(Deuxi me Chambre)
Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 18 juin 1996, présentée pour M. Jean-Frédéric X..., demeurant ... ( Meurthe-et-Moselle), par Me Gosserez, avocat à la Cour ;
M. X... demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n 94788, 94789 en date du 9 avril 1996 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande en décharge du complément d'impôt sur le revenu et de la contribution sociale généralisée correspondante auxquels il a été assujetti au titre de l'année 1990, dans les rôles de la commune de Nancy ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3 ) de condamner l' Etat lui verser une indemnité au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 avril 2000 :
- le rapport de M. COMMENVILLE, Président ;
- et les conclusions de M. STAMM, Commissaire du Gouvernement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que le tribunal administratif de Nancy a été saisi de deux demandes distinctes présentées, d'une part, par Mlle Geneviève X... et, d'autre part, par M. Jean-Frédéric X... ayant trait aux compléments d'impôt sur le revenu auxquels ces contribuables ont été assujettis au titre de l'année 1990 ; que, compte tenu de la nature de l'impôt sur le revenu et quels que fussent, en l'espèce, les liens de fait et de droit entre les impositions en cause, le tribunal devait statuer par des décisions séparées sur ces deux demandes ; que c'est en méconnaissance de cette règle d'ordre public qu'il a prononcé la jonction des instances ; que, dès lors, son jugement en date du 9 avril 1996 doit être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu, pour la Cour, dans les circonstances de l'affaire, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Nancy ;
Considérant que M. X... conteste la réintégration dans son revenu imposable et dans les bases de la contribution sociale généralisée, au titre de l' année 1990, dans la catégorie des revenus fonciers, de sa quote part, estimée à 337 470 F, dans le bénéfice de la SCI de gestion " Les Paraboles"dont il est membre, ainsi que la majoration dont a été assorti le redressement dont il a fait l' objet, du fait du défaut de souscription par ladite SCI de sa déclaration de résultat de l'année 1990 dans le délai réglementaire ;
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne les intérêts d'emprunt :
Considérant qu'aux termes de l'article 31 du code général des impôts : "I. Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent :
1 ) pour les propriétés urbaines : ... d) les intérêts de dettes contractées pour la conservation, la réparation ou l'amélioration des propriétés ..." ;
Considérant que la SCI " Les Paraboles" a déduit de ses revenus fonciers de l' année 1990 des intérêts d' emprunt payés à la "Banque Internationale à Luxembourg " pour un montant total de 312 264 F ; que, toutefois, il résulte de l'instruction que les emprunts correspondants, en dates respectivement du 15 mars 1990 pour un montant de 25 000 000 F et du 6 avril 1990 pour un montant de 30 000 000 F, dont il n'est pas établi qu'ils auraient été utilisés entièrement ou même partiellement pour le compte de la société civile immobilière, ont été souscrits personnellement par son gérant, M. Christian X... , qui en a lui-même supporté la charge effective notamment par l'intermédiaire d'un prêt obtenu auprès de la SA Immobilière Joseph II dont le siège est à Bruxelles ; que, par suite, nonobstant la mention de la destination de l'emprunt à l' achat d' un immeuble par la SCI " Les Paraboles" portée sur l' acte de prêt du 30 mars 1990 et la désignation de la SCI comme emprunteur sur une télécopie du 6 avril 1990, en l' absence de corrélation justifiée entre ces frais financiers et l'acquisition par la société d' un immeuble situé à Roubaix, le 7 juin 1990 et à défaut de toute justification comptable par cette dernière du mode de financement de cette opération, c'est à bon droit que l'administration en a refusé la déduction ;
Sur le bien-fondé de l'imposition du bénéfice réalisé par la SCI "Les Paraboles" au nom de ses membres, au titre de l'année 1990 :
