Vu, 1°), la requête et le mémoire ampliatif enregistrés au greffe de la Cour sous le numéro 93NC01034 respectivement le 15 octobre 1993 et le 6 décembre 1993, présentés pour le Centre Hospitalier de CLERMONT sis ... (Oise), par Me Daniel X..., avocat au barreau de Paris ;
Le centre hospitalier requérant demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 4 août 1993 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé pour excès de pouvoir l'arrêté du maire de CLERMONT du 11 mai 1992 accordant à l'hôpital général de cette commune l'autorisation de démolir un ensemble de bâtiments à usage hospitalier ;
2°) de rejeter la demande présentée devant le tribunal administratif d'Amiens par M. Michel Y... ;
Vu le mémoire en intervention enregistré le 8 septembre 1994, présenté par le Regroupement des Organismes de Sauvegarde de l'Oise (R.O.S.O.) ; le R.O.S.O. conclut au rejet de la requête du Centre Hospitalier de CLERMONT ;
Vu l'ordonnance en date du 16 août 1994 par laquelle le président de la formation de jugement a, en application des dispositions de l'article R.154 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, fixé la date de clôture de l'instruction de la présente affaire au 9 septembre 1994 à 16 heures ;
Vu l'ordonnance en date du 13 septembre 1994 par laquelle le président de la formation de jugement a, en application des dispositions de l'article R.157 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, décidé la réouverture de l'instruction ;
Vu l'ordonnance en date du 14 septembre 1994 par laquelle le président de la formation de jugement a, en application des dispositions de l'article R.154 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, fixé la date de clôture de l'instruction de la présente affaire au 14 octobre 1994 à 16 heures ; Vu, 2°), la requête enregistrée le 16 octobre 1993 sous le numéro 93NC01035, puis le 19 octobre 1993 après rectification d'une erreur matérielle, présentée pour la commune de CLERMONT (Oise) représentée par son maire en exercice habilité à cette fin par délibération du conseil municipal en date du 2 septembre 1993, par Me Daniel X..., avocat au barreau de Paris ;
La commune de CLERMONT demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 8 août 1993 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé pour excès de pouvoir l'arrêté du maire de CLERMONT du 11 mai 1992 accordant à l'hôpital général de cette commune l'autorisation de démolir un ensemble de bâtiments à usage hospitalier ;
2°) de rejeter la demande présentée devant le tribunal administratif d'Amiens par M. Michel Y... ;
Vu l'ordonnance en date du 16 août 1994 par laquelle le
président de la formation de jugement a, en application des dispositions de l'article R.154 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, fixé la date de clôture de l'instruction de la présente affaire au 9 septembre 1994 à 16 heures ;
Vu l'ordonnance en date du 13 septembre 1994 par laquelle le président de la formation de jugement a, en application des dispositions de l'article R.157 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, décidé la réouverture de l'instruction ; Vu l'ordonnance en date du 14 septembre 1994 par laquelle le président de la formation de jugement a, en application des dispositions de l'article R.154 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, fixé la date de clôture de l'instruction de la présente affaire au 14 octobre 1994 à 16 heures ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 et le décret n° 92-245 du 17 mars 1992 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 novembre 1994 :
- le rapport de M. LAPORTE, Président-Rapporteur,
- les observations de Me Z... du cabinet LE PETIT, avocat du Centre Hospitalier de CLERMONT, de M. HUVEY, président de l'Association Avenir du Clermontois et de M. A..., vice-président du Regroupement des Organismes de Sauvegarde de l'Oise,
- et les conclusions de M. LEDUCQ, Commissaire du Gouvernement ;
Considérant que les requêtes susvisées du Centre Hospitalier de CLERMONT et de la commune de CLERMONT sont dirigées contre un même jugement en date du 8 août 1993 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a annulé un permis de démolir accordé par le maire de CLERMONT au Centre Hospitalier de CLERMONT ; qu'elles ont fait l'objet d'une instruction commune et présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre afin d'y statuer par une seule décision ;
