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26/09/2002 | FRANCE | N°97NC00953

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3e chambre, 26 septembre 2002, 97NC00953


(Troisième chambre)
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la Cour les 2 mai 1997 et 24 septembre 1998 et complétés par mémoire enregistré le 7 janvier 1999, présentés pour la société OURRY, société anonyme dont le siège est -Ferme des Fusées- à Champdeuil (Seine-et-Marne), par la Selarl Molas et associés, avocats au barreau de Paris ;
La société OURRY demande à la Cour :
1° - d'annuler le jugement n° 942619-953257 du 30 décembre 1996 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses requêtes tendant, d

'une part, à l'annulation des décisions prises par l'administration des douanes de ...

(Troisième chambre)
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la Cour les 2 mai 1997 et 24 septembre 1998 et complétés par mémoire enregistré le 7 janvier 1999, présentés pour la société OURRY, société anonyme dont le siège est -Ferme des Fusées- à Champdeuil (Seine-et-Marne), par la Selarl Molas et associés, avocats au barreau de Paris ;
La société OURRY demande à la Cour :
1° - d'annuler le jugement n° 942619-953257 du 30 décembre 1996 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses requêtes tendant, d'une part, à l'annulation des décisions prises par l'administration des douanes de refouler ses camions de transport du territoire français entre le 26 novembre 1991 et le 3 décembre 1991 et de rejeter sa demande d'indemnisation, d'autre part, à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 1 900 000 francs (289 653,13 euros) en réparation du préjudice subi ;
2° - de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 900 000 francs (289 653,13 euros) avec intérêts légaux à compter du 7 juillet 1995 et capitalisation desdits intérêts en date du 24 septembre 1998 ;
3° - subsidiairement, d'ordonner une expertise tendant à l'évaluation du préjudice subi ;
4° - de condamner l'Etat à lui verser la somme de 25 000 francs (3 811,23 euros) au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la correspondance en date du 26 avril 2002 par laquelle le président de la 3ème chambre de la cour a informé les parties, sur le fondement de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour était susceptible de soulever d'office le moyen tiré du caractère excessif de l'évaluation du préjudice subi ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code des douanes ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 septembre 2002 :
- le rapport de M. VINCENT, président,
- et les conclusions de M. ADRIEN, Commissaire du Gouvernement ;

Considérant qu'à la suite de contrôles effectués sur le site de déchargement de la société Satrod à Roche-La-Molière, qui ont révélé la présence de déchets hospitaliers parmi les ordures ménagères déversées par les camions appartenant à la société OURRY, la direction générale des douanes a demandé à ses services locaux de refouler systématiquement les véhicules transportant des déchets en provenance d'Allemagne pour le compte de la société Satrod ; qu'il est constant que, consécutivement à cette décision, les camions de la société OURRY ont été refoulés au poste frontière d'Ottmarsheim du 26 novembre au 3 décembre 1991 ; que la société OURRY relève appel du jugement du 30 décembre 1996 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg, tout en estimant que l'administration des douanes avait commis une faute de nature à engager sa responsabilité en refoulant ses camions sans s'être préalablement assurée de la présence de déchets générateurs de nuisances dans les ordures ménagères transportées, a rejeté sa requête tendant à l'indemniser du préjudice subi, au motif qu'elle n'en établissait pas la réalité ;
Sur le préjudice subi par la société OURRY :
Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que la société OURRY transportait des ordures ménagères en provenance d'Allemagne et procédait à leur déversement sur la décharge de Roche-la-Molière (Loire) en vertu de marchés conclus avec la société Satrod, exploitant du site, ainsi qu'avec la société Bormann, exportatrice de ces déchets ; qu'il n'est pas contesté que, compte tenu de la soudaineté de l'intervention de l'administration, la société OURRY, qui exécutait son contrat en partie à l'aide de ses propres camions et en partie par sous-traitance, n'a pu réaffecter ses véhicules à d'autres marchés ; qu'elle n'a pu davantage différer après le 3 décembre les transports prévus pour être effectués du 26 novembre au 3 décembre, dès lors qu'elle était tenue de ne transporter que des ordures collectées le jour même ; que le principe même du préjudice subi est ainsi établi ;

Considérant toutefois que s'il ressort des pièces du dossier que la société Bormann lui facturait une somme de 10 750 francs (1 638,83 euros) par opération et en admettant que le coût forfaitaire d'un transport affrété auprès des sous-traitants soit fixé à 7 866 francs (1 199,16 euros), auquel s'ajoute le coût du passage en douane, le nombre de transports qui aurait été effectué pendant les six jours ouvrables ne saurait, eu égard aux éléments avancés concernant l'activité du mois d'octobre et de la première quinzaine de novembre 1991, être estimé à un nombre supérieur à 35 pour ce qui concerne tant les prestations réalisées à l'aide de ses propres camions que celles accomplies par les camions affrétés ; que la perte de bénéfice sur les transports affrétés peut ainsi être évaluée à 14 000 euros ; que le résultat d'exploitation dégagé par les transports à l'aide des camions de la société OURRY doit être par ailleurs calculé en tenant compte des charges fixes, outre les charges variables indiquées par la société requérante ; qu'en prenant en considération le taux de marge tel qu'il ressort de l'étude de rentabilité présentée en première instance, il sera fait une juste appréciation du préjudice subi relatif à l'activité exercée directement par la société OURRY en le fixant à une somme de 9 000 euros ; qu'il s'ensuit, sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise sollicitée à titre subsidiaire, que le préjudice indemnisable doit être arrêté à la somme de 23 000 euros ; que, dans cette mesure, la société OURRY est fondée à demander l'annulation du jugement attaqué ;
Sur les intérêts et les intérêts des intérêts :
Considérant que la société OURRY a droit aux intérêts de la somme de 23 000 euros à compter du 27 juillet 1995, date de réception de sa demande préalable par le ministre de l'économie et des finances ; que la capitalisation des intérêts a été demandée le 24 septembre 1998 ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner l'Etat à verser à la société OURRY une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg en date du 30 décembre 1996 est annulé.
Article 2 : L'Etat -ministère de l'économie, des finances et de l'industrie- est condamné à verser à la société OURRY la somme de 23 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 27 juillet 1995. Les intérêts échus le 24 septembre 1998 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 3 : L'Etat -ministère de l'économie, des finances et de l'industrie- versera à la société OURRY une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société OURRY et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 97NC00953
Date de la décision : 26/09/2002
Type d'affaire : Administrative

Analyses

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITE EN RAISON DES DIFFERENTES ACTIVITES DES SERVICES PUBLICS - SERVICES ECONOMIQUES - SERVICE DES DOUANES.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - EVALUATION DU PREJUDICE - PREJUDICE MATERIEL.


Références :

Code civil 1154
Code de justice administrative L761-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. VINCENT
Rapporteur public ?: M. ADRIEN

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2002-09-26;97nc00953 ?
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