La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/06/2004 | FRANCE | N°00NC00019

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ere chambre - formation a 3, 24 juin 2004, 00NC00019


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 10 janvier 2000 sous le n° 00NC00019, complétée par les mémoires enregistrés respectivement les 20 juillet 2000 et 28 septembre 2001, présentée pour la société S.A. GOFFETTE, représentée par son mandataire liquidateur, Me X..., demeurant ... par Me Devarenne, avocat au barreau de Châlons-en-Champagne ;

La société S.A. GOFFETTE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°98/1839 du 5 octobre 1999 par lequel le Tribunal administratif de Chalons-en-Champagne l'a condamnée au paiement d'une amende de 5 000 fra

ncs, lui a enjoint de remettre les lieux en l'état et l'a condamnée à verser à ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 10 janvier 2000 sous le n° 00NC00019, complétée par les mémoires enregistrés respectivement les 20 juillet 2000 et 28 septembre 2001, présentée pour la société S.A. GOFFETTE, représentée par son mandataire liquidateur, Me X..., demeurant ... par Me Devarenne, avocat au barreau de Châlons-en-Champagne ;

La société S.A. GOFFETTE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°98/1839 du 5 octobre 1999 par lequel le Tribunal administratif de Chalons-en-Champagne l'a condamnée au paiement d'une amende de 5 000 francs, lui a enjoint de remettre les lieux en l'état et l'a condamnée à verser à l'établissement public de l'Etat à caractère industriel et commercial Voies navigables de France la somme de 100 francs au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

2°) de la relaxer des fins de la poursuite ;

3°) de condamner l'établissement public de l'Etat à caractère industriel et commercial Voies Navigables de France à lui verser une somme de 5 000 francs au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Code : C

Plan de classement : 07-01-01

24-01-03-01

La société S.A. GOFFRTTE soutient que :

- l'agent chargé de dresser le procès-verbal n'était pas compétent ;

- la procédure suivie est entachée d'irrégularité ;

- aucune obligation de remettre les lieux en l'état à l'expiration de l'autorisation n'avait été mise à la charge de la société ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 10 mai 2000 présenté pour Voies Navigables de France, établissement public de l'Etat à caractère industriel et commercial dont le siège est, ..., représenté son directeur général, dûment habilité par délégation de signature du 2 juin 1999 ;

Voies Navigables de France demande à la Cour de rejeter la requête susvisée ; à cette fin, il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé ;

Vu l'ordonnance du président de la 1ère chambre de la Cour du 17 septembre 2001, fixant au 10 octobre 2001 la date de clôture de l'instruction ;

Vu les lettres en date du 25 mai 2004 informant les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la Cour est susceptible de soulever d'office le moyen tiré de l'application des lois n° 95-884 du 3 août 1995 et n° 2002-1062 du 6 août 2002 portant loi d'amnistie ;

Vu le mémoire enregistré le 2 juin 2004 présenté pour la S.A. GOFFETTE, représentée par son mandataire liquidateur, Me X... ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure ;

Vu la loi n° 95-884 du 3 août 1995 portant amnistie ;

Vu la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002 portant loi d'amnistie ;

Vu la loi n° 91-1385 du 31 décembre 1991 portant dispositions diverses en matière de transport ;

Vu la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 ;

Vu l'ordonnance n° 2000-916 du 19 septembre 2000 portant adaptation de la valeur en euros de certains montants exprimés en francs dans les textes législatifs, ensemble le décret n° 2001-373 du 27 avril 2001 ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 juin 2004 :

- le rapport de Mme FISCHER-HIRTZ, Premier Conseiller,

- les observations de Me Y..., du Cabinet DEVARENNE, avocat de Me X..., mandataire liquidateur de la S.A. GOFFETTE,

- et les conclusions de M. ADRIEN, Commissaire du Gouvernement ;