Considérant que, par un arrêté du 11 mai 1992, le maire de CLERMONT (Oise) a accordé à l'hôpital général de cette ville le permis de démolir un ensemble de bâtiments à usage hospitalier d'une superficie de 9 101 mètres carrés, sis ... ; que, saisi de requêtes émanant de l'Association Avenir du Clermontois et de M. Michel Y..., le tribunal administratif d'Amiens a, par le jugement attaqué en date du 4 août 1993, annulé ledit permis de démolir après avoir considéré que la construction présentait un intérêt du point de vue architectural et historique, qu'elle se situait dans le périmètre de protection d'un ensemble de monuments historiques, et que, dans ces conditions, l'arrêté accordant le permis de démolir était entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; que le Centre Hospitalier de CLERMONT et la commune de CLERMONT soutiennent, d'une part, que le jugement attaqué est entaché de plusieurs irrégularités, et d'autre part, que le bâtiment litigieux, qui n'est ni classé ni inscrit, ne présente pas un intérêt tel que sa démolition révélerait une erreur manifeste d'appréciation, et qu'il n'est pas situé dans le champ de visibilité d'immeubles classés ou inscrits ;
Sur la requête du jugement attaqué :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier de première instance que la requête de l'Association Avenir du Clermontois a été enregistrée au greffe du tribunal administratif d'Amiens le 27 novembre 1992 ; que la commune de CLERMONT et le Centre Hospitalier de CLERMONT ont présenté des mémoires en défense enregistrés respectivement le 10 février et le 3 mars 1993 auxquels l'association requérante a répliqué par un mémoire enregistré le 2 juin 1993 ; que le Regroupement des Organismes de Sauvegarde de l'Oise (R.O.S.O.) et le Comité de Sauvegarde de l'Hôpital Général de CLERMONT ont présenté des mémoires en intervention enregistrés respectivement les 4 et 5 juin 1993 ; qu'il n'est pas contesté que ces mémoires en intervention ne sont parvenus que le samedi 5 juin 1993 au conseil de la commune de CLERMONT et au Centre Hospitalier de CLERMONT qui n'a pu en prendre connaissance que le lundi 7 juin 1993 alors que l'affaire a été appelée à l'audience du 8 juin 1993 ;
Considérant que si, aux termes de l'article R.187 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Le président de la formation de jugement ordonne, s'il y a lieu, que cette requête en intervention soit communiquée aux parties et fixe le délai imparti à celles-ci pour y répondre", il y a lieu d'ordonner une telle communication toutes les fois que le mémoire en intervention, tout en s'associant aux conclusions d'une partie, se fonde sur des éléments de discussion ou des moyens qui, bien que ne reposant pas sur une cause juridique nouvelle, sont différents de ceux qui ressortent des écritures des parties à l'instance ;
Considérant, d'une part, que, dans son mémoire en intervention, le R.O.S.O. dont l'Association Avenir du Clermontois est membre, soutenait, en plus des arguments avancés par cette association, que le bâtiment dont la démolition a été autorisée se trouvait dans le périmètre de protection de l'ensemble des monuments protégés de la ville et était en co-visibilité avec des parties notables de deux d'entre eux, à savoir le pignon postérieur et la toiture de l'Hôtel de Ville ainsi que la moitié supérieure du clocher de l'église Saint-Samson ; que les requérants de première instance n'ont pas été mis en mesure de répondre à cette argumentation alors que, par un motif qui n'est pas surabondant, le jugement attaqué a retenu que le bâtiment se trouvait "dans le périmètre de protection de l'ensemble des monuments historiques de la ville, protégés au titre de la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques" ;