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 8-1 du code général des impôts, les membres des sociétés civiles qui ne revêtent pas, en droit ou en fait, l'une des formes de sociétés visées à l'article 206-1 et qui, sous réserve des exceptions prévues à l'article 239 ter, ne se livrent pas à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35 "sont personnellement soumis à l'impôt sur le revenu des personnes physiques pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société" ; que les associés des sociétés civiles visées par cet article doivent être regardés comme ayant acquis, dès la clôture de chaque exercice, la part des bénéfices sociaux à laquelle ils ont droit, même si, à cette date, ils ne l'ont pas encore effectivement appréhendée ; qu'ainsi, le fait que M. X... n'aurait pas pu effectivement disposer lors de l'établissement de l'impôt auquel il a été assujetti au titre de l'année 1990 de sa part des bénéfices correspondant, pour cette année, à ses droits dans le capital de la société civile " Les Paraboles" est sans influence sur le bien-fondé de son imposition au titre de l'année de réalisation de ce bénéfice ;
Considérant, d'autre part, que si M. X... fait état de la décision de la cour d' appel de Douai en date du 22 novembre 1993 ayant confirmé la résiliation, prononcée le 23 octobre 1991 par le tribunal de grande instance de Lille, de la vente du 7 juin 1990 par laquelle la SCI "Les Paraboles "avait acquis l'immeuble donné en location et ordonné la restitution à la venderesse des loyers perçus entre le 20 décembre 1990 et le 31 décembre 1991, cette restitution étant intervenue après la clôture de l'exercice au cours duquel les loyers litigieux ont été perçus, n'est pas, pour la détermination de l'impôt contesté, opposable à l'administration et ne permet pas à M. X... de contester le caractère imposable au nom des associés des loyers encaissés en 1990 ;
Sur les pénalités :
Considérant qu'en vertu du 1 de l'article 1 728 du code général des impôts, lorsqu'une personne morale tenue de souscrire une déclaration comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'un des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes établis ou recouvrés par la direction générale des impôts, s'abstient de faire cette déclaration ou la présente tardivement, le montant des droits résultant de la déclaration déposée tardivement est assorti de l'intérêt de retard de 0,75 % par mois prévu par l'article 1 727 du même code et d'une majoration de 10 % ; que selon le 3 du même article 1 728, cette majoration est portée à 40 % "lorsque le document n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure notifiée par pli recommandé d'avoir à le produire dans ce délai" et à 80 % "lorsque le document n'a pas été déposé dans les trente jours de la réception d'une deuxième mise en demeure notifiée dans les mêmes formes que la première ;
Considérant, d'une part, qu'aux termes mêmes des dispositions susmentionnées du code général des impôts la circonstance que le respect des obligations déclaratives de la SCI "Les Paraboles" ait échappé à la maîtrise de ses membres est sans influence sur l' application des pénalités qu'elles prévoient ;
Considérant, d'autre part, qu'il est constant que la SCI "Les Paraboles"n'a souscrit la déclaration de résultat de son exercice clos le 31 décembre 1990 que le 29 novembre 1991, soit après l'expiration du délai expirant avant le 1er mars de chaque année prévu par l' article 46 C de l' annexe III au code général des impôts, et en outre plus de trente jours après réception d'une seconde mise en demeure qui lui a été notifiée le 26 avril 1991 ; que si M. X... fait état de ce que le gérant de la SCI " Les Paraboles" a été incarcéré du 10 avril au 31 juillet 1991 et de ce que "des documents de toute nature" ont été saisis au domicile de ce dernier les 18 avril et 21 novembre 1991, il ne démontre pas que ces faits auraient constitué pour la SCI " Les Paraboles" un cas de force majeure ayant fait obstacle au respect des délais qui lui étaient impartis ; que, dès lors, M. X... n' est pas fondé à soutenir qu'il n'était pas passible de la majoration qui lui a été appliquée au taux de 80 %, conformément aux dispositions précitées de l' article 1 728 du code général des impôts ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la demande de M. X... ne peut qu'être rejetée ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que les dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à ce que l' Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à verser à M. X... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nancy en date du 9 avril 1996 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Nancy est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de M. X... tendant au bénéfice de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetées.
Article 4 : Le présent arr t sera notifié M. X... et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.