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02/12/1993 | FRANCE | N°91NC00610

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2e chambre, 02 décembre 1993, 91NC00610


Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 23 septembre 1991, présentée par M. Jean-Marie X... demeurant 26, bis ... ;
M. X... demande à la Cour :
1°/ d'annuler le jugement n° 8615041 en date du 25 juillet 1991 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1979 à 1982 dans les rôles de la COMMUNE DE COMPIEGNE ;
2°/ de lui accorder la décharge sollicitée ;
3°/ de lui accorder le remboursement de la somme de

50 000 F au titre des frais d'instance ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu ...

Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour le 23 septembre 1991, présentée par M. Jean-Marie X... demeurant 26, bis ... ;
M. X... demande à la Cour :
1°/ d'annuler le jugement n° 8615041 en date du 25 juillet 1991 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1979 à 1982 dans les rôles de la COMMUNE DE COMPIEGNE ;
2°/ de lui accorder la décharge sollicitée ;
3°/ de lui accorder le remboursement de la somme de 50 000 F au titre des frais d'instance ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 novembre 1993 :
- le rapport de M. DARRIEUTORT, Président-rapporteur,
- et les conclusions de M. DAMAY, Commissaire du Gouvernement ;

Sur l'étendue du litige :
Considérant, que par décision en date du 11 mars 1993 postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux de l'Oise a prononcé le dégrèvement, en droits et pénalités, à concurrence des sommes de 15 978 F, 7 030 F, 7 502 F, 9 502 F et 750 F, des compléments d'impôt sur le revenu auxquels M. X... a été assujetti, respectivement au titre des années 1979, 1980, 1981, 1982 et 1983 ; que les conclusions de la requête de M. X... relatives à ces impositions sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que si M. X... soutient que le tribunal administratif n'aurait pas répondu à toute son argumentation, il ressort de l'examen de ce jugement que le tribunal a répondu aux moyens exposés par l'intéressé ; que les premiers juges n'étaient pas tenus répondre à tous les arguments présentés devant eux par M. X... à l'appui de ses moyens ;
Considérant, par ailleurs, que si le requérant a fait état en cours d'instance d'une correspondance en date du 3 avril 1984 par laquelle il informait le vérificateur que lui-même et son conseil se trouvaient dans l'impossibilité d'assister, le 6 avril, à la première intervention sur place, cette lettre a été produite pour la première fois en appel ; que, dans ces conditions, les premiers juges ont pu régulièrement considérer que la preuve de la réalité de ladite correspondance n'était pas apportée ;
Considérant, enfin, qu'il ressort de la notification de redressement en date du 24 août 1984 que la procédure d'évaluation d'office a été retenue pour l'année 1979 et la procédure de redressement contradictoire pour les années 1980 à 1982 ; que toutefois l'administration a, devant le tribunal, exposé comme elle était en droit de le faire, qu'une procédure d'office était également applicable pour ces dernières années et que, par suite, la charge de la preuve incombait au contribuable ; que les premiers juges, en reprenant dans le jugement ces considérations n'ont pas, en tout état de cause, irrégulièrement procédé à une substitution de base légale ; qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué est irrégulier ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
En ce qui concerne la régularité des opérations de contrôle :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : " ... une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification ; cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix" ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X... a reçu le 30 mars 1984 l'avis de vérification l'informant que le début des opérations de vérification de sa comptabilité était fixé au 6 avril suivant ; que, par lettre du 3 avril, M. X... a fait état qu'il était d'usage, en vertu de la "charte du contribuable", que cet avis de vérification soit reçu 15 jours à l'avance ; qu'il informait par ailleurs le vérificateur que lui-même et son conseil ne pouvaient être présents le 6 avril mais que, néanmoins, les pièces et livres comptables étaient tenus à sa disposition sur place ; que, eu égard aux termes de cette correspondance, celle-ci ne pouvait être regardée comme une demande de report de la vérification à une date ultérieure ; que, par suite, elle n'appelait pas de réponse ; que dès lors le requérant, qui s'est fait assister d'un conseil, ne saurait faire état de ce que le vérificateur lui aurait illégalement refusé le bénéfice d'un usage et, en commençant le contrôle le 6 avril, aurait méconnu les dispositions précitées du livre des procédures fiscales ;
En ce qui concerne la régularité de la procédure de redressement :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre précité dans sa rédaction alors en vigueur : "L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable, sa réponse doit également être motivée" ;
Considérant qu'en dépit de sa présentation manuscrite et des ratures dont elle était affectée, la notification de redressement en date du 24 août 1984 comportait l'analyse des irrégularités relevées dans la comptabilité ainsi que les motifs des redressements envisagés ; qu'il résulte de l'instruction que M. X..., qui a répondu de façon complète et détaillée à cette notification, ne s'est pas mépris sur son contenu et sa portée ; que, par suite, cette notification n'a pas préjudicié aux intérêts du contribuable et aux garanties que l'intéressé tient des dispositions précitées ; que, dès lors, M. X... n'est pas fondé à soutenir que les redressements en cause ne lui ont pas été régulièrement notifiés ;
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne la qualification des sommes perçues des compagnies d'assurances :
Considérant qu'aux termes de l'article 92 du code général des impôts : "1. Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales ..." ;