Considérant, d'autre part, que si le mémoire en intervention présenté par le Comité de Sauvegarde de l'Hôpital Général de CLERMONT s'est borné à adopter les moyens de la requête, il a fourni une bibliographie portant sur les ouvrages consacrés à l'étude du bâtiment, alors que, par un motif qui ne présente pas davantage un caractère surabondant, le tribunal administratif a estimé que "l'intérêt présenté par cet immeuble a suscité la parution de nombreuses publications qui lui ont été consacrées", sans que les demandeurs aient eu la possibilité de discuter la valeur et la pertinence de ces études ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le jugement attaqué est intervenu sur une procédure irrégulière et doit, en conséquence, être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les requêtes de l'Association Avenir du Clermontois et de M. Michel Y... ;
Sur les interventions du Comité de défense de l'Hôpital Général de CLERMONT et du R.O.S.O. :
Considérant, d'une part, qu'eu égard à son objet social, le Regroupement des Organismes de Sauvegarde de l'Oise (R.O.S.O.) justifie d'un intérêt suffisant lui donnant qualité pour intervenir au soutien de la requête de l'Association Avenir du Clermontois tendant à l'annulation du permis de construire litigieux ; que, d'autre part, il résulte des statuts de l'association intervenante, du procès-verbal de la séance de son conseil d'administration du 10 décembre 1993 et de la délibération de son assemblée générale extraordinaire du 19 mars 1994, que M. Bernard A..., vice-président chargé des affaires contentieuses, avait qualité pour signer le mémoire en intervention présenté par ladite association dans l'instance engagée devant le tribunal administratif d'Amiens par l'Association Avenir du Clermontois en vue d'obtenir l'annulation dudit permis de construire ; que, dès lors, l'intervention du R.O.S.O. tant en première instance qu'en appel est recevable ;
Considérant que, dans son mémoire en intervention enregistré au greffe du tribunal administratif d'Amiens le 5 juin 1993, le comité de sauvegarde de l'Hôpital Général de CLERMONT a déclaré être représenté par son président, M. Alain B... ; que les statuts de cette association ne prévoient pas les conditions dans lesquelles celle-ci peut être représentée en justice ; que si l'article 8 desdits statuts prévoit qu'un règlement intérieur pourra être établi par le conseil d'administration, qui le fera approuver par l'assemblée générale, "afin de fixer les divers points non prévus aux statuts", il résulte de l'instruction qu'un tel règlement intérieur n'a pas été établi ; que, dans ces conditions, l'association intervenante ne pouvait être valablement représentée par son président qu'en vertu d'une autorisation donnée par l'assemblée générale ; que, par suite, en l'absence d'une telle autorisation, cette association n'était pas recevable à intervenir à l'instance ; Sur la légalité externe du permis de démolir :
Considérant qu'aux termes de l'article L.421-2-5 du code de l'urbanisme : "Si le maire ... est intéressé à la délivrance du permis de construire, soit en son nom personnel, soit comme mandataire, le conseil municipal de la commune ... désigne un autre de ses membres pour délivrer le permis de construire." ;
Considérant que le principe dont s'inspire cette disposition s'applique également à la délivrance du permis de démolir ; que si le maire de la ville de CLERMONT a accordé à l'Hôpital Civil de CLERMONT, dont il est le président, le permis de démolir un ensemble de bâtiments à usage hospitalier, cette circonstance ne saurait le faire regarder comme intéressé, soit en son nom personnel, soit comme mandataire, à la délivrance dudit permis au sens des dispositions précitées de l'article L.421-2-5 du code de l'urbanisme ;
Considérant que l'article L.430-4 du même code, également invoqué par l'Association Avenir du Clermontois, se borne à déterminer les cas dans lesquels le permis de démolir est délivré au nom de la commune ou au nom de l'Etat ; que, dès lors, la seconde branche du moyen, tirée de la violation de cette disposition, est inopérante ;
