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04/12/1997 | FRANCE | N°95NC02096

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3e chambre, 04 décembre 1997, 95NC02096


(Troisième Chambre)
Vu le recours, enregistré le 29 décembre 1995 au greffe de la Cour, présenté au nom de l'Etat par le MINISTRE DU TRAVAIL ET DES AFFAIRES SOCIALES ;
Le ministre demande à la Cour :
1 d'annuler le jugement du 2 novembre 1995 par lequel le tribunal administratif de Besançon a annulé les décisions par lesquelles le préfet du Territoire-de-Belfort a appliqué à la Société française des Nouvelles Galeries Réunies une pénalité pour méconnaissance de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés au titre des années 1991, 1992 et 1993 concernant s

on établissement de Belfort ;
2 de rejeter la demande de la Société français...

(Troisième Chambre)
Vu le recours, enregistré le 29 décembre 1995 au greffe de la Cour, présenté au nom de l'Etat par le MINISTRE DU TRAVAIL ET DES AFFAIRES SOCIALES ;
Le ministre demande à la Cour :
1 d'annuler le jugement du 2 novembre 1995 par lequel le tribunal administratif de Besançon a annulé les décisions par lesquelles le préfet du Territoire-de-Belfort a appliqué à la Société française des Nouvelles Galeries Réunies une pénalité pour méconnaissance de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés au titre des années 1991, 1992 et 1993 concernant son établissement de Belfort ;
2 de rejeter la demande de la Société française des Nouvelles Galeries Réunies devant le tribunal administratif de Besançon ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le décret n 88-77 du 22 janvier 1988 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 novembre 1997 :
- le rapport de Mme BLAIS, Conseiller,
- les observations de Me MASSON, avocat de la Société des Grands Magasins Galeries Lafayette,
- et les conclusions de M. VINCENT, Commissaire du Gouvernement ;

Sur les conclusions du recours du MINISTRE DU TRAVAIL ET DES AFFAIRES SOCIALES :
Considérant qu'aux termes de l'article L.323-1 du code du travail : "Tout employeur occupant au moins vingt salariés est tenu d'employer, à temps plein ou à temps partiel, des bénéficiaires de la présente section dans la proportion de 6 % de l'effectif total de ses salariés. Pour les entreprises à établissements multiples, cette obligation d'emploi s'applique établissement par établissement ( ...)" ; qu'en vertu du second alinéa de l'article L.323-8-2 du même code : "Les employeurs mentionnés à l'article L.323-1 peuvent s'acquitter de l'obligation instituée par cet article en versant au fonds pour l'insertion professionnelle des handicapés une contribution annuelle pour chacun des bénéficiaires de la présente section qu'ils auraient dû employer ( ...) ; qu'aux termes de l'article L.323-8-6 : "Lorsqu'ils ne remplissent aucune des obligations définies aux articles L.323-1, L.323-8, L.323-8-1 et L.323-8-2, les employeurs mentionnés à l'article L.323-1 sont astreints, à titre de pénalité, au versement au Trésor public d'une somme dont le montant est égal à celui de la contribution instituée par l'article L.323-8-2, majoré de 25 %, et qui fait l'objet d'un titre de perception émis par l'autorité administrative" ; que, selon le I de l'article L.323-4 du code du travail : "L'effectif total de salariés visé au premier alinéa de l'article L.323-1 est calculé selon les modalités définies à l'article L.431-2; toutefois, les salariés occupant certaines catégories d'emplois exigeant des conditions d'aptitude particulières, déterminées par décret, ne sont pas décomptés dans cet effectif" ; qu'aux termes de l'article D.323-3 du code du travail, issu du décret susmentionné du 22 janvier 1988 : "Ne sont pas pris en compte dans l'effectif total de salariés visé à l'article L.323-1 (1er alinéa) les salariés occupant les emplois qui relèvent des catégories d'emplois énumérées à la liste annexée au présent décret" ; qu'il résulte de ces dispositions que ne sont pas pris en compte dans l'effectif de l'entreprise ou de l'établissement en fonction duquel s'apprécie l'obligation d'emploi fixée par l'article L.323-1 précité du code du travail les salariés qui occupent un emploi relevant de l'une des catégories d'emplois limitativement énumérées par la liste annexée à l'article D.323-3 du code du travail et définies par référence expresse aux rubriques de la nomenclature des professions et catégories socio-professionnelles établie par l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) ; qu'au nombre des emplois ainsi exclus figurent les "vendeurs de grands magasins" définis par référence à la rubrique 55-10 de la nomenclature de l'INSEE ;