Considérant que l'administration, qui entend assujettir dans la catégorie des bénéfices non commerciaux les sommes perçues par M. X... de compagnies d'assurances en rémunération d'expertises médicales effectuées à titre d'activité complémentaire et déclarées dans la catégorie des traitements et salaires, fait valoir qu'aucun lien de subordination n'est établi entre l'intéressé et lesdites compagnies dès lors notamment qu'il peut fixer librement les lieux et les horaires de ses consultations et souligne que les compagnies ont déclaré à l'administration les sommes en cause dans la catégorie des honoraires ; que, si le requérant fait état de ce que les compagnies rectifient d'autorité ses états de rémunération en cas de dépassement et qu'il a été assigné devant la Cour d'appel d'Angers par l'U.R.C.S.S.A.F. au motif qu'il existerait un lien de subordination entre lui-même et les compagnies d'assurances, ces circonstances ne suffisent pas, à elles-seules, à caractériser une absence de liberté dans l'organisation du travail ; que, par suite, et à défaut de convention définissant les obligations réciproques des parties et les sujétions et obligations de service auxquelles le requérant aurait été astreint, l'administration doit être regardée comme ayant suffisamment justifié que M. X... ne se trouvait pas, vis à vis des compagnies d'assurances, dans un état de subordination permettant de le regarder comme un salarié ;
En ce qui concerne les redressements relatifs aux dépenses :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que les matériels et mobiliers de bureau affectés par M. X... à l'exercice de sa profession sont destinés à être conservés comme moyens d'exploitation ; que, par suite, M. X... ne pouvait régulièrement comprendre ces dépenses dans les charges déductibles de ses bénéfices ; qu'en revanche, la fourniture et la pose de moquette effectuée en 1982, correspondant à une facture de 1 988,77 F, a consisté à remplacer, sans amélioration, une moquette dans des locaux professionnels loués par le requérant ; que cette dépense n'a pu augmenter l'actif corporel ; qu'elle est dès lors déductible pour la détermination des bénéfices non commerciaux de M. X... pour l'année 1982 ;
Considérant, en deuxième lieu, que les sommes de 18 001 F, 18 021 F et 17 496 F portées dans les charges déductibles, respectivement pour les années 1980, 1981 et 1982, au titre des loyers des locaux professionnels ont été exclues desdites charges par le vérificateur en l'absence de justification concernant leur paiement ; qu'alors qu'il appartient au contribuable de justifier la réalité des dépenses exposées, tant dans leur principe que dans leur montant, M. X..., qui s'est abstenu devant le tribunal comme devant la Cour de produire des justifications, n'est pas fondé à demander la déduction de ces sommes ; que, par ailleurs, les dépenses afférentes à un véhicule ont été à bon droit exclues des charges déductibles, dès lors qu'elles ont également été comptabilisées sans justification ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 93 du code général des impôts : "1. Le bénéfice à retenir dans les bases de l'impôt sur le revenu est constitué par l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession" ;