Considérant que la société S.A. GOFFETTE a bénéficié depuis 1953 de plusieurs autorisations d'occuper à titre précaire et temporaire une parcelle de terrain du domaine public fluvial ... à Vireux Molhain du PK 14710 au PK 14760 et d'y construire deux bâtiments à usage principal de station-service ; que la dernière autorisation est arrivée à échéance le 1er janvier 1994, soit quelques jours avant la mise en liquidation judiciaire de la société prononcée le 6 janvier suivant ; qu'en dépit des correspondances adressées par Voies navigables de France à Me X..., nommé en qualité de mandataire liquidateur, il n'a été procédé à aucune remise en état des lieux par démolition des bâtiments ; que l'administration a fait dresser un procès verbal de contravention de grande voirie en vertu des dispositions de l'article L. 27 du code du domaine public fluvial ;

Sur les effets des lois d'amnistie des 3 août 1995 et 6 août 2002 :

Considérant qu'aux termes de l'article 6 de la loi susvisée du 3 août 1995 portant amnistie : Sont amnistiées les contraventions de grande voirie lorsqu'elles ont été commises avant le 18 mai 1995 et qu'aux termes de l'article 2 de la loi susvisée du 6 août 2002 portant amnistie : Sont amnistiées les contraventions de grande voirie lorsqu'elles ont été commises avant le 17 mai 2002. ; que ces dispositions ne distinguent pas selon que les contraventions ont été infligées pour une infraction instantanée ou continue ; qu'il résulte de l'instruction que les faits qui ont donné lieu à l'établissement à l'encontre de la société S.A. GOFFETTE d'un procès-verbal de contravention de grande voirie ont été commis à compter du 1er janvier 1994, soit avant l'intervention de la première des deux lois d'amnistie susmentionnées et se sont poursuivis jusqu'à la date de constat de l'infraction, antérieure au 17 mai 2002 ; qu'ainsi, l'amnistie édictée par les lois des 3 août 1995 et 6 août 2002 leur est applicable ; que, par suite, la requête de la société S.A. GOFFETTE est devenue sans objet en tant qu'elle est dirigée contre l'amende de 5 000 F qui lui a été infligée par le Tribunal administratif de Chalons-en-Champagne par l'article 1er de son jugement ;

Sur la réparation :

