VU la requête, enregistrée le 4 mars 1994 présentée pour M. Guy FRERE domicilié ... (Nord) ;
M. X... demande à la Cour :
1°/ d'annuler le jugement en date du 25 novembre 1993 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa requête tendant à obtenir :
1°) la réduction du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé pour les années 1984 à 1986 ;
2°) la décharge du complément d'impôt sur le revenu, auquel il a été assujetti, au titre de l'année 1986 ;
3°) de lui accorder la décharge de ces impositions ainsi que des pénalités dont elles ont été assorties ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le livre des procédures fiscales ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 décembre 1995 :
- le rapport de M. BATHIE, Conseiller,
- et les conclusions de M. COMMENVILLE, Commissaire du Gouvernement ;
Sur la procédure :
En ce qui concerne l'avis de vérification du 12 mars 1987 :
Considérant que l'avis envoyé le 12 mars 1987 au contribuable, lui précise clairement qu'une vérification de comptabilité va être engagée, et qu'elle portera notamment, sur la taxe sur la valeur ajoutée due au titre de la période du 1er janvier 1984 au 31 décembre 1986, et sur les bénéfices industriels et commerciaux des exercices clos en 1984 et 1985 ; que le moyen tiré de ce que la période vérifiée aurait été mal précisée, manque en fait ;
En ce qui concerne la vérification des bénéfices industriels et commerciaux de l'année 1986 :
Considérant qu'il est constant que le requérant n'a produit ses déclarations de résultats, au titre de l'exercice clos en 1986 que le 15 septembre 1987 après deux mises en demeure du service ; qu'en conséquence, il s'est trouvé en situation d'évaluation d'office pour les bénéfices industriels et commerciaux de cet exercice, en application des dispositions de l'article L.73 du livre des procédures fiscales ; que cette situation, imputable au seul contribuable, ne peut être regardée comme ayant été révélée par la vérification de comptabilité alors engagée sur des exercices antérieurs ; que dès lors, tous les moyens tirés d'irrégularités de la procédure ayant conduit aux redressements des bénéfices industriels et commerciaux de l'année 1986, sont inopérants ;
Sur le bien-fondé de l'impôt sur le revenu de l'année 1986 :
En ce qui concerne la provision pour créances douteuses :
Considérant que le contribuable n'a pu justifier la liste et le montant des créances douteuses qu'il invoque en vue d'obtenir la déduction, de son revenu imposable, de la provision correspondante ; qu'en tout état de cause, il est constant qu'il n'a pas fourni en temps utile le relevé spécial des provisions exigé par les dispositions alors en vigueur de l'article 54quinquies du code général des impôts ; que le vérificateur a donc pu, à bon droit, réintégrer dans le revenu imposable de l'année 1986, le montant de cette provision dont une fraction correspondant aux petites créances a d'ailleurs été admise ;
En ce qui concerne les avances sur travaux enregistrées en 1985 :
Considérant que, si le vérificateur avait envisagé un rehaussement des bases, pour un montant de 41 723F hors taxes, provenant d'avances sur travaux acquittées par des clients, il ressort de la réponse à observations du contribuable du 19 janvier 1988 que ce chef de redressement a été abandonné, et qu'il concernait en outre l'exerci-ce 1985 ; qu'il résulte de tous ces éléments que le requérant n'est pas fondé à obtenir une décharge de l'impôt sur le revenu afférent à l'année 1986 ;
Sur la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux années 1984 à 1986 :
Considérant que le requérant avait donné son accord sur les redressements de taxe sur la valeur ajoutée qu'il conteste par le présent recours ; qu'il lui incombe, conformément aux dispositions de l'article R.194-1 du livre des procédures fiscales, d'établir l'exagération des bases retenues par l'administration, au titre de la période vérifiée ;
En ce qui concerne la méthode de reconstitution des bases :
Considérant qu'aux termes de l'article 269 du code général des impôts : "1/ Le fait générateur de la taxe est constitué : a) Pour les livraisons et les achats, par la délivrance des biens et, pour les prestations de services ... par l'exécution des services ... 2/ La taxe est exigible : a) Pour les livraisons et les achats visés au a) du 1/ ... lors de la réalisation du fait générateur ... c) Pour les prestations de services ... lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération ..." ;
Considérant que le vérificateur a constaté que le contribuable acquittait la taxe sur la valeur ajoutée selon les encaissements ; que si l'intéressé allègue l'existence de faits générateurs spécifiques à certaines opérations, il n'apporte aucune précision ni justification sur la nature et le montant des recettes qui auraient rendu la taxe exigible à une date différente de celle retenue par l'administration ;
En ce qui concerne les conséquences de l'abandon d'un chef de redressements au titre des bénéfices industriels et commerciaux de l'exercice 1985 :
Considérant que le vérificateur avait initialement rehaussé la base des bénéfices industriels et commerciaux de l'exercice 1985, d'un montant de 41 723F, correspondant à des avances sur travaux achevés la même année, et qui avaient ainsi généré des créances acquises, à rattacher à l'exercice clos en 1985 ; qu'ayant ensuite admis que ces recettes avaient été correctement comptabilisées, l'administration a abandonné ce chef de redressement ; que par ailleurs, il n'a jamais été contesté que les recettes correspondant à ces acomptes ont bien été encaissées durant l'année 1985 ; que, dès lors, l'exigibilité de la taxe sur la valeur ajoutée, liée à ces seuls encaissements, en application des dispositions précitées de l'article 269-2-c du code général des impôts, n'a pu en aucune façon, être influencée par l'abandon du redressement sus-évoqué ; que le requérant n'est donc pas fondé à obtenir, pour ce motif, une réduction de la base de la taxe sur la valeur ajoutée brute exigible durant l'année 1985 ;
