(Deuxième Chambre)
VU, enregistrée au greffe le 15 octobre 1993 le recours formé au nom de l'Etat par le ministre du budget ;
Le ministre demande à la Cour :
- d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg en date du 17 juin 1993 par lequel le tribunal a accordé à M. et Mme X... la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt auxquelles ils avaient été assujettis au titre de l'impôt sur le revenu pour les années 1981 à 1984 ;
- de prononcer le rétablissement desdites cotisations supplémentaires d'impôt qui se montent respectivement à 10 054 F, 28 444 F, 43 217 F et 5 080 F pour les années 1981,1982,1983 et 1984 ;
VU le mémoire en défense, enregistré au greffe le 17 janvier 1994 et présenté pour M. et Mme X... par le Cabinet PRICE WATERHOUSE, et tendant au rejet du recours du ministre, et à ce que l'Etat soit condamné à leur verser, au titre des frais irrépétibles, la somme de 48 448 F ;
VU le jugement attaqué ;
VU les autres pièces des dossiers ;
Vu la convention franco -allemande visant à éviter les doubles impositions conclue le 21 juillet 1959 et modifiée par l'avenant du 9 juin 1969 ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 novembre 1996 :
- le rapport de M. GOTHIER, Président-Rapporteur,
- et les conclusions de M. PIETRI, Commissaire du Gouvernement ;
Sur les conclusions présentées par le ministre et tendant au rétablissement des impositions contestées :
Considérant que l'administration a, dans un premier temps, assujetti M. et Mme X... a des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 1981 à 1984, pour un montant total de 86 795 F, à raison de l'imposition séparée des deux époux ; que sur réclamation de ces derniers, l'administration leur a accordé le dégrèvement desdites cotisations supplémentaires mais a pratiqué la compensation entre ce dégrèvement et la somme, d'un montant identique, qu'elle estimait due par M. et Mme X... et résultant de l'imposition, au taux effectif, des revenus d'origine française du couple ; que M. et Mme X... ayant obtenu devant les premiers juges la décharge des cotisations supplémentaires contestées, le ministre de l'économie, des finances et du plan demande le rétablissement desdites cotisations ;
Considérant qu'aux termes de l'article 4 B du code général des impôts :" Sont considérés comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : a) Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ..." ; qu'en l'espèce il résulte de l'instruction que M. X... disposait en France, à Strasbourg, pour l'ensemble de la période considérée, d'une résidence où demeurait son épouse ; que M. X..., bien qu'exerçant ses activités en Allemagne et y demeurant, se rendait régulièrement dans ladite résidence ; que par ailleurs M. X... était également propriétaire d'un autre immeuble en France, sis à Lingolsheim ; qu'ainsi M. X... devait être regardé comme ayant en France un foyer au sens de l'article 4 B ci-dessus rappelé ; que toutefois il est constant que pour la même période, M. X... disposait également d'un immeuble en Allemagne, où il résidait de façon habituelle ; que dés lors il devait être regardé comme ayant un foyer dans ce pays, dans lequel il était d'ailleurs assujetti à l'impôt en raison de son activité professionnelle ; qu'ainsi M. X... entrait dans le champ d'application de la convention franco-allemande visant à éviter les doubles impositions conclue le 21 juillet 1959 et modifiée par l'avenant du 9 juin 1969 ;
Considérant qu'aux termes de l'article 20 de cette convention : " ...En ce qui concerne les résidents de France la double imposition est évitée de façon suivante : a ) sous réserve des dispositions des alinéas b et c sont exclus de la base de l'imposition française les revenus provenant de la République Fédérale qui en vertu de la présente convention, sont imposable en République Fédérale. Cette règle ne limite cependant pas le droit de la France de tenir compte de, lors de la détermination du taux de ses impôts, des revenus ainsi exclus ..." ; qu'il résulte de ces dispositions que l'imposition, au taux effectif, des revenus de source française d'un contribuable, ne trouve à s'appliquer que pour autant que ce contribuable a la qualité de résident de France au sens de la convention précitée ;
