette insuffisance de motivation demeure sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition et ne peut donc entraîner la décharge des impositions contestées ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne le rejet de la comptabilité présentée :

Considérant qu'il résulte des constats, non utilement contredits, du service, que la comptabilité de la société se limitait à des justifications d'achats et des relevés bancaires, qu'aucun livre d'inventaire n'a été fourni et ne pouvait être suppléé par des fiches de produits, établis par la gérante, lesquels se sont d'ailleurs avérés très incomplets ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que l'administration aurait indûment écarté les documents présentés, pour opérer une reconstitution extra comptable des résultats sur les trois exercices vérifiés, n'est pas fondé ;

En ce qui concerne la méthode de reconstitution des bases :

Considérant que le vérificateur, après avoir estimé, d'après l'analyse d'un échantillon de produits, que la marge commerciale apparaissait anormalement faible, a reconstitué les recettes de l'entreprise à partir d'un indice, proposé par les contribuables s'établissant à 2,1 ; que ce coefficient a été appliqué aux achats revendus, compte-tenu des variations de stocks ; que les différences constatées par rapport aux recettes déclarées ont été réintégrées dans les bénéfices imposables ; que la société contribuable n'établit pas le caractère excessivement sommaire de cette méthode, en alléguant le caractère non représentatif de l'ensemble des articles d'un échantillon, sélectionné en accord avec les associés, dans le cadre du débat contradictoire, et faisant d'ailleurs ressortir des marges supérieures à celle de 2,01 finalement retenue ; que si la société produit une reconstitution du stock de sortie de l'exercice 1992, elle ne fournit pas d'éléments précis sur l'évolution de ce même stock au cours des trois exercices vérifiés, ni n'apporte de données permettant d'établir que les erreurs signalées, pourraient conduire à une meilleure estimation des nouvelles bases de l'impôt ; que, dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe, du bien-fondé de ses redressements d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée ;

Sur les pénalités pour mauvaise foi :

Considérant que l'administration n'établit pas l'absence de bonne foi des dirigeants de la société contribuable, en se bornant à faire état de l'omission répétée de recettes résultant de sa propre reconstitution de celles-ci ; que la société est par suite fondée à obtenir la décharge des pénalités pour mauvaise foi qui lui ont été appliquées, conformément à l'article 1 729 du code général des impôts, au titre des exercices 1990, 1991 et 1992, accessoirement aux impositions en litige ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la Sarl TNC 3 est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Besançon lui a refusé la décharge des pénalités pour mauvaise foi appliquées aux impositions en litige, et à en obtenir la décharge ;

Sur les conclusions de la requérante tendant à obtenir l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner l'Etat à verser à la Sarl TNC 3, une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La Sarl TNC 3 est déchargée des pénalités pour mauvaise foi qui ont été appliquées aux suppléments d'impôt sur les sociétés, relatifs aux exercices clos en 1990, 1991 et 1992 et aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour la période correspondante.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la Sarl TNC 3 est rejeté.

Article 3 : Le jugement du 7 octobre 1999 du Tribunal administratif de Besançon est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la Sarl TNC 3 et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

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99NC02437


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 99NC02437
Date de la décision : 10/03/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. LUZI
Rapporteur ?: M. Henri BATHIE
Rapporteur public ?: Mme ROUSSELLE

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2005-03-10;99nc02437 ?
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