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07/01/1999 | FRANCE | N°96NC02647

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3e chambre, 07 janvier 1999, 96NC02647


(Troisième Chambre)
Vu l'arrêt n 126594 du 31 juillet 1996 par lequel le Conseil d'Etat a, d'une part, annulé l'arrêt portant les n 89LY01122 et 89LY01123 en date du 9 avril 1991 de la cour administrative d'appel de Lyon, en tant que la Cour, statuant sur les requêtes de la commune de Saint-Gervais et de la SOCIETE DES TELEPHERIQUES DU MASSIF DU MONT-BLANC (S.T.M.M.B) dirigées contre les jugements du 31 décembre 1987 du tribunal administratif de Grenoble, a limité à la seule valeur des actifs le droit à indemnité de la SOCIETE DES TELEPHERIQUES DU MASSIF DU MONT-BLANC (S.T.M.M.B

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(Troisième Chambre)
Vu l'arrêt n 126594 du 31 juillet 1996 par lequel le Conseil d'Etat a, d'une part, annulé l'arrêt portant les n 89LY01122 et 89LY01123 en date du 9 avril 1991 de la cour administrative d'appel de Lyon, en tant que la Cour, statuant sur les requêtes de la commune de Saint-Gervais et de la SOCIETE DES TELEPHERIQUES DU MASSIF DU MONT-BLANC (S.T.M.M.B) dirigées contre les jugements du 31 décembre 1987 du tribunal administratif de Grenoble, a limité à la seule valeur des actifs le droit à indemnité de la SOCIETE DES TELEPHERIQUES DU MASSIF DU MONT-BLANC (S.T.M.M.B.) à la suite de la résiliation de la concession du secteur de Bellevue ; d'autre part, renvoyé sur ce point l'affaire devant la cour administrative d'appel de Nancy ;
Vu les décisions en date des 30 janvier et 2 février 1989, enregistrées au greffe de la Cour le 3 mars 1989 par lesquelles le président de la 6ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour, en application de l'article 17 du décret n 88-906 du 2 septembre 1988, les requêtes présentées pour la commune de Saint-Gervais-les-Bains par Me Y..., avocat aux conseils et pour la SOCIETE DES TELEPHERIQUES DU MASSIF DU MONT-BLANC, par Me X..., avocat aux Conseils ;
Vu 1 / sous le numéro 89LY01122 la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, les 31 mai et 30 septembre 1988, présentés pour la commune de Saint-Gervais-les-Bains (Haute-Savoie), représentée par son maire en exercice ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 9 mars 1989, présenté pour la SOCIETE DES TELEPHERIQUES DU MASSIF DU MONT-BLANC (S.T.M.M.B.) par Me X..., avocat aux conseils ; la SOCIETE DES TELEPHERIQUES DU MASSIF DU MONT-BLANC (S.T.M.M.B.) conclut au rejet de la requête ; elle soutient que la cession d'une majorité des actions de la SOCIETE DES TELEPHERIQUES DU MASSIF DU MONT-BLANC (S.T.M.M.B) à la société d'économie mixte du Jaillet n'a aucunement porté atteinte à l'existence juridique de la SOCIETE DES TELEPHERIQUES DU MASSIF DU MONT-BLANC (S.T.M.M.B.) ni à sa qualité de co-contractante de la commune ; qu'en l'occurrence, la cession de ces actions a été le fait de certains actionnaires de la S.T.M.M.B. et non de celle-ci, de sorte qu'elle ne saurait être regardée comme ayant procédé elle-même à une cession non autorisée du contrat ; que seule la cession du contrat de concession sans autorisation, et non celle des actions de la société concessionnaire par les actionnaires, est susceptible de faire l'objet d'une sanction de la part du concédant ; qu'ainsi, la résiliation sans indemnité du contrat n'était pas en l'espèce justifiée ; qu'en outre un refus d'autorisation de cession ne se justifie que pour des motifs tirés de l'incapacité financière ou technique du concessionnaire proposé ; que la commune de Saint-Gervais, n'a fait état d'aucun motif de cet ordre ; qu'enfin la commune ayant préalablement décidé de racheter la concession avec effet du 30 avril 1987, la résiliation sans indemnité décidée par délibération du conseil municipal du 18 mars 1987 est irrégulière comme portant atteinte à des droits acquis ;

