(Troisième Chambre)
Vu la requête et les pièces complémentaires, enregistrées le 24 avril 1998 et le 25 juin 1998 au greffe de la Cour, présentées pour l'ETABLISSEMENT PUBLIC EDUCATIF ET SOCIAL. (E.T.A.P.E.S.), agissant par son représentant légal domicilié au siège social, ... ;
L'ETABLISSEMENT PUBLIC EDUCATIF ET SOCIAL demande à la Cour :
1 ) - d'annuler l'ordonnance en date du 2 avril 1998 du tribunal administratif de Besançon, par laquelle il a rejeté sa demande tendant à la condamnation solidaire de :
Monsieur Christian Y..., architecte, demeurant ..., maître d'oeuvre co-traitant ;
S.A. Betic, dont le siège social est ..., prise en la personne de son président directeur général, domicilié en cette qualité audit siège, maître d'oeuvre co-traitant ;
Société A.J.C., dont le siège social est ..., prise en la personne de son représentant M. Z..., économiste de la construction, domicilié audit siège, maître d'oeuvre co-traitant ;
S.A. Socotec, dont le siège social est Tour Maine Montparnasse, ..., prise en la personne de son président directeur général en exercice, domicilié en cette qualité audit siège ayant agence à Lons-le-Saunier, ... ;
Société Soletco, dont le siège social est ..., prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège ;
Me X..., ... 2000, 71000 Châlon-sur-Saône, ès-qualité de mandataire liquidateur de la société Reconneille dont le siège social est ... ;
S.A. Cafraco, étanchéité PVC, dont le siège social est ..., prise en la personne de son gérant en exercice, domicilié en cette qualité audit siège ;
S.A. Puget, couverture métallique zinguerie charpente, dont le siège social est ..., prise en la personne de son président directeur général en exercice, domicilié en cette qualité audit siège ;
S.A. Bonglet, doublage plafond, dont le siège social est à Lons-le-Saunier, ..., prise en la personne de son président directeur général en exercice, domicilié en cette qualité audit siège ;
Me X..., ... 2000, 71000 Châlon-sur-Saône, ès-qualité de mandataire liquidateur de la S.A. Valcher, doublage plafonds, dont le siège social est à Dôle (Jura), ... ;
S.A. Nouveau, Chauffage VMC plomberie, dont le siège social est à Salins-les-Bains, BP 105, prise en la personne de son président directeur général en exercice, domicilié en cette qualité audit siège ;
SARL Mollier Douvre, dont le siège social est 39570 Pannessières, prise en la personne de son gérant en exercice,
domicilié en cette qualité audit siège ;
Constructeurs de la maison d'accueil pour handicapés du A... Fleury à lui payer une provision de 2 000 000 F, à valoir sur la réparation du préjudice résultant des désordres dont est atteint cet établissement ;
2 ) - de prononcer cette condamnation ;
3 ) - de condamner les constructeurs à lui payer 10 000 F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance attaquée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 décembre 1998 :
- le rapport de Mme BLAIS, Premier-Conseiller,
- les observations de Me Pernot, avocat de l'ETABLISSEMENT PUBLIC EDUCATIF ET SOCIAL (E.T.A.P.E.S.), de Me Uline, avocat de la S.A. Betic, de Me Nicolier, avocat de la S.A. A.J.C.,
- et les conclusions de M. VINCENT, Commissaire du Gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article R.129 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Le président du tribunal administratif ou de la cour administrative d'appel ou le magistrat que l'un d'eux délègue peut accorder une provision au créancier qui a saisi le tribunal ou la Cour d'une demande au fond lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie."
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment des conclusions des experts désignés par le tribunal que l'ouvrage construit pour le compte de l'ETABLISSEMENT PUBLIC EDUCATIF ET SOCIAL (E.T.A.P.E.S.) a présenté après la réception des travaux des désordres liés notamment à des phénomènes de condensation et d'humidité ; que ces désordres, qui ont été suffisamment importants pour entraîner en 1997, sur injonction de la commission de sécurité compétente, la fermeture de l'établissement, sont imputables au choix du procédé d'isolation de la toiture et à des défauts ou insuffisances des travaux exécutés par les entreprises Reconneille, Bonglet, Nouveau, E.J.E., Cafraco et Puget ; que ces désordres mettent ainsi en cause la responsabilité décennale des entreprises citées et de l'équipe de maîtrise d'oeuvre, constituée de M. Y..., architecte et de la société A.J.C., économiste de la construction, et de la société Betic, cette dernière à raison notamment de l'insuffisance de surveillance des travaux ; que l'expert du tribunal a conclu, pour les seuls travaux de réfection, à un coût de 2 116 030,16 F T.T.C. ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'ETABLISSEMENT PUBLIC EDUCATIF ET SOCIAL (E.T.A.P.E.S.), dont la demande entrait bien dans les prévisions de l'article R.129 précité du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, et qui a bien précisé le fondement de sa demande, justifie que les constructeurs précités ont à son égard une obligation solidaire, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'affaire, de regarder comme non sérieusement contestable dans la limite de 1 000 000 F ; que l'établissement est par suite fondé à soutenir que c'est à tort que le vice-président du tribunal administratif de Besançon, par l'ordonnance attaquée, a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu d'annuler cette ordonnance, et de condamner solidairement M. Y..., la société A.J.C., la société Betic, et les entreprises Reconneille, Bonglet, Nouveau, E.J.E., Cafraco et Puget à lui payer une somme de 1 000 000 F à titre de provision ; qu'en revanche, en l'état de l'instruction, l'existence d'une obligation non sérieusement contestable de Socotec, et des entreprises Valcher, Soletco et Mollier Douvre n'apparaît pas établie ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'ETABLISSEMENT PUBLIC EDUCATIF ET SOCIAL (E.T.A.P.E.S.), qui n'est pas la partie perdante à l'instance, soit condamné sur leur fondement à indemniser les sociétés Betic, Mollier Douvre, A.J.C. et Bonglet et M. Y... ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'affaire, de condamner solidairement M. Y..., la société A.J.C., la société Betic, et les entreprises Reconneille, Bonglet, Nouveau, E.J.E., Cafraco et Puget à payer à l'établissement requérant une somme de 8 000 F en application de ces dispositions ;
Article 1er : L'ordonnance du 2 avril 1998 du vice-président du tribunal administratif de Besançon est annulée.
Article 2 : M. Y..., la société A.J.C., la société Betic et les entreprises Reconneille, Bonglet, Nouveau, EJE, Cafraco et Puget sont condamnés solidairement à payer à l'ETABLISSEMENT PUBLIC EDUCATIF ET SOCIAL (E.T.A.P.E.S.) une provision de 1 000 000 F.
Article 3 : M. Y..., la société A.J.C., la société Betic et les entreprises Reconneille, Bonglet, Nouveau, EJE, Cafraco et Puget sont condamnés solidairement à payer à l'ETABLISSEMENT PUBLIC EDUCATIF ET SOCIAL (E.T.A.P.E.S.) une somme de 8 000 F en application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête et les conclusions présentées par les sociétés Betic, Mollier Douvre, A.J.C. et Bonglet, et M. Y... sur le fondement des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetés.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'ETABLISSEMENT PUBLIC EDUCATIF ET SOCIAL (E.T.A.P.E.S.), à M. Y..., à la S.A. Betic, à la société A.J.C., à la S.A. Socotec, à la société Sotelco, à la S.A. Cafraco, à la S.A. Puget, à la S.A. Bonglet, à la S.A. Nouveau, à la SARL Mollier Douvre et au ministre de l'intérieur.