Considérant que l'article 2 de cette convention prévoit que : " ... 4 a ) au sens de la présente convention, on entend par "résident d'un Etat contractant ", toute personne qui, en vertu de la législation dudit Etat, est assujettie à l'impôt dans cet Etat, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère analogue ; b ) Lorsque, selon la disposition de l'alinéa ci-dessus une personne physique est considérée comme résident de chacun des Etats contractants, le cas est résolu d'après les règles énoncées ci-dessous : (aa) Cette personne est réputée résident de l'Etat contractant où elle dispose d'un foyer d'habitation permanent. Lorsqu'elle dispose d'un foyer d'habitation permanent dans chacun des Etats contractants, elle est considérée comme résident de l'Etat contractant avec lequel ses liens personnels et économiques sont les plus étroits ..." ;
Considérant que pour demander le rétablissement des impositions dont le tribunal administratif a accordé la décharge, le ministre, qui ne conteste pas le fait que le pays dont M. X... possède la qualité de résident au sens des dispositions de l'article 2 ci-dessus rappelé, ne peut être déterminé en appliquant les critères définis par l'alinéa 4 a) dudit article, entend s'appuyer sur le contenu du b)aa de cet alinéa ; qu'il fait valoir, d'une part, que si M. X... disposait d'un foyer permanent d'habitation en Allemagne, il n'y demeurait que pendant la semaine pour les besoins de ses activités, et rentrait en fin de semaine à Strasbourg, où se situait son véritable foyer d'habitation, et d'autre part, que pour définir le centre des intérêts vitaux de M.OLFF, le seul critère économique ne suffit pas mais qu'il faut prendre en compte également les liens personnels les plus étroits, qui en l'espèce se situaient en France ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X... disposait à Francfort d'un appartement dont il était propriétaire ; que toute son activité professionnelle s'exerçait en Allemagne à travers la société dont il détenait la quasi-totalité des parts et dont il était le gérant ; qu'il possédait également des titres de participation dans une clinique située dans le même pays ; que par ailleurs au début de la période d'imposition, ses trois filles étaient toutes majeures, mariées et mères de famille et ne vivaient plus au domicile familial français des époux X... ; que l'essentiel du patrimoine foncier dont disposaient en France M. et Mme X... avait fait l'objet d'une donation partage entre Mme X... et ses enfants ; que M.OLFF soutient sans être contredit que son épouse et lui-même se rendaient alternativement en France ou en Allemagne pour les fins de semaines ; qu'ainsi, compte tenu de ces éléments, M.OLFF doit être regardé comme ayant entretenu au cours de la période d'imposition des liens personnels plus étroits avec l'Allemagne, tant en ce qui concerne l'aspect personnel de ceux-ci qu'en ce qui concerne leur aspect économique ; que dés lors M. X... doit être considéré comme résident d'Allemagne au sens des dispositions de l'article 4 b) aa) de la convention précitée ; qu'il suit de là que les dispositions de l'article 20 de ladite convention ci-dessus rappelées prévoyant la possibilité de l'imposition des revenus de sources françaises au taux effectif ne lui étaient pas applicables ; que dés lors le ministre n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a accordé à M. et Mme X... la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt contestées ; qu'il a lieu, par suite, de rejeter le recours du ministre ;
Sur les conclusions de M. et Mme X... tendant à ce que l'Etat soit condamné à leur payer la somme de 48.448 F, en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que pour justifier le montant de la somme dont ils demandent le paiement au titre de l'article L.8-1 précité, M. et Mme X... n'ont produit que des notes d'honoraires qui sont toutes antérieures à l'instance d'appel engagée par le ministre ; que dés lors il n'y a pas lieu de leur accorder le paiement de ladite somme ;
Article 1 : Le recours du ministre de l'économie, des finances, et du plan est rejeté.
Article 2 : Les conclusions de M. et Mme X... tendant à ce que l'Etat soit condamné à leur payer la somme de 48.448 F sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie et des finances et à M. et Mme X....