Vu 2 / sous le n 89LY01123 la requête, la requête complémentaire et le mémoire ampliatif, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 9 mai, 2 juin et 15 juillet 1988, présentés pour la SOCIETE DES TELEPHERIQUES DU MASSIF DU MONT-BLANC (S.T.M.M.B.) dont le siège social est ...Hôpital à Sallanches (Haute-Savoie) ;
Vu, enregistré le 10 décembre 1996 sous le n 96NC02647 le mémoire présenté pour la société d'économie mixte Mégève Rochebrune, venant aux droits de la SOCIETE DES TELEPHERIQUES DU MASSIF DU MONT-BLANC (S.T.M.M.B.), représentée par son président-directeur général en exercice, par la société civile professionnelle d'avocats Charles Sirat et Jean-Paul Z...,
La société demande à la Cour :
- de condamner la commune de Saint-Gervais à lui payer 19 906 321 F avec intérêts de droit à compter du 24 avril 1987, capitalisés aux dates des 22 juillet 1988, 25 novembre 1992, 15 mars 1994, 17 mars 1995 et 20 mars 1996 ;
- la condamner également à lui verser 200 000 F au titre de l'article L 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu, enregistré le 14 avril 1998 le mémoire par lequel la SOCIETE DES TELEPHERIQUES DU MASSIF DU MONT-BLANC demande la capitalisation des intérêts échus à son profit ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 décembre 1998 :
- le rapport de Mme BLAIS, Premier Conseiller,
- les observations de Me GILLI, avocat de la SOCIETE DES TELEPHERIQUES DU MASSIF DU MONT-BLANC (S.T.M.M.B.), et de la société civile professionnelle ADAMAS, représentée par Me BONNARD, avocat de la COMMUNE DE SAINT-GERVAIS,
- et les conclusions de M. VINCENT, Commissaire du Gouvernement ;

Considérant que, par une délibération du 18 mars 1987, le conseil municipal de Saint-Gervais a résilié sans indemnité la convention confiant à la SOCIETE DES TELEPHERIQUES DU MASSIF DU MONT-BLANC (S.T.M.M.B.), aux droits de laquelle vient la SEM Mégève Rochebrune, l'exploitation des remontées mécaniques sur le territoire de la commune ; que le tribunal administratif de Grenoble, saisi de cette décision, a annulé la résiliation en tant qu'elle concernait le secteur dit "de Bellevue", et rejeté comme irrecevables les conclusions tendant à l'annulation de la concession relative au section dit "du Mont d'Arbois" ; que par son arrêt susvisé du 9 avril 1991, la cour administrative d'appel de Lyon a constaté le désistement de la SOCIETE DES TELEPHERIQUES DU MASSIF DU MONT-BLANC (S.T.M.M.B.) de ces dernières conclusions, annulé le jugement en tant qu'il annulait la résiliation de la concession du secteur de Bellevue, et rejeté les conclusions tendant à cette annulation ; que le Conseil d'Etat, saisi en cassation de cet arrêt, l'a seulement annulé en tant qu'il limitait à la seule valeur des actifs le droit à indemnité de la SOCIETE DES TELEPHERIQUES DU MASSIF DU MONT-BLANC (S.T.M.M.B) à la suite de la résiliation de la concession du secteur Bellevue, et a renvoyé l'affaire sur ce point à la cour de céans ; qu'entre temps, un protocole d'accord, intervenu entre les parties le 19 décembre 1991, a déterminé les conditions d'indemnisation de la valeur des actifs, qui n'est donc plus en litige ; qu'il résulte de ce qui précède que ne restent à juger que le bien-fondé et le quantum des autres préjudices dont la société a demandé réparation ; qu'il appartient désormais à la seule cour de céans, désignée pour en juger par l'arrêt susvisé du Conseil d'Etat, de statuer sur cette demande d'indemnisation pour le secteur de Bellevue, dont la cour administrative d'appel de Lyon, contrairement à ce qui est soutenu, avait bien été saisie ;
En ce qui concerne le manque à gagner ;