Considérant que, dans la version de 1983 de ladite nomenclature, les vendeurs de rayon spécialisé de grand magasin ou de grande surface relevaient des rubriques 55-12 à 55-17, par le biais d'un commentaire figurant sous chacune de ces rubriques ; que la rubrique 55-10 intitulée "vendeurs de grand magasin" a été insérée dans la version de la nomenclature publiée en 1984, sans pour autant que les commentaires figurant sous les rubriques 55-12 à 55-17 aient été supprimés ; que, par suite, la rubrique 55-10 vise, depuis son insertion dans la nomenclature, les seuls vendeurs non spécialisés des grands magasins, la modification de son intitulé postérieurement à l'intervention du décret susmentionné du 22 janvier 1988, la rubrique visant depuis lors les vendeurs "polyvalents" des grands magasins, ayant eu pour seul objet de clarifier son contenu ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet du Territoire-de-Belfort était fondé, pour fixer l'étendue de l'obligation d'emploi des personnes handicapées et assimilées incombant à l'établissement de Belfort de la Société française des Nouvelles Galeries Réunies au titre des années 1991, 1992 et 1993, à déterminer son effectif en y incluant les vendeurs de rayon spécialisé relevant des rubriques 55-12 à 55-17 ; que, par suite, c'est à tort que, pour annuler les décisions susvisées du préfet du Territoire-de-Belfort, le tribunal administratif s'est fondé sur le motif que ledit préfet aurait commis une erreur de droit en limitant la notion de "vendeur de grand magasin" aux seuls vendeurs non spécialisés des grands magasins ;
Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par la Société française des Nouvelles Galeries Réunies devant le tribunal administratif et devant la Cour ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'intitulé des diverses rubriques de la liste annexée à l'article D.323-3 du code du travail que le classement des salariés dans chacune d'entre elles doit être opéré en fonction de leur activité ; que le respect de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés étant apprécié annuellement, la nature de l'activité exercée par chaque salarié est celle qui est constatée à la date à laquelle la déclaration d'emploi doit être souscrite par chaque entreprise assujettie ; que, par suite, la Société des Grands Magasins Galeries Lafayette, venant aux droits de la Société française des Nouvelles Galeries Réunies, n'est pas fondée à faire valoir à titre subsidiaire que les vendeurs affectés à l'établissement de Belfort relèveraient tous de la rubrique 55-10 précitée du seul fait que l'évolution de leur carrière professionnelle les amènerait à exercer leur activité successivement dans les divers départements du magasin ;

Considérant, en second lieu, qu'il appartient à la société des Grands Magasins Galerie Lafayette, pour chaque emploi dont elle demande l'exclusion de l'effectif de son établissement de Belfort, de démontrer que l'emploi en cause entre dans l'une des catégories énumérées dans la liste annexée à l'article D.323-3 du code du travail ; que si ladite société soutient que les vendeurs de l'établissement devaient en tout état de cause être regardés comme des vendeurs polyvalents au sens de la rubrique 55-10 en tant que les "départements" ou "centres de profit" auxquels ceux-ci seraient affectés recouvriraient le champ de plusieurs des rubriques 55-12 à 55-17 de la nomenclature, elle n'apporte aucun élément précis et propre aux années en cause tendant à démontrer que ceux des vendeurs que l'administration a refusé de ranger dans la rubrique 55-10 au vu d'indications recueillies sur place pour chacune desdites années ne relèveraient pas uniquement de l'une des rubriques 55-12 à 55-17 relatives aux vendeurs de rayon spécialisé en grand magasin ; que, par suite, la Société des Grands Magasins Galeries Lafayette n'établit pas que l'administration aurait commis une erreur de fait dans le calcul de l'effectif salarié de l'établissement de Belfort retenu pour déterminer l'assiette de l'obligation d'emploi et dont procède le montant de la pénalité infligée à la Société française des Nouvelles Galeries Réunies au titre des années 1991, 1992 et 1993 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DU TRAVAIL ET DES AFFAIRES SOCIALES est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a annulé les décisions par lesquelles le préfet du Territoire de-Belfort a appliqué à la Société française des Nouvelles Galeries Réunies la pénalité prévue à l'article L.323-8-6 du code du travail pour avoir méconnu l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés et assimilés lui incombant au titre des années 1991, 1992 et 1993 concernant son établissement de Belfort ;
Sur les conclusions de la Société des Grands Magasins Galeries Lafayette tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant qu'aux termes de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;
Considérant que la Société des Grands Magasins Galeries Lafayette succombe dans la présente instance ; que sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser une somme au titre des frais qu'elle a exposés doit, en conséquence, être rejetée ;
Article 1 : Le jugement du tribunal administratif de Besançon en date du 2 novembre 1995 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par la Société française des Nouvelles Galeries Réunies devant le tribunal administratif de Besançon et les conclusions de la Société des Grands Magasins Galeries Lafayette tendant à l'allocation des frais irrépétibles sont rejetées..
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITE et à la Société des Grands Magasins Galeries Lafayette.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 95NC02096
Date de la décision : 04/12/1997
Type d'affaire : Administrative

Analyses

66-032-02-05 TRAVAIL ET EMPLOI - REGLEMENTATIONS SPECIALES A L'EMPLOI DE CERTAINES CATEGORIES DE TRAVAILLEURS - EMPLOI DES HANDICAPES - REDEVANCES POUR INSUFFISANCE D'EMPLOI


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Code du travail L323-1, L323-8-2, D323-3, L323-8-6
Décret 88-77 du 22 janvier 1988


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme BLAIS
Rapporteur public ?: M. VINCENT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1997-12-04;95nc02096 ?
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