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27/09/2004 | FRANCE | N°02NC00910

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4eme chambre - formation a 3, 27 septembre 2004, 02NC00910


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 14 août 2002 sous le n° 02NC00910, complétée par les mémoires enregistrés les 13 septembre 2002 et 7 juillet 2003, présentée pour

M. Michel X élisant domicile ... par Me Blindauer, avocat ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 11 juin 2002 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de l'inspecteur du travail prise le 24 août 2000 autorisant la société Cora à le licencier ;

2°) d'annuler pour excès de pou

voir cette décision ;

3°) de condamner l'Etat au versement d'une somme de 1 500 € au titre d...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 14 août 2002 sous le n° 02NC00910, complétée par les mémoires enregistrés les 13 septembre 2002 et 7 juillet 2003, présentée pour

M. Michel X élisant domicile ... par Me Blindauer, avocat ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 11 juin 2002 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de l'inspecteur du travail prise le 24 août 2000 autorisant la société Cora à le licencier ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;

3°) de condamner l'Etat au versement d'une somme de 1 500 € au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- les premiers juges n'ont pas répondu au moyen tiré du non respect de l'article 6-3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales alors que la demande de licenciement du 2 août 2000 n'a pas été portée à sa connaissance ;

- le jugement est emprunt d'une contradiction dès lors qu'il relève d'une part, que certains griefs retenus ne sont pas établis, et d'autre part, que, quand bien même chaque grief pris individuellement ne serait pas constitutif d'une faute grave, leur multiplication dans un délai très bref d'environ un mois présenterait le caractère d'une faute d'une gravité suffisante et de nature à fonder son licenciement ;

- le jugement n'est pas suffisamment motivé dès lors que les premiers juges ne pouvaient se dispenser d'énumérer les griefs qui constituaient selon eux une faute d'une gravité suffisante ;

- la procédure préalable au licenciement n'a pas été respectée par la société ;

- l'inspecteur du travail n'a pas estimé utile de procéder à une enquête contradictoire ;

- la décision critiquée méconnaît l'article L. 122-44 du code du travail qui prévoit qu'aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance ;

- la décision repose sur une erreur manifeste d'appréciation ;

- les faits qui lui sont reprochés ne sont pas établis ;

- la décision contestée viole les stipulations de l'article 6 § 1 de la convention européenne des droits de l'homme dès lors qu'elle a été prise par la même personne alors que sa première décision a été invalidée ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 19 mai 2003 présenté pour la société anonyme Cora par la S.C.P. Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, société d'avocats ; la société conclut au rejet de la requête et à la condamnation de M. X à lui verser la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 septembre 2004 :

- le rapport de M. Sage, président,

- les observations de Me Taurand de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la société anonyme Cora,

- et les conclusions de M. Wallerich, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X demande à la Cour d'annuler le jugement en date du 11 juin 2002 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de l'inspecteur du travail prise le 24 août 2000 autorisant la société Cora à le licencier ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant, en premier lieu, que les stipulations de l'article 6 paragraphe 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne sont applicables qu'en matière pénale ; qu'ainsi, le requérant ne pouvait utilement soulever le moyen tiré de la violation de ces stipulations à l'appui de son recours contre la décision contestée ; qu'en ne répondant pas à ce moyen inopérant, les premiers juges n'ont entaché leur décision d'aucune omission de statuer ;

Considérant, en deuxième lieu, que le jugement n'est entaché d'aucune contradiction de motifs et que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation manque en fait ;

Sur la légalité de la décision contestée :

Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, le licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre compétent de rechercher sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ;

En ce qui concerne la légalité externe :

Considérant que lorsqu'une de ses décisions est annulée par une juridiction, l'autorité administrative n'est pas tenue, avant de se prononcer à nouveau, de reprendre les éléments de la procédure qui n'ont pas été affectés par des changements dans les circonstances de fait ou de

droit ; qu'à la suite de l'annulation par le Tribunal administratif de Strasbourg de la décision du

25 mai 1999 accordant à la société Cora l'autorisation de licencier pour faute grave M. X délégué du personnel, la société a confirmé sa demande d'autorisation de licenciement en la fondant sur des circonstances de fait identiques à celles qui justifiaient la première demande ; que le requérant n'apporte aucun élément de nature à établir la survenance d'éléments de fait ou de droit nouveaux ; que, dès lors et en tout état de cause, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision du 24 août 2000 autorisant le licenciement de M. X est entachée d'irrégularité du fait qu'il n'a pas été procédé à une nouvelle enquête contradictoire postérieurement à l'annulation de la première décision et que la société n'aurait pas renouvelé la procédure préalable au licenciement antérieurement au dépôt de la nouvelle demande d'autorisation en date du 2 août 2000 ;

En ce qui concerne la légalité interne :

Considérant que, contrairement à ce que soutient M. X, l'article L. 122-44 du code du travail ne faisait pas légalement obstacle à ce que l'autorité administrative retînt, pour apprécier la gravité des fautes reprochées, des faits dont certains se seraient produits plus de deux mois avant la demande d'autorisation de licenciement dès lors que le comportement fautif avait revêtu un caractère continu ;

Considérant qu'il est reproché à M. X qui exerçait les fonctions de manager du département épicerie du magasin Cora, l'absence d'organisation de réunions et le manque d'informations des personnels placés sous son autorité, le non respect de la législation sur les horaires de travail et les règles de sécurité dans les réserves, le non respect de la procédure définie pour les passage des 35 heures, ainsi que dans l'établissement du planning des congés payés, une carence dans l'organisation et le contrôle d'une opération commerciale, le non respect des directives concernant le développement des produits régionaux, l'application d'une situation de crise, de la procédure de traitement des réclamations clients, l'absence de réponse aux problèmes posés par son personnel et des négligences dans le travail ; qu'il ressort des pièces du dossier que les griefs retenus à l'encontre de M. X ne sont pas entachés d'inexactitude matérielle ; qu'eu égard aux fonctions d'encadrement et aux responsabilités dévolues à

M. X, la multiplication des négligences est constitutive d'une faute d'une gravité suffisante de nature à justifier le licenciement de l'intéressé ;

Considérant que M. X disposait devant la juridiction administrative d'un recours qu'il a effectivement exercé ; qu'ainsi, il n'est pas fondé à soutenir qu'il a été privé du droit à un procès équitable reconnu par l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le juge ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par M. X doivent dès lors être rejetées ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu , dans les circonstances de l'espèce, de condamner

M. X à verser à la société Cora la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête présentée par M. X est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la société Cora tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Michel X, à la société Cora et au ministre de l'emploi et de la cohésion sociale.

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N° 02NC00910


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 02NC00910
Date de la décision : 27/09/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. JOB
Rapporteur ?: M. Paul SAGE
Rapporteur public ?: M. WALLERICH
Avocat(s) : GANDAR-PATE SCP

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2004-09-27;02nc00910 ?
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