Considérant que, quelle qu'ait été la procédure d'imposition suivie par l'administration, il appartient dans tous les cas au contribuable, en application des dispositions précitées, de fournir des éléments propres à justifier que les dépenses qu'il a portées dans ses charges déductibles étaient "nécessitées par l'exercice de la profession" ;
Considérant qu'en ce qui concerne les dépenses de téléphone afférentes aux communications passées à son domicile, la seule allégation du requérant selon laquelle l'insuffisance de la ligne téléphonique de son cabinet l'aurait conduit à utiliser sa ligne privée ne permet pas de le regarder comme ayant apporté la preuve dont il a la charge ; que, par ailleurs, des revues d'intérêt général, telles que "Le Particulier", "Le Revenu français", "Mon notaire m'a dit", ainsi qu'un ouvrage sur Compiègne ne sont pas des dépenses qui, pour un médecin-rhumatologue, peuvent être regardées comme des charges professionnelles ; qu'enfin, les amendes pour infraction aux règles du stationnement ne sauraient en tout état de cause être comprises dans les charges déductibles dès lors qu'il n'est pas établi qu'elles aient présenté un lien avec l'exercice de la profession ;
En ce qui concerne les redressements affectant le revenu global :
Considérant qu'aux termes de l'article 238 bis du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : "1. Les entreprises assujetties à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés sont autorisées à déduire du montant de leur bénéfice imposable, dans la limite de un pour mille de leur chiffre d'affaires, les versements qu'elles ont effectués au profit d'oeuvres ou d'organismes d'intérêt général, de caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social ou familial. Pour les autres contribuables, la déduction est admise dans la limite de un pour cent du revenu imposable" ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que la déduction du montant du bénéfice imposable, dans la limite de un pour mille du chiffre d'affaires, ne peut se cumuler avec la déduction admise dans la limite de un pour cent du revenu imposable ; que, par suite, M. X... n'est pas fondé à soutenir que l'administration lui a refusé à tort le droit de déduire de son revenu global divers dons s'élèvant à 1 600 F en 1980 et 1981 et 1 500 F en 1982 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... n'est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif d'Amiens a, par le jugement attaqué en date du 25 juillet 1991, rejeté sa demande en décharge des impositions contestées qu' en ce qui concerne la somme de 1 988,77 F qui devra être déduite de la base d'imposition de l'année 1982 ;
Sur les frais d'instance :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation" ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à payer à M. X... la somme de 3 000 F ;
Article 1er : A concurrence des sommmes de quinze mille neuf cent soixante dix huit francs (15 978 F), sept mille trente francs (7 030 F), sept mille cinq cent deux francs (7 502 F), neuf mille cinq cent deux francs (9 502 F) et sept cent cinquante francs (750 F), en ce qui concerne les compléments d'impôt sur le revenu auxquels M. X... a été assujetti respectivement au titre des années 1979, 1980, 1981, 1982 et 1983, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. X....
Article 2 : La base de l'impôt sur le revenu assignée à M. X... au titre de l'année 1982 est réduite d'une somme de 1 988,77 F.
Article 3 : M. X... est déchargé des droits et pénalités correspondant à la réduction de base d'imposition définie à l'article 2.
Article 4 : Le jugement susvisé du tribunal administratif d'Amiens en date du 25 juillet 1991 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 3 ci-dessus.
Article 5 : L'Etat (ministre du budget) versera à M. X... une somme de trois mille francs (3 000 F) au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. X... et au MINISTRE DU BUDGET.


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