En ce qui concerne les livraisons à soi-même :
Considérant que le requérant n'établit pas, faute de précisions et justifications adéquates, que les livraisons à soi-même constatées en 1984 et 1985, n'auraient pas donné lieu à une déduction immédiate de taxe dès le mois de constatation des opérations ;
En ce qui concerne les contrats obsèques :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'entreprise de pompes funèbres de M. FRERE concluait des contrats organisant les obsèques de certains clients, lesquels versaient aussitôt le prix convenu, pour des prestations et fournitures prévues à l'occasion de leur décès ;
Considérant, en premier lieu, que la taxe est exigible lors de l'encaissement du prix pour les prestations de service en application des dispositions sus-évoquées de l'article 269-2-c du code général des impôts ; que pour l'ensemble des prestations prévues au contrat, la taxe était donc due l'année de l'encaissement de la somme payée par le client ;
Considérant, en second lieu, qu'en application du même article 269 du code général des impôts, la taxe est exigible à la délivrance des biens ; qu'en l'absence de toute disposition législative définissant les actes ou opérations qui, au regard de la loi fiscale, doivent être regardés comme constitutifs d'une livraison, il y a lieu de se référer à la définition issue de l'article 1690 du code civil, dont il ressort notamment que : "La délivrance des effets mobiliers s'opère : ou par la tradition réelle ... ou même par le seul consentement des parties, si le transport ne peut pas s'en faire au moment de la vente ..." ; qu'en application de ces dernières dispositions, la délivrance de biens liés aux obsèques des clients, doit être regardée comme effectuée dès la signature des contrats sus-évoqués ;
Considérant, en troisième lieu, que le requérant allègue l'erreur résultant de l'inclusion, dans les bases de la taxe qui lui est personnellement réclamée, de débours pour autrui et du taux de la taxe appliquée à la partie "transports" des opérations facturées ; que l'Adminis-tration n'a jamais contesté la nature et le montant de ces éléments détaillés dans une lettre du contribuable au service local du 3 mai 1989, et dont le total des taxes correspondantes s'élève respectivement, à :
° 7 415,71F au titre de l'année 1984, ° 14 470,29F au titre de l'année 1985, ° 23 850,77F au titre de l'année 1986,
que le requérant est donc fondé à obtenir la déduction des montants sus-indiqués, des bases reconstituées à la taxe à laquelle il a été assujetti au titre des mêmes années ; dès lors que le total de ces décharges de taxe demeure en-deçà du dégrèvement sollicité dans sa réclamation préalable auprès de l'Administration, et qui s'élevait à 151 867F ;
En ce qui concerne les avances sur travaux :
Considérant que le poste "avances-sur-travaux" ressortait successivement à la clôture des exercices 1985 et 1986, aux montants de 68 315F et 83 354F hors taxes ; que ces sommes ont été incluses dans les bases de la taxe d'après les dates des encaissements, conformément aux règles d'exigibilité sus-évoquées ; que M. X... n'établit pas que les avances sur travaux enregistrées à la clôture de l'exercice 1985, auraient été reportées, au moins en partie, sur le même poste en clôture de l'exercice suivant ; qu'à défaut de toute justification sur ce point, le requérant n'est donc pas fondé à soutenir que la base de la taxe serait en réalité égale à la différence entre les deux montants sus-mentionnés ;
En ce qui concerne les travaux faits pour le compte de l'exploitant :
Considérant que si le requérant allègue avoir reversé la taxe à hauteur de 14 023F, dans le cadre des travaux effectués par ses salariés, sur un immeuble lui appartenant, il n'apporte aucune justification à l'appui de ses dires ;
En ce qui concerne une erreur matérielle relative à la taxe brute rappelée en 1985 :
Considérant que le montant de taxe brute rappelée en 1985, ressortant à 73 357F, est mentionné dans la notification de redressements, puis à deux reprises dans la réponse à observations du contribuable du 19 janvier 1988 ; que, à supposer que la dernière mention de ce chiffre puisse prêter à confusion à raison d'un caractère peu lisible, le recoupement des données disponibles permettait aisément au contribuable de connaître le montant exact de ces rappels de taxe ; que le requérant ne saurait obtenir une décharge de ces rappels à raison d'une discordance de chiffres, au demeurant mal établie ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... est seulement fondé à obtenir la réformation du jugement attaqué, en tant que celui-ci lui a refusé une réduction des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour les années 1984, 1985 et 1986 ;
Article 1 : M. Guy FRERE est déchargé de la taxe sur la valeur ajoutée mise à sa charge au titre des années 1984, 1985 et 1986, pour des montants respectifs de : 7 415F, 14 470F et 23 850F.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. Guy FRERE est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. X... et au ministre délégué au budget.