Sur la légalité interne du permis de démolir :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R.430-12 du code de l'urbanisme : "La décision doit être conforme à l'avis du ministre chargé des monuments historiques ou du ministre chargé des sites, ou de leur délégué, lorsque l'immeuble est, selon le cas : 1° inscrit sur l'inventaire supplémentaire des monuments historiques ; 2° situé dans le champ de visibilité d'un édifice classé ou inscrit ; 3° protégé au titre des articles 4 ou 9 de la loi du 2 mai 1930" ; qu'il n'est pas contesté que l'immeuble litigieux n'est pas classé ou inscrit à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques ; qu'il est en outre constant qu'il n'est pas protégé au titre des articles 4 ou 9 de la loi du 2 mai 1930 relative à la protection des monuments naturels et des sites ;
Considérant que, selon l'article 1er de la loi du 31 décembre 1913 modifiée, doit être considéré pour l'application de cette loi comme étant situé dans le champ de visibilité d'un immeuble classé ou proposé pour le classement "tout autre immeuble nu ou bâti, visible du premier ou visible en même temps que lui et compris dans un périmètre n'excédant pas 500 mètres ..." ; que si, dans la motivation du permis de démolir litigieux, le maire de CLERMONT a admis que les bâtiments à démolir sont situés dans un rayon de 500 mètres par rapport à des édifices classés ou inscrits, il a précisé, en reprenant les termes de l'avis émis par l'architecte des bâtiments de France, que les bâtiments dont il s'agit n'étaient pas situés dans le champ de visibilité d'édifices protégés, à l'exception de "l'extrême bout de la girouette du clocher de Saint-Samson" ; que si le R.O.S.O. soutient qu'il y a covisibilité du bâtiment à démolir avec le pignon postérieur et la toiture de l'Hôtel de ville et la moitié supérieure du clocher de l'église Saint-Samson, et qu'en outre ce clocher comporterait deux croix et deux girouettes, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'avis de l'architecte des bâtiments de France et, par voie de conséquence, le permis de démolir litigieux, sont entachés d'une erreur de fait susceptible d'avoir exercé une influence sur le sens de la décision contestée ; qu'il résulte de ce qui précède que l'architecte de bâtiments de France n'ayant pas émis un avis défavorable et son avis n'étant pas entaché d'une erreur de fait substantielle, le maire de CLERMONT n'était pas tenu de refuser le permis de démolir ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 430-5 du code de l'urbanisme : "Dans les cas visés aux alinéas autres que l'alinéa a de l'article L.430-1, le permis de démolir peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les travaux envisagés sont de nature à compromettre la protection ou la mise en valeur des quartiers, des monuments et des sites" ;
Considérant que les bâtiments litigieux ne sont ni classés ni inscrits, ni même proposés en vue d'une inscription ; que seule la partie la plus ancienne du gros oeuvre date du 18ème siècle tandis que les toits à la Mansart et les ailes datent du 19ème siècle ; que si le caractère esthétique et l'intérêt architectural de cet édifice ne sont pas sérieusement contestables, sa disparition n'est pas de nature à compromettre manifestement la protection ou la mise en valeur du quartier où il est situé ou celle des monuments et des sites qui constituent le patrimoine architectural de la ville de CLERMONT ; que, dans ces conditions, la décision d'autoriser sa démolition en vue de permettre l'édification d'une maison de retraite de 206 lits, n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le Centre Hospitalier de CLERMONT et la commune de CLERMONT sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué en date du 4 août 1993, le tribunal administratif d'Amiens a annulé le permis de démolir accordé audit centre hospitalier le 11 mai 1992 ;
Article 1 : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens en date du 4 août 1993 est annulé.
Article 2 : L'intervention du R.O.S.O. est admise.
Article 3 : L'intervention du comité de sauvegarde de l'hôpital général de CLERMONT n'est pas admise.
Article 4 : La demande présentée devant le tribunal administratif d'Amiens par l'Association Avenir du Clermontois et par M. Michel Y... et le surplus de leurs conclusions sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au Centre Hospitalier de CLERMONT, à la ville de CLERMONT, à l'Association Avenir du Clermontois, à M. Michel Y..., au Regroupement des Organismes de Sauvegarde de l'Oise (R.O.S.O.), au Comité de Sauvegarde de l'Hôpital Général de CLERMONT.