Considérant que si l'amnistie a pour effet d'effacer le caractère délictueux des infractions auxquelles elle s'applique et d'empêcher ainsi la répression de ces infractions, elle ne fait pas obstacle, en raison de l'imprescriptibilité du domaine public, à ce que soit poursuivie la réparation des dommages commis audit domaine ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er III de la loi susvisée du 31 décembre 1998 portant diverses dispositions en matière de transport : L'Etablissement Voies navigables de France est substituée à l'Etat dans l'exercice des pouvoirs dévolus à ce dernier pour la répression des atteintes à l'intégrité et à la conservation du domaine public qui lui est confié (...). Toutefois, les contraventions continuent à être constatées par des agents mentionnés à l'article 41 du même code. et qu'aux termes de l'article 41 du code du domaine public et de la navigation intérieure : Les contraventions sont constatées concurremment par les fonctionnaires des ponts et chaussées, les agents de la navigation intérieure, les conducteurs de chantiers ou agents de travaux assermentés à cet effet par les maires ou adjoints, les commissaires de police, les gardes champêtres et la gendarmerie. Les fonctionnaires publics ci-dessus désignés qui n'ont pas prêté serment en justice le prêteront devant le préfet. ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. Z... X, fonctionnaire des services déconcentrés du ministère de l'équipement, du logement, des transports, du tourisme, contrôleur TPE spécialité Voies navigables-Ports maritimes , affecté au service de la navigation nord-est, subdivision de GIVET, a été commissionné par ce même ministère le 3 mars 1997 à l'effet de permettre la constatation des infractions résultant notamment du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure ; que, dès lors, M. Z... X, qui a la qualité d'agent de la navigation intérieure au sens de l'article 41 du code du domaine public et de la navigation intérieure avait qualité pour constater les atteintes portées au domaine public et dresser procès-verbal ; qu'il suit de là, que le moyen invoqué doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 13 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel alors applicable : Dans les dix jours qui suivent la rédaction d'un procès-verbal de contravention et son affirmation quand elle est exigée, le préfet fait faire au contrevenant notification de la copie du procès-verbal ainsi que de l'affirmation, avec citation à comparaître dans le délai d'un mois devant le tribunal administratif ... ; que s'il résulte de l'instruction que le procès-verbal de contravention de grande voirie dressé contre la S.A. GOFFETTE le 5 novembre 1998, ne lui a été notifiée que le 9 décembre 1998, soit après l'expiration du délai de dix jours fixé à l'article 13 précité, ce délai n'est pas prescrit à peine de nullité ; que le retard constaté en l'espèce n'a pas porté atteinte aux droits de la défense ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 13 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel doit être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 27 du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure : Il est interdit de construire ou de laisser subsister sur les rivières et canaux domaniaux ou le long de ces voies, des ouvrages quelconques susceptibles de nuire à l'écoulement des eaux ou à la navigation. Le contrevenant sera passible d'une amende de 1 000 F à 80 000 F et devra, en outre, démolir les ouvrages établis ou, à défaut, payer les frais de démolition d'office par l'administration. ; que la circonstance que Voies Navigables de France ait sur le fondement des dispositions sus-rappelées de l'article L. 27 du code du domaine public fluvial, demandé au juge administratif la condamnation de la société S.A. GOFETTE à remettre les lieux en l'état sans avoir déclaré sa créance éventuelle dans le délai fixé à l'article 66 du décret du 27 décembre 1985 ni avoir demandé à être relevée de la forclusion dans les conditions prévues par l'article 53 de la loi du 25 janvier 1985 et l'article 70 du décret du 27 décembre 1985 est sans influence sur la compétence du juge administratif pour se prononcer sur ces conclusions dès lors qu'elles ne sont elles-mêmes entachées d'aucune irrecevabilité au regard des dispositions dont l'appréciation relève de la juridiction administrative, et ce, sans préjudice des suites que la procédure judiciaire est susceptible d'avoir sur l'extinction de cette créance ; qu'il résulte de l'instruction que l'autorisation dont a bénéficié la société S.A. GOFFETTE dans les conditions sus -rappelées emportait pour elle l'obligation de remettre les lieux dans leur état primitif ; que, dans ces conditions, la circonstance que l'autorisation d'occupation temporaire n'ait pas été renouvelée au 1er janvier 1994, loin de dispenser la société S.A. GOFFETTE de son obligation d'avoir à restituer les lieux dans leur état initial par la démolition des bâtiments litigieux, l'obligeait à remettre les lieux en l'état primitif après leur exploitation ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, en date du 5 octobre 1999, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne l'a condamnée à remettre les lieux en l'état ;

Sur les conclusions incidentes présentées par Voies navigables de France :

Considérant qu'il y a lieu d'autoriser Voies navigables de France à procéder d'office, aux frais du contrevenant, à l'enlèvement des installations, en cas d'inexécution par la S.A. GOFFETTE de son obligation de remise en état dans un délai de trois mois après la notification de la présente décision ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice qui reprennent celles de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à ce que Voies navigables de France qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante soit condamné à verser à la société S.A. GOFFETTE la somme que cette dernière demande au titre des frais exposés par elle lui et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de ce texte et de condamner la société S.A. GOFFETTE à verser à Voies navigables de France la somme qu'il réclame ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la société S.A. GOFFETTE en tant qu'elles sont dirigées contre l'article 1er du jugement du Tribunal administratif de Chalons-en-Champagne du 5 octobre 1999.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la société S.A. GOFFETTE est rejeté.

Article 3 : En cas d'inexécution par la S.A. GOFFETTE, passé un délai de trois mois après la notification du présent arrêt, du jugement du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne la condamnant à remettre les lieux en l'état, Voies navigables de France est autorisé à procéder d'office, aux frais du contrevenant, à l'enlèvement des installations dont s'agit.

Article 4 : Les conclusions de Voies navigables de France tendant à la condamnation de la société S.A. GOFFETTE en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société S.A. GOFFETTE représentée par son mandataire liquidateur, à Voies navigables de France et au ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer.

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ere chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 00NC00019
Date de la décision : 24/06/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux répressif

Composition du Tribunal
Président : Mme MAZZEGA
Rapporteur ?: Mme Catherine FISCHER-HIRTZ
Rapporteur public ?: M. ADRIEN
Avocat(s) : CABINET DEVARENNE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2004-06-24;00nc00019 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award