Considérant que, si la requérante a droit à la réparation de son entier préjudice, y compris le manque à gagner qui est résulté pour elle de la résiliation de la concession, elle ne peut prétendre être indemnisée par la collectivité au-delà du préjudice dont elle justifie ; que la S.E.M réclame à ce titre une somme de 17 728 200 F toutes taxes comprises, correspondant au montant du revenu annuel qu'elle a retiré de la location-gérance de l'exploitation en litige entre les années 1988 et 1991, soit 700 000 F hors taxes, multiplié par le nombre d'années de la concession restant à courir, soit vingt-et-un ans ; que, d'une part, le tarif conventionnel de 700 000 F ne peut être regardé comme un justificatif suffisant des résultats de l'exploitation pour les années précédant la résiliation ; que, d'autre part, il y a lieu, pour évaluer le manque à gagner à venir de la S.E.M., de corriger la valeur desdits résultats pour tenir compte des aléas prévisibles de l'exploitation jusqu'à la fin de la concession ; qu'enfin, le résultat obtenu, si l'indemnisation est versée en capital, doit être, pour les années restant à courir, actualisé à la date de la décision ; que la Cour ne trouve pas au dossier les éléments nécessaires pour procéder à la fixation de ce préjudice ; qu'il y a lieu, par suite, de désigner un expert afin qu'il examine la comptabilité de la SOCIETE DES TELEPHERIQUES DU MASSIF DU MONT-BLANC (S.T.M.M.B.), et qu'il propose, dans le respect des principes de la comptabilité, une ou plusieurs évaluation du manque à gagner dont peut se prévaloir la société ;
En ce qui concerne les autres préjudices :
Considérant en premier lieu qu'il résulte de l'instruction que le directeur technique du secteur Bellevue a été licencié pour faute lourde ; que, par suite, la société n'est pas fondée à soutenir que ce licenciement serait en relation directe avec la résiliation, et à demander, pour ce motif, à être indemnisée du montant des frais qui en sont résultés pour elle ;
Considérant en deuxième lieu qu'un déficit s'élevant à 1 091 503 F a été constaté dans les comptes de la société pour l'exercice 1987-1988, à raison du seul secteur de Bellevue : que ce déficit, qui résulte de l'absence de recettes de la concession après la résiliation, est bien en relation avec cette dernière et doit par suite être indemnisé ;
Considérant en troisième lieu que si la société soutient avoir exposé en salaires et déplacement de personnel à raison des contentieux issus de la résiliation, 336 145,40 F, elle n'en apporte aucun justificatif ; qu'il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de condamner la commune de Saint-Gervais à verser à la SEM Mégève Rochebrune une somme de 1 091 503 F et de réserver ses droits au titre du manque à gagner ;
Sur les intérêts et les intérêts des intérêts :
Considérant que la SEM Mégève Rochebrune demande que les indemnités qui lui sont accordées portent intérêts à compter du 24 avril 1987 ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que la requête introductive d'instance enregistrée à cette date par le greffe du tribunal administratif de Grenoble ne comportait que des conclusions en annulation de la décision de résiliation ; que la première demande indemnitaire présentée par la société a été enregistrée au même greffe le 30 octobre 1987 ; que c'est, par suite, à compter de cette date que courront les intérêts au taux légal ;

Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée pour la première fois le 22 juillet 1988 ; qu'à cette date, une année ne s'était pas écoulée depuis la demande d'indemnité ; que par suite, il ne peut être fait droit à cette demande ; que la capitalisation a été ensuite demandée les 25 novembre 1992, 15 mars 1994, 17 mars 1995, 20 mars 1996, 7 avril 1997 et 14 avril 1998 ; qu'à chacune de ces dates, il était échu une année d'intérêts ; qu'il y a lieu, par suite, de faire droit à ces demandes ;
Article 1er : Avant dire-droit sur les conclusions de la SEM Mégève Rochebrune tendant à l'indemnisation du manque à gagner résultant pour elle de la résiliation de la concession en litige, il est ordonné une expertise aux fins de déterminer ledit manque à gagner conformément aux motifs de la présente décision.
Article 2 : La commune de Saint-Gervais versera à la SEM Mégève Rochebrune, venant aux droits de la S.T.M.M.B., une somme de 1 091 503 F, augmentée des intérêts de droits à compter du 30 octobre 1987, avec capitalisation des intérêts échus les 25 novembre 1992, 15 mars 1994, 17 mars 1995, 20 mars 1996, 7 avril 1997 et 14 avril 1998.
Article 3 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la S.E.M Mégève Rochebrune, venant aux droits de la SOCIETE DES TELEPHERIQUES DU MASSIF DU MONT-BLANC, à la commune de Saint-Gervais, au ministre de l'intérieur et à l'expert.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 96NC02647
Date de la décision : 07/01/1999
Type d'affaire : Administrative

Analyses

39-04-05-02-02 MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - FIN DES CONTRATS - FIN DES CONCESSIONS - RESILIATION - DROIT A INDEMNITE DU CONCESSIONNAIRE


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme BLAIS
Rapporteur public ?: M. VINCENT

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1999-01-07;96nc02647 ?
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