Vu la requête, enregistrée le 10 octobre 2000, présentée pour la société INFO-TEKCOM, dont le siège social est ..., représentée par son dirigeant en exercice, par Me X..., avocat ;
La société INFO-TEKCOM demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 97652, en date du 6 juillet 2000, par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1990 et 1991 ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de condamner l'Etat à lui payer une somme de 15 000 F au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Elle soutient :
- que les frais de recherche réintégrés par l'administration présentaient un caractère générique et n'ont aucun rapport avec les contrats passés avec la société Treillet en 1991 ;
- que l'absence de facturation des intérêts sur la créance qu'elle détenait sur la société Info Prom était justifiée par le souci de ne pas aggraver la situation de cette société stratégique au sein du groupe et ne constitue donc pas un acte anormal de gestion ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire ampliatif, enregistré le 19 décembre 2000, présenté comme ci-dessus pour la société INFO TELECOM, venant aux droits de la société INFO TEKCOM, tendant aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 janvier 2002, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, tendant au rejet de la requête par les motifs qu'aucun des moyens présentés par la société requérante n'est fondé ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 février 2005 :
- le rapport de M. Montsec, président,
- et les conclusions de Mme Rousselle, commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée à la demande de première instance :
Sur le bien-fondé des cotisations supplémentaires en litige :
En ce qui concerne la comptabilisation des produits issus du contrat passé avec la société Treillet :
Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts : (...) 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. (...) 3. Pour l'application des 1et 2, les stocks sont évalués au prix de revient (...) ; qu'il résulte de ces dispositions que les travaux en cours, c'est-à-dire ceux qui, à la date de la clôture de l'exercice, ont été exécutés à la demande de clients mais n'ont pas été facturés à ces derniers, sont au nombre des valeurs d'actif qui doivent figurer au bilan pour leur prix de revient ;
Considérant que la société INFO-INGENIERIE, ultérieurement devenue la société INFO-TEKCOM puis la société INFO-TELECOM, a passé les 26 et 29 novembre 1990 des contrats avec les sociétés MISIL et INFO-REALITE, appartenant comme elle au groupe INFO-REALITE, en vue de la réalisation par ces deux sociétés de travaux de recherche en matière de technologie de l'infra-rouge, pour des montants de respectivement 1 000 000 F et 1 200 000 F ; que, le 6 mars 1991, la société INFO-INGENIERIE a signé un contrat avec la société Treillet pour une prestation de recherche et développement d'un module d'étiquettes électroniques pour dossiers suspendus, pour un montant de 2 800 000 F ; qu'après avoir déduit de ses résultats au titre de l'exercice clos en 1990, les sommes de 1 000 000 F et 1 200 000 F susmentionnées, correspondant aux contrats de sous-traitance passés avec les sociétés MISIL et INFO-REALITE, la société requérante a comptabilisé une partie de ces sommes, à hauteur de 1 000 000 F, au titre de l'exercice clos en 1990, comme correspondant à des travaux de recherche déjà utilisables et commercialisables, puis à hauteur de 200 000 F, au titre de l'exercice clos en 1991, en tant que produits à recevoir ; qu'il résulte de l'instruction qu'eu égard à l'objet des travaux de recherche dont s'agit et à la proximité dans le temps entre ces différents contrats, il existe un lien direct entre les frais de recherche dont s'agit et le contrat de commercialisation passé avec la société Treillet, comme la société l'a d'ailleurs elle-même pour partie reconnu dans ses propres écritures comptables, en inscrivant une somme de 1 200 000 F au titre des travaux en cours ; que la société INFO-INGENIERIE doit ainsi être regardée comme ayant en réalité sous-traité aux sociétés MISIL et INFO-REALITE les travaux de recherche nécessaires à l'exécution du contrat de recherche et développement passé avec la société Treillet, qui s'est de son côté engagée à prendre à sa charge l'intégralité du coût de développement du produit concerné ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration fiscale a réintégré dans les résultats de la société la somme de 1 000 000 F correspondant à la différence entre le coût total des travaux de recherche sous traités aux sociétés MISIL et INFO-REALITE, soit 2 200 000 F, et la part de ces dépenses déjà spontanément inscrites à l'actif de son bilan par la société ;
En ce qui concerne la dispense de facturation des intérêts sur une créance non payée détenue sur société Info-Prom :
Considérant que le fait de consentir des prêts ou avances sans intérêts à un tiers constitue une libéralité étrangère à l'intérêt social, sauf s'il est établi l'existence d'une contrepartie ; que cette règle doit recevoir application même si le bénéficiaire de ces prêts ou avances est une société liée à celle qui les a consentis, hormis le cas où la situation des sociétés serait telle que la société prêteuse puisse être regardée comme ayant agi dans son propre intérêt en venant en aide à une société du groupe en difficulté ; que, s'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour considérer qu'un abandon de créance constitue un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve si l'auteur de l'abandon n'est pas en mesure de justifier de contreparties ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, le 20 décembre 1988, la société INFO-INGENIERIE a cédé à la société INFO-PROM, appartenant au même groupe, une partie de ses stocks, pour un prix de 1 008 100 F ; qu'il est constant qu'au 31 décembre 1992, cette créance restait impayée ; que la société requérante ne conteste pas avoir cependant renoncé à facturer à la société INFO-PROM les intérêts ayant couru sur cette somme de 1 008 100 F ; que cette renonciation doit être assimilée de sa part à une avance sans intérêt au profit de la société INFO-PROM ; que, si la société requérante soutient que cette dernière société était alors en difficulté, elle n'apporte aucun élément de nature à établir la réalité et l'ampleur de ces difficultés ; qu'alors que la société requérante n'entretient aucune relation commerciale régulière avec cette société et ne conteste pas qu'elle devait elle-même recourir au crédit bancaire pour assurer sa trésorerie, les circonstances alléguées, à les supposer établies, que la société INFO-PROM remplirait des missions stratégiques pour le groupe, procurerait à la société requérante des possibilités de sous-traitance à moindre coût dans les pays de l'Est pour la fabrication d'afficheurs à cristaux liquides et lui aurait permis d'obtenir un gros marché avec un client important, ne permettent pas à cette dernière de justifier de l'existence, pour elle-même, d'une contrepartie directe à l'abandon de créance susmentionné ; que la circonstance que les stocks vendus en 1988 à la société INFO-PROM correspondaient à des invendus ne pouvant être écoulés que sur certains marchés externes ne permet pas davantage d'établir l'existence d'une telle contrepartie ; que, dans ces conditions, à défaut pour la société requérante d'établir tant les difficultés de la société bénéficiaire d'une telle libéralité que la contrepartie qu'elle en aurait elle-même retirée, l'administration fiscale doit être regardée comme apportant la preuve qu'en agissant de la sorte ladite société a effectivement accompli un acte anormal de gestion ; que c'est dès lors à bon droit qu'elle a réintégré les intérêts dont s'agit dans les résultats imposables de celle-ci, selon des modalités qui ne sont pas elles-mêmes contestées ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société INFO-TEKCOM n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué en date du 6 juillet 2000, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant au bénéfice de la déduction au titre de l'année 1992 de la somme de 1 200 000 F réintégrée en 1991 :
Considérant que ces conclusions ne sont en tout état de cause pas étayées des précisions et justifications suffisantes de nature à permettre au juge d'en apprécier le bien fondé ;
Sur les conclusions tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la société INFO-TEKCOM la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société INFO TEKCOM est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société INFO TELECOM et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
2
00NC01330